C.N.R.S.
 
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     EMPRISE     
FEW IV *imprehendere
EMPRISE, subst. fém.
[T-L : emprise ; GD : emprise ; AND : emprise ; FEW IV, 602a : *imprehendere ; TLF : VII, 991b : emprise]

A. -

"Fait d'entreprendre, ce qu'on entreprend"

 

1.

"Entreprise, projet, action" : Si qu', amis, je t'ay en couvent Que ce n'est riens fors umbre ou vent. Et qui le fait pour lui prisier Ou pour lui plus auctorisier, Y fait mal, car si fole emprise Fait li homs, si tost qu'il se prise, Qu'il boute orgueil et vanité En sa povre fragilité. (MACH., C. ami, 1357, 133). Li roys avoit fait une emprise, Einsois qu'Alixandre fust prise, Par son conseil que bon tenoit, Que se Dieux grace li donnoit Que la cité fust conquestée, Il passeroit, la teste armée, Tout outre pour un pont deffaire, Qu'est entre Alixandre et le Quaire. (MACH., P. Alex., p.1369, 91). Et s'avons Dieu de no partie, Qui a ceste emprise bastie, Que ja ne se fust soustenue S'elle ne fust de lui venue : Il s'en puet aler qui vorra, Et qui bien vuet, il demourra. (MACH., P. Alex., p.1369, 105). ...je me fas fort Que Dieux si nous aidera Que nostre emprise a bien venra (Mir. fille roy, c.1379, 71). Or sa, mes amis, puisque nous Avons pri congié de mon pere, E ausi de ma damme ma mere, Pansons d'acomplir noustre emprise. (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 45). Quelque maniere ou menace qu'elle face, il ne veult laisser son emprinse, mais de plus en plus la pourchasse [Un seigneur harcèle une des servantes de sa femme] (C.N.N., c.1456-1467, 74). ...tarda tant dehors qu'il se pensa bien qu'il la trouveroit nue et couchée. Mais il faillit a son emprinse. [Un mari veut punir sa femme qui l'a trompé] (C.N.N., c.1456-1467, 264). ...pour tousjours savoir et entendre de voz bonnes nouvelles et conseil, lequel je vueil bien ensuivre et selon icelluy conduire mon affaire et emprise (Lettres Ch. VIII, P., t.4, 1495, 156). Mais quant a la besoigne faire, Des choses ferons impossibles ; Allons nostre emprise parfaire. (LA VIGNE, S.M., 1496, 515).

 

-

Estre au-dessus de son emprise. "Avoir toute facilité pour réaliser son entreprise" : ...en gerre il n'i a nulle pité ne merchi ; et li varlet qui poursievent les gens d'armes, font plus a la fois, qant il se voient au desus de lor emprise, que on ne lor conmande. (FROISS., Chron. D., p.1400, 439).

 

2.

P. méton.

 

a)

"Esprit d'entreprise, initiative"

 

-

De grande/haute/hardie emprise. "De telle valeur (souvent militaire), qui manifeste telle capacité de prouesse, d'nitiative" : Mais, s'il puet, avec lui menra Les chevaliers et l'amiraut De Rodes, qui moult scet et vaut, Et qui est de tres grant emprise, Dont chascuns l'aime et loe et prise. (MACH., P. Alex., p.1369, 57). Je vous di bien qu'il n'a signeur En Turquie de li gringneur, Ne qui face tant à doubter. De tous se fait trop fort doubter. C'est uns homs de trop grant emprise, Dont maint home le loe et prise. (MACH., P. Alex., p.1369, 163). ...li François (...) avoient gens de grant fait et de hardie emprise à le main. (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 126). ...li sires de Poussances (...) et li sires de Vertaing (...) doi baron de haute emprisse et de grant hardement, s'en vinrent l'un sus l'autre et tout à piet, tenant les glaves acerées. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 35). ...le roy est ung sire de grant emprinse et de haulte et de noble voulence. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 235). ...du cappitaine de la ville, qui moult bien advisa l'ost et le maintieng des gens, qui moult le prisa en son cuer, et bien dist que c'estoient gens de fait et de grant emprise, quant si pou de gent emprenoient a contrester contre l'effort du soudant qui avoit plus de cent mille Sarrasins. (ARRAS, c.1392-1393, 92). ...toutes prouesses et emprinses adventureuses cesserent grant tamps pour ce que ceulx qui de nouvel les devoient recommencier n'apparoient point de tant haulte emprinse (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 482). Car madame Jaque de Baviere, qui succeda à toutes les contez et seignouries dessusdictes, fut femme de sa voulenté joyeuse et de grande emprinse, et toutesfois saige et subtile pour sa voulenté conduire selon son desir (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 91).

