A. -

"Bajoue, mâchoire (d'animal)" : Sanson tua d'une bajoe Mille hommes par haulte entreprise, Et toutesfois parmy la joe Eut il du vent de la chemise (MARTIN LE FRANC, Champion dames II, D., 1440-1442, 78). [Cf. Juges XV, 15] Le loup marin, qui est a dire le lus, a en sa dextre maxille ou bagoe une espine en semblance d'une croix et, se dilligamment elle est quise, on la treuve, selon ce que dient les naturiens. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 148).

B. -

TECHNOL. Faire bajoue. "Longer" : ...louvrage de machonnerie que ceste annee on y a fait alencontre de la cauchie qui fait bajoe de ladite riviere (Comptes Doullens W., 1470, 22).

Rem. L'éd. signale qu'un mur bajoyer désigne un mur latéral d'un sas d'écluse ou la berge revêtue de maçonnerie près des culées d'un pont. Pour ce sens techn., cf. TLF IV, 54a, 53b s.v. bajoyer et bajoue B 3.

C. -

"Élément de décoration en bordure (?)" : ...messire Anthoine et messire Josse de Lalaing, et Mile de Bourbon, vestus de palletos de satin cramoisy bajoés de bestes devant et derrière en brodure d'or, bonnetz blancs en teste, son escu de velours cramoisy à une bajoe et ung O d'or (LA MARCHE, Mém., IV, Pièces annexées, p.1468, 135).
 

V. bajoue

"Décoré en bordure, bordé (?)" : ...vestus de palletos de satin cramoisy bajoés de bestes devant et derrière en brodure d'or (LA MARCHE, Mém., IV, Pièces annexées, p.1468, 135).
 

"Étouffé, étranglé" : Et quant Thesëus fut si avant en la dicte maison que le dit toreau le povoit veoir, icellui thoreau bea la goulle pour le cuider devorer. Et lors il luy jecta dedans le dit peloton de gluz et de colle, dont il fut si engoué et englué qu'il ne lui pot mesfaire. (Ovide mor. B., 1466-1467, 226).
 

Empl. trans. "Engloutir"

Rem. FROISS. (éd. Kervyn, encores d'abondant en eussent il engoué, car il avoient grant fain) ds GD III, 174c.
 

"Panneau de plâtre entre deux joues, jouée" (Éd.) : ...en la chambre Monsieur l'évesque a esté fait une porcion de degré qui monte en la dicte chambre, revestu de deux pignons dessus de novel, de soliviaux et de enjouemens, de soleittes, de coulombes et de chevronneure. (Comptes Archev. Rouen J., 1412-1413, 79).
 

Région. (Picardie, Flandres) "Gosier, estomac des oiseaux" : ...et de son arcq bendé, avoit sagitté les fins oyseaux et ravisans harpies qui furtivement emplissoient leurs grosses gaves de frians morseaux (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 79). Ilz [les habitants affamés] avoient ceste industrie, Que grains de leurs gaves yssus [des coulons] Vendoient la quarte partie De une mesure - lors cabus Appellee - ce peu sans plus, Comme auchun docteur discoustoit, Cincq pieses de monnoie aux us Que la monnoie lors valoit. (Myst. process. Lille K., t.3, a.1485, 220).
 

"Contenu du jabot, nourriture" : ...Faindant dormir a plaine pance enflee ; Mais la dervee estoit a cop levee, Pour sa gavee avoir se resveillot, Puis s'abilloit et au vent s'estrilloit (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 71).
 

"Gorge, gosier" (synon. gavion)

Rem. Doc.1413 (gaviete) ds GD IV, 248c.
 

