C.N.R.S.
 
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     COMMUN     
FEW II-2 961a communis
COMMUN, adj. et subst. masc.
[T-L : comun ; GD : commun ; GDC : commun ; AND : commun1 ; DÉCT : comun ; FEW II-2, 961a : communis ; TLF : V, 1134a : commun]

I. -

Adj.

A. -

"Qui est le fait de plusieurs personnes ou de plusieurs choses"

 

1.

[D'une chose]

 

a)

Commun à... (et à...)/Commun de... (et de...)

 

-

"Qui est le fait de plusieurs personnes (ou bêtes)" : Car je croy c'est pour le prouffit De nous conmun. (Mir. abbeesse, 1340, 67). ...une [cause] commune a la mere et au fruit (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 245). ...Et que c'est grant confusion, Et que Dieu courresce et offent Quant son service li deffent, Car à saoul et à geun Son digne service est commun, En tous cas, à tous et à toutes (MACH., P. Alex., p.1369, 226). Car tels deliz sont communs a nous et aus bestes, et doit estre nostre felicité en la plus noble chose qui soit en nous et en laquelle nous passons les bestes. (ORESME, E.A.C., c.1370, 111). ...ycellui de Bedford de son povoir se vouloit emploier, comme amy commun des parties, à l'apaisement des procès et debas (FAUQ., II, 1421-1430, 155). ...le peril commun de moi et des autres cognoissoit (CHART., Q. inv., 1422, 49). ...nom d'amy a esté commun a eulx et a toy (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 9). Mais croire a Dieu est croire a ses paroles, doctrines et enseignemens. Le premier, croire Dieu estre, et le tiers, croire a Dieu et a ses paroles, apartient et est commun aux bons et aux mauvais, mais le second, croire en Dieu en le amant et tendant en lui par amour, apartient seulement aux bons. (Somme abr., c.1477-1481, 100).

 

-

"Qui est le fait de plusieurs choses" : Et donques ne est ce pas pour ce que elle [la terre] resgarde semblablement et equalment les parties du ciel, car ce est commun a toute chose qui seroit mise ou milieu ; mais estre meu au milieu est propre a la terre. (ORESME, C.M., c.1377, 548).

 

b)

Empl. abs. "Partagé"

 

-

[Par plusieurs personnes (ou bêtes)] : N'autre chose n'i va querir Fors au Saint Pere requerir Qu'il ottrie un commun passage, Car faire vuet le saint voiage. (MACH., P. Alex., p.1369, 219). ...et ordonna à estre ensevelis ou sepulcre commun des povres gens. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 184). ...dès environ la Saint-Jehan-Baptiste derrenierement passée, il qui parle et ledit Jehan Le Camus, qui est son serourge, se acompaignerent à demourer ensamble et à estre à uns despens communs, et y ont tousjours depuis esté et demouré (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 510). ...il n'avoit pas dessoubz soy dix hommes, combien qu'il soit de commune bonne ligniée ["d'une lignée partout également bonne, qui a les mêmes qualités en partage"]. (JEAN DE SULTANIEH, Mém. Tamerlan M., 1403, 441). Tous apperçoivent et prevoient leur commune desolation et ruine (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 12). En l'unité de la nature divine sont trois personnes, entre lesquelles la premiere est de nulle aultre. La seconde par generation est seulement de la premiere personne. La tierce par commun soufflement et par spiration commune est de la premiere et seconde. (Somme abr., c.1477-1481, 123). Pareillement commune spiration ou spirement est une notion et cognissement faisant congnoistre qui est une unité ou Pere et ou Filz, et est distincte et separee de toute aultre notion, qui fait congnoistre les personnes. (Somme abr., c.1477-1481, 150). Cestui predist sur aucune revolucion et grande conjunction que les bestes plus domestiques comme chevaulx, beufz, vaches, chievres, brebis et pourceaulx laysseroient leurs communes habitacions et fuyroient ès lieux sauvages (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 64 v°).

 

-

[D'une sorte de caravansérail] Lieu commun : ...enseignier en verité Ne vous saroie lieu nesun, Se ce n'estoit un lieu conmun, Liquelz n'est pas pour vous honnestes : Car la foraine gent leurs bestes, Quant il sont venuz au marchié, Sitost qu'il les ont decharchié, Y mettent, sire. (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 210).

 

.

DR. Biens communs. "Biens qui sont dans la communauté du mariage, qui appartiennent aux deux époux" : Son mari contredisoit la dite marchandise et disoit que l'en ne preist nulz de ses biens, ne des biens de sa femme. Dit fut et à droit que le marchié seroit tenu et seroient contrains elle et son mari, par prinse de leurs biens communs, à paier les deniers, pour ce qu'elle est marchande commune. (Cout. bourg. glosé P.M., c.1380-1400, 134). ...je vous prie que soiez contente que la divorce et separacion soit faicte de nous deux, et que amoureusement partissons noz biens communs par egale porcion. (C.N.N., c.1456-1467, 445).

 

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Robe commune. "Robe qui est partagée par plusieurs personnes" : ...une canne et demye de drap gris, de quoy avons fait faire une robe commune, pour nos paiges, à quant ils sont malades (Comptes roi René A., t.2, 1471, 15).

 

-

[Par plusieurs choses] : Car les sciences sont et sont dites d'aucun principe commun. (ORESME, E.A., c.1370, 535).

 

.

MÉD. Maladie commune. "Maladie affectant à la fois les parties homogènes du corps (os, chair, etc.) et les parties composées ou organiques" : Tu dois entendre que maladie officiale n'est pas cause de douleur, se ce n'est par accident, car il n'y a que deux causes, c'est assavoir maladie consimile et commune (GORDON, Prat., c.1450-1500, VI, 9). Et [Galien] dit universellement que toutes maladies, les unes sont complexionables qui sont es parties semblables, les aultres composicionales qui sont es parties organicques et les aultres communes qui sont faictes en une et en aultre partie. (PANIS, Guidon, 1478, tr.VI, doct.2, chap.2).

 

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Veine commune. "Veine médiane de l'avant-bras, partagée par tous les lieux de l'avant-bras" : Par certain temps ou certains moiz, Le doit doubler ou itérer, Se la vertu peut tolérer, Et est le conseil de Phisique Minuer lors de l'épatique, Ou d'une autre commune vaine Qui est dicte la médiaine (LA HAYE, P. peste, 1426, 116). ...une vene qui est en la curvature du bras on milieu qui se appelle purpurea ou la vene noyre eu la vene commune (PREVOST, Cir. Guill. Salicet, 1492, IV, 2).

 

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GRAMM. Qualité commune. "Propriété du nom dit commun" : Qu'est nom ? C'est une partie d'oroison qui signifie substance avec qualitee propre ou communne. (DonatS, a.1436. In : Th. Städtler, Zu den Anf. der frz. Grammatikspr., 1988, 126).

 

c)

Loc. D'un / de / par commun accord./D'un / de commun assent./D'un / de commun assentiment./D'une commune voix... V. assent, assentiment, voix : Lors de commun acort recordent Qu'elle est digne d'estre loée. (MACH., D. Aler., a.1349, 351). Juges sui par commun acort Especiaument d'un descort Qui est ci entre deus parties, Pour atendre droit de parties. (MACH., J. R. Nav., 1349, 192). Si s'avisierent d'un malice Pour li oster de son office Et pour sa mort, que sans deloy Il le penroient en sa loy, Si que d'assentement commun Tuit furent en acort comme un (...) D'un edit faire et un decret, Tout en appert, non en secret (MACH., C. ami, 1357, 36). Lors d'un commun assentement Respondirent moult liement, Qu'il le feroient ; et le firent Mieus encore qu'il ne leur deirent. (MACH., P. Alex., p.1369, 54). ...et tous d'un commun accord avez advisié qu(il) est neccessité et expedient que pour les causes dessusdictes nostredit Chancellier demeure pardelà. (BAYE, I, 1400-1410, 250). Lors sans demeure et tout d'un commun assentement s'agenoillerent devant le trone de la majesté divine toutes les Vertuz (GERS., Concept., 1401, 396). Nous ottroyons tout au premier de grace especiale l'umble supplicacion que Oroison a faicte pour noz bonnes gens de nostre bonne ville de Nazareth, Joachim et Anne, attendue la bonne et veritable relacion que vous de commun accort avez faicte d'eulx. (GERS., Concept., 1401, 405). ...et pour pourveoir de commun assentement au gouvernement, à la garde et conservacion de ce royaume (FAUQ., I, 1417-1420, 317). ...de voix commune ["par l'opinion générale"], Icy n'en est aucune nouvelle (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 83). En tesmoing de ce, d'un commun accord, Jehan le Gros le jeune, secretaire et auditeur de monseigneur de Charroloys, en fist et bailla acte et certification de sa main à tous ceulx dessus nommez qui avoir le vouldroient. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 195).

