C.N.R.S.
 
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     QUITTE     
FEW II-2 quietus
QUITTE, adj.
[T-L : quite ; GD : quite ; DÉCT : quite ; FEW II-2, 1471b, 1472b : quietus ; TLF : XIV, 178a : quitte]

A. -

"Délié d'une obligation (dont on s'est acquitté)"

 

1.

Quitte de qqc. "Délié de (d'une obligation financière, légale, juridique..., en partic. d'une dette pécuniaire, d'une corvée, d'un office que l'on doit remplir...)" : Une foiz ou deux la sepmaine Il s'en aloit esbanoier Avec Petre le fauconnier (...). Maiz la messe estoit avant dite Et de son office estoit quite ["il s'était ainsi acquitté de son office"] (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 289). ...que nous soiens et demouriens quictes et deschargez de la promesse et obligacion devant dicte (Ch. VI, D., t.1, 1387, 78). ...et demouroit ung chascun quite et absolz de toute foy, service, hommage et fidelité envers les dessusdis (FAUQ., I, 1417-1420, 361). ...que ledit receveur soit tenu pour quicte en nous rendant (...) les diz mars d'argent par lui receuz (Ch. VI, D., t.1, 1422, 416).

 

-

Empl. abs. : ...item, deux hostieux qui doivent chacune une mine de blé, et sont quictez pour tout. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 27). ...et après po de paroles ont eu iceulx prevost et bourgoiz aggreable, et sont contens que ladicte Court soit quitte parmi la somme de mil libvres tournois (BAYE, II, 1411-1417, 34). [Contexte métaph. ; c'est Sapience qui parle] Le pris y est tant acceptable, Tant precïeux, tant agreable Que nature humaine tient quicte ["je considère que la nature humaine s'est acquittée de tout ce qu'elle devait"] Et toute la franchist et quicte De ce que luy pouoit devoir (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 454).

 

-

Bailler qqc. en quitte. "Accorder qqc. pour se libérer de toute dette, de toute réparation" : ...et se à recepvoir faisoit, à malvaise cause s'estoit ad ce opposés, en devoit dequeir, adrechier et amender et ce qui estoit en le main du Roy pour l'opposition des parties leur devoit estre baillié en quitte et en delivre (Hist. dr. munic. E., t.1, 1374,,, 387).

 

-

JEUX Jouer à quitte et / ou à double. "Jouer une dernière partie qui, si l'on gagne, rattrape toutes les pertes"

 

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"Risquer le tout pour le tout" : ...mais je n'entens pas que aucuneffoys on ne mette peine de surprendre son ennemy, comme en ung logeiz, en chevauchant ou par une embuche. Et en joue l'en à quitte ou à double ; car, qui fault à les surprendre et ilz vous voient venir, je dy pour ce qu'ilz sont arrestez, qu'ilz ont de grans avantaiges. (BUEIL, I, 1461-1466, 201). ...quant il vit qu'il les vouloient enmener, il print ung baston, en disant que à celle heure falloit jouer à quicte et à double, et se parforça et ingera de frapper lesdiz francs archiers. (Doc. Poitou G., t.12, 1481, 440).

 

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Faire (à) deux et / ou (à) quitte. "Risquer le tout pour le tout" : ...je feray deux ou quitte, Quant je ne puis avoir un doulz regart : Se ce temps tient, je devendray hermite. (DESCH., Oeuvres Q., t.1, c.1370-1407, 132). CUPIDO. Belle, se vous prenez amy Par amour, au jour la journee, Vous serés vestue, aournee Autant a l'endroit qu'a l'envers, Et s'on vous dit rien de travers, A Dieu jusques au revenir. Il ne vous scauroit rectenir Contre vostre consentement ; Oultre plus de l'apoinctement Qui se fait a deux et a quite, Vous en serés tresbien conduite Tous les jours face froit ou chault. (P. moyne, a.1500, 46).

 

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Estre quitte de qqn. "N'avoir plus d'obligations à l'égard de qqn" : ...il [le mari] fut quitte de sa femme et de ses enfans [À sa mort, une femme infidèle rend à chacun de ses amants les enfants qu'elle a eus d'eux] (C.N.N., c.1456-1467, 329).

