I. -

Empl. trans.

A. -

"Remettre en mémoire, rappeler au souvenir, remémorer qqc., faire penser à qqc."

1.

[D'une pers., d'un propos, d'un écrit, de la mémoire... ; avec une idée plus ou moins nette d'intention, de volonté] : ...servons de cuer et de pensée L'arche en qui fu la sainte char fourmée De Jhesu Crist, car bien li ramentoit Son vray servant, afin que sauvé soit. (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 245). Se m'aprochay de Souvenir, Afin que les choses passées Me fussent par li repetées ; Et il les me ramentevoit. (MACH., D. Aler., a.1349, 283). ...et quant Aigres fut un pou esloingnez, si commença a soy plaindre et a souspirer et a ramentevoir les durtez qu'il avoit eües en son temps (Bérinus, II, c.1350-1370, 83). Je te di voir, qui que te bourde, Et t'amentoy ce qu'on doit faire, Car je ne me puis des bons taire. Se tu as ci dessus leü, Je les t'ay ja ramenteü. (MACH., C. ami, 1357, 117). Je te di voir, qui que te bourde, Et t'amentoy ce qu'on doit faire, Car je ne me puis des bons taire. Se tu as ci dessus leü, Je les t'ay ja ramenteü. (MACH., C. ami, 1357, 117). Et se Pité me vuet estre piteuse Et bonne Amour par pensee amoureuse Li ramentoit ma doleur dolereuse, Je ne doubt point Qu'elle n'en soit vers moy plus gracieuse Et de savoir mon estat plus songneuse ; Et s'il est bons, elle en sera joieuse. (MACH., F. am., c.1361, 170). Et vraiement ses vasselages N'est pas oubliez ne teüs, Eins est souvent ramenteüs, Car chascuns l'aimme et loe et prise Qui scet son fait et son emprise (MACH., P. Alex., p.1369, 144). S'aucune chose en oubli met, Bien li saray, je vous promet, Ramentevoir. (Mir. ste Bauth., c.1376, 128). Car souvenirs vo face coulourée Et vo bonté qu'on ne puet esprisier, Et vo biauté qu'est de douceur parée Me ramentoit si fort qu', à droit jugier, Cilz souvenirs me fait souvent cuidier Que je soie de vo biau corps procheins, Dame, coment que vous soie lonteins. (MACH., L. dames, 1377, 29). Amis, pour l'amour de mon fieulx Que m'as ici ramenteu M'as de pitié le cuer meu. (Mir. st Alexis, 1382, 345). Et la commenca la doulour si grant que oncques homs ne vit greigneur. Et en cellui estat, douleur faisant, s'en vindrent jusques au palais, et la fu ly corps descendus. On ne doit pas ramentevoir dueil longuement. La contesse et ses enfans font grant dueil (ARRAS, c.1392-1393, 28). ...les escris qui ramentoivent Leurs grans fais (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 185). Et Fortune, qui moult amie Luy fu un temps, puis ennemye, Si com devant ramenteü, Nonobstant que l'istoire teu. (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 29). Vous me commandastes que, sanz attendre au desrain besoing, je vous ramenteusse le derrain sacrement (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., II, 1404, 188). Lors le premier ses raisons ramenteut Sans y muser (CHART., D. Fort., 1412-1413, 191). Et se memoire vous puet aucune chose ramentevoir et les anciens livres de noz peres apprendre à cognoistre nos faiz par les leurs... (CHART., Q. inv., 1422, 3). Mais l'anemy, qui estoit soubtil et qui jour et nuit ne cesse de pensser a decepvoir les creatures et amis de Dieu, sy mist au cuer de l'escuier une telle voulenté de retourner qu'il n'estoit une seule heure de desirer et regrester les grans biens qu'il avoit laissiez, dont jour et nuit ne cessoit ; et tant lui ramenteust que au chevalier ennoya le grant delay de son pardon. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 106). ...laquelle chose, le jour de ses nopces, il luy ramenteust (C.N.N., c.1456-1467, 10). Nostre musnier (...) ramentevoit souvent en sa teste la courtoisie que monseigneur luy avoit faicte (C.N.N., c.1456-1467, 42). ...a pou qu'il ne la cravanta, en luy ramentevant la lamproye (C.N.N., c.1456-1467, 265). Je croy, dit il, que vous songiez de la lemproye, [ne] faisiez pas ? Ce ne seroit pas trop grand merveille, car je la vous ay bien ramantue a ce matin. (C.N.N., c.1456-1467, 266). ...il leur ramentut leurs chemises qu'ilz avoient perdues a Envers (C.N.N., c.1456-1467, 400). Item, varletz et chamberieres De bons hostelz - riens ne me nuyt ! - Feront tartes, flans et goyeres Et grans ralïatz a mye nuyt - Riens n'y font sept pintes ne huit Tant que gisent seigneur et dame-, Puis aprés, sans mener grant bruyt, Je leur ramentoy le jeu d'asne. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 122). Mais d'un corrous passé, il n'en faut plus parler, car ce n'est que desplaisir que de le ramentevoir (Charles de Hongrie C., c.1495-1498, 78). ...par ung notable frere prescheur sera faicte une briefve collation de sermon qui ramentevera la cause de la fondacion de celle noble ordre (LA MARCHE, Mém., IV, Pièces annexées, c.1500, 179).