 

-

Chevaucher le commun pas. "Chevaucher le même pas" : Et cheauçoient tout le commun pas, rengiés et serrés ensi que pour tantost combatre. (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 196).

 

2.

[D'une pers. ; p. ext. idée de rapprochement]

 

a)

"Relever (d'une même autorité)" : Ceulx sont communs en la ville de Chastillon à monseigneur le Duc et à monseigneur l'Evesque qui sont nés de l'omme lige monseigneur le Duc, et de femme lige monseigneur l'Evesque (Chartes communes Bourg. G., t.1, 1371, 350).

 

-

Communs en biens. "En communauté de biens" : Mari et femme dès ce qu'ilz sont mariez sont communs en biens et font entre eulx communauté de biens meubles et acquests (Vieux cout. Poitou F., c.1451-1454, 182).

 

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Marchande commune. "Marchande qui est en communauté de biens avec son mari" : ...se une femme est marchande commune, son mari ne pourra despecier le marchié qu'elle aura fait, ne retarder le paiement aux crediteurs (...). Son mari contredisoit la dite marchandise et disoit que l'en ne preist nulz de ses biens, ne des biens de sa femme. Dit fut et à droit que le marchié seroit tenu et seroient contrains elle et son mari, par prinse de leurs biens communs, à paier les deniers, pour ce qu'elle est marchande commune. (Cout. bourg. glosé P.M., c.1380-1400, 133-134). À Agnès, femme Alain du Tilloy, boulengier, marchande commune, soy faisant fort de Pierre Le Conte, boulengier, et dudit Tilloy, frère dudit Pierre, pour pain livré pour la despense de l'ostel de mondit Seigneur, comme il appert oudit roolle, par quittance de ladite Agnes, donnée le XXVe jour de juing IIIIxxXVI, 100 fr. À Agnès La Guernie, potagière et marchande commune de suif et de chandelle, pour la dite despense, comme il appert oudit roolle, par quittance de ladite Agnès, donnée le Xe jour de juillet, l'an IIIIxxXVI : 100 fr. (RAPONDE, Comptes La Trémoille L.T., 1396-1406, 26).

 

Rem. Sent. Chât. Paris M., II, 1402, 615.

 

b)

[De plusieurs pers.] Estre commun en qqc. "Être proche, uni en qqc." : Mes chiers amis, Puis qu'Amours ad ce nous a mis Que nos deus cuers ensamble joindre Vuet sans partir et sans desjoindre, Et que faire vuet un de deus, Pour Dieu, ne faisons paire d'euls. Car il sont perdu et honni, Se si pareil et si onni Ne sont qu'en bien et mal commun Soient, et en tous cas comme un, Sans pensée avoir de maistrie, De haussage ou de signourie. (MACH., R. Fort., c.1341, 148).

 

c)

Estre commun (à) "Être proche (de), être familier (de), être accessible (sans faire de différence d'une pers. à une autre)" : Si privés, si communs estoit qu'an fut repris Et respondit com sires de valeur et de pris (Gir. Ross. H., c.1334, 188). ...li aultres m'est moult communs, C'est li bons sires de Couchi, Qui m'a souvent le poing fouchi De biaus florins a rouge escaille (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 56). Et gardez, tant que vous aurez a estre conquerant, que entre vous compaignons ne vous maintenez comme sire, mais commun au grant et au petit, et parler et tenir compaignie a chascun selon sa qualité, car ce fait les cuers enflammez d'amour a ceulx qui ainsi sont humain en seignourie. (ARRAS, c.1392-1393, 86). Ne soiez pas entre voz compaignons comme sires, mais communs, et les honnourez chascun selon son degré, et leur donnez du vostre selon vostre aisement et selon ce que la personne le vauldra. (ARRAS, c.1392-1393, 153). ...et doit [le roi, Advis a Isabelle de Baviere] soy lever en tous temps à six heures à matin, diner à dix, souper à six et coucher à dix, oir sa messe à sept heures et, la messe oye, besoigner jusques à dix, se besoignes y a à expedier, et apres digner soy esbatre secretement à petite compaignie de ses bons [,] secrez et privés serviteurs et non mie estre trop commun. (Doc. c.1434. In : Vallet de Viriville, Bibl. Éc. Chartes 2, 1865-1866, 141). Commun, plain, joieux, humain, traitable... (Lex. techn. monolingue, éd. G. Hasenohr, c.1480. In : Romania 105, 1984, 127). ...on list de l'empereur Trajan es croniques rommaines que, comme aucuns de ses amis le reprenissent de ce que, oultre et par dessus tous les empereurs, il estoit trop famillier et commun en se condescendant et acointant de tous, il respondi qu'il desiroit estre tel envers tous que tous le desiroient trouver. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 184).

 

-

Estre commun à qqc. "Être favorable à, attentif à, ou au moins neutre vis-à-vis de qqc." : Prince clement [Charles d'Orléans], or vous plaise sçavoir Que j'entens moult et n'ay sens ne sçavoir ; Parcïal suis, a toutes loys commun. (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 47).

 

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Au fig. [De la Fortune et de ses apparences] : Scipio, tu voys et sces que la Fortune est commune ["aux apparences favorables, proches, familières"] (...) en laquelle nul se doit fier, car elle ne regarde fors a ses apetis. (LA SALE, Sale D., 1451, 70). Bonnes gens de trestoulx estas, Vous avés veu tout maintenent - Si avés entendu le cas- Comment en ce monde present L'ung a heu des biens a grant tas Par les mains de faulce fortune, La quelle n'est jamais commune ["favorable, proche"], Comme avés veu expressement (OLIOU, Mess. Arg. A., c.1470, 501).

B. -

"Qui est le fait de la plupart ou de tous"

 

1.

[D'une chose]

 

a)

"Qui n'est pas propre à telle ou telle personne, qui est partagé par toutes, qui est général" : ...quant une dame de haulte renommee vint a l'encontre de ses enfans qui d'une bataille s'enfuyoient et pour confundre leur vituperable honte et lacheté laissa la commune vergoigne feminine, car elle se descouvry par devant en leur disant, puis que fouir vouloient, qu'ilz rentrassent ou ventre qui les avoit portez et que autre lieu n'avoit pour les sauver (CHART., Q. inv., 1422, 61).

 

-

[Dans une situation partic.] "Général" : ...l'adversité est commune a tout le royaume (CHART., Q. inv., 1422, 33). Et, à ceste cause, fut bruyt tout commun parmi ladicte ville de Paris que le roy estoit ainsi mort, dont il n'estoit riens, et s'en revint, but, parla et menga très bien, et vesquit jusques au samedi au soir ensuivant, trentiesme et penultime jour dudit mois d'aoust, environ l'eure de entre six et sept au soir qu'il rendit l'ame. (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 136). En ladicte année fut mortalité commune et universelle par la pluspart dudit royaume de maladie de flux de ventre et autres maladies, à cause de quoy plusieurs gens de façon moururent en ladicte ville de Paris et ailleurs (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 262). ...je suis de l'oppinion commune. (BUEIL, II, 1461-1466, 158).

 

b)

En partic.

 

-

"Qui est le bien de tous, qui appartient à tous, public" : ...il, à l'aide d'aucum de ses gens et serviteurs, tendi le drap entier de XVIIJ aulnes, duquel icelles quatre aulnes et demie sont yssues, et ont esté coppées, ès poulies communes estans à lui et autres drappiers, en la ville de Saint-Marcel (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 113). La est l'ediffice commun Pour gens moyens et pour commun. (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 123). L'anesse qu'est commungne Avec l'anon, sans fere a nul rancune, La m'amenéz (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 154).

 

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Chemin commun. "Voie publique" : En la terre sui de Sennar Ou l'en me dit que d'ermitages A plus qu'ailleurs sur les boucages Et sur le grant chemin conmun. (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 251).

