C.N.R.S.
 
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     RETIRER     
FEW VI-1 martyrium
RETIRER, verbe
[T-L : retirer ; GDC : retirer ; FEW VI-1, 403a, 410b : martyrium ; TLF : XIV, 1023a : retirer]

I. -

Empl. trans.

A. -

"Tirer en arrière qqn ou qqc. (en partic. pour faire sortir qqn ou qqc. de qq. part)" : Car tout ensi que le contrepois tire La corde a lui, et la corde tiree, Quant la corde est bien a droit atiree, Retire a lui et le fait esmouvoir, Qui aultrement ne se poroit mouvoir. (FROISS., Orl., 1368, 85). Et aussi aucune foiz les boucs ysarus ne veulent grater en mi les cuisses de leurs cors et boutent aucune foiz si fort qu'ilz les se mettent par les fesses et ne les peuent retirier (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 72). ...et puis mectre la queue de sangler bien chaude en plat pardessus vostre beuf, qui primo soit rosty, ou bouté en eaue boulant et retiré tantost, pource qu'il est plus tendre que cerf. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 211). Il semble que sans parboulir l'en la doit mectre en eaue boulant, et tantost retirer et larder au long (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 211). ...et convint que trois des autres galées venissent retirer la nostre en mer : sy ne fut point dommagée, car c'estoit sablon, mais elle avoit esté dommagée le soir devant, par une fortune qu'il fist en mer, moult grosse (Voy. Jérus., c.1395, 8). Et avint que messires Henris de Flandres, (...) tenoit son glave a un petit pennon de ses armes, et le lançoit a la fois dedens et puis le retiroit a lui. (FROISS., Chron. D., p.1400, 322). ...estrange felonie seroit vouloir l'omme estre plungié en l'eaue pour l'en retirer, ou qu'il fust batus pour le revenchier, ou chacié hors pour le herbergier (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 150). ...[elle] voulut entrer en la chambre, et son amy la retiroit a force (C.N.N., c.1456-1467, 195). Je suis au fort contente, dist la fille, de la mettre [la "lance"] et bouter ou il fault, mais si elle devoit y pourrir, je ne l'en retireray ja. [Cont. grivois] (C.N.N., c.1456-1467, 501). Et, incontinent qu'ilz furent ainsi montez que dit est, près de partir et singler en mer, lesdiz Bourguignons, Anglois, Picars et autres, voians qu'ilz avoient longuement esté à l'encre sans avoir riens fait et mengié tous leurs vivres, retirerent leursdiz anchres et s'en retournerent à leur duc sur trayne boyau et sans avoir riens fait ; de quoy il eut bientost ris son saoul, pour ce qu'ilz avoient perdu grant temps et si avoit beaucop fraié et despendu à l'avitaillement desdiz navires et au soudoy desdiz gens de guerre. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 244).

 

-

Retirer arriere/retirer hors : Et, si son limier tret au vent, come aucuns font voulentiers, espiciaument ceulx qui suyvent la teste levee, il ne le doit pas suyr mes doit demourer tout coy et le retirer arriere aux routes et li fere mettre le musel a terre (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 174). Et puis fut le corps dudit d'Esternay retiré hors de ladicte riviere et mis en terre en l'eglise Notre-Dame de Louviers, où ilec fut fait son service. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 149).

 

-

Retirer la table (pour s'y asseoir plus facilement) : Madame voult faire retirer la table pour l'asseoir, mais damp Abbés dist : "Ja Dieu ne plaise que la table en bouge ja pour moy" (LA SALE, J.S., 1456, 249).

 

-

[La courtine, au théâtre ou dans un tournoi] "Tirer (la courtine, une fois le spectacle terminé)" : Ainsy fu la courdine retendue retirée, et le mistère quant ad ce achevé. (ESCOUCHY, Chron. B., t.2, a.1465, 146). ...et à tant fut la courtine retirée, et cessa ce mistere pour celle fois (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 358). ...et la courtine fut retirée, et mis le brevet dehors, tel qu'il estoit accoustumé, dont la teneur s'ensuyt... (LA MARCHE, Mém., III, c.1470, 168).

B. -

Au fig.

 

1.

