C.N.R.S.
 
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     PAÎTRE     
FEW VII pascere
PAISTRE, verbe
[T-L : paistre ; GDC : paistre ; DÉCT : paistre ; FEW VII, 695a : pascere ; TLF : XII, 798a : paître]

A. -

Au propre [À propos d'animaux]

 

1.

Empl. trans.

 

a)

Paistre herbe. "Manger, brouter l'herbe" : Herbe vert ou fleur de genestre Me puet o les bues faire paistre, À son plaisir, Et morir, Sans mentir. (MACH., Les lays, 1377, 436). Cogneut avec ce, ledit deposant, que, IIJ ans a ou environ, autrement du temps n'est record, et en passant par la conté du Perche, trouva enmi les champs une jument qui paissoit herbe en un champ, laquele n'avoit aucune garde, laquele il print, et icelle mena en la ville de Chasteaudum, et illec la vendi la somme de XXXV s. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 108).

 

-

Paistre pré

 

.

[Dans un cont. métaph.] : Et on dist, et c'est vrai, que force paist le pré [comprendre ainsi : qu'il y faut de la force, de la persévérance pour paître toute l'herbe d'un pré ; à force de persévérance on arrive à bout des difficultés] Et qui a forche il boute. (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 64). Le forche paist le pré, cecy set on assés. (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 195).

 

Rem. WAUQUELIN, Faits conq. Alexandre Hé., a.1440, 214/23.

 

b)

Paistre (un animal) "Mener (un animal) au pâturage pour qu'il se nourrisse" : Il fist toute l'ost là endroit arrester en uns blés, pour leurs chevaus paistre et recengler (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 63). O la tresbelle entre les femmes puis que tu te ignores et que tu ne te veulx congnoistre va ten, ys de la compaignie des bestes et va derriere apres les tropeaux de tes bestes, tu paistras les boucs. (CIB., p.1451, 199). Quel forrage Pour paistre moutons en greve ! (Pipée R., c.1470-1480, 214). ...il oy crier sondit filz en une terre où il paissoit sesditz pourceaulx (Doc. Poitou G., t.12, 1480, 373).

 

-

[Dans une comparaison] : Certainement les princes ont a coustume a aucuns eslargir pluseurs choses en la façon que paisçons les pourceaulx, c'est que nous les devourions quant seront engrecéz. (PICCOLOMINI, De curialium miseriis epistola L., c.1458-1477, 90).

 

-

[Dans un cont. métaph.] : "...Pierre, me aimes tu ?". Et a chascune foys que il respondoit oÿ, il adjoustoit : "Paix ou gouverne mes brebis, mes aigneaux", c'est a dire tous crestiens, en trois manieres : par doctrine, par correction ou discipline, et par exemple (GERS., P. Paul, a.1394, 487).

 

2.

Empl. intrans. [D'un animal] "Brouter, manger de l'herbe (au pâturage)" : ...et s'avint Que par les champs les bestes mues Gisoient toutes esperdues, Es blez et es vignes paissoient, Tout partout ou elles voloient, N'avoient signeur, ne pastour, N'homme qui leur alast entour, N'estoit nuls qui les reclamast, Ne qui pour siennes les clamast. (MACH., J. R. Nav., 1349, 151). ...Et toutes trois nous en alames Vers Paris, le pastour de Troie, Qui gardoit s'aumaille et sa proie, Bues, vaches, moutons et brebis, Qui vont paissant par ces herbis. Mercurius nous y mena Et le pastour arraisonna, Qui s'esbatoit de sa holette Tous seuls en une sentelette. (MACH., F. am., c.1361, 209). ...[il] trouva d'aventure enmi les champs une jument assez basse qui paissoit aus champs (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 273). Et sur ce mont maynnent leurs avoirs menus a paistre, pour la grant bonté des herbes qui y sont. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 78). ...ung laboureur avoit perdu son veau qu'il avoit mis paistre dedans un pré (C.N.N., c.1456-1467, 88).

 

3.