 

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Criee commune. "Proclamation publique" : ...et la publication et criee commune pour tous venans fu faite par les heraux (Saladin C., c.1465-1468, 98).

 

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Commune policie. "Gouvernement par un grand nombre de personnes" : Commune policie est la ou une grande multitude tient le princey au profit publique ; aussi comme en aristocracie un petit nombre tient le princey, et en royalme un seul le tient et tout au profit publique (...). Et ceste policie Aristote appellle tymocracie (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 370).

 

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[D'une cité] "Qui est à tous, qui est libre, qui est libéré du pouvoir féodal" : ...saulve la grace de sa dignité comme homme mortel, ainssi que je suis, se la place estoit commune, ou devant juge compettant, je lui respons que (...) il a menty. (LA SALE, Reconf. De Fresne H., 1457, 15). [Il s'agit d'une place forte le tresfort chastel et ville de Breth, mentionné plus haut dans le même texte]

 

-

"Qui s'applique à tous, général" : Et vous leur avez respondu que vous ne voliés que je y alasse, et que eu cas que je yroie, vous me feriés faire damage et deshonnour ; de la quele chose certes vous me faisiés grant tort, car le service de Dieu est commun et vous ne le deussiez mie deffendre à nul crestien, especiaument à moy, considéré le service que je vous ay fait. (MACH., P. Alex., p.1369, 229). Face chascun ce qu'il doit envers Dieu et son amour, sans resister a sa grace et a son mouvement secret, et il perfera le demourant. Car de loy commune l'un sans l'autre ne se fait point en la justificacion du pecheur par penitence : ne grace sans voulenté, ne voulenté sans grace. (GERS., P. Paul, a.1394, 498). Et aussi la sentence de Titus Largius estoit trop commune et s'estendoit trop (LA SALE, Sale D., 1451, 183).

 

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Le bien commun / le salut commun / le commun profit : Je te pri que tu te conseilles A bonnes gens et que tu veilles A faire le commun pourfit, Einsi com Boësses le fit Et com maint philosophe firent Qui mainte doleur en souffrirent Et furent chacié en essil. (MACH., C. ami, 1357, 133). Mais pour ce que les livres morals de Aristote furent faiz en grec, et nous les avons en latin moult fort a entendre, le Roy a voulu, pour le bien commun, faire les translater en françois, afin que il et ses conseilliers et autres les puissent mieulx entendre, mesmement Ethiques et Politiques, desquels, comme dit est, le premier aprent estre bon homme et l'autre estre bon prince. (ORESME, E.A., c.1370, 99). ...et dit qu'il estoient icy venus pour tout le bien commun et par especial de ce royaume (BAYE, II, 1411-1417, 260). ...aprés le lien de foy catholique, Nature vous a devant toute autre chose obligiez au commun salut du pays de vostre nativité et a la defense de celle seigneurie soubz laquelle Dieu vous a fait naistre et avoir vie (CHART., Q. inv., 1422, 11). Pourquoy ledit excellent Roy, Considérant forment en soy, Comme Prince trez crestien, Le salut commun et le bien, Fist compiler (...) Une certaine et vraie doctrine (LA HAYE, P. peste, 1426, 12). Le prince ou bon chevalier desire le bien commung et de ses subgectz ; le tirant demande et quiert son prouffit particulier et l'oppression du peuple. (BUEIL, I, 1461-1466, 73). ...car par icelle [la partie irascible de l'âme], l'homme courrouchié par bonne jalousie enflammee d'une fervente amour d'aucune chose juste, honneste, grande, prouffitable et salutaire se expose pour l'apprehender en pugnissant et en deboutant ce qui est injuste et deffendant virilement ce qui appartient a justice et au bien commun piteusement, non furieusement. (Somme abr., c.1477-1481, 138).

 

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Guerre commune. "Guerre qui frappe tout le monde" : L'une des grans douleurs de soubz la lune, C'est veoir le feu en sa propre maison. Mais trop plus est veoir la guerre commune En ung pays, et sans juste achaison. (J. MESCHINOT, Trois ballades, 1493. In : Romania 49, 1922, 431).

 

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Bourgeois / bourgeoise commun(e). "Bourgeois, bourgeoise qui a juré la commune" : ...autres bourgeois que bourgeoises que j'ay en lad. ville appellez communs, qui me doivent chacun an deux s. par. (Trés. Reth. L., t.4, 1479, 370).

 

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Commun pays de Flandres. "Groupement de toutes les villes de Flandres ainsi que le plat pays" : ...le paiement de 60000 escuz doubles lors derrainement accordez à icellui seigneur par son commun pays de Flandres (Comptes Etat bourg. M.F., t.3, 1416-1418, 235). ...l'ayde qui lors prouchainement seroit acordee à mondit seigneur par les bonnes gens, manans et habitans de son commun pays de Flandres (Comptes Etat bourg. M.F., t.1, 1420, 237).

 

Rem. FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 274.

 

c)

[D'un fait, d'une réalité...] "Su, connu de tous, du moins de la plupart, qui est notoire" : ...on dit qu'en Lorraine en a une Qui, par renommée conmune, Est belle damoiselle et sage (Mir. ste Bauth., c.1376, 83). ...ce dictié vueil que l'en nomme, Quant l'istoire sera commune : "La mutacion de Fortune." (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 12). ...et lors failli le royaume de Inda, qui avoit esté en estat .CCCLXIX. ans, ce dient les communes histoires (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 166). Dont il advint une telle merveille que dedens huit jours que les malades estoient dedens l'ospital, ilz estoient garis. Vray est que ceste besongne fut incontinent commune [var. sceue] en ce paÿs. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 90). ...a la verité sez fais estoient en France aussy communs a toutez gens qu'il eussent esté meismez en Castille (Comte Artois S., c.1453-1467, 151). ...ses vertuz ne doivent estre celées n'estainctes, mais en commune audience publiquement blasonnées (C.N.N., c.1456-1467, 241). ...encores n'estoit pas descouverte l'encloueure de son infortune si avant que d'estre commune comme elle fut depuis (C.N.N., c.1456-1467, 246). Si (...) vous ne povez garder chasteté, au mains mettez peine de la garder tant qu'il touche fame et commune renommée. (C.N.N., c.1456-1467, 563). ...et telle est la commune et certaine renommee par tout (LA VIGNE, V.N., p.1495, 297).

 

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Il est commun (que) "Il est bien connu que, cela est bien connu" : ...pour ce qu'il estoit tout commun et nottoire que ledit mons. l'evesque de Poitiers estoit fait arcevesque de Sens. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 522). Et ne scet, sur ce requis, nommer les personnes qui le lui ont dit, mais il est tout commun oudit pays. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 197). SOCTE MYNE. Comme source de sapience, Fontaine de toute science, Aiday nous as, il est commun. (Sots, c.1480-1500, 272). Il estoit tantost tout comun qu'il estoit arriué vng roy à la ville que on appelloit le Roy de Canare, et qu'il estoit logé à la seigne du Cherf, en la grant rue (BÉTHENCOURT, Canarien G., c.1490, 192).

 

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Chose est commune (que). "C'est bien connu (que)" : Chose est commune, Car quant la personne est plus pleinne D'onneur, de richesse mondeinne, De son tour a niant la meinne. (MACH., R. Fort., c.1341, 35). Car on voit - et chose est commune - Que qui plus en a, plus en pert. (MACH., R. Fort., c.1341, 90). ...car la chose estoit toute commune que le prinche de Castelongne traveilloit a tort le pays du conte d'Urgel et le voloit de tous poins desheriter (Comte Artois S., c.1453-1467, 27).

 

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Proverbe / vers commun. "Proverbe, vers connu de tout le monde" : C'est un proverbe tout conmun Qu'il en fait conme de sa femme (Mir. femme, 1368, 178). Car aussi comme l'entendement qui se occupe en pluseurs choses est mendre en chascune de elles que se occupast en peu si comme dit un vers commun : "Pluribus intentus minor est ad singula sensus", semblablement est il de la volenté ou affeccion qui est partie en pluseurs. (ORESME, E.A.C., c.1370, 490). On dist en un commun proverbe, et voirs est, que... (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 85). Ceulz yci sont bieneureux Qui les cuers ont doloreux. Mais tantost par aventure on me dira le proverbe commun : "Bien aise plaidoye qui parle sans partie !", car il semble que nulz ne parle ou doye parler contre moy. (GERS., Déf., 1400, 221). ...car c'est ung proverbe commun... (JUV. URS., Nescio, 1445, 474). ...ainsin que dit le proverbe commun : Qui bien ne mal ne puet souffrir, a grant honneur ne puet venir. (LA SALE, J.S., 1456, 67).

