C.N.R.S.
 
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     NU     
FEW VII nudus
NU, adj.
[T-L : nu ; GD : nu ; GDC : nu1 ; DÉCT : nu ; FEW VII, 229a : nudus ; TLF : XII, 286a : nu1]

A. -

[D'une pers.]

 

1.

"Sans vêtements" : Et lors ledit filz descendi tout nu, excepté d'une houpelande que il avoit sur ses espaules et un chapperon sur sa teste, senz brayes, senz soulers (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 414). ADAM. (...) Helas, qu'ay fait ? povre me truis, Nu et honteux, enginé suis. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 17).

 

-

Tout nu. "Sans aucun vêtement" : Mais Leandus, toutes les nuis, Passoit le bras de mer au large, Tous nus, seuls, sans nef et sans barge. Belle Hero au gent atour Ot en sa maison une tour Ou toutes les nuis l'atendoit, Et un sierge ardant la tendoit, Auquel Leandus se ravoie (MACH., J. R. Nav., 1349, 248). ...il li dist que la royne Estoit amie et concubine À monsigneur Jehan de Mors, Par le temps qu'il a esté hors, Et qu'il l'a heüe et tenue Cent fois, en ses bras, toute nue. Et, par Dieu, je croy qu'il mentoit, Pour ce que la royne estoit Si vaillant et si preude femme, Et en tous cas si bonne dame, Que jamais ne s'i consentist (MACH., P. Alex., p.1369, 249). La dame ay veu hault et bas Toute nue a plain, et de fait J'ay d'elle ma voulenté fait. (Mir. Oton, c.1370, 351). Et est une telle chose comme ce qui advient a ceulz qui se combatent tous nuz en certains esbatementz et excercitacions, comme seroient par aventure tornoiemenz, car la fin pour quoy en esperance il seuffrent tel labeur, elle leur est delectable, si comme est avoir une coronne ou aucuns honneurs (ORESME, E.A., c.1370, 217). Et eulx retournez, se revindrent couchier en leurdite maison, c'est assavoir : elle qui parle toute nue, et ledit feu Thevenin tout vestu (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 57). ...sy vint en Lameri, ou il fait sy chaut que les gens y vont tous nuis. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 159). La vi je neuf dames venues Qui se baignoient toutes nues En la fontaine (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 35). Ha, le ribault s'en fuit tout nu (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 256). Ma seur, vous n'estes pas honneste Pour aler ainsi toute nue. (Pass. Auv., 1477, 150).

 

-

En partic. [Pour la nuit] : ...il se pensa bien qu'il la trouveroit nue et couchée. (C.N.N., c.1456-1467, 264).

 

-

À nu. "Tous vêtements ôtés" : ...elles [les matrones] ont veue et diligenment visitée à grant diligence Marion de La Court, prisonniere dessus nommée, tastée et mesniée à nu au mieulx que elles ont peu et sceu (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 430).

 

-

[Comme attr. de l'obj.] : Or est la nuittie venue Qu'il me devoit en ses braz nue Ennuit toute la nuit tenir Pour sa volenté acomplir. (Mir. femme roy Port., c.1342, 174). Quant elle le tint neut [l'enfant dans la baignoire]... (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 477).

 

.

Deshabiller / desvestir tout nu : ...de quoy recite Frontinus (...) que ung prince nommé Agi[s]elaus feit devestir tous nuz devant ses chevaliers aucuns de leurs ennemis pour leur monstrer leur belle et blanche couleur, affin que bien semblassent gens femenins, non excercez en peines et en labeur (GERS., Concept., 1401, 417). ...on le fist desabiller Tout nud (Amant cord. M., 1490, 56).

 

.