"Cou, gorge" : ...Car le chien par le gavion Si roidement print le lion Que le froissa quant l'ala prendre (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 296). Guttur (...) : gorge, gavion, jardrin (Aalma R., c.1380, 176). ...et puis taster dessoubz gencives qu'il y ait grant entredeux et bonne ouverture et large, et qu'il n' y ait gourme, bube ne malen, et que l'entree du gavion ne soit en riens despecié [l. despecie]. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 137). Prenez vos poules et leur coupez le gavion, puis les eschaudez et plumez - et gardez que au plumer la peau ne soit dessiree - puis les reffaictes en eaue. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 247). Poullaille farcie. Prenez vos poullez et leur couppez le gavion (Viand. Taillev. Vat. S., c.1400-1450, 120). Jà l'euist pourfendut jusques ou gavion, Quant chis s'est escriés : «Je me reng vo prisson.» (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 521). Le Charpentier : Je vueil oïndre mon gavïon. Ogier et Hüet : Boif, boif, sanglante passïon. (Mir. ste Genev. S., c.1410-1420, 140). Frumen (...) : gargate d'omme, le gavion (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 185). Gurgulio (...) : garguechon, gavion (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 202). Ructa (...) : gargate, gavion de le gorge d'omme (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 437). Neron, encor pis te feron. A Lucifer te porteron, Qui te estraindra le gavïon Sans fin et sans redempcïon. (Mart. st Pierre st Paul R., c.1430-1440, 157). Demain (...) ainsi que serons au palais et que le roy Hugues mengera son poisson et qu'il bura son bon vin, je lui dourray tel horion du poing sur le coul que je lui rompray le ganion [l. gavion]. (Galien Restoré K.K., c.1450, 29). Gurgulio (...) : garguchon, gaviun ou huette (LE TALLEUR, Vocab. E.M., c.1490, 144). ...je lui donray tel coup sur le col de mon poing que je lui rompray le gavion. (Galien Rethoré K.K., 1500, 188).
 

"Gorge"

-

Entre yeux et gavois. "En pleine figure" (?) : ...le Roi li dit asses [l. assés] fellement entre ieus et gavois : "Biau couzin de Sain Pol, vous m'aves [l. avés] tant dit et dittes tou les jours de belle parolles que j'en ai perdu Roen et Pontoise" (JEAN DE HAYNIN, Mém. B., t.1, 1466-1477, 102).
 

A. -

Région. (Provence) "Celui qui fait le métier de portefaix" : ...lesquelles balles furent apportées de nuyt en la maison de il qui parle par aucuns portesfeix ou gavaux, qu'ilz ne congnoist, et les leur fist apporter le dit Pion de Village. (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 173). À plusieurs gavots, qui aidèrent à descharger les besongnes du batteau, et les porter au logeys du roy (Comptes roi René A., t.2, 1476, 346).

B. -

"Rustre" (Éd.) : Or voy a cui en parleras Et se noble es ou home lige "Et pourquoy ?" me demanderas. Car noble a gavot ne s'oblige. (MARTIN LE FRANC, Champion dames III, D., 1440-1442, 26). A vos raisons, vilains gavots, Ce demonstré, veulz je respondre, Par lesquelles les vrais devots De Marie voulez confondre. (MARTIN LE FRANC, Champion dames V, D., 1440-1442, 82).
 

"Tumeur, sorte de chancre" : ...une tres mauvaise maladie que l'en appelle javart. (...) on la doibt congnoistre en la langue du cheval et au pié. (Chir. chevaux P., c.1325-1350, 147). Et encores de rechief advise qu'il ne s'entretaille ne ne soit crapeulx ne rongneulx, ne qu'il n'ait javart et rongne (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 139). [Autre ex. p.140] ... lequel [Robin Clerou] avant ledit cop ainsi à lui advenu avoit une grant maladie que l'on appelle chancre ou javart en la verge. (Doc. Poitou G., t.9, 1448, 77).
 

"Joue" : Veéz, seigneurs, veéz mervoille, Ce truant m'a coppee l'oreille, Veéz com la face me saigne ! Seigné suis a la rouge enseigne ; Il m'a tout le jouaul fendu. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 179).

Rem. Cf. T-L IV, 1686, l. 22 (var. jöaus de jöes, ds un ex. de Faucon. Fréd., et DEAF J, 378, joël ;suffixe -el diminutif ; sans doute différent du vocable présenté ici).
 

