C.N.R.S.
 
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 Article 1/3 
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     AVANT-COEUR     
FEW II-2 cor
AVANT-COEUR, subst. masc.
[FEW II-2, 1176a : cor ; TLF : III, 1054a : avant-coeur]

HIPP. "Forme ganglionnaire de la morve (anticor)" (synon. anticoeur) : Et se ceste maladie chet en maniere de morve, si soit bien appareillé comme je enseigneray ou chappitre de la morve ou dedans le chappitre de l'avent cuer (Chir. chevaux P., c.1325-1350, 127). Une maladie vient au cheval, laquelle est appellee avant cuer ; aucuns l'appellent anthicore. (Chir. chevaux P., c.1325-1350, 133).
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 2/3 
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     COEUR     
FEW II-2 1170a cor
COEUR, subst. masc.
[T-L : cuer2 ; GD : cuer ; GDC : cuer ; AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ; FEW II-2, 1170a : cor ; TLF : V, 981b : coeur]

I. -

[Comme organe]

A. -

Au propre

 

1.

"Organe de la circulation sanguine, coeur" : Et telle circulacion n'est pas inconveniente, aussi comme l'en diroit que l'en scet que le cuer est chaut parce que le poulz est hastif comme par signe, et ce que le cuer est chaut est cause de ce que le peuls est hastif. (ORESME, C.M., c.1377, 410). Mez nous devons savoir que le Philosofe [Aristote], ou Livre dez bestes, si dist que ou cuer est le comancement dez voynes, lezquelles transportent le sanc aux aultres membres, sanz lequel le corps ne pourret vivre (Songe verg. S., t.1, 1378, 61). Pour ce que l'air fort empiré Toudis attrait et inspiré, Avec son venim et malice, Moult pénétrant et plain de vice, S'en va au cuer soudainement, Et au pommon pareillement (LA HAYE, P. peste, 1426, 43). Unes choses especiales Que l'en appelle cordiales, Pour réconforter en partie Le cuer, la fontaine de vie, à quoy valent les margarites Qui sont unes pierres petites (LA HAYE, P. peste, 1426, 118). Muant la forme gracieuse En une autre trop vicieuse, Dont la mauvaise qualité Assault le cuer sans amité, Il fault et est expédient Secourir au cuer patient Par saignier, ou commencement, D'un braz ou deux moult largement (LA HAYE, P. peste, 1426, 119). La substance du cueur est dure ainsi comme lacertouse, qui a en soy deux ventricules, c'est assavoir le dextre et le senestre. (PANIS, Guidon, 1478, tr.I, doct.2, chap.5). ...jaçoit ce que le ceur soit la fontaine generative du sanc et des esperis, toutesfois le sanc est le fondement de la chaleur naturelle (Rég. santé corps C., 1480, 162).

 

-

[Dans des contextes de combat, de mort, de vengeance...] : Si vous me voulés adresser Et me conduire ma lance Droit au cuer ung peu sur la pance, Je le poulsarey si tresbien Que cognoistrés en son maintien S'il a vie ne tant ne quant. (Pass. Auv., 1477, 230). Et aprés disner, fut coupé la teste d'un Ytallien qui avoit tué ung paige des François et mengé son cueur (LA VIGNE, V.N., p.1495, 263). Quant ledit chevalier eust tout bien remonstré audit admiral les choses devant dittez, si rappaisa ung peu sa fureur et appella ledit Voyaul, qui estoit tout pensif, et luy dit qu'il dit hardiment audit conte que si le roy le tenoit qu'il feroit menger son cueur aux chiens. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 146).

 

-

[Placé au centre du corps (dans le ventre)] : Aussi comme le cuer qui est le plus noble membre est aussi comme ou milieu de la beste ou de le honme. (ORESME, C.M., c.1377, 516). Et Anthoine boute l'espee ou fourreau et l'ahert par le millieu du corps et le tire jus du cheval et le gecte si rudement a terre que a pou que il ne lui a crevé le cuer ou ventre. (ARRAS, c.1392-1393, 162). Mais la damoiselle, qui plus ne povoit si le cueur ne luy sailloit du ventre, ne peut oncques dire ung seul mot (C.N.N., c.1456-1467, 213).