 

-

[D'un ouvrage, d'un écrit] "Répandu" : Cestui Abraham monstra bien comme il estoit erudit en la science des estoilles, par ung livre qu'il en a composé, lequel est partout commun et imprimé. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 29 v°). Cestui composa plusieurs beaux instrumens, servans à la science de astrologie et plusieurs belles tables, qui sont assez communes et en usage. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 118 v°).

 

d)

"Qui n'est pas propre à telle ou telle chose, qui est partagé par toutes, qui s'applique à toutes" : ...[les nobles cieux] Gouvernent nécessairement, Se le Philosophe ne ment, Par Loy commune et naturèle, Toute la masse corporèle Des Elémens et autres choses, Qui soubz la Lune sont encloses (LA HAYE, P. peste, 1426, 3). Aussi le Ciel notoirement Par soy mouvoir diversement, Fait tourner avant et arrière, Sans cesser en quelque manière, Le beau Soleil avec la Lune, Comme veult Nature commune (LA HAYE, P. peste, 1426, 5).

 

2.

[D'une pers.]

 

-

Estre communs à qqc. "Avoir qqc. en commun" : En cel terre prendoit ons de tous les biens a sa volenteit, car ilz estoient commoins a toutes choeses. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 160). [Seul ex. ; peut-être altération du texte de Mandeville (et sont tous les biens du pays communs) ; cf. note de l'éd.]

 

-

[D'un collectif] La commune chevalerie. "Le gros des chevaliers, la plupart des chevaliers" : Or advint, au chief de huit jours [,] que la commune chevalerie se fut partie du Francq Palais (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 402).

 

-

[D'une femme] "Prostituée" : Et les fames conmunes qu'aux hommes vont gesir... (CUVELIER, Chans. Guescl. F., c.1380-1385, 360). ...une garsse appellée Jehannete, la plus diffamée et la plus mauvaise ribaude que l'en sache, car elle est toute commune (Trés. Reth. S.L., t.2, 1388, 350). ...fu attainte et fait venir Katherine, femme Henryet du Roquier, prisonniere oudit Chastellet, pour ce que l'en dit que elle est maquerelle publique et commune (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 42). ...Girot et Vilain et Boutevillain distrent a ladicte femme qu'il faloit qu'ilz eussent sa compaignie charnele, dont elle fut refusant, combien qu'elle feust femme toute commune, disant qu'elle estoit affiée audit Boschier. (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1426, 383). ...on appelloit celle Lorence louve pour ce qu'elle estoit une louere en luxure et moult commune a chascun (LA SALE, Sale D., 1451, 171).

 

.

Femme de vie et commune. "Femme publique" : ...Jaques Ferré, frere du dit Jehan Ferré, avoit leans mené une jeune femme de vie et commune (Doc. Poitou G., t.7, 1415, 288).

 

-

Homme commun. "Homme public, connu de tous" : Se un homme commun despendoit plus que tout le sien en donner un disner a une communité ou en aucune autre chose de soy honeste, il feroit que sot. (ORESME, E.A.C., c.1370, 245).

C. -

P. ext. "Habituel, ordinaire ; banal"

 

1.

"Habituel, ordinaire"

 

a)

[D'une chose] : Et de ce la vient la tempeste Qui destruit le monde et tempeste, Les merveilles et les fortunes Qui au jour d'ui sont si communes Qu'on n'oit de nulle part nouvelle Qui soit aggreable ne belle (MACH., J. R. Nav., 1349, 140). Car ce fu chose assez commune Qu'on vit le soleil et la lune, Les estoiles, le ciel, la terre, En signefiance de guerre, De doleurs et de pestilences, Faire signes et demoustrances. (MACH., J. R. Nav., 1349, 142). ...Et au temple donna preu dons ; Le ciel, le soleil et la lune Cultiva - c'est chose commune - Et toute la chevalerie Dou ciel, et pour l'idolatrie Plus essaucier, en certein lieu Les fist mettre eu temple de Dieu. (MACH., C. ami, 1357, 50). Mais mençonge, sanz deffaillir, En tous cas, leur ert si commune Que verité n'i est aucune, Ne en promettre, n'en jurer (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 48). ...et se pranront lesdiz gages sur les revenues communes de la terre de Coucy. (BAYE, I, 1400-1410, 280). ...il [Dieu] mue et change le commun et acoustumé cours tant de nature comme de l'Escripture et faisant miracles souvent, graces, pardons et privileges. (...) Et mesmement a nostre propos contre le commun cours il sainctifia Jheremie avant sa nativité (GERS., Concept., 1401, 403). De quoy vous sert cela, Fourtune ? Voz propos sont, puis longs, puis cours, Une foiz estes en decours, L'autre plaine comme la lune ! (...) S'est vostre maniere commune ; Car, quand je vous requier secours, Vous fuyez, aprés vous je cours, Et pitié n'a en vous aucune. (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 445). Du Messias la comune voix Est qu'il nous doit tous rachapter. (Pass. Auv., 1477, 155). ...les [instruments] communs [des chirurgiens] : les aulcuns sont medicinaulx et les aultres sont de fer. (PANIS, Guidon, 1478, chap. sing.). Ce n'est [...] pas mon train commun Pour servir a mon appetit. (Sots gard., a.1488, 108). ...car lui seul porta un boeuf tout vif sur ses espaulles l'espace d'une stade, qui contient cent XXV pas et chacun pas V piez et chacun pié IIII palmes et chacune palme IIII doiz de main commune (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 41 r°). ...et, entre autres merveilles, vit une dent maxillante, tant grosse que l'on en pourroit fere cent des communes des hommes de present. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 75 r°).

 

-

Communes annees. "Années ordinaires (c'est-à-dire en moyenne, en dehors d'éléments exceptionnels)" : Item, et quant a l'article de la valeur du pressoir, dient les dessus diz qu'il vault bien par an XXIIII livres, le pressoir retenu et deffroyé de toutes choses, combien qu'il ne soit bannier ; et a valu ceste presente année de ferme XXIIII queues de vin, et vault bien chascune queue l'une année par l'autre XL s. Parisis. (...) Item, l'estellage du dit lieu est vendu XXIIII l. Parisis pour an, et vault bien tant communes années par le rapport des dessus diz (Comté Porcien R., 1400, 212).

 

-

Sens commun. "Sens ordinaire, l'un des sens internes, rassemblant les impressions sensibles" : Donc c'est le service dequoy sert le nerf obtique, car il porte l'espece visible et raporte la semblance jusques au sens commun (GORDON, Prat., c.1450-1500, III, 1).

 

-

De commun cours. "Habituellement" : Or savez vous de conmun cours Nous n'avons que quarante jours A faire nostre eleccion (Mir. ev. arced., c.1341, 122). ...il est de conmun cours que celles qui pour l'amour de Dieu vivent en estat de virginité, a ce que elle soient dites vraies vierges, que touzjours sont paoureuses et doubteuses... (Mir. nonne, 1345, 314).

