C.N.R.S.
 
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     MARRI     
FEW XVI *marrjan
MARRI, adj.
[T-L : marrir (marri) ; GD : marir (marri) ; GDC : marri ; AND : marri1 ; FEW XVI, 535a : *marrjan ; TLF : XI, 436a : marri]

A. -

"Affligé, triste, contrarié" : Pour ce te pri que tu me croies, Car je te jur seur ma crëance, S'estre vues en ma gouvernance, Qu'a tous besoins te porteray, Aiderai et conforteray, Trés loiaument et de bon vueil, Ne jamais laissier ne te vueil, Sain, malade, lié ne mari, Ne que la femme son mari. Or pren cuer et te reconforte, Biaus dous amis, car je t'aporte La santé dont tu as desir ; Et vraiement, je la desir. (MACH., R. Fort., c.1341, 71). ... pour la mort de mon mari, Dont en cuer sont triste et marri... (Mir. femme, 1368, 202). ...cil Englès (...) rencontrèrent pluiseurs François qui estoient mari et fourvoiiet le samedi, et qui avoient celle nuit jeu sus les camps, et qui ne savoient nulles nouvelles de leur roy ne de leurs conduiseurs. (FROISS., Chron. L., III, c.1375-1400, 189). Desqueles accus[ac]ions il se repentoit m[oult] fort, comme triste et marry d'avoir fait icelles (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 114). Je ne di pas Que ceulx qui font d'amours un droit trespas Et y passent en prenant leurs repas, Sans arrester en ce perilleux pas Et hault larris, Doient vivre ne dolens ne marris, Mais passent temps en esbas et en ris Et s'en tournent gras, gros et bien nourris, Quoy qu'ilz promettent. (CHART., D. Fort., 1412-1413, 180). Riens ne vault m'en desconforter Ne d'estre dolent ou marry (CH. D'ORLÉANS, Chans. C., c.1415-1440, 217). Souvent, aux yeulx plain de larmes, aloit regrettant s'amye, en disant : "O tres noble jovenencelle, que ores suis pour vous dolant et marry..." (Gérard de Nevers L., c.1451-1464, 31). Item, et a Noel Jolis, Autre chose je ne lui donne Fors plain poing d'oziers frez cueilliz En mon jardin - je l'abandonne : Chastoy est une belle aulmosne, Ame n'en doit estre marry - : Unze vings coups lui en ordonne, Livrez par les mains de Henry. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 127). Helas, helas, les grans doleurs ! Onc femme ne fut si marrie ! (Pass. Auv., 1477, 183). Il ne savoit s'il en devoit estre joyeulx ou marry (COMM., I, 1489-1491, 214). Ce dict jour dont, totallement guery, De Grenoble partit alaigre et sain, Et fut disner joyeux et non marry A Sainct Rambert, et coucher a Morain. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 321). LA FEMME D'YPOLITE. A Dieu cil ou est mon desir, Le bon des bons ! Quant je remir Ceste piteuse departie, Bien doys estre triste et marrye, Quant de leur bien j'ay souvenir (Myst. st Laur. S.W., 1499, 151). La venue duquel esbaÿst fort ceulx de Valenciennes et du pays, lesquelz furent fort estonnez et marris de l'avoir perdu. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 378).

 

-

À coeur mari : ...chascuns s'esmerveille Et pleure de ceste merveille, Car onques mais esté parole N'avoit d'elle laide ne fole. L'andemain, devant son mari Vint li pueples a cuer mari Et li doi prestre plein d'outrage, D'inique pensee et de rage, Pour mettre Susanne a la mort Sans conscience et sans remort. (MACH., C. ami, 1357, 8).

 

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Avoir le coeur mari : ...je n'avray autre mari, Qui que en ait le cuer marri, Que vous (Mir. femme roy Port., c.1342, 162). Une dame sans villenie D'un chevalier estoit amie, Si li donna un anelet (...) Par si qu'adès le porteroit Et que jamais ne l'osteroit De son doy, s'elle ne l'ostoit. Et li chevaliers, qui estoit Tous siens, bonnement li promist, Et la dame en son doy le mist. Or avint qu'elle avoit mari Qui ot le cuer triste et mari ; Car l'anel a recongnëu Pour ce qu'autre fois l'ot vëu. Si l'ala tantost demander A la dame et li comander Qu'elle li baille en la place Seur peinne de perdre sa grace. (MACH., J. R. Nav., 1349, 235). Ses crins tiroit et batoit sa poitrine Et pour s'amour seur lit ne soubs courtine Ne pot dormir. Alchioine trop ot le cuer marri Pour la dolour qu'elle ot de son mari Qui dedens mer par fortune peri, Si qu'en plourant Dist a Juno pluseurs fois : "Je te pri, Riche deesse, oy mon dolent depri." (MACH., F. am., c.1361, 163). Li roys en son païs revint, Où si fort malades devint Qu'il jut en son lit moult griefment, Sept semainnes entierement. Et en la fin il fut garis, Dont maint eurent les cuers marris ; Car pour eaus mieus esté eüst Se Dieus adonques pris l'eüst, Pour la traïson, qui celée Fust, qu'il avoient pourpensée. (MACH., P. Alex., p.1369, 255).

