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Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500) - ATILF - CNRS & Université de Lorraine - http://www.atilf.fr/dmf
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     BOUTER1          BOUTER2     
FEW XV-1 *botan
BOUTER, verbe
[T-L : boter ; GD : bouter ; GDC : bouter ; AND : bouter2 ; FEW XV-1, 210a : *botan ; TLF : IV, 859a : bouter]

I. -

[Idée de coup, de heurt, de pression]

A. -

Bouter qqn (ou un animal)

 

1.

"Frapper qqn (ou un animal), lui donner des coups" : S'aucuns est chault et effraez De toy ferir ou de bouter [de toy bouter "de te frapper"]... (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 188). Lors de sa lance l'a bouté (Dame Lycorne G., c.1349-1350, 249). LE BAILLIF. Il n'est homme qui me peust Faire entendant qu'il [Aubin] n'ait esté Feru ou destraint ou bouté, Dont il est mors soudainement. (Mir. femme, 1368, 198). Dist aussi, sur ce requis, que ladicte femme n'ot oncques que ledit coup, et ne la fery ou bouta en aucune maniere (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 118). Ogiers le bute sy fort que le roy cheit a terre. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 195). ...et en courant les fiert ou boute de son tinel (Chev. papegau H., c.1400-1500, 81). Ung homme qui boute un chien avec ung baston... (BAUDE, Dictz moraulx S., p.1450, 131). Lors, voiant que sa pointe tenoit fort, par ardant desir de le desmarchier, abandonna cuer, corps, avec la force de ces bras boutant Saintré qui ferme et sur sa garde se tenoit (LA SALE, J.S., 1456, 184).

 

-

[Contexte métaph.] : Et se tu dis : "Je ne vif mie, Quant ne voy ma dame et m'amie", Ou se Desirs par sa maistrie Te pique et boute, Resgarde l'image jolie Que tu as en ta compaingnie, Et jamais l'amour qui nous lie Ne sera route. (MACH., F. am., c.1361, 225).

 

-

Empl. abs. : ...car du bout du bourdon Les fors boutteurs en bouttant reboutte on. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 349).

 

.

[D'un cheval] "Frapper (le sol) du pied ou frapper du pied après s'être dressé" : Il n'y a reméde soudain Que faire bouter les destriers (Amant cord. M., 1490, 34).

 

-

Prov. : Car voir, qui boute l'un, il va l'autre heurtant. (CUVELIER, Chans. Guescl. F., c.1380-1385, 355).

 

Rem. Prov. H., 58 [B 163 ; 164].

 

2.

"Avoir des rapports sexuels avec qqn" : Lors commence [la femme adultère] a crier haro, Et dit pour ce qu'elle se doubte D'un autre qui souvent la boute : " Ha ! sire, Dieux bon gré en ait ! Hui m'avez vous un enfant fait ; Certes, je croy que suys ensainte..." (DESCH., M.M., c.1385-1403, 124).

B. -

Bouter (qqn / qqc.). "Heurter, pousser (qqn ou qqc.)" : Mais s'il avient qu'il se desferre, .X. hommes faut, quant on le ferre : Li uns sache, li autres boute. Chascuns le fuit, chascuns le doubte ; Et loiez est à .IIIJ. estaches Dou travail ; et vueil que tu saches Qu'on n'i fait riens, s'on ne le pent. (MACH., Compl., 1340-1377, 265). La fu il boutés et saciés, Et reçut tamaint horion (FROISS., Méliad. L., t.1, 1373-1388, 78). ...pour bouter ne pour huchier, On ne le peuist esvillier. (FROISS., Méliad. L., t.1, 1373-1388, 223). Et aussi aucune foiz les boucs ysarus ne veulent grater en mi les cuisses de leurs cors et boutent aucune foiz si fort qu'ilz les se mettent par les fesses et ne les peuent retirier (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 72). La maniere de l'estouper si est que on preigne des fouchieres et menu boys, et les boute l'en dedanz les fousses et puis mettre de terre dessus et bouter bien fort, affin qu'il n'y puisse entrer en nulle maniere. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 243). Tirez, boutez, chacez tout a l'escart ! (CHART., R. Bal., c.1410-1425, 384). ...par son esbranler et debatre elle esveilla Entendement, qui coste moy soumeilloit, et le bouta si vertueusement que en sursault il se leva, ses yeulx a paine demy ouvers (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 22). Huy boute l'ung, demain le tire (Abuzé D., c.1450-1470, 43). Jesus ! Et qui vous a bouté, Dictes ? (Fr. arch. B., c.1468-1480, 44). Boute, Longis ; boute fort, boute [une lance] ! (Pass. Auv., 1477, 231).

 

-

"Pousser qqn (du coude), pour attirer son attention ou en signe de complicité, d'encouragement" : Alors les dames et damoiselles et aucunement le maistre d'ostel, qui jeunoient et avoient bon appetit, pensans que trop mieulz disneroient que de l'ordinaire de l'ostel, l'une guinant et boutant l'autre, tant prierent pour la premiere requeste de damp Abbés que Madame s'i consenti. (LA SALE, J.S., 1456, 248).

 

.

Bouter qqn du coude. "Pousser qqn du coude" : Une foiz le boutoit du coste en escripvant, une aultre foiz luy ruoit des pierrettes (C.N.N., c.1456-1467, 150).

 

-

[De l'enfant à naître, dans le ventre de sa mère] : Dieu ! Que senz je qui se remue En moy si fort, et qui si boute ? Vraiement je ne fas point doubte ; C'est enfant qu'ainsi sanz mouvoir. (Mir. enf. ress., 1353, 8).

 

-

[Du faucon] Bouter (son haleine). "Pousser son haleine, respirer avec difficulté" : Se vostre faucon a grosse alaine et que il boute, vous li ferés ainssi : ... (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 211).

 

-

[D'une chose en mouvement] Bouter qqn / qqc. "Frapper, heurter qqn ou qqc." : Car souvent la hurte et la boute La mer et la fiert de mainte onde (Mir. emper. Romme, 1369, 282). ...se le vent une fenestre boute (CHART., D. Fort., 1412-1413, 169). ...Comme la branche qui s'encline Au vent qui de plus fort la boute (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 41).

 

-

Boutant sachant. "En poussant et en tirant ; par la force" : ...et ne blame Qui depose boutant sachant Le gouverneour non sachant De gouvernement (Pastor. B., c.1422-1425, 116).

C. -

Bouter à / contre / sur qqc. "Heurter qqc. ; exercer une pression, une poussée (sur qqc.)" : Et Amours tant y fiert et boute Et hurte... (ACART, Prise am. H., 1332, 53). ...et puis boutoient de grant randon contre le mur (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 68). ...et doit fendre les coullons [du sanglier] et bouter sus le ventre de son genoill et trere les coullons hors (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 186). Et tant i hurterent et bouterent que il perchierent le mur et trauerent en pluisseurs lieus, et entrerent par derriere en l'abeie. (FROISS., Chron. D., p.1400, 427). Quant un enffant est nouveau né, se c'est un filz, il le convient porter au pere et lui bouter des pieds contre la poitrine, et pour certain jamais ne fera l'enfant male fin. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 110).

 

-

Bouter à la roue. "Pousser à la roue" : ...je feuz l'ung pour à la roue bouter (MAXIMIEN, Avocat dames Paris M.R., c.1485-1490, 16).

 

-

[Dans un surnom quasi générique pour les coupe-bourses] Boute en courroie : Dites ou est Boute en Courroie, Ne Lambin ne Hupin le grant ? (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 5).

 

-

Empl. abs. : Pour bouter sus, pour tout abattre, Pour faire gens esmerveillier... (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 10).

 

.

Boute dedans. "Tope-là" : LE PREMIER. (...) Il sera tien. LE DEUSIESME. Boutes dedens. (Tr. Men., c.1480-1500, 289).

