C.N.R.S.
 
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     ASSERVIR1          ASSERVIR2     
FEW XI servus
ASSERVIR, verbe
[T-L : asservir ; GDC : aservir ; AND : asservir1 ; FEW XI, 549b : servus ; TLF : III, 687a : asservir]

I. -

Empl. trans.

A. -

Asservir qqn

 

1.

"Réduire en esclavage" : N'asservi mie tes subjès, Car tu les dois tenir adès En leur droit et en leur franchise Qu'ont de toy et des tiens acquise. (MACH., C. ami, 1357, 136). Celuy tyrant, qui avoit usurpé et asservi toute Judee et interdit la loy et les sacrifices, tenoit les simples en subgection par force (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 134). La trouveras Troie destruite par Theseus et Jason ou temps de Laomedon, et relevee en plus grant gloire ou temps de Priamus. Ailleurs pourra lire comme Athenes, Lacedemone et Thebes furent tant de foys asservies, destruites et desolees ou temps de Xersés, de Phelipe et de Alexandre (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 137). [C'est Adam qui parle] O dolent et maleureux pere, C'est dommaige et pitié qu'il vit, Qu'ainsi son lignaige asservit ! O dure pomme et interdicte, De moy dois bien estre mauldicte (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 35).

 

2.

"Soumettre, mettre en son pouvoir, assujettir" : S'umilité m'asservissoit (MACH., Voir, 1364, 3132). ...et neantmoins ne plaist pas à Dieu que ilz soient par prince trop asservis ne fouléz par oultrageuses charges (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 130). Fault il aveugle devenir ? N'ose l'en plus les yeulz ouvrir, Pour regarder ce qu'on desire ? Dangier est bien estrange sire, Qui tant veult amans asservir. (CH. D'ORLÉANS, Chans. C., c.1415-1440, 235). Dampnacion Ne me peult present asservir. (LA VIGNE, S.M., 1496, 392).

 

3.

"Imposer à qqn une servitude financière" : Par foy, dist Gieffroy, se je te devoye de bonne debte, si auroies tu grant paine avant que tu le peusses avoir. Et, d'autre part, tu me tiens bien pour nice, qui maintenant me cuides asservir, et sans moy monstrer que tu y aies cause. Dy, va, qui es tu, qui as levé le mien larrecineusement ja l'espace de XIIIJ. ou de XV. ans ? Je te deffy de la puissance de Dieu, et te callenge mon droit heritaige. (ARRAS, c.1392-1393, 298).

B. -

Asservir qqn à/en qqc. [de pénible]

 

1.

"Soumettre à qqc." : Fortune, tu me es trop perverse, Sans ce que je l'aie deservy. Mon ceur as a Deul asservy Et mon bien mis a la reverce. (Au grey d'amours F.-H., c.1400-1500, 150). Les naturelz ennemis quierent moy oster liberté pour tenir en leur miserable subjection, et vous me asservicez à l'usage de voz desordonnances et lachetez, en cuidant demourer delivres des dangiers de ma fortune. (CHART., Q. inv., 1422, 12). Noble et digne estat d'innocence, Vraye originale Justice, Helas, bien maudit fut le vice Qui de toy me despossessa A ceste mort cy m'opressa Et m'asservy a ce dur mors. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 28). [C'est Judas qui parle] Moy, meschant, las, de quoy me sert L'argent qui m'estrainct et m'assert A vil service ? (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 331).

 

-

Estre asservant à qqc. "Être soumis, asservi" : Maleurté m'a si fort suyvye Qu'a elle je suis asservant. (LA VIGNE, Aveugle boiteux D., 1496, 58).

 

-

Asservir son corps en qqc. : Rendre me vois en hermittage Et mon corps en paine asservir Pour l'amour ce Dieu desservir (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 248).

 

2.

Asservir qqn à/de + inf. "Contraindre à, inciter à" : Je me repens De ce qu'onques je l'asservy A faire ce dont m'a servi (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 295). Je serviray sans desservir En ma loiauté observant, Car pour ce me fist asservir Amours d'estre voustre servant. (CHART., B. Dame, 1424, 338). [Adam parle à Eve] Nous avons plusieurs enfans eu, Filz et filles en multitude ; Mectez bien tousjours vostre estude A les duire et les asservir, Principaument a Dieu servir Honnorablement, sans reprouche. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 27). Pas ne souffit que sobresse nous serve Pour nostre char abaissier et master, Mais fault la langhe, a legiereté serve, Tenir si sobre que riens ne nous asserve A trop parler, qui peult beaucoup grever. (LA MARCHE, Triumphe dames K.-B., p.1488, 46).