P. ext.

 

a)

Empl. trans. Paistre (un animal) "Nourrir (un animal)" : Je l'eus [le lion] si juene et si petit Que pour fain, ne pour appetit, Ne pour destresse qu'il eüst De famine, il ne se sceüst Rapaistre ne mangier par li ; Si vos qu'il n'i eüst celi Ne celle par tout ce vergier Qui riens li donnast a mengier N'a boire, se ne li donnoie ; Si que jour et nuit le paissoie, Sans fallir, de ma propre main Toutes les fois qu'il avoit fain. (MACH., D. Lyon, 1342, 226). Lors faut que li contes li dongne [au faucon] Le cuer de l'oisel, c'est sa chasse, C'est ce pour quoi il vole et chasse. (Ainsi le paist, ensi le lurre Dou cuer de l'oisel sur le lurre.) (MACH., Voir, 1364, 724). ...ledit de Saint Laurens est tenu faire et païer par chacun an, tant pour lui que pour ses hommes dudit fieu, une mine de seigle du pris de XII d. t. pour paester les chiens du roy quant il vient en son manoir d'Oessel. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 52). Ce que Apollo aussi est en l'ostel du roy Ameteus receus et qu'il le fit son pasteur et garde de ses bestes, c'est a dire, et non autre chose quant a ceste exposicion, que les bestes ne sont norries ne peues fors par les herbes que le soleil leur livre. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 534).

 

Rem. HENRI FERR., Modus et Ratio T., c.1354-1377, gloss.

 

-

Paistre et nourrir au doigt. "Paître et nourrir avec soin" : Et pour ce qu'on dit que cremour N'est pas volentiers sans amour, Et il me crient tant comme il puet, Et croy qu'Amours a ce l'esmuet, Et si l'ay longuement au doy Peü et norri, je le doy Mieus amer c'une beste estrange ; Car volentiers fui et m'estrange Des bestes qui ne sont privées, Pour ce que condicionnées Sont de si divers esperis Qu'il y a tout pleins de peris. (MACH., D. Lyon, 1342, 227).

 

b)

Empl. intrans. [D'un animal] "Se nourrir (aux champs, aux bois...)" : LE FOL. (...) Je vi quant ma mére fut née Qu'elle menoit les truies paistre Dedans le chapperon d'un prestre... (Mir. parr., 1356, 17). Item, cogneut que, quatre ans a ou environ, en passant par un bois qui est en la conté du Perche, trouva oudit bois et vit sept ou huit pourceaulx, n'est record lequel, qui paissoient esdiz bois, à sept lieues de la ville de Nogent, et qui estoient sanz garde (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 109). Mais que j'ay veu depuis six ans Paistre de grues parmy les champs Qui toutesfois s'en sont vollees. (Rapp., c.1480, 59).

 

-

[Cont. métaph.] : Certes, dist elle, le pourpoint Si te fust bien taillie a point, Se tu a point fusses taillies ; Mais a toi tient qui apointiez N'es pas a droit selonc son point, Quar trop es cras et as trop d'oint Dessous l'elë et trop es drus, Trop reveleus et trop pëus. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 122). Vous estes ministre et pasteur Des povres berbis esgarees Qui, par quelque faulx seducteur, Des bons pastis sont separees Et de mal paistre preparees Au dangier, dont souvant advient Qu'elles sont du loup devorees, Quant ainsi dessus elles vient. (LA VIGNE, S.M., 1496, 258).

 

.

[Par dérision, d'une pers.] : Pour ce sui sy vostres, par saint Sevestre, Qu'avec les bues me poés faire pestre A vostre guise. (MACH., Voir, 1364, 552). En celui temps ne paissoit ou jardin de justice de France telle vaquerie [p. allus. à Jean de la Vacquerie, premier président du Parlement de Paris] comme à present ! (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 140 v°).

 

-

[Pour marquer l'idée d'une situation inverse de la normale (c'est le monde à l'envers)] : Par me foi, dist Jourdain , je croi que li oison Menront les auwez paistre (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 876). Les oisons mainnent les oes paistre. (Path. D., c.1456-1469, 194).

 

c)

Empl. pronom. "Se nourrir" : ...les povres chiennés famis Qui dessoubz la table sont mis, Aucuneffoiz se peuent paistre Des mïettes qui de leur maistre Dessoubz la table leur descend. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 166).

B. -

P. ext. [À propos de personnes] "Nourrir"

 

1.