 

.

Le coeur du ventre. "Le coeur" : Et, quant la voit si doulereuse, Le cuer du ventre li estraint Si fort qu'a poy que ne s'estaint (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 138). Ceulx estoient assaillis et devourez de serpens, de scorpions, de couleuvres et de crapous enflez, envenimez et tous ardans, qui leur gettoient leurs santonines et leurs venins jusques au cueur du ventre. (Horloge de sapience S., c.1389, 103). ...le Danois le passat [son adversaire] tout parmy le coeur du ventre. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 100). Et entrent les glaives (...) jusques aux coeurs de leurs ventres. (Percef. I, T., c.1450 [c.1340], 303).

 

Rem. L'interprétation par "milieu du ventre" (v. infra, p. anal.) ne semble pas pertinente ici, la place du coeur étant dans le ventre.

 

-

[P. oppos. au corps] : Cuer et corps, vouloir et pensée Met du tout en vostre baillie (Mir. enf. diable, c.1339, 4).

 

.

[Isolé du reste du corps après la mort] : [Le roi d'Écosse, n'ayant pu réaliser son désir d'aller à Jérusalem, ordonne qu'on y porte son coeur après sa mort] ...puisqu'il est ainsi que li corps de mi n'i poet aler ne achiever ce que li coers a tant desiré, jou i voel envoiier le coer ou lieu del corps pour mon veu achiever (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 78). Je voel sitos que je serai trespassés que vous prendés le coer de mon corps et le faites bien embasmer (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 79). ...leur pere estoit mort le tiers jour aprez. Et trouverent que le prieur en avoit bien fait son devoir, car il l'avoit fait ouvrir et enbasmer, et appareillier le cuer, et avoient ensevely les entrailles en la chappelle aux lampes, devant le maistre autel. (ARRAS, c.1392-1393, 289).

 

Rem. Pratique fréquente. Ainsi Philippe de Bourgogne est enterré à N.D. de Haulx en Brabant et son coeur aux Chartreux de Dijon.

 

-

[Dans une comparaison] : ...la chose publique est comme ung corps compaginé de plusieurs membres, dont le roy c'est le chef, les officiers de justice les membres, comme baillis et prevostz les yeulx et oreilles, les sages conseilliers le cuer, les chevaliers et nobles les mains et les laboureux et marchans les piez. (JUV. URS., Verba, 1452, 203).

 

-

[Coeur d'un animal, comme nourriture] : Et je vois en la boucherie Acheter un cuer de mouton, De quoy je paistray mon faucon. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 156). Et cuer de porc lui est char bonne (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 352).

 

-

[Juron] Par le coeur bé ! V. Dieu "Par le coeur de Dieu !" : Par le cuer bé ! n'eschapera, Car ge saré qu'elle fera ! (Renart contref.,, 1ère réd. R.L., t.2, c.1319-1322, 197).

 

2.

En partic. [Dans ses réactions aux douleurs, aux émotions, dans les impressions et réactions qu'il produit] : Es fievres, ceulx qui ont grant embrasement environ le ventre et mordicacion ou mouvement tremblant du cuer, tous ces signes sont mauvaiz. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 78). Lors, quant de nous approuchier je les vy, Couleur changay et de cueur tressailly. (CH. D'ORLÉANS, Ret. am. C., 1414, 5). Il eust tant de douleur en son cueur que il tomba a terre comme mort et perdit sa memoire (Belle Maguel. C., 1453, 49). Sy leur en devoit faire le coeur mal, et la cause y estoit bien. (CHASTELL., Chron. K., t.2, c.1456-1471, 113). ...elle a grant fain De veoir quelque miracle faire A ce prophete de bon aire [Jésus], Que le cuer des gens admollist (Pass. Auv., 1477, 134). De doleur j'ay le cuer tout vain (Pass. Auv., 1477, 197).