D. -

Inf. subst. "Action de frapper, coup" : Lors par la force du bouter messire Nicole tumba des deux mains et genoulz a terre. (LA SALE, J.S., 1456, 185).

E. -

Part. passé en empl. adj. p. anal. [Du vin] Bouté. "Atteint de la pousse (pression qui vient de la fermentation bactérienne génératrice de gaz carbonique), fermenté, tourné, aigre" : Item que aucun dudit mestier ne mette en besongne lye puante, ne vin bouté ou puant (Mét. corp. Paris L., t.1, 1412, 569). ...et en toute celle année ne fut trouvé du creu d'icelle vin qui devenist gras, ne bouté, ne puant. (Journal bourgeois Paris T., 1414, 55).

 

Rem. FEW XV-1, 215b.

II. -

[Idée d'une poussée qui déplace ; p. ext. idée de mise en place]

A. -

Bouter qqn / qqc.

 

1.

Au propre "Exercer sur qqn ou qqc. une poussée qui déplace, imprimer un mouvement à qqn ou qqc."

 

a)

Bouter qqn

 

-

Bouter qqn par terre. "Pousser qqn par terre" : Toutesvoyes dit-il que ledit deffunt bouta par terre ledit Jehan Eutasse de ladite fourche, senz le navrer (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 412).

 

-

Bouter qqn arriere. "Repousser qqn" : ...quant elle vouloit baisier, acoler ou soy esbatre, par aucune avanture, avec sondit ami, elle li ostoit ledit oreillier de dessoubz la teste, et le boutoit arriere (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 338). Mais les bourgois les ont arier buteiz. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 133). ...allons y bouter Gens d'armes devant leur barriere Affin de les bouter arriere (Pac. Job M., c.1448-1478, 266).

 

-

Bouter qqn de haut en bas : Fortune (...) Souventes foiz, contre raison, Boutez de hault plusieurs en bas, Et de bas en hault (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 176).

 

-

Bouter qqn jus. "Précipiter qqn vers le bas" : La ot grant encauch et maint honme reversé et bouté jus a terre (FROISS., Chron. D., p.1400, 690). ...le bourreau fut tant esperdu et esbahy qu'il (...) n'eut oncques l'advis de (...) le bouter jus (C.N.N., c.1456-1467, 452).

 

-

[Dans un contexte guerrier, un contexte de lutte] Bouter qqn. "Repousser qqn" : Il fu là de chiaux dedens[de ceux qui étaient dedans] boutez si très roit de cop de glave, que il fu reversez ou fons dou fosset (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 23). ...en boutant et en requlant les Englois, il eslongierent si lors bailles que... (FROISS., Chron. D., p.1400, 584). ...Et qu'il ait bouté ses nuysans Et vaincu ses contredisans (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 122).

 

b)

Bouter qqc. "Pousser qqc." : Celluy tref on tire à chaisnes et est fait en manière que on le puisse bouter et retirer (BUEIL, II, 1461-1466, 50). ...le brouttier boutant sa brouette chargié... (Devin. R., c.1470, 130).

 

-

Bouter qqc. par terre. "Renverser qqc." : ...liquel, lances abaisies, s'en vinrent frapant en ces logeis, boutans tentes et trefs par terre, mehagnans et ocians honmes et metans en grans meschiés (FROISS., Chron. D., p.1400, 619).

 

-

Bouter qqc. outre. "Renverser qqc." : Adonc bouta il la table oultre (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 179). ...il boutèrent soudainnement oultre leurs palis et se misent as camps (FROISS., Chron. L., VIII, c.1375-1400, 112-113).

 

.

Bouter (une porte) outre. "Enfoncer (une porte)" : Si furent assailli vistement, et li porte de leur hostel boutée oultre. (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 10). ...ilz vindrent hurter a la chambre ou estoit la pucelle (...) et bouterent l'huis oultre. (C.N.N., c.1456-1467, 551).

 

.

P. anal. Bouter la nuit outre. "Passer la nuit" : Ilz se reposerent aprés leur traveil et bouterent la nuyt oultre. (LEFÈVRE (R.), Hist. Troyes A., c.1464, 388).

 

-

Bouter l'herbiere. "Pousser l'herbière" : Et la coupe [l'herbière du cerf] assez pres du bout de la fente par devers la teste du cerf, et la boute par mi la fente un tour ou deux, affin que la viande qui est en l'erbiere [n']en isse par mi la fente (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 179). [Éd. : "mets ta main dans la fente que tu as faite dans l'erbière, et pousse en bas, une ou deux fois, le contenu (la viande) de l'erbière, pour qu'il ne sorte pas"]

 

c)

[D'une chose mobile] Bouter qqc. "Pousser" : Et tout mouvement du ciel est naturel, car autrement il ne seroit pas regulier ne perpetuel. Item, le premier et souverain ciel qui est ainsi meu est concentrique au monde selon la concavité de ce ciel, et donques il ne boute et ne tire le ciel qui est souz soy sanz moien. (ORESME, C.M., c.1377, 316).

 

-

Empl. abs. : ...et pour ce elle [la superfice concave du ciel] passe sus le feu tres souef sans freer, sanz tirer ou bouter, si comme il fu dit ou .XVIIIe. chapitre. (ORESME, C.M., c.1377, 530).

 

2.

Au fig.

 

-

Bouter qqn avant. "Pousser qqn" : S'il n'a alegence Toute desplaisance Si le boute avant (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 172). Nulz ne puet souffrir mort pour mon nom soustenir se mon Pere ne le boute avant (CRAP., Cur Deus, De arrha B.H., c.1450-1460, 178).

 

-

Bouter qqc. avant. "Pousser qqc. en avant, mettre qqc. en évidence" : S'il [escouvient] que je m'aplicque A bouter avant ma praticque, On ne sçaura trouver mon per. (Path. D., c.1456-1469, 50).

 

.

"Pousser qqc. en avant, promouvoir, faire valoir, élever en dignité" : ...en vous priant (...) que vous me vueillez aidier à (...) bouter avant l'hostel dont je suis sailli. (CABARET D'ORV., Chron. Loys de Bourb. C., 1429, 8).

 

.

Bouter le temps avant. "Faire avancer le temps, passer le temps" : Mes en lamentant Et en languissant J'ai bouté avant Le tamps, qui noiant M'a tenu de joie (FROISS., Espin. amour. F., c.1369, 168).

 

-

Bouter qqc. arriere. "Repousser qqc." : ...Pour le mal arriere bouter. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 2). C'est qu'elle puet avoir despit De gent qui mainnent vie obscure, Qui n'ont de nulles honneurs cure - Despit, non quant a despiter, Mais leurs ouevres soupediter, Eschuer et bouter arriere, Sans faire a euls samblant ne chiere (MACH., D. Aler., a.1349, 263).

B. -

Bouter qqn / qqc. (qq. part)

 

1.

Au propre "Pousser qqn / qqc. qq. part, placer, mettre qqn / qqc. qq. part"

 

a)

Bouter qqn (ou un animal) (qq. part) : Adonc si tost que la nuit vint, Celle a qui de ce fait remembre, Bouta Second ["fit pénétrer S."] dedenz la chambre, Au lit sa dame le mena (DESCH., M.M., c.1385-1403, 96). N'est ce pas droit qu'il [Dieu] face grace auxquelz qu'il luy plaist, sans faire tort a ceulx qu'il laisse en la prison [de péché originel] en laquelle ilz sont boutez ? (GERS., Trin., 1402, 163). ...allons y bouter Gens d'armes devant leur barriere Affin de les bouter arriere (Pac. Job M., c.1448-1478, 266). L'Anglois le mena en une place assez près de la et en prison le bouta. (C.N.N., c.1456-1467, 55). Et, en ce faisant, et avant qu'ilz feussent bien asseurez d'avoir lettres de leur promesse et traictié, furent par aucuns dudit lieu de Neelle mis et boutez en icelle place lesdiz Bourguignons (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 269). Boute ton cheval en l'estable, Il a bien gaigné son avaine. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 11).