A. -

"Partie latérale de la face s'étendant entre du nez à l'oreille, du dessous de l'oeil au menton, joue" : D'un des bras les met sus sa roe Plus legierement qu'une aloe ; De l'autre les fiert en la joe Si fierement Qu'elle les trebuche en la boe, Et puis elle leur fait la moe. Einsi Fortune tous ceaus doe Qu'elle entreprent. (MACH., R. Fort., c.1341, 39). La teste a pelée a moitie ; D'un oueil rit, de l'autre larmie ; L'une joe a couleur de vie, L'autre est com morte ; S'une de ses mains t'est amie, L'autre t'iert mortel anemie ; Un piet a droit, l'autre clopie, La droite torte. (MACH., R. Fort., c.1341, 42). Lambert Luux est jugiet à estre mis en l'eschièle de le ville (...) et, quand il sera ostéz, on li donra l'ensengne de le ville en une de ses jauwes (Hist. industr. drapière Flandre E.P., t.3, 1360, 646). De la painture de la face dist saint Jerome ou livre de Garder vesvage : «Quel chose fait en la face de une christienne pourpre et ceruse, dont l'un fait avoir les goes et les lievres vermeilles et l'autre le col blanc ?» (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 374). ...et ainsi est de la dent ou regart de la joe. (ORESME, E.A.C., c.1370, 441). Et cellui lui compte comment Anthoine a le grip d'un lyon en la joe, et la grant fierté et la grant puissance de lui (ARRAS, c.1392-1393, 159). Et fort estoient esbahiz du gipp de lyon que Anthoine avoit sur la joe, mais moult prisoient le beau corps et les beaulx membres de lui et de Regnault. (ARRAS, c.1392-1393, 187). Lors lui perça de sa dague la langue et les deux joues (LA SALE, J.S., 1456, 298). Et incontinent que ledit cry fut fait, plusieurs marchans de Paris y porterent grant foison de vivres aux champs devant Saint-Anthoine, lesquelz vivres furent incontinent moult bien recueillis par lesdiz de l'ost qui y vindrent de toutes pars et achetoient iceulx vivres ce qu'on leur faisoit, par especial pain et vin, car lesdiz de l'ost estoient tant affamez, les joes velues et si pendans de maleureté qu'ilz avoient longuement enduré que plus n'en povoient, et la pluspart estoient sans chausses et soulers, pleins de poux et d'ordure. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 123). Ha, mon enfant, Quel restaurant - me font voz joes affeblies ! Elles sont toutes reffroidies, Fort onnyes, Car remplies - on les a d'onteuse liqueur. (Pass. Auv., 1477, 255). Mais quel deablë as tu mengé ? Ton visaige si est changé. Mort bieu, que vecy grosses joues, Ce c'estoit pour faire la moue, Si sont ilz belles et nourries. Fay l'en de moy ces mocqueries ? Plus n'y joeray par tous les saincts. (Tr. Men., c.1480-1500, 292).

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Loc. Tourner la joue (à qqn). "Se détourner (de qqn)" : Mais quant Fortune, La desloial, qui n'est pas a tous une, M'ot si haut mis, com mauvaise et enfrune, Moy ne mes biens ne prisa une prune ; Eins fist la moe, Moy renoia et me tourna la joe, Quant elle m'ot assis dessus sa roe, Puis la tourna, si cheï en la boe. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 83).

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Bailler à qqn sur la joue./Ferir qqn en la joue. "Giffler, frapper qqn" : De l'autre [de l'autre main, Fortune] les fiert en la joe Si fierement Qu'elle les trebuche en la boe, Et puis elle leur fait la moe. (MACH., R. Fort., c.1341, 39). Ne veulliés pas resister au mal qu'on vous fera, mais s'on te fiert en la joe dextre, presente s'il est besoing la senestre. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 200). Et tel son bruyt au jour d'uy magnifeste A qui demain mort baille sur la joue. (LA VIGNE, S.M., 1496, 166).

-

Loc. Malgré ses joues. "Mal gré qu'elle en ait"

Rem. HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, gloss. (signale en a.fr. malgré le nez / malgré les dents).

B. -

P. ext. "Chez l'animal, partie latérale de la tête" : ...il leur estraindra le col et les joes de fort chevestre et de aspre frain (FOUL., Policrat. B., VI, 1372, 140). Aprés levera la teste du cerf d'avecques le col. Coupe le coul bien pres des joes de la teste tout en tour, et trouvera une jointe, si boute son coutel par mi et coupe les nerfs darriere (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 181).