Despouiller tout nu : Yci tout nu le despoulliez [Panthaleon] Et le liez a celle estache De cordes aussi c'une vache (Mir. st Panth., 1364, 350). En enterinant lequel jugement, ledit prisonnier fut fait rere tout jus, et après fait despouillier tout nu, mis, lié et estendu à question sur le petit tresteau (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 105). Ribaulx, delivrés vous grant erre De despoillez ces gens touz nuz, Et a lez batre comme terre Emploiez toutes vous vertus (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 80). ...et si dy oultre, s'il estoit vray, que telle dame devroit estre despoillee toute nue dez la ceinture en amont et toute reze (LA SALE, J.S., 1456, 305). Quand damp hermite se treuve a part avec la belle fille, comme s'il la voulsist rebaptiser toute nue la fist despoiller (C.N.N., c.1456-1467, 103). Quant tous les homes et les femmes Le veirent tout nud despouiller, Des yeux jectérent grosses larmes (Amant cord. M., 1490, 57).

 

-

[De deux pers., pour l'amour] Nu à nu. "Tous deux étant sans vêtements" : ...l'umble supplicacion de Guillaume Eraut, contenant que comme, environ la Penthecouste darrainement passé, il eust trouvé Martin Gragaut nu à nu couchié avec sa femme et se feust prins à eulx (Doc. Poitou G., t.5, 1380, 128). ...et que quant elle seroit couchée auprès de sondit ami nu à nu, et il dormiroit, que d'icelle cire et poix elle prenist un petit, et en frotast sondit ami entre les deux espaules continuelment, jusques à nuef jours ensuivans (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 308). ...Jusques a ce que, nu a nu, Leurs corps sucrez attoucherez ; Or sachez que n'est pas tenu Vray amoureux qui est venu Vir sa dame principaument Pour faire le jeu trop congnu ; Il est maint aultre esbatement. (MARTIN LE FRANC, Champion dames III, F., 1440-1442, 62). ...[il] se joignit avecques sa dicte hostesse ; et après ce s'esbatirent ensemble si comme nu a nu. [D'un couple] (C.N.N., c.1456-1467, 390). Le celuy que j'atraperay Avec ma femme nu à nu, Premier qui soyt de moy conu, Je luy monstreray mon efort. (Gent. moun. T., c.1500, 356). Quand sera-ce que je tiendray Ce beau gentil corps nud à nud ? (Gent. Naudet T., c.1500, 277).

 

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Nu comme le doigt. V. doigt

 

-

Nu comme fétu : Fais sacrifice aux Dieux plains de vertu, Toy revestu, ou se ce ne fais tu, Nud que festu, sera prins a l'atrape (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 516).

 

-

Nu comme un ver. V. ver : ...Nu comme ung ver (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 46). Au mains, reprenez vostre alaine, Ne soyez pas si rigoreux Au povre bergier douloreulx Qui est aussi nu comme ung ver. (Path. D., c.1456-1469, 178). Ilz furent amiablement rechuptz en l'oost du roy qui les fist penser et revestir de nouveaux habis, car ilz estoyent nudz comme vers (MOLINET, Chron. D.J., t.2, 1474-1506, 145).

 

-

Nu comme l'heure qu'il fut né

 

Rem. Prov. H., 178 [N43].

 

-

Au nu. "Sans vêtements, déshabillé" : Anvers (...) fit plus que le possible à ceste reception archiducale, tant en rices parures, decoremens de hours, d'histoires nouvelles et de luminaire à grant plenté comme de joyeusetéz et singuliers esbatemens (...) ; mais le hourd où les gens donnoyent le plus affectueux regard, fut sur l'histoire des .III. deesses, que l'on veoit au nud et de femmes vives. (MOLINET, Chron. D.J., t.2, 1474-1506, 398).

 

2.

[Du corps, d'une partie du corps] : Prens l'abillement D'un de mes folz le plus cornu Et le vetz dessus son corps nu (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 299). Qu'il soit en chimise bouté, Et puis luy fesstes le piés nus Aler tout deschaus par dessus Les charbons trestous enflammés (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 236). Les Ganthois, veans monseigneur d'Austrice, se mirent tous à genoulx, les testes nues (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 463).

 

Rem. Scheler, Gloss. Geste Liège, 211 (II, 2173 : le chief nuit).

 

-

Main nue

 

.

