C.N.R.S.
 
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     AVOIR1          AVOIR2     
FEW IV 362b habere
AVOIR, subst. masc.
[T-L : avoir ; GD : avoir ; GDC : avoir ; AND : aver1 ; FEW IV, 362b : habere ; TLF : III, 1136a : avoir2]

A. -

"Ce que l'on possède, ce dont on dispose"

 

1.

"Biens, fortune, richesses" : Et s'il est po riches d'avoir Ou d'amis ou de grant savoir, Je l'enrichi de loiauté Et de grant debonnaireté. (MACH., D. verg., a.1340, 30). Par foy, ma fille ne vault mie De sens, d'avoir ne de lignie Tant qu'a femme la doiez prendre (Mir. femme roy Port., c.1342, 160). ...tout son avoir terrien Veult delaissier ce chevalier Pour devenir moine cloistrier (Mir. nonne, 1345, 350). Et la leur fu il demandé (...) S'on li porroit donner santé, Et qu'il demandassent planté Hardiement de leur avoir, Tant comme il en vorront avoir. (MACH., J. R. Nav., 1349, 202). ...il li feïst aye De gens, d'avoir ou de navie, Pour le tres saint pelerinage (MACH., P. Alex., p.1369, 33). Il [jone gent] n'ont cure de grant avoir ; Il ont droit, car ors ne argens Dure petit a jones gens (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 145). Fol roy, par ta musardie te mescherra. Toy et les tiens decherront de terre, d'avoir, d'onnour et de heritaige, jusques a la IXe lignie ; et perdra par ta fole emprise le IXe de ta lignie le royaume que tu tiens. (ARRAS, c.1392-1393, 305). ...il est bien vray qu'ilz fonderent une fois ceste cité de leur avoir (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 414). Guerir ne pourroit ma destresse Trestout l'avoir d'Aufrique et d'Aise (Poés. lyr. court. XVe I., c.1454-1456, 175).

 

-

Au plur. : Et les grans avoirs abandonne A maint qui n'en sont mie digne (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 80).

 

Rem. Cf. O. Collet, Bibl. d'Human. et Ren. 63, 2001, 157.

 

-

L'avoir de. "Les biens contenus dans" : Et quant Berinus ot toutes ses choses ordonnees et mises a point, et tout l'avoir de ses nefs mis en sauve main... (Bérinus, I, c.1350-1370, 189).

 

-

Pour avoir./Par avoir./Par grant avoir : ...moult bien le vorroie avoir, Fust par amour, fust par avoir. (MACH., D. Aler., a.1349, 371). Elle [Nature] commande qu'on oublie Et mort d'amant et mort d'amie, Pour ce qu'on n'i puet recouvrer Par grant avoir, ne par ouvrer. (MACH., J. R. Nav., 1349, 211). ...elle ne puet ravoir Jamais son ami pour avoir, Pour pleindre, ne crier, ne braire (MACH., J. R. Nav., 1349, 241).

 

.

Pour tout l'avoir : Et certes, pour trés tout l'avoir Qu'on porroit desirer n'avoir, Ne vous eüsse respondu (MACH., R. Fort., c.1341, 133). Ne fuisse point si lie pour tout l'avoir de Franche. (Baud. Sebourc B., t.1, c.1350, 116). ...Pour tout l'avoir qui est a Rains. (FROISS., Méliad. L., t.2, 1373-1388, 220). ...a vous ne seroit accordé Pour tout l'avoir Ottevien. (Cent ball. R., c.1388-1396, 187). Car a nullui tort ne feissent Pour tout l'avoir qui est ou monde (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 259). ...pour tout l'avoir de Constantin, le riche empereur de Romme, ne voldroye delaissier la voye ne le chemin que j'ay empris. (Gérard de Nevers L., c.1451-1464, 48).

 

Rem. Prov. H., 46 [A229].

 

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Ni cens ni avoir : Fols seras, s'ad ce ne te duis, Car scens n'avoirs n'est qui ce vaille. (MACH., F. am., c.1361, 218).

 

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Ni pour cens ni pour avoir : Vostre Dieus, li Dieus d'Israël, Est dieus des dieus, sires et peres Des rois, revelans les misteres Et les choses que nuls savoir Ne puet pour scens ne pour avoir. (MACH., C. ami, 1357, 18). ...ja pour scens ne pour avoir Ne porra sans moy joie avoir (MACH., F. am., c.1361, 207).