C. -

Asservir qqc.

 

1.

[Une chose abstr.] "Soumettre, contraindre" : Voz ennemis anciens et naturelz vous assaillent a leur entreprise et viennent chalengier vostre terre et vostre pays sur vous (...), ilz veulent asservir vostre liberté et vous avez a vous deffendre de leur servage (CHART., Q. inv., 1422, 18). De droit je n'y chalenge rien, Car ma volenté s'est soubzmise En voustre gré, non pas au mien, Pour plus asservir ma franchise. (CHART., B. Dame, 1424, 338).

 

-

"Affaiblir, diminuer" : Car, s'il [Jésus] dit que nous les debvons, Il asservist la loy juïse Et faulse la loy de Moÿse Qui nous descript qu'en quelque lieu, Nous ne devons riens fors a Dieu Et sommes francs de tous impostz. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 227). Seloncq la coustume de la dicte court de Mons, ung Censseur ou Censiers a une personne possessante Viagierement d'aucunes dismes et redevanches, ne pareillement viageurs ne pooient asservir ne ameurir le droit du proprietaire. (Arch. Nord, 1454, 9 H 13, pièce 31, IGLF).

 

2.

DR. Asservir un heritage. "Le faire dépendre d'un seigneur à qui on doit une redevance" : Lors [Geoffroy] dist en hault : Et comment cuidiez vous, se mon pere a voulu asservir l'eritaige tant comme il le tint, que je le doye tenir serf, puis qu'il est franc ? Vous avez veues les lettres comment le bon conte Aimery de Poictiers le donna a mon pere si franchement que il n'en devoit rien a nul homme que a Dieu. Par mon chief, je n'en paieray jamais croix, ne homme pour moy. (ARRAS, c.1392-1393, 296).

II. -

Empl. pronom.

A. -

S'asservir à/devers/pour qqn. "Se soumettre à qqn ; se mettre à son service" : Comment il se vuet asservir Devers elles, si qu'elles l'aimment (MACH., D. Lyon, 1342, 178). Mais puis que li lions s'assert Pour vous qu'il aimme, crient et sert (MACH., D. Lyon, 1342, 229). S'ainsi vous voulez asservir A Dieu, vous ressemblerez, sire, Un jouvencel dont vous vueil dire... (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 270). Ainsi devons nous ensuyvir : Du parent soustenir dommaige, Pour l'amy plus soy asservir, L'ame mettre et tout le bornaige. (GARIN, Compl., 1460, 86).

B. -

S'asservir à/en qqc. "Se soumettre" : Einsi est, puis que tant t'assers A Fortune que tu la sers Et yes mis en sa servitute (MACH., R. Fort., c.1341, 94). Or s'est il sagement souffers Et toutdis bellement offers A vous, dame, et a cheuls servir, Com chils qui se voelt asservir Entirement a tous vos gres. (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 183). Maiz tant say je bien qu'asservir Il ne s'i [au mariage] vuelt aucunement, Pour ce que tous jours franchement Vuelt vivre sanz melancolie. Et pour ce que il ne voit mie Qu'on y puist vivre sanz soussy, Est il obstinez a ceci Que de femme avoir ne fait compte. (Gris., 1395, 8). Helas, pas ne l'ay desservy, Oncques tel chose je ne vy, Car asservy Me suis du mien en son service, En desplaisance suis ravy, Quant a la my On joue de moy par malice. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 194). Vers toy [Jésus] n'avons point desservi Que a mort te soyes aservy Pour nous mener a tel haultesce Plaisant, singuliere en noblesse. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 435). Ma dame, pardonnez moi, que il a bien a penser, le cuer d'un nouvel amant deliberé de loyalment servir, comme le scien est, de bien choisir et soy du tout asservir aux entiers commandemens de sa dame (LA SALE, J.S., 1456, 14). Et pour mieulx ad ce m'asservir D'umble cueur et fervent couraige Sans plus l'estat mondain suivir, Je m'en voys en ung hermytage. (LA VIGNE, S.M., 1496, 285).