"Sans gant" : Uns chevaliers un trop bel arc Li aporta et le volt tendre, Mais onques n'i volt la main tendre, Eins li dist : "Alez en deduit, Qu'assez ci endroit me deduit". Si me mena par la main nue Parmi l'erbe pognant et drue Sus une trop bele fonteinne Qui chëoit, douce, clere et seinne, En un vaissel de marbre bis. (MACH., F. am., c.1361, 189). Lors se vint la dame sëoir Dalés l'amant qui se dormoit, Et son dous ami le clamoit. Elle le prist par la main nue. (MACH., F. am., c.1361, 221). Et issirent de leurs vaissiaus Bien et bel et arreement, Sans avoir nul empechement ; Puis se meïrent en bataille ; Chascuns l'espée qui bien taille Tenoit en sa main toute nue. (MACH., P. Alex., p.1369, 77). La Dame (...) ala encontre luy jusque l'uys de la chambre, si le preist par la main nue en riant, et luy dist que bien fust il venuz (Chev. papegau H., c.1400-1500, 28).

 

.

"Sans protection" : ...pour prouver son dit, porta ung fer chault à tout la main nue, disant qu'il n'estoit que ung seul Dieu tout puissant, par laquelle chose ledit roy Allart et toute sa famille se convertit à Dieu et à sa loy et foy. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 109 r°).

 

.

"Sans rien dans la main" : Lors li doi prestre se leverent Enmi le pueple et s'aünerent, Quant Susanne fu la venue. Chascun d'eaus sa main toute nue Mist sus la teste de Susanne, Qui de son cuer efface et planne Tout pechié, toute villonnie, Et en Dieu seulement se fie. (MACH., C. ami, 1357, 8).

 

.

"Sans arme" : ...car lui seul porta un boeuf tout vif sur ses espaulles l'espace d'une stade (...) et, quant fut hault en la montaigne devant le peuple, l'occist de sa main nue, sans baston, et tost se mist à icelui detrencher et fere cuire et le mengea tout, tout seul (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 41 r°).

 

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Nus coudes : C'est qu'a genouz et a nuz coudes Aillons deprier saint Mercure (Mir. emp. Julien, 1351, 191).

 

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Nus genoux

 

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À genoux nus : Lors la roÿne l'aoura ; A nulz genoulx devant se mist, De coeur ploura, oroison dist (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 81). Mercy vous pri a nuz genouz Que mon meffait me pardonnez (Mir. st J. Cris., c.1344, 282). Icy se retrait encor Jhesus plus loing et se mect a genoux nulz [l. nuz] a terre (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 682).

 

-

Nues jambes : ...Aler nues jambes (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 89).

 

-

Nues plantes : Et charbons ardans m'estendez, Sur lesquelz aler le ferons [Ignace] A nues plantes (Mir. st Ign., 1366, 84).

 

-

Nus pieds. V. pied

B. -

P. ext.

 

1.

"Mal vêtu, pauvre, misérable" : Fuians vont (...), Comme chetifz et essilliés, Povres et nulz et avilliés (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 120). Et quant Fortune m'ot fait nu et tremblant Par povreté qui ses gens desavance, Lors vint Mauffé à Dangier ressamblant ; Quant l'aperçu, je perdi contenance : Honte m'assaut, Paour me fist grevance. (MACH., App., 1377, 644). Et encore te scé grans graces De ce que quant m'as veu nu Et povre, tu m'as revestu Si bonnement. (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 263). Ilz jugent nices ceulz qui mettent toute leur cure a oÿr parler de Dieu par Escripture ou sermon, a parler a luy par saincte oroison et meditacion, et sont nus, familleux, povres, souffreteurs, angoisseux, haÿz, moquez pour son amour (GERS., P. Paul, a.1394, 515). Il est nulz par grande indigenche (Jeu Etoile T., c.1400-1500, 101). ...Famis et plus nuds c'uns foullons (Pastor. B., c.1422-1425, 247). Et quant il se vey tant nud et en tant povre point... (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 240). ...les francz nus et povres en fit departir. (MAMEROT, Romuleon D., 1466, 110). POVRE. Hellas, n'y aura il personne Qui de mon grief mal revenu N'ait pitié ? Ou que l'on me donne Quelque habit, car je suis tout nu. (LA VIGNE, S.M., 1496, 544).