 

-

[D'un usage, d'une manière de faire, d'une opinion...] "Qui est le fait de la plupart, voire de tous ; usuel, habituel" : Pour ce penre congié convint ; Si le prist chascuns et chascune Selonc la maniere commune. (MACH., R. Fort., c.1341, 147). ...car c'est un langage noble et commun a genz de grant engin et de bonne prudence. (ORESME, E.A., c.1370, 101). Vous savez, c'est ung commun usaige, que nul ne paie voulentiers ne sacque argent hors de sa bourse, tant comme il le puist amender. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 24). Mais selonc le commun usage de parler, la ou elles sont inequales, la plus grande est appellee longitude, et l'autre apres latitude, et la plus petite est dicte spissitude. (ORESME, C.M., c.1377, 48). ...il seroit bien temps que nous alissons voyagier pour congnoistre les terres et les pays, et aussi pour acquerre honneur et bon nom en estranges marches et contrees, par quoy nous feussions introduit de savoir parler avecques les bons des choses qui sont par estranges marches et pays, qui ne sont pas communes par deca. (ARRAS, c.1392-1393, 82). De la boce qui lors régnoit, Et aussi pour y obvier à si grant mal, mortel et fier, Laquele quiers soigneusement Translater véritablement De Latin en commun Françoiz (LA HAYE, P. peste, 1426, 12). ...en quoy lesdis greffiers ont fait nouvelleté et entreprise contre l'usage, stile et commune observance de la Court (FAUQ., III, 1431-1435, 2). ...en quoy lesdis greffiers ont fait nouvelleté et entreprise contre l'usage, stile et commune observance de la Court (FAUQ., III, 1431-1435, 2). Mais la transquilité de la paix benoite est commun desirer de toutes bonnes gens (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 11). ...il lui paieroit le louage d'un selier où il les fist mectre, au pris commun (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 611). ...meschine estoit, faisant le mesnage commun comme les litz, le pain et aultres telz affaires. (C.N.N., c.1456-1467, 115). Ce village estoit assez estrange de la voye commune des chevaucheurs et chemineurs. (C.N.N., c.1456-1467, 547). ...telz espousailles qui n'ont esté d'aucune valeur prestent, donnent et baillent empeschement a ceulz de la consanguinité afin qu'ilz ne peuent contraire avec telz espoux, comme dist la commune opinion d'aucuns docteurs juristes. (Sacr. mar., c.1477-1481, 72).

 

-

Commun langage : Aristote tenoit que il n'estoit que un dieu, mais il parle selon le comun langage qui estoit lors. (ORESME, E.A.C., c.1370, 128). ...lesquelz estoient embastonnez, c'est assavoir ledit Jehan Launay d'une fourche ferrée à deux beusailz et ledit feu Martin d'une sarpe enmanchée, appellée en comun langaige volant. (Doc. Poitou G., t.12, 1476, 137).

 

-

Delit commun. "Délit commis par un ecclésiastique et justiciable du juge ecclésiastique, délit ordinaire, par opposition à cas privilégié" : La Court a baillié la detention de frere Guillaume Alaiz, religieux de Clugny (...) à l'abbé de Clugny, pourveu que ledit abbé ne procedera à la sentence diffinitive du delict commun jusques à ce que la Court ait cogneu du cas previlegié. (BAYE, II, 1411-1417, 191).

 

-

Droit commun : Mais aucune foiz appelle l'en droit commun celui qui est propre pour un royalme et commun a toutes les cités et parties d'icelui royalme. (ORESME, E.A.C., c.1370, 304). ...touz ceulz qui, par affection ou prouffit particulier, pourchassent tel dommage contre la chose publique (...) contre droit commun et contre bonnes meurs, sont indignes de demourer et d'estre beneficiez en ce royaume (FAUQ., I, 1417-1420, 267). ...je demandoie le dit Village par réquisitoire et non par commandement, à laquelle requeste, selon la disposicion de droit commun et ex precepto legis, le dit seigneur de Secille devoit et estoit tenu de optempérer (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 203).

 

-

Grace commune. "Faveur ordinaire, opposée à grâce expectative" : ...quant aux benefices electifz et non cheans en graces communes et expectatives. (BAYE, II, 1411-1417, 157).

 

b)

[D'une pers.] Estre commun de + inf. "Avoir pour habitude de" : Fortune, Qui de mentir a tous est trop commune. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 68). Ay ! Fortune, Qui es forte une, Preste et commune De baillier prune Verte ou meüre, quant tu veulz (MACH., Lays, 1377, 476). Mais gardez vous que ne croyez Fortune Qui de flater est a chascun commune (CH. D'ORLÉANS, Songe compl. C., 1437, 101).

 

-

(Estre) commun de qqc. "Avoir l'habitude de qqc., y être versé" : Et qui en jeu se treuve plus commun Acquiert souvent entre joueurs le pris. (Lyon cor. U., 1467, 34).

 

2.

"Banal, ordinaire"

 

a)

[De choses] : Preigne l'abre, d'umble stature, Qui porte le fruit, par Nature, Duquel on fait la commune huile, Qui est à vivre moult utile (LA HAYE, P. peste, 1426, 167). ...ne ne fut femme, royne ou aultre, enointe de ladicte saincte huille, ne les roynes femmes des roys ne sont sacrees que de cresme comum. (JUV. URS., Aud. celi, 1435, 160). Fy de l'enseigne, Puisque l'ouvraige est si commun ! (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 126). [Pour faire le siège d'une place, il faut avoir...] Item ung canon especial de cuivre gettant cent livres pesant. Item vingt aultres canons communs gettant pierres. Item autres petiz canons gettans plombées et pierres communes de cent à six-vings livres. Item deux autres grans canons et six plus petis. (BUEIL, II, 1461-1466, 46).

 

-

[En partic., d'une plante, d'un animal] : Item, est ordonné que (...) chaponneau, oultre II. s. VI. d. (...) Item, poulet commun, oultre XV. d. Item, cochon de lait commun, oultre IIII. s. II. d. (...) Item, perdris retille, oultre II. s. Item, une assée, oultre XII. d. (Doc. Poitou G., t.7, 1422, 385). ...Ou de mellisse ou de bugloxe, Ou bourroche commune et grosse (LA HAYE, P. peste, 1426, 132). Mais la seconde noix, c'est assavoir l'aveleine ou la noix commune, nuyt, car elle est inflative et engendre ventiosités au ventre et fait douleur de teste et est difficile a digerer (Rég. santé corps C., 1480, 86).

 

-

De façon commune. "De coupe ordinaire, banale" : Vendu n'ay pour denyer ne maille, J'ay robe de façon commune. (LA VIGNE, S.M., 1496, 549).

 

-

Empl. subst. Cuisine de commun. "Cuisine ordinaire, banale" : Grosse cuysine de commun et de bouche ["raffinée"] (LA VIGNE, V.N., p.1495, 147).

 

b)

[De personnes] "Ordinaire" : Chier filz, qui establiz les loys, Qui de grace tant me donnas, Que de moy ta mére ordenas, Non pas conme mére conmune, Mais mére et vierge fui par une Voie qui fu dessus nature, En tant que de ta creature Tu daignas nestre en humain corps, Filz, entens cy a mes recors (Mir. ev. arced., c.1341, 132). Il n'est pas personne conmune En tant conme il est roy, c'est une ["c'est une première chose"] ; Ains est un homme singulier (Mir. fille roy Hongrie, c.1371, 9). Je vous diray, quant la personne est morte Et a bien fait : il n'a esté commun. (CONTE DE CLERMONT. In : CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 412).

 

c)

En partic. Les communes gens / la gent commune / le commun peuple / le peuple commun...

 

-

"Les gens, tout le monde" : Ne se tenoient mie en palais enfermez, Ainçoiz au commun pueple s'estoient monstrez (Renaut Mont. B.L. V., c.1350-1400, 20). Ly contez Savaris, cescun le maudissoit ; Car de le mort du roy moult mescréus estoit, Et disoit on partout qu'enpoisonné l'avoit, Sy que ly communs peupple du païs le haiioit. (Hugues Capet L., c.1358, 25). Et les gens du païs l'appellent pollibastro ; et en mettent les communes gens de la contree en leurs viandes et es coffres de leurs linges, et en font sechier et pouldre pour mettre en leurs viandes en lieu d'espices. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 73). Et, au departir, parla à tous les cappitaines, chevaliers et escuiers qui estoient là, et appointa d'envoyer querir tout le peuple commung qui avoit esté prins en ceste course, et de le delivrer, excepté les nobles et toutes gens de guerre et ceulx des villes fermées qui faisoient guerre. (BUEIL, II, 1461-1466, 97).

 

.

[Dans une situation particulière] "Les présents, la foule assemblée" : Quant il furent tuit arrivé, N'i ot estrange ne privé Qui en son cuer ne se resjoie, Et qui ne meinne feste et joie, Quant il ont passé tel fortune ; Aussi toute la gent commune Dou païs grant feste en feïrent. De leurs galées descendirent Et aus hostelx se hesbergierent (MACH., P. Alex., p.1369, 110). Hé, Dieux ! que la gent commune fu au cuer resjoïe ! (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 341).