 

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Quitte et quitte. "Sans qu'il n'y ait plus ni d'un côté ni d'autre aucune obligation envers l'autre" : Amours, a vous ne chault de moy, N'a moy de vous, c'est quicte et quicte (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 503).

 

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Quitte à quitte : Et s'il ne lui plaist, quitte a quitte (DESCH., Oeuvres R., t.7, c.1370-1407, 346).

 

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Quitte quitte

 

Rem. CUVELIER, Chron. Guescl. C., t.1, c.1380-1385, 10861 (Ne sai se me devez ou se nous vous devons : Or soit tout quite quite, puisque nous departons).

 

-

Prov. : N'est pas quitte qui doit de reste. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 196).

 

Rem. GERS., Oeuvres G., t.7, 295 : N'est pas quitte qui doit de reste ; Prov. H., Q12.

 

2.

Au fig. "Libéré, affranchi d'une obligation morale" : Dont je di que si fais descors Sont propres causes de racors Qui font les larges paiemens De trés dous assouagemens Des quels amans est appaiez, Tant qu'il s'en tient pour bien paiez. Einsi Amours la dame acquite Vers l'amy, tant qu'elle est bien quitte Et li amans en est meürs Plus que devant et plus seürs. (MACH., D. Aler., a.1349, 253). Mais encores n'estes vous pas quicte : une autre foiz nous compterons a vous. (LA SALE, J.S., 1456, 51). ...encores n'estes vous pas quicte : vous nous avez fait et faictes tousjours tant de peine et de meschef que nous vous avons gardé ceste pensée (C.N.N., c.1456-1467, 189).

 

-

"Affranchi de l'obligation que crée un bienfait" : Et donques la cause dessus dite a lieu tant seulement quant as malvais, car il vient de grant iniquité que un veuille estre absoulz et quicte des biens receüs senz faire retribucion ne regraciacion. (ORESME, E.A.C., c.1370, 473).

 

-

Quitte d'une promesse. "Libéré d'une promesse que l'on a satisfaite" : Puis pensons de nous adressier D'aler le presenter [ce cuer] Maliste, Afin que chascun tiengne a quitte De sa promesse. (Mir. Berthe, c.1373, 184).

 

-

Quitte vers qqn. "Libéré d'une obligation envers qqn" : ...regardons par quel point Vers Maliste quites serons Du cuer que porter lui devons (Mir. Berthe, c.1373, 183).

 

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Loc. Ne pas en estre quitte. "Ne pas s'en tenir à qqc., ne pas être en reste de qqc." : Li roys avoit au col sa targe, Dont bien et sagement se targe ; Et certes il li est mestier Qu'il en sache bien le mestier, Car les Sarrazins des creniaus Li ont trait plus de C. quarriaus ; Et li autre n'en sont pas quite, Car li Sarrazin grant merite Attendent des nostres tuer. Si ne font que traire et ruer Pierres, sajettes et garros. (MACH., P. Alex., p.1369, 88).

 

3.

Estre quitte de / pour + inf. "Se délier d'une obligation en, se libérer en" : Et la partie a cui Dieu donra du pire, chascun de nous sera quicte pour donner ["en donnant"] son dyamant en sa visiere, et ilz seront quictes pour donner chascun un semblable dyamant que sont les nostres. (LA SALE, J.S., 1456, 231). Alors les assegies considerans que se ilz estoient prins par force ilz ne seroient pas quites pour seullement perdre les biens, mais aussy les vyes, se misrent a tres grant deffence (WAVRIN, Chron. H., t.4, p.1471, 90).

 

-

Estre quitte de + inf. "Ne plus avoir d'autre possibilité que de" : Trois bonnes villes y a pris Et destruites li roys de pris, Dont vesci les noms, sans doubtance ; C'est Tourtouze, Liche et Valence, Et maintes grandes et petites, Qui de peler les aus sont quittes, Car c'est tout mors et mis en cendre, Sans espargnier homme ne prendre. (MACH., P. Alex., p.1369, 212).

B. -

"Exempté, dispensé (d'une obligation)"

 

1.