 

-

Bouter en terre / sous lame. "Mettre dans la terre, dans la tombe, enterrer" : Or ça ! il fault que je m'atire A ces enfans executer, Et puis les en terre bouter (Mir. roy Thierry, c.1374, 263). Secondement c'est pour nous humilier, pour humilier la fole presumpcion, le fol orgueil que prent personne humaine en ce monde, non contrestant qu'elle saiche bien, et doye scavoir, que tantost elle sera boutee en terre, et sa charoingne rongee de vers, et que en ceste langoreuse vie elle recoit peine, doleur, honte, afflictions, maladies et maleuretés sans nombre. (GERS., Noël, p.1404, 295). Je croy qu'on a ma mort juré Et qu'on me voeult bouter soubz lame. (TAILLEV., Moral. D., 1435, 91). Rommain, gardez le corps mon pere. Je vois le tressainct pere querre Qui le viendra bouter en terre. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 184).

 

-

Bouter en l'eau. "Jeter à l'eau" : Maiz diverses bestètes mues, Dès l'eure qu'elles sont yssues, Dehors des ventres de leurs mères, Sont si vaillantes et légières Que par soy elles vont et viennent, Et se drecent et se soustiennent, Et en brief temps quièrent jouer, Et aucunes scevent nouer Qui en l'eaue les bouteroit, Que un enfant jamès ne feroit, Et endurent chault et froidure Sans usement de vestéure (LA HAYE, P. peste, 1426, 67). Et puis le bouta aval en l'eaue (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 323).

 

-

[Du vent] "Pousser qq. part" : ...il eurent vent contraire qui les bouta en Bretagne. (FROISS., Chron. L., VIII, c.1375-1400, 195). Au tierch jour, vens lor revint a droit souhet, et qui les mena et bouta droit contre Engleterre, et tant que li maronnier en orent la congnissance. (FROISS., Chron. D., p.1400, 72).

 

.

Quel vent vous boute ? "Quelle est la cause de votre venue ?" (cf. "quel bon vent vous amène ?") : L'EMPEREUR. Bien veigniez vous, maistre Morin. Quel vent vous boute ? MAISTRE MORIN. Mon seigneur, vous l'orrez sans doubte. (Mir. st Panth., 1364, 338).

 

b)

Bouter qqc. (qq. part) : Je la pris [une verdiere] moult douillettement ; Lors la boutay moult doucement Dedens mon sein un bien petit, Pour reprendre son appetit De joie, car pour la froidure Peüst morir en la verdure. (MACH., D. Aler., a.1349, 394). Si ne vaus depuis aourer Sa belle ymage, ainçois l'ostai De mon chevés et la boutai Et mis en un petit coffret (MACH., Voir, 1364, 666). Dont fu li rondelès boutés Desous la lettre (FROISS., Méliad. L., t.1, 1373-1388, 64). ...et puis vint au flaiel de la porte et bouta d'aventure premierement la clefz en la serure (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 215). Mon avoir en l'escrin boutay Et puis en la mer le jettay (Mir. march. juif, c.1377, 215). Lors presente aussi l'annel a Guyon de par la damoiselle et lui dist qu'elle lui prioit qu'il le portast pour l'amour d'elle. Et il dist que si feroit il, et le bouta en son doy, et en mercia moult la damoiselle et le messaige. (ARRAS, c.1392-1393, 99). ...il avoit bouté en ung de ses doiz ung aneau d'or garny d'un beau gros dyamant (C.N.N., c.1456-1467, 390). Le bourreau (...) fist ses preparacions pour luy bouter la hart au col (C.N.N., c.1456-1467, 452). Je suis au fort contente, dist la fille, de la mettre et bouter ou il fault (C.N.N., c.1456-1467, 501). Et, après ladicte execucion ainsi faicte, ledit corps mort fut despoullié et mis avecques ladicte teste tout ensevelir dedens ung beau drap de lin, et puis bouté dedens ung sarcueil de bois que ledit sire Denis Hesselin avoit fait faire. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 361). ...auquel fut le col coppé dedens ung chapperon d'escarlate fourré de letisse, et ladicte teste avecques ledit chaperon mise et boutée au bout d'un chevron, auquel fut fort cloué ledit chaperon afin qu'il ne feust emblé ensemble ladicte teste. (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 48). Et, pour ce qu'il sembla aux dessusdiz qu'elle ne s'estoit pas bien deschargée de toute la pouldre qui (,) mise et boutée (,) avoit esté dedens la chambre d'icelle bombarde, fut ordonné par les dessusdiz que encores seroit chargée de nouveau et que derechief seroit tirée par seconde fois (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 81). Pour ungs fers à bouter les deux bras, les jambes, et à bouter au col et parmy le corps, pour ung prisonnier (Comptes hôtel rois Fr. D.-A., 1478-1481, 361). Il a le frain aux dens bouté (Sots Magn., a.1488, 210). Boute moy [datif éthique] sus mon establie Mes cizeaulx, mon fil et mon dé (Coust. Esop. T., c.1500, 151).

 

-

[Dans l'intention de cacher] : DACIEN. (...) Encors te demande conment Il est (...) Des tresors, ou sont il bouté, Qu'a avoir quier. (Mir. st Lor., 1380, 174). ...battit sa coulpe et bouta en sa manche tout secretement ung pain bis (C.N.N., c.1456-1467, 331). Une foiz il pensoit de les bouter [les chemises volées] dedans les chaudieres et grands potz de cuyvre qui estoient en la cuisine ; aultrefoiz de les bouter en sa manche. (C.N.N., c.1456-1467, 398).

 

-

[Un mets, dans l'intention de le servir] : Il fauldra largement boucter Cuyre de boilly et rosti, De blant mangier, pastez aussy De hasteriaulz et de luannes. Vous avés d'oisons et de cannes (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 65).

 

.

Bouter la nappe. "Mettre la table" : Boutez la nappe, bon gré ma vie ; Par le sang bieu, j'enrage de fain. (Sav. Calb. T., c.1475-1500, 143).

 

-

[Une partie du corps] : ...ou saint Thomas luy butat sa main en sa plaie. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 75). Car il bouta sa main es genitalles d'une jument, et sy tost que Dairès fut en la place, il bouta sa main aux narilles du cheval (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 30). Et n' estoient point les trouz entre les barreaulx plus grans que à y boutter le braz à son aise. (COMM., II, 1489-1491, 60).

 

.

Bouter (sa teste) qq. part : Or advint, grant temps après, que la dicte faee se baignoit. Il, par sa curieuseté, la voult veoir, et tantost la faee bouta sa teste dedens l'eaue et devint serpente (ARRAS, c.1392-1393, 4). L'escuier qui fu venu pour noncier le secours, estoit en la maistre tour avec la pucelle et ses damoiselles. Si ouy la noise et bouta son chief hors a une fenestre, et appercoit la bataille fiere et mortelle. (ARRAS, c.1392-1393, 162). ...il ne sceut aultre remede, affin de non estre oy, que de bouter sa teste ou pertuis du retrait (C.N.N., c.1456-1467, 436).