 

-

[P. opp. aux nobles, aux seigneurs, aux chefs de guerre, aux chevaliers, aux gens d'armes...] "Les gens ordinaires, le peuple" : Ly contez Savaris, cescun le maudissoit ; Car de le mort du roy moult mescréus estoit, Et disoit on partout qu'enpoisonné l'avoit, Sy que ly communs peupple du païs le haiioit. (Hugues Capet L., c.1358, 25). Et aussi moult desavenant Est a prince de hault paraige De finer ses jours sanz lignage Avoir procreé de sa chair, Auquel ait refuge et repair Le commun peuple de sa terre. (Gris., 1395, 16). Et trop fort se disferent en Engleterre les natures et conditions des nobles aux honmes mestis et vilains, car li gentilhonme sont de noble et loiale condition, et li conmuns peuples est de fele, perilleuse, orguilleuse et desloiale condition. (FROISS., Chron. D., p.1400, 42). Or se plaint le peuple de nous, or crient et murmurent les communes gens contre la seigneurie pour l'argent qui sur eulx est aucunesfois levé pour la defense du pays. (CHART., Q. inv., 1422, 32). TESTE LIGIERE. (...) Tu as resjouy ung chascun. MERE SOCTIE. C'est la nourrice du commun. (Sots, c.1480-1500, 272).

 

-

[P. opp. aux nobles et au clergé] "Le tiers état" : ...lesquelles [des plaintes] ne sont point pour mon interest particulier, mais pour tout le bien publique de vostre royaume et pour les trois estas d'icelluy, c'est assavoir l'esglise, noblesse et commum peuple (JUV. URS., Verba, 1452, 185).

 

.

Tiers (et) commun estat. "Le tiers état" : ...nous (...) vous mandons que (...) vous assemblez (...) les gens d'eglise, nobles, gens des bonnes villes et autres du tiers commun estat de vostre seneschaussée (Lettres Louis XI, V.M., t.10, 1482, 29). A noz trés chers et bien amez les gens d'eglise, nobles, gens de bonnes villes et aultres du tiers et commun estat de nostre bailliage de Senlis. (Lettres Louis XI, V.M., t.10, 1482, 37).

 

-

[P. opp., parmi les non nobles, aux clercs, aux notables, aux bourgeois, aux riches...] "Le petit peuple, les petites gens" : Après toutes les besongnes dessusdictes, le XIIe jour de juing ensuivant, s'assemblèrent les communes gens de Paris de petit estat jusques à soixante mille ou plus, environ quatre heures après midi, et tous armez, doubtans comme ilz disoient que les prisonniers ne feussent mis à délivrance, non obstant le desenortement du nouvel prévost de Paris et de plusieurs autres seigneurs, iceulx embastonnez de vielz mailletz, haches, coignées, massues et de moult d'autres bastons dissolus, en faisant grant bruit et crians, Vive le Roy et le duc de Bourgongne ! s'en alèrent à toutes les prisons de Paris (...) où estoient les prisonniers. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.3, c.1425-1440, 269).

 

-

La commune gent de... "Les serviteurs de" : ...desus le royne avoient mautallent, Pour ce qu'en sen palais, de se commune gent Ot fait tuer les princhez à Paris sy vieument. (Hugues Capet L., c.1358, 46).

II. -

Subst.

A. -

[Empl. neutre] "Ce qui est le fait de plusieurs ou de tous, ce qui est commun (à)"

 

1.

"Ce qui appartient à plusieurs ou à tous, les biens qui sont à plusieurs ou à tous, ce qui est commun, partagé" : La congnoissance des communaus et des communs appartient communément au prevost et au maire (Chartes communes Bourg. G., t.1, 1371, 354). ...se il en foïssoit son secret en terre, le rosel qui en croistra le revelera et le mettra en commun et par un legier et petit vent l'espandra en grans orages (FOUL., Policrat. B., III, 1372, 235). Afin que du commun soient nourris touz, et femmes et enfans. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 106).

 

-

Commun de gent. "Ce qui est commun aux gens" : Quel donmaige fait le heron Ny autre oysel que prent faucon ? Par les marchés prennent les raines El mengüent herbes et graines Qu'ilz truevent parmy ces ruiseaulx ; Tel viande est pour telx oyseaulx. Dont püent il peu donmagier Commun de gent [var. Le bien commun] pour leur mengier. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 368).

 

-

Le commun. "Ce qui est commun, la commune" : ...et le veandredi ensuiguant que fut le premier jour de jung, l'an que dessus, convoquey a son de la clouche du commun, a la maniere acustumee, le commun de Besançon (Doc. 1386. In : M. Bubenicek, Entre rébellion et obéissance, 2013, 683).

 

-

Commun de la paix. "Droit appartenant au roi en temps de paix et qui, dans le Rouergue ou le Périgord, se lève tout à la fois sur les propriétaires et les locataires" : ...la valeur des dis chasteaux, chastellenies, terres et seigneuries et de leurs dites appartenances et appendances, et pareillement des dis commun de la paix, passade, tail de canal et autres droiz (Archives servit. Louis XI, T., 1470, 35). ...nos villes, chasteaulx, chastellenies, terres et seigneuries de Villefranche de Rouergue, comprins le commun de la paix, les drois de la justice et autres drois et devoirs seigneuriaulx (Ordonn. rois Fr. P., t.18, 1480, 574). ...maistre Bremond de Saint Felix, s'est efforcé (...) nous dessaisir du droit du commun de la paix es lieux de Conques, de Sauveterre et ailleurs (Lettres Ch. VIII, P., t.1, 1488, 274). Item, et sur ce que ledit Bourrain requerroit que, selon ung mandement qu'il avoit du conte d'Armignac, il peust lever sur le commun de la paix la taille annuelle dudit Severac jusque à la somme de six cens frans, pour payer l'assence du prioré de Severac et de Lavergne, fut respondu que le roy avoit fait prendre le commun de la paix, et en parleroit on ou roy, et feroit on le mieulx que on pourroit. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 238).

 

Rem. Lettres Louis XI, V., t.4, 1470, 80 ; 145 ; t.6, 1477, 230 ; t.8, 1480, 271... Cf. Fr. Ragueau, E. de Laurière, Gloss. du dr. fr., 1969 [1704], 134b-135.

 

2.

"Ce qui est commun à plusieurs choses"

 

-

GRAMM. "Genre grammatical à la fois masc. et fém., ou à la fois masc., fém. et neutre" : Quantez geners est il ? Cinq. Quelx ? Le masculin, le femenyn, le neutre, le commun de deux, le comun de trois. (DonatOxf., p.1400. In : Th. Städtler, Zu den Anf. der frz. Grammatikspr., 1988, 130).

 

3.

Loc. À commun / de commun / en commun

 

a)

À commun

 

-

"Ensemble" : Autant y ont droit tous comme un, Et si se gouverne a commun Par les plus anciens lignages (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 20).

 

-

"De manière générale" : ...ou temps plus ancïen Chantoit l'en bien de requïem Pour ceulx qui en la foi moroient, Mais a commun pas ne savoient des messes la grant efficace. (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 85). [Autre ex. p.93, v.201]

 

b)

De / du commun

 

-

"Ensemble" : ...sans noise et sans assamblee de commun (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 780). CHASCUN. Sus doncques, puis que suis congneu Et que vous et moy c'est tout ung, Esbatons nous, je suis esmeu, Faisons tout de propre commun. (Sots triumph., c.1475, 42). Tous lez jours de la quarantaine Ilz font leur assignation. (...) O Gautier disneront lundi, Mardi disneront o Guillaume (...) Samedi aront qui que soit. Au dimence font du commun (Bien avisé Mal avisé B., c.1487-1490 [1396], 190).

 

-

[D'une chose] Aller tout de commun. "Être mis ensemble" : [Discours révolutionnaire de Jean Ball] Bonnes gens, les coses ne pent bien aler en Engletière ne iront jusques à tant que li bien iront tout de commun. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 96).

 

-

Dire tout de commun que. "Dire de l'avis général que" : Mais il n'y ot cellui qui fort ne pensast aux merveilles et aux richesses que ilz avoient veues aux nopces, et aux trancheiz des fallisses, et au ruisseau qui soubdainement s'estoit comparus et fait ou dit lieu. Et disoient bien tout de commun que d'autres plus grans merveilles vendroient et apparroient de cest commencement. (ARRAS, c.1392-1393, 45).