 

-

Le coeur casse / crame /deult / engrosse / estreint / faut / fend / fremist / part / pasme / rompt / soupire / tressaut... (à qqn) : Car j'ay au cuer si grant dolour, Pour tant qu'approucher voy le jour Que l'ennemi le doit avoir, Qu'il m'est avis, au dire voir, Que le cuer me doie partir (Mir. enf. diable, c.1339, 20). Et, quant la voit si doulereuse, Le cuer du ventre li estraint Si fort qu'a poy que ne s'estaint (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 138). Et quant il oÿ parler de dame par amours, comme cellui qui onques ne l'avoit pensé, les yeulx larmoiant, le cuer fremist et le viz palist, si qu'il ne sceust un seul mot parler. (LA SALE, J.S., 1456, 7). ...baille au bon seigneur a demain l'heure de besoigner, dont il est tant content que son cueur tressault tout de joye (C.N.N., c.1456-1467, 74). ...en lysant, le sang luy monte et le cueur luy fremist, et devint tout alteré de maniere et de coleur. (C.N.N., c.1456-1467, 180). Quant je vous voy tout le cueur me remue (Feste roys, c.1475-1500, 308). Certes, je ne serey pas celle, Pour ce que le cuer me romproit, Quant je varrois la vierge belle. (Pass. Auv., 1477, 182). De tristesse le cuer me casse (Pass. Auv., 1477, 220). J'en ay ung remort (si) tresgrant que le cuer me fent ! (Pass. Auv., 1477, 234). Le cuer me crame - d'oyr telz ditz ! (Pass. Auv., 1477, 240). L'AFFINEUR. Quant le cueur luy fauldroit, J'ay ce qu'il luy fauldroit Et luy feroit grant bien (Sots mal., c.1480, 90). Le cueur m'en deult, j'en suis mary. (S. fol, c.1480-1490, 7). Il me semble que le cueur me euvre De joye quant je gaigne argent. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 383). J'enraige, brou ! Le cueur me part, Jamais ne feray chiere baulde. (LA VIGNE, S.M., 1496, 288). Rommain, le soleil est levé, Allons au lever de mon sire. Le cueur au ventre me souspire ; Je ne sçay que je puis avoir. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 183). A Dieu ! pere. Le cueur me pasme, Quant icy vous voy mort gisant, Vous qui estiez le plus puissant Qui fust en l'universel monde. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 184).

 

.

[Formule traditionnelle pour marquer une extrême émotion, une extrême douleur] À peu que le coeur ne me fent / ne me part : A pou que le cuer ne li fent. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 99). ...a pou que ne li parti Le cuer et de duel et d'envie (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 227). Mais quoy ! je fuyoie l'escolle Comme fait le mauvaiz enffant. En escripvant ceste parolle, A peu que le cueur ne me fent (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 36). SAINCT MARTIN. Ains que d'icy faire depart, Dictes moy vostre adversité. CLAUDE. A peu que le cueur ne me part, Tant suis en grant proplexité ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 524).

 

-

[Comme lieu de la conscience] : ...son treshoneste, tresvertueux et loyal cueur s'evanuyt, et cheut paulmée. Elle fut prinse et portée sur ung lit, et luy revint le cueur (C.N.N., c.1456-1467, 425).

 

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À coeur failli. "Évanoui" : ...et s'en alla tout droit au chevalier, qu'il trouva cuer failly, et cuidoit qu'il fust mort (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 260). ...la povre Ysiphile fu toute esperdue. Ou lieu de danser, elle chey pasmee lors et a cuer failly (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 216).

 

-

Casse / miner / navrer / rompre / sacher ... le coeur (à qqn) : ...avis m'est c'on me sache Le cuer, tant ay dueil et hachie, Quant il fault que je le vous die. (Mir. enf. ress., 1353, 56). Mais ceste doleur mon cuer mine. (LE FÈVRE, Lament. Math. V.H., c.1380, 17). Filz, vostre mort le cueur me casse (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 222). Pitié tout cuer - sarre et destrainct [l. destraint]. (Pass. Auv., 1477, 241). Je vaiz ad Jhesus le saulveur ; Ses beaulx ditz m'ont navré le cuer. Je suis du tout de s'amour prise (Pass. Auv., 1477, 151). Las, quel ardeur Me romp le cuer - d'y veoir si tresgros partuis ! (Pass. Auv., 1477, 256). ...cella le cueur me casse. (ANTITUS, Poés. P., c.1500, 18).