 

-

"Placer, mettre, enfoncer qqc. (dans le corps)" : Ceste dague parmy la gorge Vous bouteray. (Mir. marq. Gaudine, 1350, 167). ...un homme qui estoit en ladite eglise (...) en la tasse duquel homme elle qui parle print ledit anel d'or, et icellui bouta et mussa en sa bouche. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 324). Et cil retourne et tire bon coutel et en fery mon pere par my la cuisse, mais il lui cuida bien bouter par my le corps. Et mon pere le fery du pommeau de l'espee en la temple grant coup. (ARRAS, c.1392-1393, 58). Et quant Gieffroy sent le coup, qui fu durs et pesans, si le fery d'estoc de l'espee enmy le pitz, tellement qu'il lui bouta tout dedens jusques a la hendure. Et le jayant getta un moult horrible cry et chiet mort. (ARRAS, c.1392-1393, 267). ...le duc de Milan fut tué et murdry par ung gentilhomme du pays, qui, ledit jour, en feignant de vouloir parler à lui dedens la grande eglise dudit Milan, où il se pourmenoit avecques une ambaxade qui estoit venue pardevers lui, vint secretement lui bouter ung cousteau parmy la fente de sa robe dedens le petit ventre, où le bouta soudainement par trois ou par quatre foiz, et sans dire mot cheÿ soudainement à terre tout mort (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 32). Item, a Jehan Raguier je donne, Qui est sergent, voire des Douze, Tant qu'il vivra, ainsi l'ordonne, Tous les jours une tallemouze Pour bouter et fourrer sa mouse, Prinse a la table de Bailly ; A Maubué sa gorge arrouse, Car au menger n'a pas failly. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 91). ...qu'on luy boute Tous ces poisons dedens le corps (Cene dieux, c.1492, 130).

 

.

[Domaine sexuel] : Je l'eusse tresvoluntiers bouté dedans, mais il n'a oncques daigné lever la teste [Équivoque sur un chien sorti de la chambre et le sexe d'un galant devenu impuissant] (C.N.N., c.1456-1467, 196). Et vien ça, Hacquin, je te laisseray tout bouter plus avant (...) ainsi que tu vouldras. (C.N.N., c.1456-1467, 483).

 

-

Bouter sous le nez. "S'en mettre derrière la cravate, s'en mettre plein la lampe" : Ly daulphin, ly preux, ly senez, Ou de Dijon, Salins et Dolles Ly sires filz le plus esnez, Ou autant de leurs gens prenez, Heraux, trompectes, poursuivans, Ont ilz bien boutez soubz le nez, Autant en emporte ly vens ! (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 49).

 

-

Bouter l'espee ou feurre. "Rengainer l'épée" : ...quant Remondin vint a l'encontre du senglier pour destourner qu'il ne venist sur son seigneur, que alors que le sengler l'apperceut, il se destourna de sa voie et vint vers le conte grant aleure. Et quant le conte le vit venir, si regarde lez soy, et vit un espie, et boute l'espie [l. l'espee] ou feurre, et print l'espie, et le met soubz la plante du pié et l'abaisse. (ARRAS, c.1392-1393, 22).

 

-

Bouter de l'eau en (un récipient). "Verser de l'eau dans (un récipient)" : "Pierre, prennez la siel et va traire de l'yauve tost, et puis le boutez en la grant paelle et le mettez sur le feu..." (Man. lang. G., 1396, 72).

 

2.

Au fig.

 

a)

[Lieu abstr.] : ...elle est merveilleuse depuis qu'elle entre en sa [malice], et si n'est chose ou monde qui plus tost l'y boutast. (C.N.N., c.1456-1467, 67). ...et elle (...) endormoit nostre prestre (...) et en son amour tant fort le boutoit qu'il eust pour elle ung Ogier combatu. (C.N.N., c.1456-1467, 455). ...je vous diray les dangiers Où est une femme boutee (P. moyne, a.1500, 45).

 

-

Bouter qqn en erreur. "Induire qqn en erreur" : Barlaam sui je, qui de fait Ay le filz du roy hors osté D'erreur et non mie bouté En erreur (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 283). En especial ung advocat, que je puis nommer Plaisir mondain, a mis et bouté presques tout le monde en erreur et contraire creance. Qui est maintenant la personne qui n'ayt oÿ pluseurs foys, voir ung chascun jour, Plaisir mondain enhortant tous cuers a fole liesse, a vayne joye, a se donner du bon temps en ceste vie ? (GERS., Déf., 1400, 221).

 

-

Bouter qqn en oeuvre. "Mettre qqn à l'oeuvre" : En euvre boutoye tailleurs, Orfevres, selliers et brodeurs (Poés. lyr. court. XVe I., c.1454-1456, 179).

 

b)

[Une chose abstr.] : ...il n'entendent point bien tous les termes dou langage de France ; ne on ne lor scet conment bouter en la teste (FROISS., Chron. D., p.1400, 189). Dix commandemens par moy te mande A garder sans point trespasser ; Garde, peuple de les casser. Quil contre ceste loy ira, Cil de son peuple perira. Voy les te cy, or les escoutes Et en ton cueur les fiches et boutes ; Vecy la loy en pierre escripte. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 40). J'oublie ce que plus à cuer je boute (ROBERTET, Oeuvres Z., c.1450-1500, 89). ...il avoit du tout bouté son cueur [son amour] en elle (MART. D'AUV., Arrêts Am. R., c.1460-1466, 149). ...aulcunes joyeuses choses Se doybvent en tous cueurs bouter [empl. pronom. de sens passif] (Bataille st Pens. A., a.1485, 4).

 

-

Bouter qqc. aux oreilles de qqn. "Faire entendre, suggérer qqc. à qqn" : Aucuns de son conseil li boutoient en l'oreille que... (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 225). Et devez savoir que le conte de Dampmartin, qui estoit à mons. de Berry, fut l'ung qui luy bouta aux oreilles qu'il ne se devoit contenter de son appanaige, s'il n'avoit la duchié de Normendie. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 197).

C. -

Bouter qqn / qqc. de / hors de qq. part

 

1.

Au propre

 

-

Bouter qqn hors. V. boutehors "Jeter qqn dehors, chasser qqn" : C'est la femme noiseuse qui chasse hors son hoste, sicut dicit Salomon. Avise que c'est plus grant honte de bouter hors I tel hoste que de le non recevoir (GERS., Pent., p.1389, 81). Et lors se lieve Remondin, et le prist [Olivier] par les deux piez, et le traine jusques aux lices, et puis le boute hors, et retourne, et vint devant l'eschaffault du roy, la visiere levee, en lui disant : Sire, ay je fait mon devoir ? (ARRAS, c.1392-1393, 64). ...et t'enclines descendre en terre racheter l'umain lignaige, et nous rendre par ce nostre habitacion de laquelle tant sommes hors bouteez, car nostre adversaire, Pechié mortel, le vilain et crueux tirant, avec toute sa maudicte compaignie (...) ont en terre presque occupé tout le logis (GERS., Concept., 1401, 394). ...pour bouter hors pluseurs gens d'armes faisant guerre à la ville de Paris (BAYE, II, 1411-1417, 31). Mais quant à nous, oncques parler N'oysmes de si grant merveille, Car tous les preux au long aler Qui ont esté, ne s'appareille Leur prouesse à ceste qui veille à bouter hors noz ennemis. (CHR. PIZ., J. d'Arc, 1429, 33).

 

.

Bouter qqn dehors : Mais, en la fin, ceulx de ladicte ville de Dynan, par traïson et autrement, furent surprins, et entrerent lesdiz Bourguignons dedens icelle ville, qui d'icelle en gecterent et bouterent dehors hommes, femmes et enfans, et retindrent prisonniers les plus notables gens d'icelle ville, et puis la pillerent tellement qu'il n'y demoura rien. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 164).

 

-

Bouter (la) banniere hors. "Déployer la bannière" : ...il dist que il ne bouteroit ja hors ce jour ne baniere ne pennon, mais se vouloit combatre dessoubz la baniere de messire Jehan de Buel. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 6). ...et bouta banière hors (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 210).