 

-

[D'une chose] Estre de commun. "Être prodigué à tous" : Elle jeue et rit a cascun, Si regard sont trop de commun ! (FROISS., Espin. amour. F., c.1369, 80).

 

-

Ville de commun. "Ville ouverte, place commerciale" : ...il n'est chastiau nesun, Cité, ne ville de conmun, Par ou pensent que venir doie, Qu'il n'aient estouppé la voie (Mir. ste Bauth., c.1376, 127).

 

c)

En commun

 

-

"Ensemble" : Chier sire, ce fait ce qu'ilz ont, Lui et touz autres (non pas un) Qui crestien sont en conmun, Une paroles si traittables... (Mir. st Ign., 1366, 88). Or escoutez vous en conmun : A touz ensemble et a chascun, Par foy, fas ce conmandement Qu'a la justice ysnellement Venez que le baillif veult faire (Mir. femme, 1368, 210). ...pour pourveoir audit paiement on devoit, concorditer unanimi consensu, poursuir en commun le paiement desdis gaiges pour tous eulz ensemble, sans querir paiemens et provisions à part separeement (FAUQ., II, 1421-1430, 181). ...les masures, jardin, vignes, prez, saulceiz et terres arrables, qui de present sont en totalle ruyne et boccage, qui sont six vingts jours ; et quand un autre les tenoit, devoient en commun au seigneur dud. Vonc, chacun an, de menus cens (Trés. Reth. L., t.4, 1479, 371). François estoient X contre ung, Et pensions entre nous Anglois Morir tous ensemble en commeung Par les mains des tristres François. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 572). ..fut le premier qui mist les loix en Archadie et mariage, car lors vivoient encore hommes et femmes en commun (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 19 r°).

 

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"Tous ensemble" : Soubz la couronne espicial, Resjouys nous as en commun. (Sots, c.1480-1500, 272).

 

-

"De manière générale" : Or avon donques ainsi dit en commun et generalment des vertus et avon mis leur gerre grossement et avon dit comment il sont moiennes ou en moien ou moienneresses et que elles sont habis. (ORESME, E.A., c.1370, 202). Si doit donques le prince honorer en commun [ou "en public" ?] la magesté du peuple et en son privé il doit mesurer et considerer l'estat de soy et de un chascun ensemble. (FOUL., Policrat., IV, 1372, 70). ...en la cité m'as amené Dite de Magines a Romme Et ens ou pais on la nomme Et est ditte en conmun Edesse (Mir. st Alexis, 1382, 316).

 

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"Unanimement" : ...Comme il est cy dit en commun. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 45).

 

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En commun et particulier. "Collectivement et individuellement" : L'empereur me fit chevalier Pour avoir gloire terrïenne Partout sur le bras seculier En commun et particulier. (LA VIGNE, S.M., 1496, 259).

 

-

Traire qqn en commun. "Faire comparaître qqn en public" : Pour amour dou lignaige vout li juges tant faire Qu'elle moruit en chartre senz li en commun traire (Gir. Ross. H., c.1334, 196).

B. -

[Empl. de l'animé]

 

1.

[Empl. coll.] Le commun. "Personnes représentant le plus grand nombre ; les gens, le peuple"

 

a)

"Les gens, tout le monde" : Li communs la pais desiroit Tant que nuls ne le vous diroit (MACH., P. Alex., p.1369, 189). TESTE LIGIERE. On doit bien mauldire celluy Par qui le commun se doulloit. (Sots, c.1480-1500, 262).

 

-

[Dans une situation particulière] "Les présents, la foule assemblée" : Adont prinst le commun diuement [l. durement] a huer. (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 480). ...le bon archevesque qui tant estoit senés Remontra au commun parlers si advisés Que par le sens de lui ilz furrent accordés (Cip. Vignevaux W., p.1400, 33). En ce temps, la royne, femme du roy Charles, acoucha d'un filz, lequel fut nommé sur les fons Loys, premier Daulphin de Viennois. Pour la nativité duquel fut faite grand leesce et grand joye par toute son obéissance, et par espécial en sa bonne cité de Tournay. Et furent fais grans feux par toute la ville, et crioit le commun Noël ! à haulte voix, en menant grant joye et leesce. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.4, c.1444-1453, 173).

 

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Tout le commun. "Tout le monde, tous" : LA CHOSE PUBLICQUE. Si ay, de vray, j'en ay eu ung [un enfant], Le pire de tout le commun [,] Que j'ay portay fort longuement, Lequel m'a donné du tourment, De l'ennuy et douleur amere Et ne faisoit rien pour sa mere, Tant est mauvais et detestable. (Sots mal., c.1480, 88).

 

-

[P. opp. aux nobles, aux seigneurs, aux chefs de guerre, aux chevaliers, aux gens d'armes...] "Les gens ordinaires, le peuple" : "...Il nous menra à tel pertuis Que nous en serons tous destruis, Car il sont bien mille contre un." Einsi murmuroit le commun. (MACH., P. Alex., p.1369, 80). Et partout estoient bien venut, especialment dou commun d'Engletière, quant il dissoient que il estoient de Gaind (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 264). ...nous nous garmentïons tous Comment au marquis, nostre sire, Pourrïons deprïer et dire Qu'a soy marïer s'assentist, Qu'avis nous est qu'en avenist Grant bien a lui et au commun. (Gris., 1395, 10). [Le quint chevalier au marquis] Et vez ci vos humbles subgez, Des plus grans une grant partie, Avec le commun qui deprie Ensemble eulx ma conclusïon. (Gris., 1395, 11). ...murmure de subgiez, plaintes de peuple et de commun (CHART., Q. inv., 1422, 46). En ce temps, se resmeurent ceulx de la ville de Tournay, et se mirent en armes l'ung contre l'autre à bannière déployée. Et fut la cause de ceste esmuette pour ce que la communaulté doubtoit que les seigneurs de Moy et de Conflans, qui estoient en leur ville et avoient grand audience, ne leur baillassent garnison plus puissant d'eulx. Nientmoins, soubdainement ilz se rapaisèrent sans cop férir. Et assez tost après, se départirent les seigneurs dessusdiz de ladicte ville de Tournay, doubtans la fureur d'icelui commun. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.4, c.1444-1453, 174). Lesquels, jusques au nombre de bien IIII mil hommes, saillirent sur les gens dudit grant maistre ; mais tous lesdits Bourguignons furent durement rechassez dedans la ville, à leur grant honte, perte et confusion ; de quoy le commun print si grant despit contre eulx, qu'ils leur volurent courir sus. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 377).

 

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Le menu commun : ...le second (...) avoit eu le gouvernement des canonniers ; le tiers (....) estoit capitaine du menu commun (LEFÈVRE ST-RÉMY, Chron. M., t.1, c.1462-1468, 357).

 

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"A Rome, le peuple" : ...pour ce que a force d'armes il avoit pris et occupé le gouvernement du commun, il fu reputé tyrant et, par le consentement de la greigneur partie des senateurs, il fu occis de petis pugions, c'est a dire de greffez d'argent, ou Capitole. (FOUL., Policrat., IV, 1372, 100).

 

-

[P. opp. aux nobles et au clergé] "Le tiers état" : Noblesse fuit encontre sa nature, Le clergié craint et cele verité, L'umble commun obeit et endure Fains protecteurs lui faire adversité (BAYE, II, 1411-1417, 220). ...j'ay intencion de exposer aucunes clameurs de vostre peuple, tant de gens d'esglise, nobles, que du commum (JUV. URS., Verba, 1452, 201). Aussi, monseigneur, tous les estas du payz, tant messeigneurs de l'Eglise, messeigneurs les nobles que le commun et la chose publique en general, vous devez avoir l'ueil à faire droit à ung chascun, à vostre povoir (BUEIL, II, 1461-1466, 27).

 

-

[P. opp., parmi les non nobles, aux clercs, aux notables, aux bourgeois, aux riches, aux hommes armés d'une troupe...] "Le petit peuple, les petites gens" : Estes vous marchant ou bourgoys Ou du conmun ? (Mir. fille roy Hongrie, c.1371, 76).

 

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Le menu commun : Plusours des habitans de notre ville de Dyjon, especiaulmant des marchanz ou dou menu commun, sunt venu plaintiz à nous... (Chartes communes Bourg. G., t.1, 1332, 61).

 

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Le petit commun : ...tu fais tout ung Du roy et du petit commun. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 227).