 

-

[Pour désigner la réaction elle-même] N'avoir coeur. "Ne pas manifester de réaction (de peur)" : ...et puis demener le belement. Se il n'a cuer, metez .II. seons (Chir. chevaux P., c.1325-1350, 374).

 

-

[Contexte métaph.] : Quant il sont bossu par orgueil Ou que du cuer ont crevé l'ueil... (Best. lap. Rosarius S., c.1330, 14). ...cent maux dont tout le mendre Pourroit un coeur de pierre fendre Et en cent quarts l'escarteler (CHASTELL., Outré am. K., 1449, 106).

B. -

P. méton.

 

1.

"Poitrine, région du coeur" : Aucuns d'eulx furent navrez ou cuer de saiectes qui sont en peril, les autres ou chief, autres es bras, autres es gembes, autres es mains (BAYE, I, 1400-1410, 103). Et qui vouldra ce pratiquier Doit forment mettre et appliquier Icelles liqueurs ou iteles Sur le cuer et sur les mamèles, Et mesmement sur la fenestre Où le cuer tent, ce dit le Maistre, Et les lessier et retenir, S'il veult à bon effect venir. (LA HAYE, P. peste, 1426, 121).

 

2.

"Estomac, ventre" : Es corps ou il n'a point de fleume, qui ont fastide, mors du cueur, tenebres es yeulx, et amertume en la bouche, toutes ces choses signiffient que cel corps a mestier d'estre purgié par haut. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 73). Qui le veult mesler et confire Sagement avec la racine De caparis, une herbe digne, Et, selon l'art de Médicine, Tout homme aiant foible poictrine, Mal estomac ou dolent cuer, Doit mains user de tel liqueur (LA HAYE, P. peste, 1426, 126). ...le lieutenant d'Angers avoit le cueur chargié ; si luy fut conseillé que il print une plume et la meist en sa gorge le plus fort qu'il peust ; si ne la peut avoir du corps, et y demoura ung jour et une nuyt, si se voua a madame sainte Katherine. Et aussitost comme il fut voué, la plume s'en yssit, et fut guery. (Mir. ste Cath. Fierbois C., 1470-1483, 7). [La belette] ymagina qu'elle se mectroit en la farine pour prendre yceulx ratz et pour mieulx vivre affin de saouler son cueur. Et, ainsi que les ratz venoyent en la farine, elle les mengeoyt l'ung aprés l'autre. (MACHO, Esope R., c.1480, 132).

 

-

Coeur petit : ...les anciens ont acoustumé a appeller la bouche de l'estomac le cuer petit (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 243).

 

-

"Ventre" : Dieu (...) entra u cuer de la Vierge Marie. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 117).

 

-

À coeur jeun. "À jeun" : Doit on oir messe le dimanche a cuer jeun ? (GERS., Gourm. II, G., 1402, 808). Cherme contre farcin. (...) Icy sont les paroles que vous devez dire (...) et que se soit a cueur jeun (GUILL. VILLIERS, Hipp. P.-D., a.1456, 131).

 

Rem. LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 190, v. 2848. Sur en jeun coeur, cf. FEW II-2, 1173a.

 

-

Avoir mal au coeur. "Ne pas se sentir bien" : Et environ jour couchant, ledit Jehan se commença à plaindre, disant qu'il avoit mal au cueur et qu'il se vouloit aller coucher, ce qu'il fist, sans boire ne menger ; et environ l'eure de mynuyt il ala de vie à trespassement. (Doc. Poitou G., t.9, 1454, 374).

 

-

Faire mal au coeur./Le coeur fait mal. "Donner / avoir envie de vomir" : Il me semble, dit la damme, que quant vient au matin je te voy vomir et fere telle contenance et telle. - Vroiement, fait elle, madame, il est vroy que le cuer me fait mal. - Ha a, fait la dame, tu es grousse sans faulte ! (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 84). Je ne digneroye menger de toy [de la graisse], car tu me feroys mal au cueur (MACHO, Esope R., c.1480, 167). Pour sa douleur si fort et aigre On l'arousa tout de vinaigre. Mais le goust luy fist mal au cueur Et en sentit plus grant douleur (Vig. Trib., c.1480, 234).