 

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Corps et avoir. "Corps et biens" : ...Pour (...) Corps et avair abandonner (Tomb. Chartr. Souvain S., c.1337-1339, 26). ...pour lesquelz meffaiz il avoient encourru envers nous paine de corps et d'avoir (PHIL. VI VALOIS, Doc. paris. V., t.2, 1348, 324). Ceste traïson plus celer Ne volt, eins la fist reveler Et si generaument savoir Qu'il perdirent corps et avoir. Car tuit Juïf furent destruit (MACH., J. R. Nav., 1349, 145). Et en cellui jour que la feste devoit estre, huit jours devant, commenca a arriver grant peuple en la cité, de quoy le roy fu moult joyeux. Et fist crier, sur peine de perdre corps et avoir, que nulz ne rencherist denree nulle. (ARRAS, c.1392-1393, 140).

 

-

Estre serf à son avoir : De la Bove li bons Gobers, Qui n'est pas à son avoir sers (MACH., P. Alex., p.1369, 153).

 

-

De tant d'avoir procedent les blasphemes

 

Rem. Lyon cor. U., 1467, 77 (VI 19 ; "jamais tant de richesse ne s'est trouvée à côté de tant de vice, d'irréligion, de cruauté, qu'à la cour de Bourgogne").

 

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Prov. : ...l'avoir a l'avoir demandent ly vilain ["Que les biens s'ajoutent aux biens, c'est une demande de vilain" (le riche roi Henri épouse Hélène bien qu'elle soit pauvre)] (Belle Hélène Const. R., c.1350, 180). Pour ce dit on : quant avoir vient, corps fault. (DESCH., Oeuvres Q., t.2, c.1370-1407, 15). L'autrui avoir ne enrichist homme. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 196).

 

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L'avoir mal acquesté est tost perdu

 

Rem. Pierre Chevalier, in : CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 562 (Tost est perdu avoir mal acquesté). Prov. H., 46 [A228].

 

2.

En partic.

 

a)

"Argent placé en banque" : Et le gouverneur dudit banc ou change par sa main au vendeur et a l'achapteur a chacun satisfait, car il a tout devers lui. Il tout seul est maistre des comptes, tresorier et receveur, et departeur aussi comme de tout l'avoir de Venise. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 460). Et est cestui office si auctentique, si abregie, et si appreuve, que tous les marchans reputent leur avoir estre plus seur en la garde du dit change que en leurs propres maisons. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 461).

 

b)

[P. oppos. à l'argent] "Biens en nature" : ...ne pour argent ne pour avoir (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 94).

 

c)

"Marchandise" : ...que tous avoirs de lanage, quels k'il soit, amenés dedens le banliuwe de Valenchiennes et deskierkiés en le halle de le lainne u ailleurs, hormis lainne à sun, que tout chou u il ara 60 lb. u plus, a qui que che soit, soit fais rewarder par l'assent dou prevost u dou mayeur de le halle, a le requeste de celui qui li avoirs sera u de personne de par lui souffissant, anscois qu'il en soit faitte nulle moustre ne nulle sarpilliere descousue (Drap. Valenc. E., 1344, 268).

 

-

P. iron. [Appliqué à des pers.] : Et maintenant ves chi venir Süeur Jehenne et süer Perrete. Bien semblent estre en grant destrece Et dient : "Ha ! pour Dieu merchi, Menes nous ent avoec[que] li." Che dit le Petit Afilét : "Ja, se Dieu plest, n'encomberé Nostre nef de si viel avoir..." (Dame Lycorne G., c.1349-1350, 224).

 

-

Avoir de poids. "Marchandise qui se vend au poids" : Item, les drappiers en groz ou a détail, les peletiers en groz ou a detail, les espiciers, feutriers, tappissiers, frappiers, cordiers, vendeurs de hanaps et tous autres marchans d'avoir de poix pourront prendre de leur marchandise et en leur marchandise II sols parisis pour livre d'acquest en pays de parisis ; et tournois en pays de tournois (Mét. corp. Paris L., t.1, 1351, 23). ...pour l'acquit de XXXII caques d'alun et de warance et autres avoirs de pois (Commerce marit. Rouen F., Pièces justif., 1393, 181).