[D'une pers.] : Ainsi n'est ce pas, a m'entente, Uns oiseaus qui doie estre en vente, Car il est a si grant signeur Qu'il le tient et garde a honneur Et de tous servages l'aquite, Tant qu'il le donne franc et quitte. (MACH., D. Aler., a.1349, 310). ...il n'avoient de quoy paier. Ly usurier lez clama quicte ["efface leur dette"] (Myst. Pass. N.S. R., c.1350-1370, 103). L'EMPERIÉRE. (...) Il convient qu'a l'un de ces deux Vous combatez. BERENGIER. Sire, ja plus n'en debatez : Trop voulentiers, mais que me dites Pour lequel d'eulx je seray quittes Avoir affaire ["lequel des deux je n'aurai pas à affronter"]. (Mir. Oton, c.1370, 378). ...leurs prevostz et moniers sont quittes et frans semblablement. Et de ce sont subgets guestier au chastel de Breouse chacun une nuyt et un jour par an. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R.B., 1398-1402, 44).

 

-

Quitte de : L'un venist par devotion Au sepulchre en pelerinage Et fust quittes de tout servage ; L'autre venist pour marchander, Et li autres pour demander Le demi commerque dou roy (MACH., P. Alex., p.1369, 184). Car l'en lit in Cronica Eusibii que, pour la victoire que ilz eurent contre lez Alemans, l'Impereur Valentinian voult et ordena que ilz fusent frans et quittes de toutes aides et de tout tribut juques a diz ans (Songe verg. S., t.1, 1378, 146). ...et me clamerez quitte de la bataille ["vous déclarerez hautement que je n'ai pas à livrer bataille, puisqu'à présent vous me demandez pardon"] (Chev. papegau H., c.1400-1500, 41). ...[le cardinal de Pise] s'estoit chargié et offert d'escripre au Pape que voulsist tenir les seigneurs de ceans, graphier et notaire frans et quittes du dixiesme imposé sur le clargié de France qu'il avoient refusé à paier, pretendens en estre quittes par previlege (BAYE, II, 1411-1417, 37). Ha dya, dist l'oste, puis que monseigneur et tant de gens de bien le payent [la dîme], je n'en doy pas estre quicte, combien que je m'en passasse bien. (C.N.N., c.1456-1467, 221).

 

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Tenir qqn à quitte de qqc. "Considérer qqn comme libéré d'une obligation" : ...et de la somme en quoy et pour quoy estoient obligées et transportées en sa main, comme perpétuel gage, il en quittoit et tenoit à quites et absous perpétuellement le roy Loys, roy de France pour lors, et tous les autres roys de France ses successeurs pour le temps advenir, sans jamais y réclamer droit, ne aucun recoeuvre. (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 396).

 

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"Être libéré d'un engagement qu'on a pris (inconsidérément)" : Et Florimons [qui regrette d'avoir appelé le roi en champ clos] y est, qui chace En toutes guises et pourchace Qu'il soit quittes de son appel, Où bien porra laissier la pel ; Car c'est son principal desir Qu'à honneur s'en puist departir. (MACH., P. Alex., p.1369, 236).

 

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Estre quitte de l'amende. "Échapper à l'amende" : [D'une pers. qui a accepté d'effectuer un travail qui lui était imposé sous peine d'amende] Or sa, nous sommes quictes de l'esmende. (Pass. Auv., 1477, 179).

 

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"Qui est exempt d'une peine" : Et aussy se en la darrienne heure de la mort la personne en grace demande estre quitte de purgatoire, sa priere est oÿe : Quia perseverat, pie petit et pro se. La Xe question : Se je fais me penitence qui me sera baillee en confession, en seray je quitte ? Response : Se elle est bien baillee et discretement, oÿ, et se elle est faicte en estat de grace (GERS., Déf., 1400, 237).

 

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JEUX Faire (qqn) quitte. "Dispenser qqn de l'obligation de jouer (et de payer la dette de jeu)" : [Prov.] Au fruit cognoist on l'olivier Et aux armes qui bien s'aquitte ; Qui a bel a jeu ["celui qui a l'avantage au jeu"] n'en fait quitte. (TAILLEV., Prise Luxemb. D., 1443, 169).

 

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Estre quitte de + inf. "Pouvoir se dispenser de + inf." : Plehut a Dieu, dit li villain, Que messire et mon chappellain Fussent deux bons chapons rotis. Ja n'y querroie sal ne pain. Je les mengeroie a deux main, Quittes serient [var. seroye, seroient, seriens] de sevelir. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 142). [P. dérision] Il est quicte de desbillier Son abit (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 263).