C. -

[Représentations du coeur]

 

1.

"Bijou en forme de coeur" : N'aviés vous point lors, pour devise, Sur vostre habit quelque verdure, Ou ung cueur, emprès la chemise,Ou son nom fut en escripture ? (Amant cord. M., 1490, 23).

 

-

Coeur d'or : ...ung petit cueur d'or a lermes (MART. D'AUV., Arrêts Am. R., c.1460-1466, 56). ...ung beau cueur d'or (MART. D'AUV., Arrêts Am. R., c.1460-1466, 128). Illec tumba, de son secours Ou des manches de son corset, Ung cueur d'or (Amant cord. M., 1490, 58).

 

Rem. Sur les devises qui ornent les bijoux, cf. Amant cord. M., 1490, v.1488 et note (mon coeur avez / de bon coeur / deux corps, un coeur...). Sur le sens de "garde de l'épée en forme de coeur", cf. T-L II, 1120.

 

2.

[En héraldique] : ...le cuer gueulé portoient. (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 23).

 

3.

En coeur. "De manière à évoquer la forme d'un coeur" : Et si ne veulx point trespasser en cest endroit la memoire du bon roy Robert, qui tant fut dedié a orayson qu'il portoit la chappe en cueur pour commencer le chant et entonner les antiennez en l'eglise. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 168).

II. -

[Comme siège de l'affectivité, en partic. de l'amour ou bien du désir, de la volonté ; comme siège des qualités morales, en partic. du courage ; comme siège de la pensée et, plus gén., de tout l'être psychique]

A. -

[Comme siège de l'affectivité]

 

1.

[Comme lieu des émotions, des sentiments] : Et sachiez que je pensoye moult fort a un mien affaire qui moult me touche au cuer, et je prye a Dieu qu'il m'en aide a yssir. (ARRAS, c.1392-1393, 25). Et gardez, tant que vous aurez a estre conquerant, que entre vous compaignons ne vous maintenez comme sire, mais commun au grant et au petit, et parler et tenir compaignie a chascun selon sa qualité, car ce fait les cuers enflammez d'amour a ceulx qui ainsi sont humain en seignourie. (ARRAS, c.1392-1393, 87). Et pour cela que sa matière Triacale, plaisant et chière, Ministre au cuer joie et léesce, Notoirement quant il s'adresce. (LA HAYE, P. peste, 1426, 133). ...quand la langue d'elle eut povoir sur le cueur tresfort chargé d'ire et de courroux... (C.N.N., c.1456-1467, 28). ...je vous requier et prie, ostez de vostre cueur tout courroux que avez vers moy conceu, et me pardonnez (C.N.N., c.1456-1467, 29). Si vous prie et requier, pour la paix de mon cueur et plus grande seureté de nostre besoigne, que vous me laissez aller veoir (C.N.N., c.1456-1467, 118). ...pensez comme je vous ay dit aux afferes de nostre eglise, qui me touchent près du cueur, Dieu le scet (C.N.N., c.1456-1467, 142). ...vous savez que je ne puis ma mort fuyr n'esloignier sans faire et commettre peché mortel ! Et que bien autant au cueur me touche, s'en ce faisant ma vie esloignoie, ne viveroys je pas deshonorée... (C.N.N., c.1456-1467, 143). Madame l'abbesse, oyant ce que dit est, et portant au cueur ung grand fardeau d'ennuy (...) s'accorda, combien que ce fut a grand regret (C.N.N., c.1456-1467, 144). ...en allerent chacun en leur chambre plaindre ses doleurs, Dieu scet ! plorant des yeux, du cueur et de la teste. (C.N.N., c.1456-1467, 168). Mon filz (...) me dictes deux ou trois motz Pour moy resjoïr tout le cuer ! (Pass. Auv., 1477, 191). Or laissés ces plaintes mondaines, Ma bonne seur ; pensés es cieulx, Ou Jhesus a joyes aultaines, Et nous farés le cuer joyeux. (Pass. Auv., 1477, 254). ...Dont nous portons dedens nostre cueur quelque Griefve douleur (LA VIGNE, V.N., p.1495, 316).