Empl. trans. Paistre qqn. "Nourrir qqn" : ...mon enfant chier : Ne vous sçay lever ne couchier, Ne si ne vous sçay de quoy paistre. (Mir. fille roy Hongrie, c.1371, 61). ...touz jours estoit diligens Des povres paistre et soustenir. (Mir. roy Thierry, c.1374, 287). Les .VIJ. euvres de misericorde sont paistre les povres, donner a boire au povre, vestir le povre, herbergier le povre, visiter le povre malade et l'enchartré, conseillier le povre et ensevelir le povre. (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 254). Mains sont vngs des membres plus hardiz et plus entremettans de ce qui est neccessaire au corps que tous les ault[r]es membres car premierement l'en en promet foy l'en en peest le corps l'en en fait les oeuures de vaillance le principal labour d'oeuure de homme et le plus neccessaire et est le plus entremettant de dessus le corps. (Best. hérald. H.E., c.1435-1450, 505). ...son maronnier, qui moult de biens et d'ayde lui avoit fait tant en elle paistre comme en elle reconfortant (WAUQUELIN, Belle Hélène Const. C., c.1448-1452, 54). Feu, boys, charbon, fins souffres, salpestres, Brayes et guestres pour fonder ostz champestres, Et pour gens paistre durement a la foulle, Cherz, charïotz, brouettes, huys, fenestres, Cordes, chevestres, soubbassemens silvestres En mains sequestres redigea on par roulles (LA VIGNE, V.N., p.1495, 133).

 

Rem. L'ex. suivant (à interpréter prob. "fournissant la nourriture nécessaire pour vivre") s'analyse plus difficilement (constr. à compl. d'obj. interne ?) : La descendi du ciel manne saintie Non descroissant, paissant le neccessaire, Et ce fait fu pour touz amans atraire A bonne Amour servir (Mir. st J. Paulu, c.1372, 150).

 

-

"Repaître" : [Le géant Polyphème] quanqu'il attaint il cravente Pour paistre sa gueule senglente : Quant les hommes prent, il les tue, Puis les deveure et les mengue, Si que li sans aval degoute Parmi sa barbe goute a goute. (MACH., Voir, 1364, 620).

 

-

Bien/mal peu. "Bien / mal nourri" : Il avoient trop de meschié ; Trop avoient de dures fins, De durs lis, de mauvais coussins ; Souvent estoient mal peü. Nulz ne scet, s'il ne l'a veü, Ce qu'il leur couvenoit souffrir. (MACH., D. Lyon, 1342, 210). Et s'on t'aportoit a cautelle Ceste viande bonne et belle Et puis tu en mengasses trop, Tu t'ociroies a un cop, Qu'on te donroit a la traverse Après d'une autre si diverse Et si anuieuse a mengier Que tu n'en porroies mengier. Einsi seroies deceüs, Mal gouvernez et mal peüs. Si qu'amis, pren ta soustenance, Mesure et poise en la balance Tant la mauvaise com la bonne. (MACH., C. ami, 1357, 61). ...il n'avoit pas grant quantité De gent qui fussent bien haitiez ; Einsois estoient mal traitiez, Lassé, foulé et travillié, Mal peü et mal abillié, Pour le chaut et pour la bataille. (MACH., P. Alex., p.1369, 95). Nos chevaus n'ont paille ne fein, Si que eaus et nous morrons de fein. Et s'est li soudans près de ci, Qui amenra, je vous le di, Par Vc. fois Vc. mil hommes, À si po de gens que nous sommes, Et seront fres et bien peüs ; Si que, sire, trop deçeüs "Seriés de ci demourer, Pour nous tous faire devourer. Car po de chose est, sans doubtance, De nous encontre sa puissance, Meesmement en son païs..." (MACH., P. Alex., p.1369, 102).

 

-

[Cont. métaph.] : Quant la dame malcontente et plaine d'ingratitude de son Espous immortel et de son mari mortel aussi est bien peue et saoulee de viandes delicieuses de ce monde et paree de biaus ornemens es quelz elle se delitte fort, elle chiet souvent ou pechié de peresse et de negligence de soy meismez. (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 278).

 

-

Paistre sa faim de. "Apaiser sa faim avec" : Nompourquant li fols retourna Et set jours entiers sejourna Devant la dolereuse porte, Qu'il n'est homs qui riens li aporte. Sa soif estanche de son plour Et sa faim paist de sa dolour. Mais la puet assez demourer, Assez puet braire, assez plourer Et pleindre soy tant qu'il vorra, Que jamais ne la reverra (MACH., C. ami, 1357, 91).

 

2.