 

2.

[D'une chose]

 

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[D'une rente, d'un tribut...] "Qui n'est plus l'objet d'une obligation" : "Empereres (...) pour Dieu te volons prïer Que tu nous voeulles ottroier Qu'en Babilonne ne paions Treü..." Tout treü et toute debite [l'empereur] A leur volloir leur clama quitte (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 120).

 

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[D'un héritage, d'une terre] "Sur quoi ne pèse aucune restriction, aucune condition, aucune obligation" : Après, quant de l'arche ilz issirent, Toute la terre departirent Les trois filz Noé a leurs vies. Le partirent en trois parties : Ly aisné et le plus poissant Tint la terre d'Asie la grant ; Caÿm, qui fut le moyen filz, Toute l'Auffricque ot a par lui (...). Et Japhet tint Europe quicte (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 84). [L'Europe est quitte de toute condition. Ou quicte se rapporte-t-il à Japhet (Japhet régit l'Europe sans restriction, sans condition, hors de toute revendication) ?] ...et avec toy conqueray grant terre, et sy l'avrais toute quite, pour l'amour d'ung parin que j'ay, cuy nom je porte (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 112). Bien doit estre champ de sang dit Quant, pour l'acheter quicte et franc ["libre de toute rente"], Fut vendu le precïeux sang de Jhesus (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 443). ...les huit chevaliers arbitres entre Pantus et sa soeur estoient au palais pour ordonner la sentence devant les parties [au sujet de la succession du royaume]. Sy vous advertis, selon ce que l'en sceut depuis, Pantus emportoit le royaume quitte, disant que femmes ne peuvent succeder a couronne tant qu'elles aient freres vivans. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 329). [Mais peut-être quitte se rapporte-t-il à Pantus (Pantus acquiert le royaume sans restriction, sans condition)]

 

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[D'un procès] "Qui n'entraîne aucune obligation, aucune condamnation" : Mon chier signeur, font cilz larron [des avocats], Se vous me donnez bon guierdon, Vous avrez vostre plait tout quitte. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 112). [Mais là aussi, quitte peut se rapporter à vous]

 

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Avoir qqc. quitte. "Avoir qqc. gratuitement, sans que cette chose soit frappée d'une quelconque obligation" : MERCIER. Joseph, moult me doit enbellir La parole que m'avez dicte. Le sydoine [pour ensevelir le Christ] vous arez quitte ! Vostre est et vous l'enporterez, Ne ja deniers n'en paierez. (Myst. Pass. N.S. R., c.1350-1370, 228).

 

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Donner qqc. franc et quitte. "Donner qqc. sans que cette chose soit frappée d'une quelconque obligation" : Nompourquant nulz commandement N'a en tel cas certeinnement, Tant y ait longuement servi ; N'onques nuls homs ne desservi Tant qu'il peüst de dame traire Merci pour cause de salaire, Jusqu'a tant qu'Amours en ordonne Qui tout franc et quite le donne. Tout autant y est desservans Non servans comme li servans. (MACH., D. Aler., a.1349, 306). Mais vëons la condition D'Avis selonc s'entention : Il donne conseil franc et quitte Et n'en attent autre merite, Fors ce que li juges tant face Qu'il en ait pais, honneur et grace. (MACH., J. R. Nav., 1349, 258).

 

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Estre mien quitte. "Être mien sans obligation, sans restriction, totalement" : Et certeinnement, se j'eüsse Tant de bien en moy que je fusse Aussi sages com Salemons, Et fust miens quittes tous li mons, Et aussi preus comme Alixandres Ou comme Hector, qui gueres mendres Ne fu de li quant a valour, Et s'eüsse autretant d'onnour Comme ot Godefroy de Buillon, (...) Ne peüsse je pas souffire Pour dame amer de tel affaire. (MACH., R. Fort., c.1341, 5).

C. -

[D'une pers.] "Libéré (grâce à qqn ou qqc.) d'une situation défavorable, acquitté (d'une faute, d'une accusation, du péché...)"

 

1.