C. -

Empl. abs.

 

1.

"Devenir esclave ; s'abaisser, s'avilir, se dégrader" : Et si s'assert Qu'honneur, franchise et toute joie pert. (MACH., F. am., c.1361, 175). Car pour toy [Diex] me sui asservi Et devenu serf, qui servi Soloie estre moult grandement (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 273). Et ainsi Fortune abaissa Les uns et les autres haulça. C'est le tour de quoy elle sert Ce monde cy, qui trop s'assert. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 189). Toutesfoys, il [le Fils de l'homme] n'est pas ycy Pour estre des autres servy, Mais plustost il ministre et sert Et tant se humilie et assert Qu'il se veult a la mort soubzmettre. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 256).

 

2.

"Se faire domestique ou employé" : Et, se tu es un escuier Qui d'oiseaulx saichiez le mestier Et ne te veulz pas asservir, Ne nul fors toy ne veulx servir, Ne les vueillez pas tant amer Qu'il te facent sentir l'amer Que folle amour aux sienz depart, Toutesfoiz qu'il ont en li part. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 117).

D. -

S'asservir à faire qqc. "S'asteindre à, s'imposer de" : Cellui est cler, cellui est hault, Cellui est noble et cellui vault, Cellui bien sa noblece garde De qui vertu et sens le garde Si qu'il ne se daigne asservir A nulz villains vices servir, Ains surmonte par vive force Toute chose a vilté amorse. (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 180). Dessormais je m'esserviray A toy faire honneur et service, A nul aultre ne serviray, Car ton service m'est propice (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 46). Et tant que je vous ay servy Et creu vostre simple parolle Et que je me suis asservy A attendre le tour du rolle, Fault il qu'Abuz me contrerolle Tant que de vous povre serf ysse ? (Abuzé D., c.1450-1470, 101). Et en dura la chevauchie grande heure et demie, premier que tant fust passé. Sy ne me veul asservir a conter distinctement les personnes et les manières de leur faire, car ne me semble bel en histoire de soy tenir longuement en tels contes... (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 52).

III. -

Part. passé en empl. adj.

A. -

Asservi

 

1.

Au propre. "Mis en servitude, traité en esclave" : Asservis sui, qui m'est chose trop vil(l)e, Car il m'estuet mettre aus murs de la ville (MACH., Compl., 1340-1377, 251). Chascune respondre vouloit : Leurs faiz disoient Et la bataille maudisoient Toutes ; les fuites desprisoient, En löant ceulx qui mors gesoient Ou asserviz Es prisons ou ilz sont serfz vifz, Desquelz le roy fut bien serviz. (CHART., L. Dames, 1416, 293).

 

2.

Au fig.

 

-

"Soumis" : ...Qui deservy N'a pas estre des biens servy Qu'Amours depart, car asservy N'est pas son cuer, maiz desservy (CHART., L. Dames, 1416, 220). Oncques plus piteux cas ne vis Ne cueur qui feust plus asservy Que le mien doulent, lasse, lasse ! (Narcissus, p.1426, 300). Mes dames, retenez ces cours : Ne retenez point les labours De voz humbles servans fëaulx ! Quant mercy auront desservy De cueur loyaument asservi, Ne retenez point leurs merites ! (Narcissus, p.1426, 306).

 

-

"Soumis (au péché, au mal)" : O faulce envie, O faulce racine asservie, Traÿson qui tousjours devye, Quiers tu la lumiere de vye Pour mectre a mort ? (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 525).

B. -

Asservi en/à qqc. "Soumis, voué à qqc." : Tu t'es par trop voulu fÿer En ton faulx art, j'en suis tesmoing, Car, quant c'est venu au besoing, Le dyable, a qui tu as servy, Te laisse a la mort asservy (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 336). : LE CRESTIEN. En servitude est nostre vie. LA FEMME. En grant povreté asservie. LE CRESTIEN. Par faulte de gouvernement... (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 77).

 

-

Asservi de qqc. "Accablé de" : Mais quant on vous [Amour] a bien servy, On est de reffus asservy... (Narcissus, p.1426, 296). Morras tu de soif asservie Devant la fontaine de vye ? [Passage corresp. dans GRÉBAN Pass. J., c.1450, 185 : leçon assoyvie "assoiffée"] (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 435).
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

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