Empl. intrans. ou pronom. "Se nourrir" : EVE. Des autres [fruits] avons la jouÿssance Par voulenté divine et pure, Et en pouons prandre a plaisance Pour paistre et substanter nature. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 53).

C. -

Au fig.

 

1.

Loc. fig. Faire/mener/envoyer qqn paistre (comme on le ferait d'un animal)

 

-

Faire paistre qqn. "Moquer qqn, le tourner en ridicule, le tromper, le mener comme une oie ou un mouton" : DACIEN. Seigneurs, je cuit qu'il nous fait paistre : En touz ces tourmens rien n'aconte, Par enchantement les surmonte Et mes paroles tient a foles. (Mir. st Lor., 1380, 181). Tu me cuidois bien faire paistre. (Myst. st Clément Metz D., p.1439, 535). Et fait l'en, las, atendre et pestre Cellui qui... (VAILLANT, Oeuvres D., c.1445-1470, 146). Tu nous cuides bien feyre pestre De nous dire tieulles frivolles ? Cuides tu que par tes paroules Nous croyons ainsi de legier ? (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 186). Par le sang bieu, il vous fait paistre ! (Path. D., c.1456-1469, 162). Mais me cuides tu faire paistre ? (Copp. lard., a.1488, 178). Par bieu, elle me fait bien paistre, Je croy que c'est le chien au prestre : Elle est malade quant el veult. (P. Jouh. D.R., a.1488, 37). Laisse vostre faulce loy Qui vous fait nuyt et jour bien paistre Mais Jhesu Crist nostre doulx maistre De bon cueur vueil tout jour amer (OUDIN, St Genis M.S., c.1490, 85).

 

Rem. Myst. process. Lille K., t.1, a.1485, 8/184.

 

.

Faire paistre qqn en ses lacs. "Attraper qqn dans son piège, le tromper" : LUCIFFER. Va y tost et luy dis [à saint Martin] combien De maulx le jour il peult commectre Et que tout son fait ne vault rien, De tant misericordieux estre. BURGIBUS. Si en mes las ne le foys paistre, Je suis contant que l'on me bate. (LA VIGNE, S.M., 1496, 483).

 

Rem. Cf. DI STEF., 630c-631a.

 

-

Mener qqn paistre. "Tromper, duper, abuser qqn" : MATHEUS. (...) Nous avons veü nostre sire En corps tout vifz cy en presence. THOMAS. (...) Je n'aray ja en ce creance, Et fut mille foix mieulx mon maistre, Sui ge beste pour mener paistre ? (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 267). Par Dieu, elle [ma femme] me menroit pestre Bien souvent, et dit bien et bel Des nues que se sont pel de veel. (Myst. st Clément Metz D., p.1439, 343).

 

-

Envoyer/chasser qqn paistre (au champ). "Chasser qqn, se débarrasser de qn, envoyer qqn promener" : ...[il] trouva maniere d'avoir d'elle son argent, ses bagues, ses joyaux, et tout jusques a la chemise ; et puis l'envoya paistre (C.N.N., c.1456-1467, 14). Consydera aussi de la battre ou injurier de parolles que c'estoit peine perdue ; si s'advisa a chef de piece qu'il la chassera paistre en sus de luy (C.N.N., c.1456-1467, 419). On pert et ne sait on comment ; Que celuy qui cuide estre maistre Par maleur et par aultrement, Bien souvent on l'envoye pestre. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 571). CLAUDE. Mieulx luy vauldroit qu'il fust a naistre, L'usurier parjure, faulsaire ! Aux champs je l'envoyeray paistre Puisqu'a tort il me veult deffaire. (LA VIGNE, S.M., 1496, 521).

 

-

Faire qqn le foin paistre. "Tromper qqn, le mener comme un sot" : ...il [Dieu] sommet Ton corps, ton honneur, ta puissance, Ta gloire, ta magnificence, Ton roiaume, ta dignité et Toute ta felicité A mort et a destruction, Pour ce qu'as fait oblation Aus ydoles et sacrefice Et as laissié si digne office Com d'aourer le roy celestre Qui ton pere fist le feinc pestre. Tout ce verras isnellement Parfait, se Daniel ne ment. (MACH., C. ami, 1357, 33).

 

2.