 

-

Bouter qqn / qqc. de / hors de. "(Faire) sortir qqn ou qqc. de, chasser de" : Set anz a que nous le boutasmes Hors de ceens et le chassames. (Mir. Theod., 1357, 114). Anglois et Gascons tenoient Prilli et l'avoient mallement fortefiet, ne nulz ne les en boutoit ne chaçoit hors (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 6). Et quant noz gens les virent partir [les Sarrasins], si bouterent tantost un rampin armé hors du port, qui les costoya tant qu'ilz virent que sur le soir se aancrerent environ a une veue du port soubz Saint Andrieu. (ARRAS, c.1392-1393, 131). ...pria moult qu'on le boutast hors de leans par la posterne (C.N.N., c.1456-1467, 27). Et lequel d'Alençon, depuis le temps de lors jusques au trespas dudit feu roy Charles, fut tenu prisonnier ou chasteau de Loches ; et, après icellui trespas que le roy vint à sa couronne, le bouta hors desdictes prisons et lui pardonna tout, en voulant que dudit procès ne feust jamais nouvelles (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 188). Oudit temps, environ le XXe jour de janvier IIIIcLXXIII, fut fait accord et appoinctement entre le roy et monseigneur le connestable, qui avoit prins et mis en sa main la ville de Saint-Quentin et en bouté hors le sire de Creton, qui y avoit cent lances de par le roy. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 307).

 

.

Bouter (les Anglais) hors de France : Et si veullent obeyr, a mercy je les prandray ; croyez que si ne veullent obeyr, la Pucelle vient pour les occire, elle vient de par le Roy du ciel, corps pour corps vous bouter hors de France. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 413).

 

-

Bouter qqc. ensus de soi. "Repousser qqc. loin de soi" : Lors quant Remond ouy ces mos, si boute la table ensus de lui, et entre en sa chambre, espris de yre et de jalousie, et prent son espee qui pendoit a son chevez, et la ceint, et s'en va ou lieu ou il savoit bien que Melusigne s'en aloit tous les samedis (ARRAS, c.1392-1393, 241).

 

-

"Expulser (physiologiquement)" : Se la medecine laxative boute hors telles humeurs comme nature mettroit hors s'elle povoit ouvrer (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 71). ...bouter hors les superfluités (PANIS, Guidon, 1478, tr.I, doct.2, chap.5).

 

2.

P. anal. Bouter qqn hors d'haleine. "Faire perdre haleine à qqn" : Les Anglois nous font beaucoup peine ; Tant du matin comme du soir, Nous boutent souvent hors d'alaine, Voulant aquerir le demaine D'Orleans, et la noble cité Qui est une clef souveraine De France et de l'auctorité. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 243).

 

3.

Au fig. "Sortir qqn ou qqc. de"

 

-

[Hors d'un lieu abstr.] : ...a tort suis encoupée De ce fait ci et hors boutée De ma religion (Mir. Theod., 1357, 108).

 

-

Bouter (une chose abstr.) hors : Pour ce de moy vueil hors joie bouter Et renoier Amours d'or en avant, Sa loy, son fait et son faulz convenant, Quant tu portes soubz viaire de fée Cuer de marbre couronné d'aymant, Ourlé de fer, à la pointe asserée. (MACH., L. dames, 1377, 223). Et nagaires ainsy comme je me estoye retrait ou secret de ma pensee, et que je avoye bouté hors toute autre cure, et estoye demouré comme pour estre moins seul (...) je prins fort a considerer les manieres diverses par lesquelles Male Voulenté ostoit la gloire a Dieu. (GERS., Noël, p.1404, 303). ...nous nous emploierons à bouter la guerre hors d'icellui royaume et le mettre en paix et transquillité (FAUQ., II, 1421-1430, 96).

 

-

Bouter (une chose abstr.) (hors) de : ...si ai toute doubte et toute souspesson bouté hors de mon cuer (MACH., Voir, 1364, 426). Car il s'efforcent mesmement de bouter hors des citéz contencion qui est ennemie et adversaire a concorde. (ORESME, E.A., c.1370, 414). ...c'est sainte et digne chose de bouter yre de son couraige (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 98).

D. -

Empl. pronom. Se bouter (qq. part)

 

1.

"Se précipiter qq. part"

 

a)

[D'une pers. ou d'un animal]

 

-

"Se précipiter qq. part, pénétrer avec force qq. part" : Ptholomee dit que es extremités de la terre habitable sont genz sauvages et peut estre que telz genz sont ceulz dont il fait ici mencion, qui se boutent es perilz des guerres impetueusement, senz paour et senz deliberacion. (ORESME, E.A.C., c.1370, 208). Et là survindrent plusieurs personnes, tant de cheval comme de pié, pour doubte desquelx ceulx qui les avoient assailliz ou volu assaillir s'enfouyrent et se bouterent dedens le bois ["se réfugièrent dans"]. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 518). ...les treves faillies, et le roy de France ou ses gens pour lui se boutent et mettent fors les premiers oudit pays de Guienne (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 197). Et y ot ja venu grant foison des gens du pays, qui lui demandent s'il avoit veu le jayant. Et il dist qu'il l'avoit combatu, et s'en estoit fouiz et s'estoit boutez en un pertuiz, et se fu si tost esvanoyz que il ne scot qu'il fu devenuz. (ARRAS, c.1392-1393, 265). ...lors en la cité se boute, Qu'il trouva de gent desgarnye (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 182). En leur pays craignent et doubtent Que les Amasones se boutent. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 13). Et se bouterent les aucuns d'iceulz dedens la riviere joingnant des murs, en peril de leur vie (FAUQ., II, 1421-1430, 343). ...elle se bouta dedans la dicte cheminée, et se commença a descendre et ung pou avaler (C.N.N., c.1456-1467, 275). Et puis se bouterent les gens de guerre estans dedens ledit Morat avecques les autres de ladicte armée de mondit seigneur de Lorraine dedens le parc dudit de Bourgongne, où ilz tuerent tout ce qui y fut trouvé et sans misericorde aucune. (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 20). Et ilec depuis y sejourna bien grant piece sans rien conquerir, sinon le Neuf Chastel de Nycourt, où ilz se bouterent pour ce que dedens n'y trouverent aucun qui leur contredeist (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 282).

 

-

Se bouter contre. "Se jeter contre" : Le sanglier (...) est vne beste tres fiere inmunde et ennuyeuse et si est de grant force et de sa nature comme s'il ne craingnist la mort se vient bouster contre l'espieu du veneur. (Best. hérald. H.E., c.1435-1450, 468).

 

-

[Des ennemis, dans la bataille] "Se jeter, se précipiter sur" : ...cilz nous raffreschirent de LX.. lances de bonnes gens que nous amenerent, et se bouterent en eulx tous à cheval, et les espardirent tellement que oncques puis ne se peurent remettre ensamble. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 7). Mes amis, en eulx [noz ennemis] vous boutez, Ferez et d'estoc et de taille (Mir. ste Bauth., c.1376, 140). ...et conmenchierent la bataille dou tret, et puis aprochierent les gens d'armes et se bouterent l'un dedens l'autre. (FROISS., Chron. D., p.1400, 541). ...qant les Englois et les Bretons qui en Hainbon se tenoient, veirent le deslogement, li auqun, par convoitise de gaegnier, sallirent hors et se bouterent sus les deslogans (FROISS., Chron. D., p.1400, 556). Alors tira l'espee, puis se bouta en la presse (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 38).

 

-

Se bouter avec. "Se précipiter sur" : Monseigneur, vous avez ycy trop demouré, venez vous en et faisons voz gens retraire en la ville avant qu'il soit plus tart, afin que les Sarrasins ne se boutent pelle melle avecques nous. (ARRAS, c.1392-1393, 106).

 

b)

[De la foudre] "Tomber qq. part, frapper qq. part" : Et la matière du tonnoirre Souventesfoiz se tourne en pierre De dure nature ou substance, Qui depuiz, par grant violence, Soudement en terre se boute Sans droit sentier garder ne route. (LA HAYE, P. peste, 1426, 7).