 

-

[Avec un adj. ou un part. passé marquant un sentiment] : Je la feray [ceste paciance] de cuer contrict Pour plus tost en avoir destruit Mes vanitez et mes pechiez (Mir. parr., 1356, 9). ...petit a petit son troublé cueur se remist a nature, et pardonna (C.N.N., c.1456-1467, 30). ...[la chambrière] avec tout le desplaisir et crainte que son ennuyeux cueur charge et empire, se hourde de l'escuier et a son col le charge. (C.N.N., c.1456-1467, 124). Il n'est rien que puisse gouster Ne degouster, Tant ay le cuer triste et sarré. (Pass. Auv., 1477, 277).

 

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[P. réf. au sermon sur la montagne, Matth. V, 4] Coeur douloureux : Et par le contraire Ceulz yci sont bieneureux Qui les cuers ont doloreux. Et fonderay ma predicacion, qui est une plaidoyerie de verité, en trois raisons principales, et dy que cuer doloreux - et j'entens de bonne doleur, de doleur de penitence - amaine trois excellens biens. Cuer doloreux delivre ses amis de dur emprisonnement, delivre soy meismes de rigoreux jugement, recoit yci joyeux asseurement ou sentement. (GERS., Déf., 1400, 223).

 

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Coeur noirci (de peur, de douleur...) : Car je suis pleins de pensée amoureuse Et de desir qui tant me scet detraire Qu'il me convient trambler, fremir et braire De cuer nerci, Quant vous ne me volez faire, Dame, merci. (MACH., L. dames, 1377, 103). De paour ay le cuer noirci, Helas ! a li parler je n'os (Jour Jug. R., c.1380-1400, 244).

 

Rem. GD II, 393a.

 

.

Adj. + au coeur / à son coeur / en (son) coeur : L'ystoire nous dist que Remondin fu moult courrouciez en cuer quant il ouy la requeste que ly conte de Poittiers, ses sires, et le conte de Forests, ses freres, lui fesoient, car il amoit et doubtoit tant sa dame que il heoit toutes choses que il pensoit qui lui deussent desplaire. (ARRAS, c.1392-1393, 43). Et ceulx leur en dirent la verité, et estoient moult joyeux ou cuer de l'appareil du noble secours qu'ilz veoient si prestement appareillier (ARRAS, c.1392-1393, 151). Moult fu la pucelle doulente a son cuer du grant meschief qu'elle voit qui par lui advient en la grosse bataille. (ARRAS, c.1392-1393, 162).

 

.

De coeur + adj./Adj. + de coeur : Haa, dist Presine, qui bien le savoit, faulses et mauvaises, et tres ameres et dures de cuer, vous avez mal fait, quant cellui qui vous avoit engendrees vous avez ainsi pugny par vostre faulx et orguilleux couraige, car c'estoit ce ou je prenoye toute la plaisance que j'avoie en ce monde mortel, et vous la m'avez tollue. (ARRAS, c.1392-1393, 12). Lors vint a son seigneur. Si le baise tout en plourant et triste de cuer que il ne disist un mot pour tout l'or du monde ; et prent son cor et lui met sur le pitz. (ARRAS, c.1392-1393, 23). Assez tost aprez fist le roy cueillir son paveillon, et entra en mer, et s'en va le plus droit qu'il puet en son pays, pensant de triste cuer aux paroles que Melior, la dame du chastel de l'Esprevier, lui ot dictes. (ARRAS, c.1392-1393, 306).

 

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Ennemi de coeur : ...et teis estoit son anemis de cuer, qui par semblant ly demonstroit eistre ses bons amys. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 163).