Paistre qqn

 

a)

Paistre qqn de. "Rassasier qqn de" : ...tout garist son dous regart Qui paist d'amoureuse vitaille Mon cuer et dedens li entaille Sa biauté fine par tel art Qu'autre n'est de quoi il me chaille, Et des biens amoureus me baille Tant qu'il n'est joie qui me faille (MACH., R. Fort., c.1341, 24). Et en riens n'as recongneü Les biens dont elle t'a peü (MACH., Voir, 1364, 222). De paine et de june le paix. (THOMAS MAILLET, Prov. Alain H., c.1375-1400, 68). C'est ce qui de joie me pait, Ce me norrit, ce me refait, C'est ce qui en mon cuer ne lait Doleur, tristece ne pesence (MACH., Les lays, 1377, 369). Car se je amoie assés plus Que je ne fais Et s'heüsse plus que nus Pris en tous fais, Si suis je norris, refais Et pourveüs Largement, et bien peüs De ses bienfais. (MACH., Les lays, 1377, 433). Mes amys, esjouÿssez vous En Dieu qui tout bon cueur conforte, Car la nouvelle vous apporte Qui plus de joye vous doit paistre. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 858).

 

-

Part. passé : De desconfort, de martyre amoureus, De griés soupirs, d'une crueuse ardure, De pleins, de plours, d'un mal tres dolereus Pleins et peüs de triste nourriture, Vuis et geüns d'amoureuse pasture, Vit en morant, dame, li cuers de mi En desirant vostre douce merci. (MACH., Bal., 1377, 542).

 

-

Paistre qqn de vent. "Entretenir qqn de vaines promesses" : Mais toutesfoiz j'en suis trop bien vengee, car telx folz, menans si large vie, communement meurent pauvres et sont paissuz de vent. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 331). "...Les grans seigneurs", dist Magnificence la chambriere, "aujourduy plus delictent en leur seigneurie qu'ilz ne font au bon gouvernement de la chose publique, qui leur est commise de Dieu, quant ilz encline[n]t les oreilles aux maistres dessusdiz et conseilliers, aux heraulx, faiseurs de bourdes, mahommes et chambrieres. Et sont paissuz de vent des le matin jusques au seoir, cuidant de blanc que ce soit noir..." (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 533-534).

 

-

Se paistre (de qqc.). "Se nourrir (de qqc.)" : Elle [Souffissance] n'avoit besoing de riens, Ne li failloit chose nesune ; Hors estoit des mains de Fortune Et de son perilleus dangier. De po se paissoit au mengier, Car plus refaite estoit d'un ouef Que ne fust un autre d'un buef. (MACH., J. R. Nav., 1349, 181). Et telz sont ceulz qui se paissent ou mangüent du gaaing des foles femmes incontinentes et tous telz gens. (ORESME, E.A., c.1370, 240).

 

.

"Se satisfaire de qqc." : De ceste parole me pais (Myst. st Clément Metz D., p.1439, 358).

 

b)

Paistre qqn. "Graisser la patte à qqn" : Il n'est finance nulle, tant soit grande, que gens d'armes n'exillent et mettent à fin, car qui voelt avoir leur service, il faut que il soient pascu , ou autrement, il ne font cose qui vaille (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 182).

 

-

Paistre qqn de gras morceaux : Et si les juges sont preudommes et cognoissans leurs sofismes [des avocats], et vouldront proceder a sentence diffinitive, lors les advocaz propouseront erreurs, privileges, estaz, escriptures et evasions, et parlant moralment, civiles interlocutoires, par lesquelles quatre ou cinq ans passeront, voire aucunesfoiz XX ou XXX, avant que le principal, qui sera comme oublie, puisse venir en place, c'est assavoir du pauvre defendant qui paistra l'advocat de graz morceaux et de son propre sang, comme le pellican fait ses petis pellicains. Et tant le paistra que riens ne lui demourra. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 465).

 

3.

Paistre qqc. "Nourrir qqc." : Car il n'est qu'un Dieu seulement Par lequel li quatre element Sont fait, dont toute creature Prent soustenence et norriture. Cils Dieus qui tout paist et gouverne Le centre dou ciel et le cerne, Le soleil tient haut en ardure Et la lune bas en froidure, C'est li sires qui si bien nombre Qu'il scet des arainnes le nombre (MACH., C. ami, 1357, 48).

 

-

[Un argument] : Sophistique, par qui on paist Argument par divers sophisme... (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 129).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

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