 

d)

"Domaine, propriété, bien-fonds" : De Gille de Hemsrode, fermier de l'avoir de Menin, sur les termes de la mi aoust et Chandeleur quatre cens et dix neuf et autres ensievans jusques en fin de paie, en deniers paiez à maistre Thierry Gherbode, conseillier et garde des chartres de monseigneur en Flandres (Comptes Etat bourg. M.F., t.3, 1416-1418, 146). A Roegier de Reepere, cordier, pour avoir fait et ouvré de son mestier aucuns cables de chanvre pour tirer aucuns bois hors des fossez qui gisoient à l'avoir de Roegier Boengoet (Comptes Etat bourg. M.F., t.3, 1418-1420, 645). ...les avoirs, bestaill et appareils de guerre estanz ès-terres et forteresse desdiz pupilles demouront à ladicte damme oudit nom. (Cartul. Laval B., t.3, 1419, 40).

 

e)

"Bétail" : ...la ferme de la queraterie et dou marché à l'avair de Rennes (Actes Jean V Bret. B., t.3, 1429, 249). Et sur ce mont maynnent leurs avoirs menus a paistre, pour la grant bonté des herbes qui y sont. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 78). Cestuy lyon adommageoit l'avoir Ou estoient du pastourel les pars. (...) Le pastourel (...) Ung peu de temps l'avoir abandonna. (DU PRIER, Songe past. D.-M., c.1477-1508, 98).

 

Rem. Très anc. cout. Bret. P., Textes divers, 191 ; A. Joubert, La vie agricole dans le Haut-Maine au XIVe s. (1335-1342), 21 ; La Régionalité lexicale, ELiPhi, 2016, 166 (J.-P. Chauveau).

 

-

Gros avoirs. "Animaux de ferme" : ...pour mettre ou pasturaige et herbaige de ladite forez touz les beufs, vaiches, veaux, chevaux, jumens et autres gros avairs (Cartul. Laval B., t.2, 1377, 291).

 

-

"Troupeau de moutons" : ...à Estève le tournaire et cornemusaire, lequel ledit Berruel avoit loué, par cause que nostre sire le roy (...) le m'avoit commandé, que quant sondit avoir passeroit et viendroit durant le temps des tondoysons, que fust acompaigné soir et matin et à toute heure, avecques cornemuses (Comptes roi René A., t.1, 1472, 129).

 

f)

"Butin" : Menez moy ces deux nefs et ces cent Sarrasins au Cruq, et me recommandez au roy et a sa fille, et de par moy presentez a la pucelle les vaisseaux et l'avoir qui est dedens, et au roy les cent payens. (ARRAS, c.1392-1393, 129). Et envoierent en l'abbaye des biens grant foison et en menerent ce des vaisseaulx que ilz porent bonnement, si chargiez de l'avoir aux Sarrasins que plus ne povoient. (ARRAS, c.1392-1393, 133). Je vous rens, quittes et delivres, tous voz prisonniers que nous et noz gens avons, et voz tentes et voz paveillons ; mais l'avoir qui est departy entre mes compaignons ne vous pourroy je rendre. (ARRAS, c.1392-1393, 168). Et Gieffroy leur donna tout l'avoir de la tour, et ceulx wident, et mettent le jayant sur un curre tout en son estant, et le lient bien qu'il ne puet cheoir. Puis boutent le feu par tout en la tour. Et puis ont ramené Gieffroy a son cheval, et il monte, et descendent la valee atout l'avoir troussé, chascun sa part. (ARRAS, c.1392-1393, 267). Sy se parti atout sa compaignie, qui tant avoient gaingnié qu'ilz ne sçavoient que faire de leur avoir. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 86).

B. -

Au fig. "Bien" : Salemons, che devés savoir, Ne requist a Dieu aultre avoir Qu'il euïst sens de gouvrener Son peuple et a son droit mener. (FROISS., Dits Débats F., 1363-1393, 104). He, Dieux ! quel avoir puet avoir plus bel que de science et de sagesse, car tous avoirs, toute richesse en comparacion de luy est comme arene de neant de value ! (BOUVET, Appar. Meun A., 1398, 4).
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Robert Martin

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