 

-

Empl. subst. "Celui qui est mal vêtu, qui est pauvre" : LE MARINIER. (...) De ce nu vous prengne pitié. Donnez me pour couvrir mon corps (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 257). ...qu' il desprise les biens temporelz, qu'il en face aumosnes, qu'il en veste les nulz, qu'il en donne a boire a ceulx qui ont soif (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 42). Misericorde a sept branches : la premiere est donner a boire et a mengier aux pouvres ; la seconde est de vestir lez nus ; la tierce est prester aux povres quant ilz en ont besoing et leur pardonner la debte ; la quarte... (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 43). ...tu as spolié les nulz de leurs vestemens (JUV. URS., Loquar, 1440, 426).

 

2.

"Sans autre vêtement qu'une robe de nuit (ou complètement nu ?), ou bien qu'un pantalon..." : Vezci, sire, Ygnace, tenez, Tout nu en braies. (Mir. st Ign., 1366, 108). ...fu à Nicossie De sa plus procheinne lignie, Et des nobles de son païs, Li nobles roys de Chypre ocis, En sa chambres, sous sa courtine, Nuz, gisans delés la royne. (MACH., P. Alex., p.1369, 248). Lors en son lit sus li coury Et IJ. cos ou IIJ. le fery, En son bras d'un coustiau d'acier, N'il ne le volt plus menacier. Quant li roys se senti bleciez, Tous nus est de son lit dreciez Et par la gorge le hapa À IJ. poins et si l'atrapa Que dessous li le mist à terre, Et si fort li estreint et serre Que pour po qu'il ne l'estrangla. (MACH., P. Alex., p.1369, 269).

 

-

Tout nu en ma chemise. "Sans autre vêtement que ma chemise" : Douceur, charité ne confort Ne truis en homme de l'eglise ; N'i a celui qui me confort, Ne que se j'estoie de Frise Venus tous nus en ma chemise, Querans mon pain de jour en jour. (MACH., L. dames, 1377, 234).

 

-

Porter qqc. nu à nu. "Porter qqc. directement sur la peau" : Après ton haubert qu'as vestu Porter a ta char nu a nu T'enjoing tant conme tu vivras, Et ceste haire sus aras. (Mir. st Guill., c.1347, 28).

C. -

P. anal.

 

1.

[D'un homme] "Sans arme, sans armure, sans équipement" : Maul est covert, cilz qu'est touz nuz, Qui se covre d'austruy escuz (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 49). A ung Sairaisin vint qui fuit mort sur l'erbaige, Tout neut le desarmait san faire demoraige (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 95). ...ce qui n'a pas esté maindre miracle mais trop plus grant, que se ung simple homme feble et nus, sans armeures et sans ayde, seurmontoit et vaincoit ung grant paÿs, fort et bien assemblé pour resister de toutes pars, et qui a soy deffendre mettroit toute sa puissance, son estude et diligence. (GERS., P. Paul, a.1394, 494). Le pouvre François (...) n'avoit que son paige, et qui estoit tout nu et de ses armes desgarny (C.N.N., c.1456-1467, 55). O vous n'iray pas toute nue, Mais armée et le gleve a main (Cene dieux, c.1492, 129).

 

-

[D'un pays] "Désarmé" : ...et mist a terre son armee en laquelle n'avoit que .X.m piettons, .V.c hommes a cheval et .VI. oliphans, qui n'estoient pas souffissant pour resister seulement a l'armee rommaine ne meismes aussi pour gaignier et garder Grece, quant elle eust esté nue et sans garnisons. (MAMEROT, Romuleon D., 1466, 33).

 

2.