 

b)

"Vaillance, audace" : ...Car se Hardemens et Emprise Te font emprendre aucune emprise, Se tu en voes a bon chief traire Et toy garder de tout contraire, Si met Atemprance et Avis Ensamble, car il ont avis Plus grant que nuls des aultres n'aient (FROISS., Dits Débats F., 1363-1393, 108). ...Si se fierent, sus les escus, Des lances as bons fers agus. Par la force de leurs chevaus Et l'emprise des bons vassaus, Les lances volent en tronçons. (FROISS., Méliad. L., t.2, 1373-1388, 180).

 

-

Homme d'emprise. "(Homme) vaillant, audacieux" : Et estoient bien en l'aide dou roi d'Engleterre .XLM. homnes, toutes gens de fait et d'emprise, a ce que il monstroient. (FROISS., Chron. D., p.1400, 324).

 

-

[D'une expression] De peu d'emprise. "De peu d'audace, peu courageux" : Et vostre parler est tant couard et de tant peu de emprise et n'avez tant de hardement que puissiez dire : "J'ay tel inconvenient." (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 116).

 

-

Faire qqc. à l'emprise de qqn. "Faire qqc. à l'initiative de qqn" : Et sachiez que le roy tenoit les champs aucques ou millieu des pors de son royaume, pour plus tost estre ou les Sarrasins arriveroient pour prendre terre. Et faisoit le roy Uriien si grant semblant qu'il donnoit a ses gens si grant cuer que avecques lui et a son emprise, ilz eussent bien osé combattre de X mille que ilz estoient, que de pié, que de cheval, cent mille payens. (ARRAS, c.1392-1393, 128). Par l'emprise de Douls Samblant, L'autre ier au parler s'enhardi, Mes tantost s'en racouardi, Car vo varlet avant salirent (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 191). ADAM. Mal en vendra, je le suppose, Mais, pour ce qu'a vous amour ay, A vostre emprinse en mengeray, Seulement pour sçavoir que c'est. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 19).

 

-

Donner emprise à qqn de + inf. "Encourager qqn à" : Autres, par encliner et tenir en reverence et chierté lez puissans dissolus, leur ont doné cueur et emprinse de soy estudier a vice, et leur ont osté la vergoigne de leur deshontee dissolution, que par leurs favorisans ont par volenté ensuye et desiree. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 53).

 

c)

"Façon d'agir et d'être, caractère, naturel" : ...Et celx qui cognoistre la doivent [la vérité] Ne la prisent ne ne reçoivent Plus que le porc les gemmes prise, Ainz sunt gens de si fole emprise Qu'il ne daignent mes oïr dire Fors truffles qui les face rire Et delecter en vanité. (Tomb. Chartr. W., c.1337-1339, 116). A ! mort, Que tu es d'oultrageuse emprise, Qui si tost ceste dame as prise ! (Mir. fille roy, c.1379, 23). Et quant vint à l'aborder, le seigneur de Ternant qui vit la contenance, la chaleur et la fiere emprinse de son adversaire, qui venoit sur luy comme pour rencontrer des corps avec leurs bastons, luy, pourveu de son sens, tout asseurement desmarcha en costiere, tellement que Galiot ne trouva riens devant et passa tout oultre, comme celluy qui marchoit de toute sa force, et, au passer, le seigneur de Ternant haulsa la hache et atteindit Galiot entre col et teste, et luy donna si grand cop qu'il le fit tout chanceller (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 74).