 

2.

"Se mettre, se placer (qq. part)"

 

a)

[D'une pers. ou d'un animal] : Adont durement me doubtay Et dedens mon lit me boutay. Il sambloit que j'eüsse fievres, Car je sui plus couars qu'uns lievres, Et si trambloie, et goute a goute Suoie d'effroy et de doubte. (MACH., F. am., c.1361, 146). N'il [Polyphème] n'a maisons, chambres ne sales, Fors cavernes ordes et sales Es queles li mauffés se boute Quant säoule est sa pance gloute. (MACH., Voir, 1364, 622). Il y avoit un maronnier, Qui ne fu pas le darrenier, Dont je le pris et aimme et lo, Qui se bouta dedens un tro, Si com le tro d'une privée, Qui estoit viell et si serré Que nuls hom ne s'en donnoit garde. (MACH., P. Alex., p.1369, 89). Devant moy voy le chastel estre : Dedens me vois bouter et mettre (Mir. fille roy Hongrie, c.1371, 49). N'est merveille se je la doubte. Je voy puis ça, puis la me boute : Une heure hausse, une autre abesse. (Mir. fille roy Hongrie, c.1371, 63). ...durant la feste de la royne, il, seul, se bouta devers le soir en l'ostel d'un pasticier demourant en la grant rue Saint-Anthoine (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 111). Et en ce faisant, ses plaies lui escreverent [au roi], et en yssi le sang a grant randon parmy les bendeaux. De quoy Uriiens fu moult doulent, et aussi tous ceulx qui le virent. Mais le roy se bouta ou lit soubdainement, et dist qu'il ne se sentoit nul mal. (ARRAS, c.1392-1393, 119). ...quant les menuz oiseaulx se boutent es buissons... (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 156). ...et, ainsy qu'il vouloit passer oultre ledit hostel, advisa l'uys d'icellui hostel ouvert, ou quel hostel se bouta, demandant la femme dudit maistre Pierre (Paris domin. angl. L., 1422, 49). ...bon homme de se sauver, et dessoubz le lit se boute pour estre plus seurement (C.N.N., c.1456-1467, 51). ...ne fut pas si peu asseurée (...) qu'elle ne se boutast par la presse des gens, ainsi grosse qu'elle estoit (C.N.N., c.1456-1467, 70). ...se bouta ou lit avecques madame (C.N.N., c.1456-1467, 114). ...ce paillard chien (...) s'estoit bouté soubz un banc la dedans et caiché tout de plat le museau sur la terre (C.N.N., c.1456-1467, 196). Et car elle ne savoit ou le sauver (...) elle le fist bouter en la ruelle du lit [pour s'y cacher], et puis le couvrit de ses robes (C.N.N., c.1456-1467, 243). ...il se bouta sur une couche et se coucha ; mais il n'avoit garde de dormir (C.N.N., c.1456-1467, 253). ...le ventre luy brouilla et grouilla tellement qu'il fut contraint de soy bouter en une vieille masure inhabitable (C.N.N., c.1456-1467, 469). ...en entrant par icelle dedens ladicte ville, trouva derechef lesdiz prevost des marchans et eschevins qui lui presenterent ung moult beau poile qui estoit armoyé par les costez aux armes du roy, et ou mylieu y estoient les armes d'Espaigne, et puis se bouta dessoubz icellui poile. (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 27).

 

-

[Dans l'intention de se cacher] : "...Eins vueil mourir dou mal dont je me dueil." Et je qui fui boutez dedens le brueil Vi qu'a ce mot la dame au dous acueil Cheï com morte. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 65). ...il se party de la place au plus tost qu'il peut et se bouta en la forest, car il ne vouloit point estre cogneu (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 44).

 

-

Se bouter en la boue. "Se rouler dans la boue" : Se I pourcel savoit parler, il se moqueroit des bestes qui ne se boutent en la boe. (GERS., Pent., p.1389, 84).

 

-

Se bouter en (un habit). "Se mettre dans, revêtir" : Elle [Fortune] se boute en maint abist ; Se l'un garist, L'autre mourdrist, Quanqu'elle dist Tantost desdist. (MACH., Lays, 1377, 417).

 

-

Se bouter arriere sur la mer. "Reprendre la mer" : Le cuer audit marchant (...) le feist arriere sur la mer bouter cinq ou six mois puis son retour (C.N.N., c.1456-1467, 126).

 

-

Se bouter entre. "Se placer entre (pour s'entremettre)" : Aprés ce je regardoye que elle feroit ; et incontinent se bouta entre seigneurs et princes, car bien sembloit dame de grant sens et prudence et dame de bon conseil (GERS., Noël, p.1404, 305).

 

-

Se bouter sous. "Se placer sous" : ...nostre povre pelerin viel et usé et non digne d'estre nommé s'est boutés et retrais soubz l'ombre des esleus ministres de Dieu Celestins, lesquelz paou doubtent la fin de leur gracieus pelerinage, c'est asavoir la mort en ce monde tant redoubtee (MÉZIÈRES, Test. G., 1392, 302).

 

-

Se bouter en la voie. "Se mettre en route" : Je m'etoys boultée à la vouée De vous venir vouer, Damoyselle. Mon mary a la pensée telle Qui vous veult à souper donner. (Gent. moun. T., c.1500, 377).

 

-

Se bouter en mal pas : Du tout seroye deserté, Se me boutoye en si mau pas. (Gris., 1395, 14).

 

-

[À propos de la conception du Christ] : Ilz dient que leur Dieu voult naistre D'une vierge ou il se bouta (Mir. st Ign., 1366, 75).

 

-

Se bouter ensemble. "Se mettre ensemble" : Pichars et Borgengnons s'estoient tous buteis ensemble (...) por guerier et destruire le paiis de Liege (STAVELOT, Chron. B., a.1447, 364).

 

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Se bouter avec qqn. "Se mettre avec qqn, fréquenter qqn" : ...et ses .II. compagnons Lessa ovec les feulz gaignons Qui au premier mont lez douterent, Mez entr'elz si bel se porterent Et o eulz si bel se bouterent Que trestouz lez amolïerent [Éd. : "se conduire"]. (Vie st Evroul S., c.1350, 146).

 

-

Se bouter avant / devant. "S'avancer" : Lors me boutai un peu avant Plus priés de li [du rossignol] Pour mieuls ymaginer son chant. (FROISS., Dits Débats F., 1363-1393, 131). ...je me cuide mettre avant, Ung autre se boute devant ["un autre se met devant, me devance"] (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 168).

 

b)

[D'une chose]

 

-

[De la marée] (Se) bouter avant. "Monter" : Le samedi environ midi, que la marée commenchoit à bouter avant, se mist madame en bateau elle et son estat (LA MARCHE, Mém., IV, Pièces annexées, p.1468, 98).

 

-

[D'une chose mobile] "Se mettre, se placer qq. part" : Et apres ce, il [l'air] monte par violence pour ce que l'yaue eslieve cest air et se boute sous luy par sa pesanteur. (ORESME, C.M., c.1377, 70). Mais la grant flote de noz gens vint sur eulx, et, par la force des ondes, la nef qui ardoit se bouta entre eulx. Et ne se scorent si garder que il ne leur embrasast trois de leurs nefs, et furent tous ceulx de dedens noiez et periz, et tout quanqu'il avoit dedens affondré dedens la mer. (ARRAS, c.1392-1393, 89). Lors, quant le soudant a veu que nostre roy ne lui a voulu accorder sa fille, il lui a renvoié les trieves avec une deffiance ; et estoit ja tout prest sur la mer a bien quarante mille Sarrasins, et s'en vint bouter ou havre ["s'ancrer au port"], et fist tout son harnoiz traire a terre, et vint mettre le siege soubdainement devant Famagouste (ARRAS, c.1392-1393, 94).