Retirer qqn

 

a)

Retirer qqn de qqc. "Détourner qqn de qqc." : Deyanira doncques, soy hastant de trouver nouveau remede ains que Yole feust receue en l'ostel d'Ercules, et entre pluseurs conseilz elle delibera en son couraige envoier celle chemise au dict Hercules sanz aulcun mal penser fors afin que elle le retirast et refroidist de l'amour Yole (PREMIERFAIT, Cas nobles hommes G., 1409, 166). ...c'estoit le bien et honneur de son maistre, qui le retireroit de plusieurs menues folies, ausquelles espoir trop se donnoit. (C.N.N., c.1456-1467, 80). ...puis qu'elle avoit encommencé a faire la folye (...) fort seroit de l'en retirer (C.N.N., c.1456-1467, 419). Cestui fut stippendié d'un grant prince, tirant et mal condicionné, et, voyant qu'il ne le povoit corriger par nulle discipline, ne retirer par nul enseignement de ses mauvaises inclinacions, à ceste cause, pour exemple familliere, il lui composa le jeu des eschetz (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 45 v°).

 

Rem. MAMEROT, Romuleon D., 1466, gloss.

 

b)

Retirer qqn de (captivité). "Délivrer qqn de" : ...et est bien à presumer que, entre lesdicts enfans et peuple d'Israël, que Dieu avoit retirez de captivité et esleuz sur tous autres et les avoit en singuliere estime que en .XL. ans qu'ilz furent aux desers ne trouvassent plusieurs experiences bonnes et honestes (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 25 r°).

 

c)

Retirer qqn à soi. "Attirer qqn à soi, se le gagner, le prendre à son service" : Quant il savoit quelque homme de vertu, il le retiroit à luy. (BAUDE, Eloge Ch. VII, V., p.1484, 129). Cestui concorda avecque ung nommé Alcyneon de Grece, touchant la grant pestillence, qui fut tantost après quasi universale, dont ledit Angele fut moult apprecié et le retira le pappe à lui pour l'experience de sa science (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 101 r°).

 

2.

Retirer qqc.

 

a)

"Garder en réserve, laisser subsister qqc." : ...on ne doit pas tant mengier que l'estomac soit totalement plain, et l'apetit totalement suffoqué, mais on doit retirer aulcun appetit, et par especial les hommes ayant la vertu appetitive forte, car il sont aulcunes gens qui ont naturellement l'appetit debile, et iceulx doivent plus mengier que leur appetit ne requiert. (Rég. santé corps C., 1480, 14).

 

b)

"Mettre qqc. à l'abri ; recueillir qqc." : Or est à presupposer que tout ainsi quel Noé avoit retiré de toutes choses en l'arche, que il eust aussi recuilly tous les livres qu'il avoit peu trouver escriptz des sept ars liberaulx (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 14 r°).

II. -

Empl. intrans. ou pronom.

A. -

[De la mer] "Refluer, descendre" : Puis fist mettre quatre bombardes devers la mer en la greve, quant la mer estoit retirée, et, quant la mer venoit, toutes les bombardes estoient couvertes (...), dès ce que la mer estoit retirée retraicte, on ne faisoit que mettre le feu dedans (GRUEL, Chron. Richemont L., c.1459-1466, 214). ...et ancrèrent son navire, pour ce que la mer estoit retirée, et ilz ne povoient entrer au havre, mais au plus près de la ville qu'ilz peürent (COMM., I, 1489-1491, 203). ...et, à sa priere, la mer se retira de IX piez, tant que lui et son banage fust passé. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 102 v°). Et alors revint Mons. de Berry devers le duc et furent ensemble ; et cependant la mer se retyra et fut le voyaige rompu, et faillut que Mons. de Berry s'en allast avec le duc à Caen, où il faillut que ledit Mons. de Berry vendist sa vesselle pour nourrir ses gens, disant qu'il aymoit mieulx menger en vesselle d'estain et de boys avant que ses gens ne fussent nourris. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 202).

B. -

[D'une pers.]

 

1.

[Dans l'espace]

 

a)

"Retourner (qq. part)" : ...le bon chevalier (...) menoit tousjours la brigade le plus qu'il povoit arriere de la bonne ville ou ses compaignons avoient grand vouloir de retirer. (C.N.N., c.1456-1467, 475). La vespre approuche, il est heure de retirer a la ville. Si nous n'y advisons, nous serons enfermez dehors (C.N.N., c.1456-1467, 475). Item, le roy fut tout le jour armé et a cheval, au moins jusques ad ce que tout fust retiré en camp, qui fut une grant vertu a luy. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 289).