 

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[De soi-même] Marri ! "Pauvre de moi !" : Devant qu'il meure ? Helas, marrye ! Est il si pres de prandre mort ? (Pass. Auv., 1477, 187).

 

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Empl. subst. : Embrasse moy, ma doulce amie, Et baise la pouvre marrie ! (Pass. Auv., 1477, 265).

 

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MÉD. [Des esprits] "Attristé, assombri" : ...trop grande sollicitude seche les corps humains en donnant desolacion aux esperiz de vie, et les esperitz ainsy desolés et marris sechent les os. Soubz ceste premiere doctrine se doivent comprendre les mellencolyes et marrissons, lesquelles samblablement font grand dommaige au corps humain, car par ce moyen le corps devient maigre et froit, le ceur est serré, l'entendement et engin obscuré, rayson parturbee, et la memoire anichilee. (Rég. santé corps C., 1480, 1-2).

B. -

"Contrarié, contrit, fâché" : Roy Menelaus, qui ert mari Heleine, durement marri Fu de ce (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 68). La pouvre fille, en cest estat, marrie, Dieu le scet, et desolée, part de sa cruelle et fumeuse mere (C.N.N., c.1456-1467, 69). Sa mere, toute enragée, forcenée et tant marrie qu'on ne pourroit plus, la voyant ainsi deshonorée, si prend a la tanser (C.N.N., c.1456-1467, 69). ...elle n'estoit en riens contente, mais trestroublée et marrye en estoit. (C.N.N., c.1456-1467, 70). ..a pou que le cueur ne luy faillit, tant fut marrye et desplaisante (C.N.N., c.1456-1467, 133). Si la trouva toute marrie et courroucée, voire bien fort plorant de dueil (C.N.N., c.1456-1467, 239). ...ne fault pas dire que aucunes damoiselles ne furent bien marries d'avoir perduz les instrumens de monseigneur le curé. [Il a été châtré] (C.N.N., c.1456-1467, 406). Elle, tant marye qu'on ne pourroit plus, a peine s'elle daignoit respondre. (C.N.N., c.1456-1467, 410). ...me semble bien que n'en devez estre marrye, actendu que vous cognoissez que c'est ma maniere de vivre (C.N.N., c.1456-1467, 561). Et usuriers seront marris Se les laines ne sont fort chieres. (Rapp., c.1480, 63). LA FEMME. Jamais ne le voy [mon mari] si marry Sinon quant je parle a vous, juif[z]. Ne dictes mot. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 108). Et devez savoir que alors que le duc de Berry se partit de Poictiers, le roy estoit allé en pelerinage à Nostre-Dame du Pont en Lymosin, et avoit laissé à Poictiers sondit frere Mons. de Berry. Et, quant le roy sceut la departie de sondit frere, il en fut merveilleusement marry, et tost après sceut la conspiration que les seigneurs de son royaulme avoient faicte contre luy, lesqueulx s'en estoient tous retournés en leurs païs pour faire leur amast et tachoient de attraire à eulx tous les autres seigneurs du royaulme. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 164).

 

-

À chere marrie. "Avec contrariété, irritation" : LE JUGE. Je faiz assez bien mon debvoir De vous dire vostre folie ; Je m'en vois a chiere marrie, Et me desplaist bien, monseigneur, Pour quoy vous en avrez doleur Et grant rudesse. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 97).

C. -

"Décontenancé, troublé"

 

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De courage marri. "Ayant perdu la raison" : Et lors lesdiz Guillars chaudement et de courage merry demanderent ausdiz supplians qui avoit ce fait, qui par ylec avoit charié. (Chancell. Henri VI, L., t.2, 1429, 140). ...illec eschauffé, mal meu et tempté de l'ennemi, tira ung espée qu'il avoit, et en cuida donner du plat audit Ylaire ; mais de male aventure elle lui tourna en la main et le frappa de courage marry ung seul cop sur la teste (Doc. Poitou G., t.8, 1446, 398).

 

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Faire qqn marri. "Semer le trouble en qqn, le décontenancer" : Or te despesche de ce que je t'ay dit, ou aultrement je te feray marris (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 42). Je le feray le plus marry, Par la vertu bieu, qu'il fut oncques (Fr. arch. B., c.1468-1480, 45).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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