"Libre, libéré" : ...sire, touz frans et quittes Delivrez ces deux inocens ; Moy justicez, je m'i assens (Mir. femme, 1368, 203). Li roys molt grant courrous en a : Pour ce fist tant qu'on ordena Que desormais chascuns iroit Franchement et quittes seroit, Mais qu'il heüst lettres de lui N'il n'en vuet excepter nelui, Einsois vuet que chascuns y aille Sans paier ne denier ne maille. (MACH., P. Alex., p.1369, 174). Oubliée estoit leur tristour, Qu'il savoient pour verité Qu'en Alixandre la cité Les devoit li bons roys livrer, Et frans et quites delivrer. (MACH., P. Alex., p.1369, 181). Ainssy franc et quicte s'en vint (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 44). ...quant il [le Chevalier à l'Aigle d'Or, emprisonné] sceut qu'il seroit delivré francq et quitte, il en fut moult joyeulx. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 137). S'il revient de captivité A franc arbitre, lige et quite... (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 256).

 

-

Quitte pour qqc. "Libre, en échange de qqc." : Les Atheniens avoient guerre contre les Lacedomoniens, si fu ordené de commun acort que chascun prisonnier d'une part ou d'autre seroit quicte pour certainne somme. (ORESME, E.A.C., c.1370, 303).

 

2.

"Libéré, débarrassé de qqc. (de pénible, d'encombrant, dont on veut se séparer...)" : Sus, traistre, ce champ vuidiez ; N'estes pas pour ce, ne cuidiez, Quitte de mort. (Mir. Oton, c.1370, 383). ...la pucelle (...) estoit tant troublee qu'elle desiroit plus la mort que la vye, et la renouvella son doeul. (...) Et elle, qui riens ne queroit que la mort pour en estre plust tost quitte ["débarrassée de sa douleur ou débarrassée de la mort ?"], plouroit moult tendrement. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 208). ...il se releva au plus tost qu'il peut, puis fery par grant yre le poisson a travers de tel randon qu'il lui fist voller la teste a terre. Et quant il fut quitte de ces quatre poissons... (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 275). ...et avoient intencion de vendre illecq de leur marchandise (...) ...les mariniers (...) ne partiroient point de la jusques a ce qu'ilz seroient quitte de leurs denrees ["débarrassés de la marchandise qu'ils veulent vendre"] (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 286). ...la courtoise nonnain, affin d'estre quitte de l'ennuyant poursuitte que le moyne faisoit (...), luy baille jour (C.N.N., c.1456-1467, 106). ...mainte frayeur, dont maintenant il estoit quitte. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 87). [Quentin martyrisé] ...si tost qu'il fait oroison A son dieu (...), Il est de tout quite et delivre (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 243).

 

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S'en aller quitte. "S'en tirer (d'un danger, d'une situation pénible...)" : Toutesfoiz n'est pas nécessaire Que tous ceulx de celle partie Meurent de celle maladie ; Car les aucuns, pour les mérites De leur nature, s'en vont quittes ; Les autres paient le trehu Du mauvaiz air qu'ilz ont béu (LA HAYE, P. peste, 1426, 59).

 

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Une fois quitte. "Une fois libéré (ici d'un amour qu'on a refusé)" : Ung loyal doit estre servi De grace, et non pas desservi Par reffus ou euvres despites. S'autrement le faictes ou dictes, Vous en mourrez une foiz quictes Par Amours, qui s'en vengera. (Narcissus, p.1426, 306).

 

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Être quitte de qqn. "Être libéré de qqn" : Le roi Souvain est par la lance De saint Emont geté de vie (...). Ainsi remaint le peuple quitte Du roi (Tomb. Chartr. Souvain S., c.1337-1339, 38). Sy vous advertis que le vray amant est de telle condition que, incontinent qu'il aproche du lieu ou sa dame se tient, il n'avra en sa compaignie sy bon amy dont il ne voulsist estre quitte, car il lui samble que sa compaignie lui empesche sa besongne. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 292). ...monseigneur le president (...) loa Dieu a joinctes mains de ce qu'il est quicte de sa femme. [Trompé par sa femme, l'homme s'en est vengé en réussissant le crime parfait] (C.N.N., c.1456-1467, 314). Et le duc (...), si tost que se trouva quite du dauphin, dont il ne craignoit riens tant que son retour devers luy arrière... (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 239). Puis l'Ennemy, en chemin ethroclite, Me cuyda faire aulcun grant vitupere ; Mais, sans nul mal, tantost fus de luy quicte. (LA VIGNE, S.M., 1496, 357).

 

3.