Rem. Jourd. Blaye alex. M., a.1455, gloss.

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Ramentevoir que : Mais Souvenirs li va aidier Et moult trés humblement prier Et ramentevoir qu'il repreingne Dous Penser, et qu'il li souveingne De la trés noble biauté fine Qui toutes autres veint et fine, Et dou trés gracieus viaire Qui dou dous regart le vint traire (MACH., D. verg., a.1340, 37). Mais quant je le vi en ce point, Je li ramentu trop a point Qu'il li souvenist de l'image Et dou tres gracieus langage, Dou faitis point, dou cointe atour Et dou gentil port fait a tour De sa dame qui tant l'amoit (MACH., F. am., c.1361, 239). ...et supplie a ses peres Celestins qu'il veullent ramentevoir a leur povre pelerin, avant que la maladie soit enforcie, que en son bon scens et entendement catholique devotement il doie protester sur le cas desusdit (MÉZIÈRES, Test. G., 1392, 319). Durant ce voyage, quant ilz eurent esté aulcuns jours sus la mer, Mopsus se trouva un jour avec Jason et lui ramenteut qu'il avoit promis a la royne Ysiphile de retourner par sa cité de Lennos. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 215).

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Ramentevoir + interr. indir. : ...afin d'estre avertis de non jamais croire conseil, d'où que il peust venir de vous ingerer n'esmouvoir nullement à faire, dire, ou procurer quelconques choses par assemblées en appert ne privé, contre la reverence de magesté royalle, est bon vous ramentevoir par exemple à vostre enseignement comment desplaist à Dieu murmure de subgiez vers prince et contre leurs mageurs (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 129). ...leur ramenteut comment en sa questeure... (MAMEROT, Romuleon D., 1466, 257). Mais ainçois me fault ung petit toucher et ramentevoir comment en icelluy temps se rassemblerent au lieu de Chalon sur la Sonne le duc de Bourgoingne, le duc de Savoye et le conte de Geneve (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 295). Luy ramentevoit combien il estoit tenu à sa maison (COMM., I, 1489-1491, 75).