-

Joue (de boeuf) : Item, nota que le meilleur chaudeau qui soit c'est de la joe de beuf lavee en eaue .II. foiz ou .III., puis boulir et bien escumer (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 173). La char d'une joe de beuf trenchee par lesches et mise en pasté, et puis, quant le pasté est cuit, couvient gecter de la saulse d'un halebran dedens. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 231). Et d'autre part mectez cuire une piece de giste de beuf, ou de la joe, sans sel. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 276).

C. -

P. méton. "Intérieur latéral de la cavité buccale" : Ou corps qui est eu de fievre, se suffocacion soudaine vient sans ce qu'il appere aucune tumeur es joes, c'est mortel chose [Trad. le lat. fauces]. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 75). Or avoit il le roi de France esté malade par avant en la joe ; mes, gari de cely mal, maintenant aprés le partement de ces ambassadeurs lui reprist arriere en la bouche. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 308). Derriere celle langue vers le palastre, soubz les joes [lat. fauces] et amigdalles est uvulla pandante a appareiller l'aier par son aydement (PANIS, Guidon, 1478, tr.I, doct.2, chap.3).

-

"Mâchoire" : Et de la joë d'un asne que il trouva gesant a terre tua mil des Philistiens (VIGNAY, Le Miroir historial C, 1333, III, 495).
 

"Coup donné sur la joue, soufflet" : Adont s'en vint a son mary qui estoit tout senglant et estourdi, pour la jouee qu'il reçut, et lui dist : ... (Bérinus, II, c.1350-1370, 93). Et pour ce que ycelui jeune filz perceveroit à dire de grans opprobres et deshonnestes paroles à ycelui suppliant, lui eust dit le dit suppliant que s'il ne se deportoit de ce dire, qu'il lui donrroit tele jouée qu'il cherroit à ses piés (Doc. Poitou G., t.7, 1406, 99). De quel costé luy asserray Une jouee sans point farcer ? (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 744).
 

"Partie (latérale) d'un escalier" (synon. joue) : ...a esté [fait] ung degré assiz au bout d'icelle maison fourny de son novel jouestz [et] colombé autour pour servir a tous les estages d'icelle maison (Comptes Archev. Rouen J., 1438-1439, 187).
 

[Dimin. de joue] : Car qui l'oïst Parler a point, et rire la veïst, Et les douceurs par saveur recueillist, Il la prisast seur toutes et deïst ; Que deus fossettes En sousriant faisoient ses joettes Qui estoient blanches et vermillettes Pour embelir, et un petit grassettes. Et encor plus : Les dens avoit blans, sarrez et menus, Et ses mentons estoit un po fendus (MACH., J. R. Beh., c.1340, 70). Et quant rioit ma douce dame, Lors veïssiez en ses jouettes [ms B] apparoir deux belles fossettes (LE FÈVRE, Vieille, trad. De vetula H., a.1376, 211). ...deux petites Fosses plaisans, de grant doulçour eslites, En souriant, es jouetes escriptes, Ot bien seans (CHR. PIZ., Dit Poissy R., 1400, 205).

REM. DESCH., Oeuvres Q., t.5, c.1370-1407, 186. Pour l'ex. de LE FÈVRE, v. aussi buffette.
 

"Bas de la joue" : ...certains compaignons, jusques au nombre de deux ou troys (...) le vindrent assaillir, et le batirent et navrerent mout anormement, et, par especial, li firent une grant playe de taille au-dessus du jouyer (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 256). ...Et selon le joiier a l'oreille copee (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 442).

V. aussi jouière
 

A. -

"Partie latérale de la tête du cheval"

Rem. FRERE NICOLE, Trad. du Livre des Prouffitz champ. de P. de Crescens, 1413 (éd. 1516), ds GD IV, 648a.

-

"Mâchoire" : Sampson combati les Philistiens de la joiere d'un asne (FOUL., Policrat. B., VII, 1372, 432).

B. -

"Partie du harnais du cheval qui couvre la partie latérale de la tête" : ...pour la rembourreure de la selle de la hacquenée dudit seigneur XX d., pour deux longes de brides III s. IIII d., (...) pour deux boucles de licoul et deux joyères XV d. (Comptes roi René A., t.2, 1451, 176).