[D'une arme blanche] "Qui est hors de la gaine, hors du fourreau" : L'empereur dist : "Foy que je doy L'espée de saint Charlemainne, Qui l'empire ot en son demainne, Qui tramble quant on la tient nue, J'ay grant joie de vo venue ; Et vous soiez li bien venus Et à grant joie receüs." (MACH., P. Alex., p.1369, 34). Il vient l'espée nue traicte (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 25). Auquel qui parle fu dit que l'en tuoit un sien frere ; et, pour ce, descendi hastivement de la chambre où il estoit logez, tenant un badelaire nu en sa main. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 83). ...deux hommes se entrebatoient de leurs espées ou badelaires, qu'il avoient sachez nus, et dont il gettoient moult fort l'un à l'autre (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 83). En laquele [maison] ledit Alain, lui qui parle et lesdiz ses compaignons et complices entrerent, leurs couteaux nuz. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 506). Zellandin vint a eulx l'espee nue (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 323). ...l'espée nue en sa main, la face plus noire que charbon, [il] commence a saillir en la chambre (C.N.N., c.1456-1467, 437). ...et vient la Pucelle en grant devoir (...) une espee nue en sa main (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 439).

 

3.

Nu grain. "Grain sans balle (p. oppos. à l'épeautre)" : Item, doient les maistres et renthier del citeit envoier les vies stier et les noveals (...). S'en doit eistre VIII, assavoir VI por mesureir espelte et nuyt grain, et II plus grans por mesureir oirge et avaine. (HEMRICOURT, Patron Temp. B., c.1360-1399, 117). Item, je lay mon antain de Montengney chinque muys de nud grain (HEMRICOURT, Pièces div. B.P., 1364, 73).

 

4.

[D'un homme (ou plutôt de sa peau)] "Sans poils" : Son corps n'estoit pas pareil a son hault corage, car il eult petite stature, les piedz mauvais, et fut chaulve et nu comme femme. (MAMEROT, Romuleon D., 1466, 338).

D. -

Au fig. [Idée d'absence]

 

1.

[Absence d'intermédiaire]

 

a)

[D'une chose] "Qui se présente à la vue sans obstacle ; qui n'est pas caché" : ...molt fu sa raisons nue. (BRIS., Restor paon D., a.1338, 128). JHESUS. Le peiple faistoye Et non cueur lermoye ; C'est lëesse nue ["qui se montre, qui s'extériorise pleinement"]. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 216). [Ou "vaine" ? C'est ainsi que traduit l'Éd. de MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 222 (c'est lÿesse nue) ; Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 561] Comme dist l'Apostle : "Toutes choses lui sont nues, descouvertes et ouvertes." (Somme abr., c.1477-1481, 131).

 

-

Nu à nu. "Sans que rien soit dissimulé" : LE SECOND DISCIPLE. Le veult Mort en terre reduyre ; Hellas, c'est tresmal revenu ! (Pause. Ilz luy apportent le reliquaire du Corpus Christi et une hostie non sacr[ee] en la maniere acoustumee...) LE MESSAIGIER DU JEU. Messieurs, pour le vray vous produyre, Ce qui est de ses mains tenu, Ainsi que voyez nu a nu, Pour debouter ydolatrie, Quoy qu'en honneur soit maintenu, Le corps Jhesucrist n'y est mye. (LA VIGNE, S.M., 1496, 566).

 

-

À nu. "Sans rien qui cache" : ...chacun voir a peu La tres desiree face a nu (Myst. Incarn. Nat. L., t.2, c.1454-1474, 205).

 

.

"À découvert" : Les escus qu'il avoient estient poissans et grant, Poc s'ataindient a nus ["ils ne s'atteignent guère à découvert"] car bien s'allient targens (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 1024).

 

.

À nu ciel. "À découvert" : ...unc peron, qui estoit fours de l'engliese à nuit chiel dedens le le preiel de l'enclostre (JEAN D'OUTREM., Myr. histors B.B., t.2, a.1400, 344).

 

-

Sur la terre nue. "À même le sol" : Alexandre devoit brief mourir, sur la terre nue, soubz ung voyle d'or. (FILLASTRE, Traité Conseil H., c.1472-1473, 224).