B. -

ART MILIT. "Expédition militaire, attaque, assaut" : Li princes eu palais monta, Et de chief en chief li conta De l'esquermuche, et leur emprise ; Comment la montaingne fu prise, Et comment leurs engins gaingnierent Et dedens Courc les amenerent... (MACH., P. Alex., p.1369, 172). Ensi fuist Castille conquise, Par la puissance et par l'emprise Monsire Bartrem de Claikyn. (HÉRAUT CHANDOS, Vie Prince Noir T., c.1385, 98). Si fisent chil qui dedens se tinrent pluisieurs bielles yssues et emprises sour chiaux de Valoingne. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 73). ...les hommes de la ville qui point ne pensoient que Franchois deussent faire telle emprinse estoient encoires en leurs lis. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 194). ...par ses emprises Si ot maintes terres conquises (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 203). ...le duc d'Orleans qui estoit en expedition publique en Guienne, et tenoit le siege devant Bourc près de Bordeaux (...) avoit defaut de finance, et toutevoie ne tenoit qu'à finance qu'il n'eust bonnes nouvelles de son emprise (BAYE, I, 1400-1410, 182). À Aymé Bourgois, escuier d'escuierie de mondit seigneur, la somme de quatre vins frans (...) pour enquerir et rapporter à madite dame l'emprise que l'en disoit que les princes et seigneurs de l'Alemaigne faisoient pour porter dommaige à mondit seigneur et à ses pais et subgiez (Comptes Etat bourg. M.F., t.2, 1419, 342). ...il convenoit doncq que par aulcune emprise et puissant armee encontraire de Edouard regnant ilz [les Français] alassent a secours a la reyne deboutee de sa couronne par descendre mesmes en Angleterre (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 292). Si firent les Zassons leur emprise secretement, et par une noyre nuyct se partirent trois cens hommes à pied ou cheval, et moictié d'assault, moictié d'emblée, gaignarent le chastel de la Grange et se retraïrent à grant dangier ledit de la Plume et ses compaignons en une tour, et là se deffendirent moult vaillamment et plusieurs blessarent de leurs ennemis, et furent de leur part presque tous blessez et navrez. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 22). ...dist aussi de l'excercite de la croisée et de leur venue ès confines de Turquie (...) où fut faicte par les chrestiens grande desconfiture de Turs, et aussi de la seconde emprise qui fut à Nichée, où semblablement les payans furent vaincuz. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 113 r°).

 

-

"Action entreprise contre un adversaire (dans un combat singulier)" : Mais l'entrepreneur mit la main dextre à la hache de son compaignon et moult asseurement se deffit de son emprinse, et de ce cop rua le bras au col de son compaignon (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 179). ...mais l'escuyer, qui moult estoit puissant, rabatoit et se deffendoit de l'emprinse de son compaignon, et d'ung rabat rompit la dague de la hache dudit messire Jaques (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 195).

 

-

Au plur. "Exploits" : Or vous ay dit et raconté Le scens, l'onneur et la bonté, Le hardement, la grant vaillance, Les grans emprises, la prudence, La gentillesse, la noblesse Dou roy de Chypre, et la largesse, Et comment il usa sa vie. (MACH., P. Alex., p.1369, 246). ...amours a tant de puissance qu'elle fait aux couars faire grans emprises, et de telles que ilz n'oseroient penser. (ARRAS, c.1392-1393, 94). Et furent moult loees et reconmendees dedens et dehors les appertisses et vaillances a messire Gautier de Manni, car par li et par ses emprises avoit esté tout fait. (FROISS., Chron. D., p.1400, 554). Et le hardement de toutes emprinses ou on pouoit acquerre loz et pris s'acompaigna avec moy et debouta arriere de moy toute couardise (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 145). ...failli cuer que vous estes, d'ou sont venues les grans vaillances, les grans emprises et les chevalereux faiz de Lancelot, de Gauvain, de Tristan, de Guron le courtois, et des autres preux de la Table Ronde ? (LA SALE, J.S., 1456, 9).

 

-

L'emprise (de qqn) est + adj. poss. "Quelqu'un a réussi son entreprise" : ...le premier des cappitainnes qui vint à Ousach, c'estoit Perrot Le Bernois pour monstrer que l'emprinse estoit sienne et aviser les compaingnons. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 206).

 

-

Porter emprise d'armes. "Prendre les armes, partir pour la guerre" : ...ce bon chevalier, pour mieulx valoir et honneur acquerre et embrasser, se partit de sa marche, tresbien en point et accompaignié, portant emprinse d'armes du congé de son maistre. (C.N.N., c.1456-1467, 246).

 

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Male emprise. "Mauvais coup" : ...IIIIe homme darmes [l.d'armes] et IIII archiers alans en Avrenchin pour resister à la male emprinse que avoient faicte les Bretons qui avoient prins Champeaulx (Compte Navarre I.P., 1367-1371, 273).