Au fig. "Être libéré d'une faute (commise ou dont on est accusé), en être acquitté ou innocenté" : Or vueillez, s'il vous plaist, espondre Le fait de quoy vous vous dolez ; Et s'einsi faire le volez Vous ensieurez la juste voie De droit, ou je ne saveroie Le fait congnoistre ne niër. Se non, vous devez ottriër Que je m'en voise frans et quittes De ce forfait que vous me dites ; J'en atenderoie bien droit. (MACH., J. R. Nav., 1349, 166). ...Et avec ce il pourchassera Tant par devers nostre Saint Pere, Que, s'il est ainsi qu'il appere, Qu'aucuns ait permise la voie Au Saint Sepulchre, il li ottroie Qu'il face son pelerinage À la columpne et son voiage, Et qu'il soit quittes et absos, Soit grans, petis, sages ou fos, Se li soudans empeschement Y metoit, et non autrement. (MACH., P. Alex., p.1369, 175). DIEU LE PERE. (...) Toy, femme, ne seras pas Quicte De ton mal ["innocentée du mal que tu as fait"] (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 19). PYLATE. Joseph, il convient la venir Que la chose s'est mal conduicte, Combien que j'en doye estre quicte. En riens coulpable n'en suis : Ce ont fait ces envïeux Juïfz (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 356).

 

-

"Pardonné (d'une faute)" : [Si tu aides le pécheur dans ses actes] A grant penne en puez estre quitez. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 206). SAINTE AGNÈS. Aussi de bonne voulenté, (...) Li pardoing quanque il me meffist (...). SAINT PRIST. Grant merciz : puis qu'a vous est quites, Au surplus besongnier yray (Mir. prev., 1352, 253). A vostre Filz dictes vous [la Vierge], que je [la mère de Villon] suis scienne ; De luy soient mes pechiez aboluz. Pardonne moy comme a l'Egipcïenne, Ou comme il fist au clerc Theophiluz, Lequel par vous fut quicte et absoluz, Combien qu'il eust au deable fait promesse. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 79). ...Dieu arriere commua le ceur du roy en doulcheur vers luy par misericorde, et fu restitué en sa premiere francise, quitte et delivre (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 111).

 

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"Racheté (du péché)" : Pour ce, vierge, grace demande Que de mes pechiez soie quitte (Mir. mère pape, c.1355, 395). ... .ii. sains homes y trouverez, Qui la loy vous enseigneront Et baptesme vous donneront. Sy serez de vos pechiez quites. (Cycle myst. prem. mart. R., c.1430-1440, 146). ADAM. (...) Pechié le nous a apporté, Dont jamais quites ne serons. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 22). DIEU. Temps est que la tres griefve offence, Dont le gendre humain est tachié, Soit adnullee et son pechié Pardonné et le pecheur quicte Par le tres glorïeux merite De la passion a quoy s'offre Mon filz Jhesus (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 311). Et se vous acompaigniez de celle tres glorieuse vertu de charité, (...) serez net, quicte et sauvé au regart de ce pechié. (LA SALE, J.S., 1456, 22).

 

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"Pur" : Diex (...) Vous face si pur et si monde De tout vice et si nett et quitte Que vostre ame en sa gloire habite Sanz finement. (Mir. st Alexis, 1382, 332).

 

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Clamer qqn quitte de qqc. "Déclarer que la chose ne lui est pas imputable" : Et je luy pardonne vrayement, dist il lors, et l'en clame quicte, puisqu'ainsi est que aultre chose n'en puis avoir. (C.N.N., c.1456-1467, 400).

D. -

"Privé de"

 

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Quitte de

 

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Estre quitte de qqc. "Être privé de qqc., soustrait à qqc." : Autre euvre fist de grant merite Quant il resuscita Thabite, La fille du bon Jaÿrus, Laquelle estoit du monde quite Par la mort qui tout desherite Et qui jamais n'espargne nulz. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 107).

 

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Faire qqn quitte de qqn. "Priver qqn de qqn d'autre" : Ce bon homme, voyant sa bonne femme ainsi actainte et languissant, menoit la plus doloreuse vie du monde, tant marry et desplaisant estoit qu'il ne povoit plus, et avoit grand doubte que la mort ne l'en fist quicte. (C.N.N., c.1456-1467, 515).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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