 

-

Au nu. "Directement" : Quelle merveille se un feu couvert de cendre ne brulle ["transmet sa chaleur"] pas si tost comme le sentir ["comme de le ressentir"] au nut ? (GERS., Traité R. Rose, 1402. In : Chrestom. R., 52).

 

-

La vérité nue. "La vérité pure et simple" : Et dictes la verité nue (Myst. Résurr. Angers S., 1456, 518).

 

b)

DR. FÉOD. [D'une terre, d'un héritage] "Sans intermédiaire, sans partage" : Et en la fin des dittes IX. annees, le dit Boidekin doit les dis VIII. bonniers de tiere laissier en autel point que elles seront au jour qu'il entera en la dicte cense, est assauoir, nues et entieres. (Doc. 1398. In : Ch. Doutrepont, Z. frz. Spr. Lit. 22, 1900, 118). [Charte tournaisienne]

 

-

Tenir qqc. nu à / et nu de qqn. "Tenir un fief directement d'un seigneur, sans intermédiaire" : ...ledit chevalier les tient [les parties d'un héritage] nu à nu en foy et en hommage souz notredit filz et en fié et menbre de haubert [le fief de haubert, en Normandie, ne peut être partagé], lequel ne se puet depiecer ne amenuiser par la costume de Normandie sans forfaire le fief (PHIL. VI VALOIS, Doc. paris. V., t.1, 1355, 217). Messire commande au bailli d'Auxois qu'il saisisse Rouvroy et le mette en la main monseigneur pour aucunes raisons, especialement pour ce que messire Guillaume de Rouvroy, l'ainsné des freres, tenoit cy en arrier Rouvroy, et tout l'eritage de lui, de ses freres et des suers, lesquelx freres et suers il avoit en s'avoirie, et des choses devant dites il entra en hommage monseigneur le duc qui mort est ; puis aprés, il bailla Rouvroy qu'il tenoit du duc nu et nu (Cout. bourg. glosé P.M., c.1380-1400, 210). [Le ms. B du Cout. bourg. glosé P.M. donne nu à nu]

 

2.

[Idée de privation, de manque d'un bien]

 

a)

[D'une pers.] Nu de

 

-

"Privé de (d'une chose concr. ou abstr.)" : Elle ne te fu pas amere, Einsois te fu moult amiable, Douce, courtoise et charitable ; Si n'ies pas au blasmer tenus. Car de tous biens estoies nus, Et elle te prist erraument Et t'alaita diligenment De son lait, c'est de ses richesses, De ses honneurs, de ses noblesses, Et te fu norrisse et maistresse (MACH., R. Fort., c.1341, 96). Riches d'amour et mendians d'amie, Povres d'espoir et garnis de desir, Pleins de dolour et disiteus d'aye, Loing de merci, familleus de merir, Nus de tout ce qui me puet resjoïr Sui pour amer et de mort en paour, Quant ma dame me het et je l'aour. (MACH., Bal., 1377, 540). Car Meseürs m'a mis et enserré En crueus las de Fortune si fort Que je me sens nu et desherité De tous les biens, sans recevoir confort. (MACH., L. dames, 1377, 63).

 