 

-

P. métaph. "Assaut amoureux" : Et elle, qui demandoit estre assaillie et combatue, ne laissa pas pourtant l'emprinse encommancée (C.N.N., c.1456-1467, 151).

 

-

Folle emprise. "Témérité, audace" : ...dont seulement la fierté de l'ordre, la resplendisseur des pompes et des armures, la contenance des estendards et des enseignes, estoit souffisant pour esbahir et pour troubler le hardement et la folle emprinse du plus hardi peuple du monde (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 265).

C. -

TOURN.

 

1.

"Engagement pris par un chevalier auprès d'une dame d'accepter une sorte de soumission symbolique dont il ne sera délivré qu'en combattant en tournoi, selon des modalités précises" : " -- "Mon seigneur," diz je, "il est vray que je suis envoiez de par un noble et renommé escuier du royaume de France nommé Jehan de Saintré, lequel au premier jour de ce darrain mois de may par veux faiz presens pluseurs haultes et nobles dames et damoiselles, seigneurs, chevaliers et escuiers a grant nombre prinst emprinse de porter en son bras senestre un tres riche bracelet d'or paré de pierres precieuses, et ce par l'espace d'un an et jusqu'a tant qu'il treuve aucun chevalier ou escuier de nom et d'armes sans reprouche qui le veulle deliver des armes a cheval et a pié comme ceste lectre contient, si lui porteray le seelé de celui qui le devra delivrer, et pour ce faire il vient en ce roiaume tout premiers en la court de ce tresnoble roy, ou il sera un mois entier, actendant sa delivrance par un chevalier ou escuier tel que j'ai dit, et ou cas qu'il ne le trouvera cy, il yra semblablement a la court du roy de Navarre, puis au roy de Castille, et puis de Portugal, a chascune court demeurer un mois se il ne treuve son expedicion ainsin que j'ay dit. (LA SALE, J.S., 1456, 101). Laquelle chose venue à la congnoissance du seigneur de Charny et de ses compaignons, tindrent conseil en la chappelle de la Thoison, et proposa le seigneur de Charny, remonstrant à ses compaignons comment le temps des six sepmaines se passoit fort, et n'avoient nulles nouvelles, ne n'estoit apparent que plus ou peu fussent chargez d'armes nouvelles, et comment, à leur requeste, le duc leur avoit donné congnoissance de toutes emprises d'armes durant le pas, concluant que, par honneur, l'emprise du chevalier ne povoit ou debvoit plus avant aller, sans estre levée par l'ung d'eulx (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 324). Mais riens n'y fut entreprins, ny ne survint audit pas aultre chose pour icelluy mois, ne jusques au mois de septembre que l'an de l'emprinse s'expiroit, et lequel mois de septembre fut honnorablement et chevaleureusement executé, comme vous ourrez cy après. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 173).

 

-

Accomplir son emprise : ..."nostre souveraine dame, il a pleu au roy moy donner congié de acomplir mon emprinse d'armes, dont veez ci le bracelet, a l'aide de Dieu, de Nostre Dame et de monseigneur Saint Michiel l'Ange, ainsin que en ceste lectre d'armes est contenu..." (LA SALE, J.S., 1456, 86).

 

-

Porter par emprise un objet (qui témoigne de l'engagement de celui qui le porte) : [Messire Henry au duc de Bourgogne :] Mon tresredoubté seigneur, je voy que ceans on murmure sur ce volet que je porte a mon bras, et pense on que je le porte par emprinse contre aulcun de gens. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 136). Premierement, le seigneur de Charny fut, près du temps et espace d'ung an, accompaigné des seigneurs et nobles hommes escriptz et nommez cy après, et chascun en fournissant ses armes, et portoient tous par emprise chascun une garde devant, à la maniere de la garde d'un harnois de jambe, et la portoient au genoul senestre les chevaliers dorée, et semée de larmes d'argent (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 291).

 

2.