 

b)

"Quitter un lieu, s'en aller" : Si vint a luy et luy dist (...) : "Entendez a vostre besoigne, de par le dyable, et ne vous soussyez des aultres." L'aultre se retira (C.N.N., c.1456-1467, 254). Nostre guet estoit de cinquante lances qui se tenoient vers la Granche des Merciers, et avoyent des chevaucheurs le plus près de Paris qu'ilz povoient, qui très souvent estoient ramenéz jusques à eulx et bien souvent failloit qu'ilz revinssent sur queue jusques à nostre charroy, se retirant le pas, fuyz aucunes fois le trot. (COMM., I, 1489-1491, 59). Tant y en misrent que le feu se print au portal et qu'il faillut que les assaillans se retirassent jusques après que ce feu fust estainct (COMM., I, 1489-1491, 234). Et, après que le duc d'Autriche eut faicte sa monstre, il se retira ; et marcha sur sa queue ledit grant maistre et deffict quelque nombre de ses gens. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 384).

 

-

Se retirer qq. part : Et en se retirant par sur ung pont qu'ilz avoient fait pour s'entresecourir... (GRUEL, Chron. Richemont L., c.1459-1466, 58). Et, la messe celebrée, les chevaliers s'en retournarent comme ilz estoient venus et se retirarent en leur chambre de conseil (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 93). ...icellui de Poges, qui estoit oultremontain, natif de la ville de Luques (...) s'est retiré en la ville de Bruges (Lettres Louis XI, V., t.8, 1479-1480, 75). Après ces choses dictes, me retiray à mon logis (COMM., III, 1495-1498, 129). Et quant ledit Rouault eust laissé lesdits bastard d'Arminag et Sallezart, et qu'il se feust retiré en sa chambre, il envoya querir ledit Voyau secretement par ung de ses serviteurs. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 150).

 

-

Se retirer devers qqn : ...je ne voy pas que monseigneur de Clerence, ne lui, soient si tost prestz pour aller en Angleterre, comme l'entendiez. (...) Et si la chose prenoit long train, mandez moy, se vous voulez que me retire devers vous (...) ou se vous voulez que j'actende ycy (...) ; car je feré ce qu'il vous playra me commander (Lettres Louis XI, V., Pièces justif., t.4, 1469-1472, 349).

 

-

"S'en aller (pour se réfugier qq. part, pour se mettre à l'abri)" : Et tousjours convenoit, sur l'arriere saison, que chascun party se retirast à sa seurté, pour passer l'yver et practiquer nouvel assault à l'esté à venir, et estoit le fleuve du Rin comme une barriere entre les deux. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 75). ...et jugea sur la revolucion du premier an de son regne les tempestes, fouldres et tonnerres, qui puis advindrent à Colongne, en l'eglise Saint Perre, où le peuple s'estoit retiré, laquelle eglise par fouldre fut penetrée (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 107 v°). Et quant ledit clerc ouyt qu'il n'avoit point souppé et qu'il ne savoit où aller loger, il le mena au logis de sondit maistre et le fist soupper avec eulx ; de quoy ledit Voyaul fut joyeulx, car il ne savoit où se retirer, tant pour ce qu'il estoit desja tard que aussi qu'il ne fust congneu d'aulcuns qui luy eussent poeu faire quelque desplaisir, car, comme dit est, il avoit esté menassé par ledit admiral que, s'il le trouvoit, qu'il le feroit noyer. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 147).

 

c)

En partic. [D'une armée] Se retirer qq. part (d'un lieu à un autre). "Battre en retraite, reculer (d'un endroit en se dirigeant vers un autre)" : ...car le duc Charles, frere du roy, mainsné assez tost après de Normandie, se retira en Bretaigne (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 158 v°). Tant continuerent les ditz françois canonniers a tirer si tres impetueusement, que les autres furent contrains d'eulx retirer autre part. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 284).

 

2.

Au fig.

 

-

Retirer à qqc. "Retourner à qqc." : Maiz tousjours retiroit fort a son premier langaige, espaignol, et ne s'en povoit tenir. (Rambaux Frise S., c.1450-1475, 57).

 

-

Se retirer de qqc. "Se tenir à l'écart de qqc." : ...tu te retires aulcunes fois de la reception de ce digne sacrament (Traité S. Sacr. B., c.1450-1500, 149). ...et tant d'aultres grandes, moyennes et menues douleurs, povre mary, te vendront, desquelles les saiges hommes s'en sont retirez ! (LA SALE, Sale D., 1451, 128). ...combien qu'il eust conclu et deliberé de soy retirer de l'amour et accointance de celle qui luy escripvoit, si n'estoit il pas si converty que la chose que plus il desiroit ne luy fust par ceste lettre promise (C.N.N., c.1456-1467, 480).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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