 

3.

Au fig.

 

a)

[Lieu abstr.] : Einsi est il, se Dieus me gart, De tout princë ou n'a regart A soy, quant en guerre se boute, Et qui son anemi ne doubte, Car je te promet, biaus amis, Qu'il n'est nuls petis anemis, Ne plaie aussi, ou aconter Ne doiez : oy l'ay compter. (MACH., C. ami, 1357, 123). ...et se bouta en la possession du pays. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 154). Trop est hardiz qui la se boute [dans l'état de mariage], Car li gaiges y est trop longs (DESCH., M.M., c.1385-1403, 22). Et estoit en ceste tempeste le plus auctorisé, qui plus hardiement se boutoit en la besoigne (BAYE, II, 1411-1417, 86). Et escoutoye Në ou parler d'elles ne me boutoye ["je ne prenais pas part au débat"], Mais mon penser et ma langue arrestoye (CHART., D. Fort., 1412-1413, 158). Plus avant ne pense je pas me bouter es debas de ceste matiere (CHART., Q. inv., 1422, 63). Quel besoing est, quant on est a son aise, De se bouter en soussy et meschief ! Je tiens amans pour folx (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 440). Quant la royne se fut boutee en cela ["dans cette opinion"]... (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 350). ...ung pou luy desplaisoit la folie du premier venu, qui trop fort a son gré se boutoit en chose de petite value. (C.N.N., c.1456-1467, 229). ...si je ne cuidasse qu'on feist aultre chose en mariage, je ne m'y fusse ja boutée. (C.N.N., c.1456-1467, 300). ...sans penser ne ymaginer peril ne dangier ou il se boutoit... (C.N.N., c.1456-1467, 456). ...le dit amoureux cordelier (...) s'en est (...) allé bouter et rendre en la dite religion (MART. D'AUV., Arrêts Am. R., c.1460-1466, 166). Sy apperçoy le grant danger Ouquel omme amoureux se boute. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 60). JOYEULX. Et vela peine nompareille, Qui s'y boute trop est bien sot. (B. veoir, p.1480, 20).

 

-

Se bouter en amour : [Titre] Le premier point que l'en doibt considerer avant ce que on se boute en amours. (MARTIN LE FRANC, Champion dames III, F., 1440-1442, 26).

 

.

(Y) estre bouté. "Être amoureux" : A vous servir entierement, Je vueil employer mon savoir (...). Car je suis boutté tellement, Sy je puis vostre amour avoir, Que je y mectray tout mon debvoir Sans jamais faillir nullement. (Au grey d'amours F.-H., c.1400-1500, 245). Mais Blanchette demoura avecques Liriope et Priande, qui estoient ferues d'Amours, dont elles entrerent en matiere, car il n'en avoit nulles des trois qui n'y fust boutee bien avant. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 224). ...je y suis aussi avant bouté que homme qui vive (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 11).

 

-

Se bouter en forme de. "Se mettre en, se transformer en" : Il te convient ta peau ridee estandre Et te bouter en forme de Venus (LA VIGNE, S.M., 1496, 479).

 

-

Se bouter à + inf. : Je me suis sy tres fort bouté A vous amer (...) Qu[e]... (Poés. lyr. court. XVe I., c.1454-1456, 85). ...Puis qu'a le faire je me boute (Bataille st Pens. A., a.1485, 45).

 

-

(Se) bouter avant. "S'avancer, prendre des initiatives" : En ces paroles avoit aucuns qui boutoient fort avant pour grever les Parisiiens, et disoient : ... (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 76). ...les deux partis, c'est assavoir les Franchois et Anglois, commencèrent à avoir grant communicacion et hantises les ungs aveuc les autres ; et, par especial, marchans et gens de divers mestiers se bouttèrent fort avant ; et pareillement, laboureurs mirrent fort les mains à l'oeuvre, esperant que, par le moien desdictes treves, paix generalle se deust ensievyr entre iceulx oncle et nepveu. (ESCOUCHY, Chron. B., t.1, c.1453-14, 5).

 

b)

[D'une chose abstr.] : Doutance (...) entre mes pensés se boute (ACART, Prise am. H., 1332, 46). Ne Souvenirs ja mais ne m'aideroit, Car desconfort toudis m'aporteroit, Merencolie en moy se bouteroit, Pour moy detraire. (MACH., Compl., 1340-1377, 260). Dont ont li roy plus grant deffaut Que n'ont la povre gent menue, D'or, d'argent et de joiaus nue, Et par deffaut de souffissance, Car en leur cuer se boute et lance Un ardant rain de convoitise Qui si les ambrase et atise Qu'il les art jusques es entrailles (MACH., R. Fort., c.1341, 101). Quant il se vit en si haut point, Orgueil, qui ne scet faire a point, En son cuer se mist et bouta Et telement le debouta Qu'il perdi sa gloire et son regne, N'orgueil n'i tint regle ne regne. (MACH., C. ami, 1357, 29). ...et quant Verité fault, Erreur et Fausseté s'i boute. (GERS., Annonc., a.1400, 234).

 

4.

(Se) bouter hors de. "Se retirer de" : [Madame la princesse récemment accouchée] ...devoit bouter hors de ses cambres à sa relevée (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 93). ...a ceulx qui Dieu aiment et doubtent, Et qui hors du monde se boutent Viennent touz biens. (Mir. ste Bauth., c.1376, 164).

 

-

Au fig. [Hors d'un lieu abstr.] : De jamais n'amer par amours J'ay aucune fois le vouloir (...). ...se j'eusse le povoir D'aucunement hors m'en bouter, Par le serement qu'a Amours doy, Jamais n'y lairoye rentrer Mon cueur qui est maistre de moy. (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 23).

E. -

En partic. [Avec une idée de causalité (l'objet bouté n'existe pas au départ)]

 

1.

Bouter le feu qq. part : Le feu dedens le lit boutay, Et mon seigneur hors en sachay, Si laissay ma cousine ardoir. (Mir. femme roy Port., c.1342, 191). Finablement et à briés mos, Chascuns des nostres tant s'efforce Qu'il bouterent, par fine force, Maugré tous, le feu en la porte. (MACH., P. Alex., p.1369, 88). Et quant elle [la ville] fu bien pillie, Bien destruite et bien essillie, Li roys le feu dedens bouta, Car bien vit, et pas ne doubta, Qu'il ne la peüssent tenir, Et veoit le vespre venir. (MACH., P. Alex., p.1369, 209). ...li feus i estoit boutés en plus de vint lieus. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 184). ...les aultres oïent paroles attraihans a mal et qui boutent le feu mauvais es maisons Dieu et es hospitaulx du Saint Esperit, c'est a dire es ames. (GERS., Pent., p.1389, 80). Et lors fist on crier par la cité que de chascun hostel alast un homme sur le champ pour assembler les Sarrasins mors sur une montaigne et y portast on grant foison bois, et feust le roy Selodus mis tout au dessus, et feussent tous couvers de bois, et feust le feu boutez dedens, et feussent tous les payens ars et bruiz, et tous les crestiens enseveliz et mis en terre saincte. (ARRAS, c.1392-1393, 186). Et le landemain, par matin, se desloga l'ost. Et fu deffendu que nul ne feust si hardy qui boutast feu en son logeiz ne ailleurs, a celle fin que Sarrasins ne sceussent leur venue ne apperceussent aucunement. (ARRAS, c.1392-1393, 227). Gieffroy (...) prist du feu a une lampe en l'eglise et bouta le feu ou feurre. La busche s'esprist. La peussiez oïr et veoir grant pitié, car, si tost que les moines sentirent le feu, ilz commencierent a faire piteux criz et tres amers et doulereux plains (ARRAS, c.1392-1393, 251). ...et bouterent le feu en pluiseurs maisons du fourbourg de Saint-Germain-de-Prés (FAUQ., I, 1417-1420, 168). Si print après une poignée d'estrain, et en bouta le feu en la maisonnette (C.N.N., c.1456-1467, 495). Et, auparavant, le roy envoya à Paris le prince de Pymont, filz du duc de Savoye, pour bouter le feu en Greve (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 206). Et en tant que vous distes que l'avangarde des Bourguignons est passée la riviere d'Oise, il est vray ; et passa hier pour aller courre la terre de Coucy, en laquelle ilz ont bouté les feux partout, et sont retournés. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 319).