P. méton.

 

a)

"Objet concret porté par un chevalier (ou par son représentant), qui le tient de sa dame, comme insigne du défi formulé dans la lettre d'emprise, et signifiant que ce chevalier se soumet à sa dame et se propose de combattre en l'honneur de celle-ci" : Et quant vous serez aucunement du corps plus puissant, alors veul que entreprenez aucunes gracieuses armes, dont porterez l'emprinse que je vous donray (LA SALE, J.S., 1456, 72). Et lors Saintré tres humblement lui dist : "Nostre souverain seigneur, il a pleu a Vostre Grace estre content que je portasse l'emprinse de ce bracelet pour acomplir armes a cheval et a pyé que vous veistes par escript, si vous vien tres humblement supplier que vostre bon plaisir soit moy donner congié tel que le XVe jour du mois de juillet, Messeigneurs mes freres et mes amis qui cy sont, qui de leurs courtoisies me veulent accompaignier, puissons a l'aide de Dieu, de Nostre Dame et de monseigneur Saint Michel l'Ange, partir et commencier mon voaige." (LA SALE, J.S., 1456, 94). Et en ce disant tira son emprinse de sa manche, enveloppee d'un delié couvrechief, et en la lui presentant la cuida baisier. (LA SALE, J.S., 1456, 233). ...nous porterons ceste emprinse d'armes sur noz espaules senestres que cy veez, par l'espace de trois ans, et le surplus ainsin que en ceste lectre de noz armes pourrez a plain veoir (LA SALE, J.S., 1456, 237). ...deux chevaliers, compagnons d'armes, se vinrent présenter aux deux princesses droit-là assemblées, et venus devant elles en grant révérence, leur requirent que pour l'honneur de noblesse et de chevalerie il leur plust, du gré et consentement de leurs maris, leur attacher à chascun l'enseigne d'une emprise qu'avoient mises sus pour faire armes (...). Sy reçurent les dames leur requeste agréable, et en l'honneur et par révérence du duc leur maistre et de leurs maris, leur attachèrent leur emprise, dont l'une fut un gant noir, lachié d'une d'une chaînette d'or qui tournoit autour du bras senestre (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 454). ...la contesse fit demander par son chevalier lyseur le contenu des chappitres, lesquelz furent bailliéz prestement ; et iceulz leuz, ladicte contesse, par aveu et ordonnance du duc qui la estoit pres, donna congié que le More [représentant Guillame de Moullon] desployast son emprinse, et que cescun y touchast qui voulsist. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 128). Meriadec (...) luy dist : "Messire Henry, comment l'entendez vous ? Il samble a vous veoir que vous ayez le ceur soubz l'ele et que vous en volez a qui que ce soit. Toutevoyez Monsieur vous a il donné congié de porter emprinse ?..." (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 133). [Messire Henry au duc de Bourgogne :] Mon tresredoubté seigneur, je voy que ceans on murmure sur ce volet que je porte a mon bras, et pense on que je le porte par emprinse contre aulcun de gens. Monsieur, je ne vous en ay pas demandé grace de la porter, de quoy je vous prie mercy se le mespris y est. Mes, Monsieur, ce n'est pas emprinse, mes l'ay en commandement de ma dame de le faire ainsy (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 137). ...et quant le seigneur de Ternant seut l'intencion dudit Galiot et veit ce beau personnaige, et entendit la renommée de l'estrangier, luy, qui de longue main avoit desiré et quis de trouver party et sorte pour faire armes, se deslibera de executer à icelle fois ce que tant avoit desiré, et, par le congié du duc de Bourgoingne, son seigneur et son maistre, il chargea pour emprise une manchette de dame faicte d'ung delié volet, moult gentement broudée, et fit actaicher icelle emprise à son bras senestre, à une esguillette noyre et bleue, richement garnye de diamans, de perles et aultres pierreries (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 65).

 

-

Lever/charger (une) emprise. "Porter une emprise (façon de s'engager à combattre en l'honneur de sa dame)" : Si est vray que le chevalier alleman, homme de bon vouloir et de la retenue du duc, le jour que jousta porta ung volet broddé (...) ; et tout tel que l'avoit porté a la jouste, le soir du banquet, en pleine salle, vint atout lyé entour de son bras (...). Si commencerent gens a murmurer (...) car n'avoit onquez esté veu en nul ostel de prince [que chevalier] levast emprise sans aveu de cely (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 133). Et en icelluy temps messire Diago de Valiere, le chevalier d'Espaigne, qui desjà avoit fait armes au pas à l'encontre de Thibault de Rougemont, et après congié et licence du duc, leva et chargea une emprise d'ung volet actaiché à son costé senestre, et le pourta à court et par la ville de Dijon publicquement. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 324). Le chevalier, qui moult courtois estoit, les marcia moult honnorablement, et dit qu'il avoit chargé et levé son emprise par commandement de sa dame, pour accomplir certains chappitres d'armes qu'il avoit cloz et seelez d'elle (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 325). Lors sault avant Jaques de Challant, seigneur de Manille, et requist au seigneur de Charny et à ses compaignons, moult humblement, que luy fessent ceste grace qu'il peust lever icelle emprise. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 325). Et prestement qu'il eust son emprise chargée, il envoya le roy d'armes de la Thoison d'or devers ledit Galiot de Baltasin, pour lui signiffier et dire de par luy qu'il avoit chargé et eslevé une emprinse en intencion de faire armes, et pour luy l'avoit il prinse et chargée, en esperant d'estre par luy accomply de son desir (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 65).