-

"Dépourvu (d'un bien affectif, psychique...)" : Et pour ce que je te savoie Desconforté et nut de joie Et qu'a conforter sui tenue Les amans, suis je ci venue. (MACH., R. Fort., c.1341, 82). C'est celle qui m'a congneü Par tout ou elle m'a sceü Nu de joie et depourveü. La doucement m'a repeü De tous les biens qu'elle a peü, Et d'aligence. (MACH., R. Fort., c.1341, 121). J'estoie juenes et petis, Nices, enfes et enfantis, Nus de scens et pleins d'innocence, D'assez petite congnoissance, D'estre en oiseuse coustumiers, Dame, quant je vous vi premiers, Ja soit einsi qu'encor en soie Mieus garnis que je ne vorroie. (MACH., R. Fort., c.1341, 131). L'autre le doi li estraingnoit ; L'autre li marchoit sus le pié, Nom pas en samblant de congié, Mais en signe de retenue, Comment que de s'amour fust nue. (MACH., D. Lyon, 1342, 218). Or ne sçay ou prendre confort, Car nu me voy et esgaré De toute joie et separé (Mir. Theod., 1357, 71). Or sui je bien en touz endroiz Povre et nu de beneurté Et venuz a maleurté, Quant j'ay ma compaigne perdue. (Mir. Theod., 1357, 89). Et m'ont rendu scens, maniere et vigour, Car de ces trois Estoie nus, quant vëoie l'atour Cointe et joli de vo corps fait a tour, Qui passe tous en grace et en valour En tous endrois. (MACH., F. am., c.1361, 152). Et se toudis la truis de pité nue, Mes cuers, qui l'aimme, obeist, sert et crient, Doit bien avoir toute joie perdue, Car il est siens, si se tenra et tient En son dangier sans depart. (MACH., L. dames, 1377, 167). Quant premiers vi vostre ymage Où riens à dire ne voy, De m'amour li fis hommage Et tous me donnai à soy. Las ! or est de pité nue, Et si fust moult bien tenue De ma dolour alegier. S'en sui vallés à drapier. (MACH., L. dames, 1377, 190). Ja ne serés pour moy de pité nue, Puis qu'en douceur vos gentilz cuers se mue, Se la parole est de bon cuer venue Qui dou mien vray ja mais ne partira. (MACH., L. dames, 1377, 225). Longuement me sui tenus De faire lais, Car d'amours estoie nus ; Mais dès or mais Feray chans et virelais : G'i sui tenus, Qu'en amours me sui rendus À tous jours mais. (MACH., Lays, 1377, 425). ...ma porteure chier tenue Sur toute riens de moy, par m'ame, Je voy ades de vertu nue (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 114).

 

b)

[D'une chose, d'une terre] "Vide de" : Et sy sens la contree sy nue de chevaulx que a deux ou trois journees je n'en sçay pas ung seul (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 239).

 

3.

[Absence d'un défaut] Nu de. "Exempt de" : Seignor, dist li boins rois qui d'orgoel estoit nus... (BRIS., Restor paon D., a.1338, 134). Il aimme l'onneur et le pris Des armes, d'amours et des dames. C'est li rois par cui uns diffames Ne seroit jamais soustenus ; De toute villenie est nus Et garnis de toute noblesse Qui apartient a gentillesse. (MACH., J. R. Nav., 1349, 175).

 

4.

[Absence de valeur] "Sans valeur"

 

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[D'un marché] "Sans valeur, sans effet" : LE PREMIER JUIS DE THIRI. N'oubliez mie aussi a mettre Comment il le nous livrera [Jésus]. JUDAS. Le livrer del aval s'en va, Aultrement le marchiet est nu (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 121).

 

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[D'une attitude, d'une parole, d'une manifestation...] "Sans valeur, vain, injustifié" : Mais ce qu'elle ["ceci à savoir qu'elle"] se rit et jue A moi donner response nue, Che me taint la coulour et mue. (FROISS., Espin. amour. F., c.1369, 100). Droitement sus un merquedi Me sont nouvelles revenues De Rose, qui ne sont pas nues, Mes grandes et especiaus (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 81). ...de quoy le roy, la royne et toute la compaignie furent moult doulans, car la feste en fut plus nue et moins joyeuse. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 270). [Éd. : "qui manque de relief, morne"] MAGDELAINE. (...) Se chascun me fait bonne chere Et qu'en tous lieux soyes bien venue, Que les plus grans me tiengnent chere Et facent feste a ma venue, Mon fait en rien n'en diminue, Ne pourtant doiz estre blasmee. C'est une parolle fort nue Et bien gectee a la volee. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 397). Pour ce, seigneurs, ne soit la chose nue : Ensuerons en, n'en parlons point en nue. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 16).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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