 

-

Bouter les feux qq. part : ...et boutèrent les feus en leurs logeis (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 88). ...ly sires de Hynsbech (...) fist buteir les feux à Fleron (STAVELOT, Chron. B., a.1447, 100).

 

-

Bouter feu. "Mettre le feu, incendier" : ...Adan Cheel, (...) Gautier Spelliton, angloys d'Angleterre, pour eulz, en tenant, raençonnant, pillant et robant noz subgés, boutant feulx et faisant tous autres maulz que l'en puet faire pour guerre (Doc. Poitou G., t.4, 1370, 58). ...garder et faire raison et justice à tous et en tous cas, sanz y souffrir bouter feux, ou faire aucunes pilleries ou roberies, ne proceder aucunement par voie de fait (Trés. Reth. S.L., t.2, 1391, 368). ...lesquelx, tant deçà que delà, ont fait tous les maulx que l'en puet faire, hors bouter feulx publiquement (BAYE, I, 1400-1410, 340). ...il a entencion et vouloir de soy retraire et vivre du sien, comme homme de bien doit faire, et n'a personnelment bouté feu, forcé femmes, violé eglises, ne fait meurtre (Doc. Poitou G., t.8, 1445, 219).

 

.

Bouter le feu : Et que d'aucune mortel guerre Fussent espandu par la terre Tout environ li annemi, Et ceste gent fussent enmi, Et que les feus de toutes pars Boutassent, si que des espars Veïssent en lieu de lanterne. (MACH., D. Lyon, 1342, 204).

 

.

Loc. Bouter le feu es estoupes. "Mettre de l'huile sur le feu" : Et quant j'aperçu la maniere De leur parler et de leur chiere, Et que meües furent toutes, Pour bouter le feu es estoupes, Au juge fis une requeste Qui me sambloit assez honneste (MACH., J. R. Nav., 1349, 245).

 

-

[Du feu, de la flamme] Se bouter qq. part. "Se déclarer qq. part" : ...flambe ardant se bouta en ce lit (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 187). Li feux en pluseurs lieux se boute (DESCH., M.M., c.1385-1403, 380).

 

2.

Bouter un siege qq. part : ...le bruit commun que l'assemblée qui se faisoit estoit pour aller boter le siege à Vanes. (Lettres Ch. VIII, P., Pièces justif., t.1, 1487, 382).

 

3.

Au fig. "Induire, causer qqc."

 

-

Bouter guerre / bouter haine : ...li diables soutille et atisse nuit et jour à bouter guerre et haïnne là où il voit pais. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 159).

 

-

Bouter qqc. hors de bouche. "Dire qqc." : ...maiz Geneilhon le butat hors de bouche : ... (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 222).

 

.

Bouter qqc. avant. "Dire qqc." : Et, a ces mos, elle avant boute, De sa vois qu'elle ot moult jolie, .I. rondelet a vois serie (FROISS., Méliad. L., t.1, 1373-1388, 227).

 

4.

Empl. pronom.

 

a)

[D'une pers.] Se bouter (en un sentiment). "Susciter en soi (un sentiment), commencer à l'éprouver" : ...dont se bouteroit tantost en jalousie (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 147). ...se bouta en une bien grande frenesie et parfonde melencolie (C.N.N., c.1456-1467, 319). Son voisin, qui maryé estoit et avoit une tresbelle femme, se bouta en la doulce rage de jalousie. (C.N.N., c.1456-1467, 331).

 

-

Se bouter en admiration. "S'étonner" : Véuz effectz bien merveilleuz Moult estranges et périlleuz, Desquelz les causes et raisons Sont célées toutes saisons à maint soutil entendement, Courage humain, certainement Pensant de sa perfection, Se boute en admiration, Pour laquele n'en doubtez mie L'en y trouva philosophie (LA HAYE, P. peste, 1426, 15).

 

b)

[D'une chose abstr.] Se bouter qq. part. "Apparaître qq. part" : ...car il se doubtoit que grant mortalité ne se boutast entre ses gens. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 96). ...envie et discorde se boutent volentiers en maison ou paix est (FROISS., Chron. D., p.1400, 182). Foy tant parfaicte en moy se boute Sur ce que l'ange m'a dicté Que... (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 52).

III. -

Empl. intrans. ou pronom. [Correspond à bout au sens spatial]

A. -

Au propre

 

-

[D'une chose] Bouter en avant. "Faire saillie" : Si y avoit veu et advisé auprès de la porte une grosse tour, qui bouttoit en avant le fossé et faisoit le triangle du mur, de laquelle tour le guet ne povoit veoir au bas pour ceste cause. (BUEIL, I, 1461-1466, 78).

 

.

Bouter hors : ...au plommel qui boutoit hors au dessus du comble (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 297).

 

-

[D'un lieu] Bouter à / sur. "Toucher, aboutir à"

 

Rem. Doc. 1333 (bute d'un bout a...), 1345 (bute d'un bout audit bois ...bute d'un bout sur), 1406 (quatre acres boutant au chemin du pont), 1415 (boute d'un bout en la terre de), ds GD I, 712a.

 

.

[D'un lieu] Se bouter. "Se situer, se placer" : ...et est sur ung goulfe de la mer qui se boute entre la terre jusques devant ladite ville bien LX milles (LA BROQUIÈRE, Voy. Outr. S., c.1455-1457, 175).

B. -

RHÉT. [D'une finale vocalique] Se bouter avec / en. "Former une crase (avec la voyelle suivante)" : Dame, ayés mon ame en vostre ayde par voustre humble grace. Et le doit on ainsi pronuncier de la voix comme sy après s'ensuit : Dame ayés mon am en vostre ayde par vostre humble grace ; car lez darrienne cilabes finans par ce demey voieux se boute en la premier voieux dez diction commansans par voieux. (Traité art rhétor. L., c.1433-1466, 200). ...la dicte sillabe se boute avec la dicte vocale, et ne font ensemble que une vocale, comme on diroit : Ma dame aime un autre que moi. Celle sillabe me, qui est la moitié de dame, s'entreboute avec ceste sillabe ai, qui est la moitié d'aime (MOLINET, Art rhétor. L., c.1482-1492, 217).

C. -

Au fig. Bouter (une somme) (sur). "Renchérir (d'une somme) ; la mettre au bout (dans la vente aux enchères)" : Sur quoy bouta Pierres Salemon X l., et dempuis bouta Eon Leroy X l. de rabat ; pour ce que fut le derain bouteur... (Comptes Lamballe C.-L., 1423, 150).

REM. Une précédente version de cet article a été rédigée par Sébastien Pettoello.
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

 Article 2/3 
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     BOUTER1          BOUTER2     
*FEW I *bod-
BOUTER, subst. masc.
[*FEW I, 421a : *bod-]

"Nombril" : ...du nombril ou du bouter (...) ...environ le bouter ou les rains (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 238).

V. aussi boutere
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

 Article 3/3 
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FamilleTextesSourcesImpressionAide à la lecture
     SOUS-BOUTER     
FEW XV-1 214b *botan
SOUS-BOUTER, verbe
[GD : soubbouter/sousbouter ; FEW XV-1, 214b : *botan]

Empl. trans. "Pousser par dessous" : Suppello (...) : soubz bouter ou souz traire (Aalma R., c.1380, 404).
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Pierre Cromer

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