 

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Empl. pronom. à sens passif : ...et conclurent pareillement que se emprise ou requeste d'estrangiers se levoit en l'hostel du duc en celluy temps, par accord du prince, iceulx gardans le pas en debvoient avoir la congnoissance avant tous aultres. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 296).

 

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Prendre une emprise de qqc. "Décider de porter qqc. " : Et puis s'en vont de l'une a l'autre et prenent une emprinse d'une jarrectiere, d'un bracelet, d'une rondelle ou d'un navet - que sçay je, ma dame ? (LA SALE, J.S., 1456, 277).

 

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Lever l'emprise/toucher (à) l'emprise (de qqn). "Toucher à l'emprise d'un chevalier, l'enlever, l'arracher, signe d'acceptation du combat" : La, devant tous, Saintré leva l'emprinse de messire Nicole, et Boussicault de Galias, et lors le roy donna le jour. (LA SALE, J.S., 1456, 183). ...et ces douze droit-cy ayans touché à l'emprise que portoit le More, ne voulut pas le duc [que] plus avant touchast nullui [parce qu'il avait besoin de ses chevaliers pour d'autres tâches] (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 463). [Le duc de Bourgogne :] Puis qu'il a si grant fain de besongnier, il convient bien qu'il en ait ung. Ja est la troizieme ou IIIIe fois qu'il me tempte, et ne cesse de me presser que je luy baille homme pour faire armes. Meismes a Lille derrenierement voult aller lever l'emprinse de messire Pierre Wast et le faire lever en pleine table (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 134). ...et ilz luy offroient liberalement que celluy qu'il choisiroit leveroit son emprise, et luy accompliroit et fourniroit son desir en ceste partie. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 325). Moult joyeux se monstra ledit Galiot, quant il entendit qu'il seroit depesché en la maison de Bourgoingne de ce qu'il queroit, et ne faillit pas à venir, et s'adgenoilla devant le duc de Bourgoingne, luy requerant à genoulx qu'il luy donnast congié et licence de toucher à l'emprinse que pourtoit le seigneur de Ternant, et le bon duc le fit lever et luy donna le congié. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 66). Les aultres chevaliers furent assiz aux aultres tables, et plusieurs chevaliers, orateurs et embassadeurs de divers royaulmes et pays avecques eulx, et là fut assis messire Jehan de Bonniface, chevalier arragonnois, à qui Jaquet de Lalain avoit touchié l'emprinse, et dont les armes se debvoient faire en celle sepmaine. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 94). ...et sembloit que, par ces deux raisons, plus de nobles hommes seroient advertiz de son emprise, et pourroient plus de nobles hommes venir à son pas, et toucher à sa noble emprise (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 143). Et se celluy qui vouldra lever madicte emprinse ne me vouloit venir combatre devant mondit seigneur ou son commis, je l'iray combatre devant le Turc, moiennant que je puisse avoir bonne seurté. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 393).

 

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Oster l'emprise à qqn : Quant le XXXe jour fut venu aprés ce que Saintré eust osté l'emprinse au seigneur de Loissellench, et jour ordonné de commencier leurs armes, le seigneur de Loissellench fist ce matin soubz le hourt du roy porter XX grosses lances toutes armees fors de fers, sans avantaiges, ainsin que en tel cas appartient. (LA SALE, J.S., 1456, 152).

 

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Fournir à l'emprise. "Relever le défi" : Le lundi, quatorziesme de juillet suyvant, se presenta devant le conte de Nevers, juge commis en ceste partie, ung escuyer nommé Thibault, seigneur de Rougemont, lequel fut ordonné par les gardans le pas pour fournir à l'emprise dudit messire Diago de Valiere. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 306).