 

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Les gens de commun : Or oez, seigneurs chevalliers, Gens de commun, clercs, escuiers ! (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 208). Et s'estoient XXX. contre un De gens d'armes et de commun, Li Sarrazin, que Dieus confonde ! (MACH., P. Alex., p.1369, 157). ...plusieurs chevaliers, escuïers et autres gens de commun, tenans le [ parti ] et bien vueillans du roy nostre sire, ont esté prins et emprisonnez audit lieu de la Sousterrine, et mis à raençon (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 58). Et lors montent a cheval a moult belle compaignie, et vindrent en la cité ou dames et damoiselles, chevaliers et escuiers, bourgois et gens de commun les regardoient a merveille. (ARRAS, c.1392-1393, 187).

 

.

Le commun populaire. "La masse du peuple" : Par grans monceaulx le commun populaire Deça, dela, s'estoit voulu assire Pour hault crier en amour voluntaire Voire si hault qu'ilz ne se povoient taire: " Libertate, libertate, chier sire ! ..." (LA VIGNE, V.N., p.1495, 201).

 

b)

En partic. "Le peuple d'une ville, d'un bourg" : Mes amis, pour tout le conmun De ceste cité assembler, Faites le saint un cop sonner (Mir. emp. Julien, 1351, 184). Ce fist li roys à leur priere, Car d'amour certeinne et entiere Le commun de Venise amoit Et ses bons amis les clamoit. (MACH., P. Alex., p.1369, 119). Le commun et habitans de Bohuon ont acoustumé de prendre en la forest de Lions III chesnes par livrée du verdier (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 28). ...se le roy meismes en sa propre façon Ne se fust amonstrés à la colation Dou quemun de Paris, tantos et sans pardon Il estoient entrés en telle abusion Qu'il eussent mis à mort tous ciaus de la mason (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 276-277). Le quemun de Paris en ot grant marison. (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 335). ...et lors firent mectre sus le commun de Paris (LE BOUVIER, Chron. Ch. VII, C.C.J., c.1451-1455, 54-55).

 

-

"Le corps des bourgeois d'une ville ; l'assemblée communale" : A touz ceulx qui orront et verront ces presentes lettres, le maire et le commun de Poitiers, salut en Dieu nostre Seigneur pardurable. (Doc. Poitou G., t.3, 1354, 144). ...et le veandredi ensuiguant que fut le premier jour de jung, l'an que dessus, convoquey a son de la clouche du commun, a la maniere acustumee, le commun de Besançon (Doc. 1386. In : M. Bubenicek, Entre rébellion et obéissance, 2013, 683). ...lesquelles XLV quehues de vin madame la duchesse, par l'avis d'aucuns des gens du conseil de mondit seigneur et d'elle a fait donner et presenter de par elle et de par mondit seigneur aux personnes apres escriptes pour consideracion des bons et agreables services, afin qu'ilz soient plus enclin es affaires de mondit seigneur et mesmement à entretenir le commun de ladicte ville de Troyes à la bonne amour et adhesion de mondit seigneur (Comptes Etat bourg. M.F., t.2, 1420, 836). ...maistres Oudart Le Fer, ou nom et comme procureur du duc de Bourgongne, et Olivier Delebeque, procureur des advoé, eschevins, conseil, hoosmans, capitaines, et des XXVIJ personnes ordonnées pour le commun de la ville d'Ypre, presenterent à la Court les lettres royaux (FAUQ., II, 1421-1430, 171). ...ilz garderont et entretiendront ces presentes ordonnances au bien publique d'icelle nostre ville, en excerceant leurs dis offices bien, justement et loialement au bien de la justice et à l'onneur et prouffit de nostre dite ville et du Commun d'icelle (Hist. dr. munic. E., t.1, 1466,,, 107).

 

c)

"Ensemble des membres ordinaires d'un métier" : ...par l'assentement et accort de tout le commun dudit mestier (Industr. Paris F., 1345-1412, 299). ...li wyt preudomme, qui seront pris et esleu de le Vintainne et des mestiers de le drapperie, et li wyt aussi, qui seront pris et esleu des mayeurs des gheudes pour estre en l'office et du nombre des Vint et quatre de le ville, seront tenu et astraint de dire et jurer publiquement et solennelment, par leurs foys et sermens, est assavoir li wyt de le Vintainne, par devant le Vintainne, les dis mestiers de le drapperie et leur commun et chil des gheudes, cascuns par devant son mayeur et sen commun (Hist. dr. munic. E., t.1, 1356,,, 356).

 

d)

"Ensemble des personnes qui forment le service d'une grande maison, serviteurs" : ...trois tapiz vers contenans 18 aunes quarrés, armoiez aus quatre cornes aus armes dudit monsgr le Dauphin, pour les sommiers de son commun (Comptes argent. rois Fr. D.-A., I, 1352, 114). ...la despense du commun de Monseigneur qui estoit à Gavray, qui se compte par un item pour les mois de janvier, fevrier (Compte Navarre I.P., 1367-1371, 65). ...Regnault, barbier du commun dudit seigneur (Comptes roi René A., t.3, 1469-1470, 340). Lors [le roi] se mect devant, et le roy d'Espaigne (...) se mect après, avecq grant nombre de gens. Quant ilz furent en la salle du commun, ilz se esmerveillerent fort de la richesse de la tapisserie que illecq estoit. (Jehan de Paris W., 1494-1495, 73).

 

-

Gent de commun. "Suite d'un haut personnage" : ROY FLOIRES. Assez avez gent de conmun ; Mais pour estre voz conseillers Vous arez ces deux chevaliers Et ces deux massiers (Mir. Berthe, c.1373, 200).

 

e)

"Troupe" : LUCIFER. Suz, deables, horrible commun, Serrez voz portes a puissance... (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 349).

 

2.

"Individu pris sur un tel ensemble"

 

a)

"Homme du peuple (en partic. d'une ville)" : ...nuls sires ne se doit trop comfiier en conmun estragne ["qui lui est étranger"]. De trop petit on piert lor grasce et lor amour. (FROISS., Chron. D., p.1400, 451). Povre et riche meurt en corrupcïon, Noble et commun doivent a Dieu service ; Mais les nobles ont exaltacïon Pour Foy garder et pour vivre en justice. (CHART., B. Nobles, c.1424, 196). Et certes l'Empereur et tous les princes de l'empire, voyre les commungs et les paysans, estoient tous pour le chappitre de Coulogne et à l'encontre de leur evesque (LA MARCHE, Mém., III, c.1470, 98).

 

Rem. Prov. : Ce n'est riens d'aide ou faveur de commun : fols est qui s'y fie ; C'est dure chose de commun rapaisier ; Qui sert commun, nul ne le paye (Prov. H., 80b-81a).

 

-

[En partic., par oppos. aux notables] : Li grant bourgois (...) se traisent d'une part (...). Quant li aultre commun veirent che, il se commencièrent a esmouvoir et à criier durement sus les grans bourgois. (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 95).

 

b)

"Homme ordinaire, qui ne se distingue par rien d'éminent" : Symonides le Second, Grecq, lequel se delecta entierement en philozophie et en la theorique et speculative des estoilles en ce temps, en maniere que nul de son temps ne fut plus estimé, ne plus apprecié sçavoir, et trouva moïen de recouvrer les livres du grand Menesserab qui fist tant de jugemens en Syrie, au moïen desquieux semblablement se mist à la pratique et experience de jugemens et en fist choses moult estimées du commun et aussi des grans. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 42 v°).

 

3.

"Être identique aux autres de la même espèce"

 

-

[A propos des anges] : ...Car les anges sont crëatures Nobles, dont le parfait commun Ne devoit pas descendre d'un Par quelque generacion (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 42).

 

-

Au plur. "L'ensemble, la totalité des êtres" : Considere donc, ma benigne ame, que les communes choses sont donnees a communs et les specialles es speciaulx et les singulieres es singuliers. Et en trestoutes ces choses il t'a demonstré grant signe d'amour, quant il t'a donné choses communes avec ceulx qui sont communs avec tous et t'a donné choses speciales avec ceulx qui sont particuliers et si t'a donné singuliere chose a toy singulierement par especiale et singuliere amour qu'il a a toy. (CRAP., Cur Deus, De arrha B.H., c.1450-1460, 272).
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Robert Martin

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