 

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Avoir le coeur gros. "Éprouver une peine lourde à porter" : Quant Olivier l'ouï, si en eut le ceur gros, A soy mesmes a dit : "A ce jour seray sos, Se a ce Sarrasin (...) Ne vois prendre vengance !" Adonc s'est desclos, Il broche le cheval qui si va les galos (Galien D.B., c.1400-1500, 61).

 

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Avoir le coeur monté. "Éprouver une douleur mêlée de rancoeur"

 

Rem. Myst. Pass. N.S. R., c.1350-1370, 253.

 

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Avoir le coeur fel contre qqn. "Concevoir une haine mortelle contre qqn" : ...et avoit le coeur felle encontre le party bourguignon (CHASTELL., Chron. K., t.2, c.1456-1471, 201).

 

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[D'une femme] Avoir le coeur bon et gai. "Avoir envie de plaire" : Sa femme convient mectre en estat ainxin qu'il appartient et a l'aventure el avra le cuer bon et goy (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 7). [Autres ex. p. 27 et 40]

 

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Faire le coeur clair à qqn. "Apaiser qqn, le rassurer (par ses explications)" : ...car brief je lui en feray son cuer cler et l'en mettray hors de melencolie, par quoy il sera seur de moy et moy de lui et congnoistra ma voulenté (BUEIL, II, 1461-1466, 253).

 

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À / en tel sentiment de coeur : ...en grant soussi de coer (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 110). ...par lasqueté ou par faintise de cuer (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 162). Et tout ce je di et met sans affermer a grant humilité et cremeur de cuer, salve tousjours la majesté de la foy catholique, et pour reprimer la curiosité ou presompcion d'aucuns qui, par aventure, la voudroient calumpnier ou impugner ou trop avant enquerir a leur confusion (ORESME, C.M., c.1377, 730). ...en grans angousses de cuers (FROISS., Chron. D., p.1400, 845). LE CRESTIEN. En puissance et auctorité Dieu vous tienne en prosperité ! LA FEMME. En joye de cueur et santé (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 86).

 

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Avoir / mettre / sentir tel sentiment au coeur : Quant Hermine ouy celle nouvelle, elle ot si grant joye ou cuer qu'elle ne scot que faire. Mais elle n'en monstra nul semblant. Ains monstre qu'elle sente grant douleur ou cuer, et si faisoit elle. (ARRAS, c.1392-1393, 116). Je vous commande a tous que vous laissiez a mener ce dueil, si chier que vous avez que je demeure en vie encores une piece de temps avec vous autres, car vostre doulour me met au cuer plus de griefté que l'angoisse de la bleceure que j'ay. (ARRAS, c.1392-1393, 120). Mais, pour Dieu, preingne vous pitié de mon povre enfant, orpheline, desnuee de tout conseil et confort, se vous lui failliez. Quant Uriiens ouy ces piteux mos, si fu moult doulent de la mort du roy et ot grant pitié au cuer des piteux moz qui furent en la lectre. (ARRAS, c.1392-1393, 142). Et quant Remond la voit [Mélusine], si fu moult doulent. Hay, dist il, m'amour, or vous ay je trahie par le faulx enortement de mon frere, et me sui parjurez envers vous. Lors ot tel dueil a son cuer et telle tristece que cuer humain n'en pourroit plus porter. (ARRAS, c.1392-1393, 242). Et sachiez que je sens ou cuer plus de doulour de nostre departie Cm. foiz que vous ne faictes, car ainsi fault qu'il soit, puis qu'il plaist a Cellui qui tout puet faire et deffaire. (ARRAS, c.1392-1393, 258). La dame, qui avoit l'oeil et l'oreille tousjours a son amy, l'entreoyt d'adventure, dont elle eut grand frayeur au cueur (C.N.N., c.1456-1467, 436).

 

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Avoir le coeur anglois / françois.../Estre anglois / françois... de coeur. "Être du parti de" : Les trois pars des gens de la ville estoient en coer plus Englès assés que François. (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 39). Et furent pris à Bruges à la venue dou conte tout cil principaulment qui avoient les cuers gantois et qui en estoient souppechonné de l'avoir. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 51).

 

Rem. FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 156 ; 160 ; 176...