 

b)

"Texte comportant la formulation du défi, les exigences pour le déroulement du combat" : ...nous, accompagné de seize autres chevaliers et escuiers de nom et d'armes (...), porterons en la jambe senestre chascun un fer de prisonnier pendant à une chesne, qui seront d'or pour les chevaliers, et d'argent pour les escuiers, par tous les dimanches de deux ans entiers, commencans le dimanche prochain après la date de ces présentes, ou cas que le plus tost ne trouverons pareil nombre de chevaliers et d'escuiers de nom et d'armes sans reproche que tous ensemble nous vueillent combattre à pied jusques à oultrance armez chascun de telz harnois qu'il luy plaira portant lance, hache, espée et dague ou moins de bastons de telle longueur que chascun vouldra avoir pour estre prisonniers les uns des autres par telle condition, que ceux de nostre part qui seront oultrez, seront quictes en baillant chascun un fer et chesne pareils de ceulz que nous portons ; (...) avons (...) promis de accomplir l'emprise dessus déclarée (Ch. VI, D., t.1, 1415, 371). Puis par deux heraulz et un varlet fist a messire Enguerrant porter ses deux haiches couvertes, pour en prendre le chois, ainsin que en son emprinse estoit contenu (LA SALE, J.S., 1456, 122). ...l'emprise ne portoit que joustes à roches, lesquelles il convenoit faire devant les dames qui n'estoient point droit-là, mais estoient à Quesnoy en Haynau (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 463).

 

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Lettre d'emprise. "Texte comportant la formulation du défi, certaines exigences pour le déroulement du combat" : "...Et qui vouldroit regarder a la rigueur, quelque bien qu'il en venist, il en devroit bien estre pugny qui le fait autrement." Et en disant icelles parolles print leur lectre d'emprinse (LA SALE, J.S., 1456, 237).

 

3.

Emprise (d'armes). "Tournoi" : ...et fit publier ung an devant, par tous les royaulmes chrestiens, une emprinse d'armes, et y envoya roys d'armes, heraulx et poursuivans à ses despens, en intencion que luy, treziesme de nobles hommes, garderoient un pas, le temps et terme de six sepmaines, pour combatre et faire armes, fust à pied fust à cheval, à tous nobles hommes venans à icelluy pas. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 283). ...et fist unes gracieuses lettres adressant à messire Jaques de Lalain, entrepreneur, luy confessant qu'il l'avoit veu par aucunes fois combatre en icelluy pas, et qu'il l'avoit veu en si chevaleureuse contenance, et avec tant d'adresse, de force et de vertu de chevalier, que luy, entrepreneur, garde et deffendeur d'icelluy noble pas, enluminoit et eslevoit si haut la renommée dudit pas, qu'il desiroit, sur tous les biens qu'il povoit jamais acquerir, donner confort à la dame de Plours, estre du très heureux nombre des combatans en ceste emprinse, et soy esprouver à l'encontre de luy, que l'on tenoit et reputoit en toutes parts chevalier tout rempli de vaillance, de vertu et de grace, luy requerant moult humblement qu'il luy donnast licence de povoir executer son emprinse (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 175).

 

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Armes d'emprise. "Combat livré dans un tournoi" : "...les tres nobles previleiges de honneur mondain requierent aux nobles cuers que par le tresnoble mestier d'armes chascun de bien en mieulz a son pouoir se employe de acquerir la tresnoble grace d'honneur, soit en armes d'emprinses ou soit en guerres guerroiables et en toutes autres honestes façons..." (LA SALE, J.S., 1456, 103).

D. -

"Partie de jeu" : Auquel lieu et jour, ledit Barraut, suppliant, avoit fait partie à jouer à la paulme, lui tout seul, contre ung nommé Micheau Thipheneau, dudit lieu, et Guion Bordier, frère dudit Jehan Bordier ; et estoit l'emprinse telle que ledit Barraut, suppliant, jouoit à l'encontre des autres deux, chacune allée pour ung cartier de chevreau. Et advint que ledit Barraut, suppliant, perdit deux emprinses, entre lesquelles ilz furent en debat d'une chasse que ledit suppliant avoit jouée (Doc. Poitou G., t.9, 1451, 210).
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

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