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(Telle chose) (bien) fait à ramentevoir. "Il est bon de rappeler (telle chose) ; (telle chose) mérite d'être rappelée" : S'en y avoit d'un autre affaire Dont je ne me vueil mie taire, Car bien font a ramentevoir : C'estoient une gent, pour voir, Dous, humble, courtois, amiable, Entreprenant et veritable, Po emparlé, fier et hardi. (MACH., D. Lyon, 1342, 206). Mais j'ay un autre las tendu Contre celui, de plus grant pris, Par lequel vous serez soupris, D'un exemple ancien de fait Qui bien a ramentevoir fait. (MACH., J. R. Nav., 1349, 208). De sa vesture ne me puis je pas passer ne taire, et mesmement du mantel ou paille qui son corps couvroit, dont le merveilleux artifice fait a ramentevoir (CHART., Q. inv., 1422, 7). Quel exemple avons nous en ce cas du vaillant magnanime Scipion, qui bien fait a ramentevoir... (CHART., Q. inv., 1422, 49). De telles petites prinses et aprinses firent les Zassons sur nostre compaignie, et peu ou riens de grandes ne de chose qui à ramentevoir face (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 19). Aultre chose n'avint, en l'an cinquante et ung, qui à ramentevoir face (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 211). ...et si fait à ramentevoir que, l'armée toute rompue, messire Pietre Wais et messire Frederich de Witem garnirent leurs bateaulx le mieulx qu'ilz peurent (LA MARCHE, Mém., III, c.1470, 41).

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Ramentevoir qqn. "Évoquer le souvenir de qqn" : ...devant l'offertoire doit le greffier de l'ordre faire une brieve collacion en ramentevant tous les chevalliers trespassez d'icelle confrairie et parler de leurs nobles meurs et de leurs nobles faiz (LA MARCHE, Mém., IV, Pièces annexées, c.1500, 185).

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Empl. pronom. à sens passif : ...telles choses ne se peuent trop ramentevoir (JUV. URS., Verba, 1452, 197). Ainsi se ramentevoient les beaulx faiz du pere pour honnorer le filz. (LA MARCHE, Mém., III, c.1470, 15).

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Inf. subst. : Aincoires vous dy que Dieu et raison deffendent le parler ou le ramentevoir devant aucune femme mariee, en eage de porter enfans ou qui est enchainte, de quelconque chose pour mengier qui pour le present et au besoing ne se pourroit trouver, affin que le fruit qu'elle porte n'en apporte enseigne sur son corps (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 86). Et pour ce m'en passe et laisse le ramentevoir des Roix d'Angleterre (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 120). Et voulut le duc que je fisse le personnage de Saincte Eglise, dont il se voulut aider à celle assemblée, et fut une solempnelle chose, et qui vault le ramentevoir et sert à nostre propos. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 340).

2.

[D'une chose ; involontairement, par simple association d'idées] : Cils souvenirs, par son engin soubtil, Me ramentoit le viaire gentil Et le gent corps pour qui mon cuer essil, Mès engendrez, Nez et fenis est et continuez Tous en doleur. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 96). Cil souvenirs me ramentoit souvent Le dous viaire et la maniere coie Dont je ne puis attraire aligement. (MACH., L. dames, 1377, 58). Ceste cautele me ramentoit une autre, dont il est escript, que avint à Romme, après ce que le roy Tarquin l'orgueilleux fu chaciez de Romme, pour cause de Lucrece, qui avoit esté efforcée. (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., II, 1404, 55). Cest jugement me ramentoit ce que je treuve de .II. hommes, qui baillerent à une femme un depost à garder, par tel condicion que elle ne le bailleroit à l'un sanz l'aultre, mais à touz deux ensemble. (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., II, 1404, 73). ...desir luy eschaufa le cueur et si luy vint ramantevoir les plaisans passetemps qu'elle souloit avoir (C.N.N., c.1456-1467, 146).

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Empl. impers. : Car il me ramentoit souvent, Quant issir me voit dou couvent Que j'ai a mes gardes proumis... (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 143).

B. -

Ramentevoir qqn/qqc. pour... "Évoquer qqn/qqc. pour..." : Le tricoplier fu esleüs Et devant tous ramenteüs Pour faire la messagerie ; Et il ne la refusa mie, Ains y ala. Dieus le conduie Et li doint bon vent et sans pluie ! (MACH., P. Alex., p.1369, 160).

II. -

Empl. pronom. Se ramentevoir qqc. "Se rappeler qqc." : Et s'ensi est qu'il te couviegne Variier par trop sejourner, Si me fes prendre et ajourner Ou que tu voes et de par toi, Se briefment ne te ramentoi Ce que tu as de pourveance, Ou tu n'as gaires de beance. (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 63).

V. aussi ramenter