 

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Le coeur tire vers : ...en son langage luy donna assez a cognoistre que le cueur luy tiroit fort devers Brabant. (C.N.N., c.1456-1467, 175).

 

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Avoir le coeur en la manche. "Cacher ses sentiments (?)"

 

Rem. CHR. PIZ., Oeuvres poét., t.1, éd. M. Roy, 191 (N'aiez pas le cuer en la manche, Amans de bonne volenté (...), Car se fausseté en vous maint Des biens d'amours y perdrez maint). HUG. II, 328a.

 

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Avoir son coeur à / en qqn. "Placer sa confiance en qqn" : Toutes ces choses ont esté et sont sur nous, et toutevoye nous ne t'avons point oublié, ne n'avons envers toy fait aucune chose inique, et avons eu et avons tousjours le cuer a toy (JUV. URS., Loquar, 1440, 355). Mon seignieur, [or] il vous fault dire A Bernard s'il y az son cuer. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 15).

 

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Avoir le coeur envers qqn. "Éprouver de l'inclination pour qqn" : ...ce fils de roy avoit le coeur envers le duc de Bourgongne (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 181).

 

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Mettre son coeur en qqn / Mettre qqn en son coeur. "Accorder son affection, sa confiance à qqn" : Ayes largement amis et paix a pluseurs, mais entre mille ayes ung conseillier ouquel tu mettes ton ceur et ta fiance. (FILLASTRE, Traité Conseil H., c.1472-1473, 146).

 

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[En alliance avec bouche, où coeur marque l'adhésion totale à ce qui est dit] V. bouche : Riche Precieuse, Verite la royne, de bouche et non de cuer nous recognoissons nostre deffaulte, et veoyons nostre ruine, nostre pauvrete et nostre laide figure, nostre infortunite et nostre maleurte. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 271). Concluons que ce traitre flateur ne nous gette en excommeniement, affin que nous, en saluant Nostre Dame, soions d'elle resaluez, quant nous disons de cuer ou de bouche : Ave, Maria, gracia... (GERS., Annonc., a.1400, 236). Qui est la bouche qui pourroit dire, ou cuer comprendre la divine leesse que vous receutes au jour d'uy, Mere de Dieu glorieuse ? (GERS., Noël, p.1404, 291).

 

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De l'abondance du coeur parle la bouche volontiers : "Se tu veuls, dit il, savoir quel cuer aucune personne a, considere bien et avise de quel matiere il parle voulentiers et plus souvent", aussi que s'il voulsist dire : tu le saras par ce car de l'habondance du cuer (...) parle la bouche voulentiers. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 677).

 

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[D'une chose]

 

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Ferir / toucher qqn au coeur / pres du coeur / Entrer au coeur de qqn. "Affecter qqn" : Ces paroles entrerent tellement ou coer le roi d' Engleterre qui estoit jones, que onques depuis elles ne li porent issir (FROISS., Chron. D., p.1400, 183).

 

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Seoir sur le coeur : ...la grant amour que en vous ay mise m'a contraint de vous descheler et dire tout ce que sur le ceur me siet. (Hist. seign. Gavre S., c.1456, 16).

 

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Venir du coeur : ...un baisier amoureux Venant du cueur (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 29).

 

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[D'une pers.]

 

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Echoir au coeur de qqn. "Plaire à qqn" : Amenés vostre niepce en pelerinage à Saint Jehan d'Amiens, et li rois sera contre li (...). ...se elle li eschiet en coer, elle sera roïne de France. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 225).

 

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Estre en coeur à qqn. "Être en faveur auprès de qqn" : ...toutes-voies estoit un vaillant chevalier et preud'homme, et bien en coeur au duc de Bourgongne, son maistre. (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 180).

 

2.

En partic. [Comme lieu de l'amour] : Ma chiere dame, Vostre biauté mon cuer art et enflame (MACH., J. R. Beh., c.1340, 76). Lequel qui parle, meu de l'amour que son cuer avoit desjà mise en icelle Marguerite, promist et enconvenança lors à icelle Marguerite (...) que il seroit son mary et la espouseroit (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 205). Ma chiere fille et dame, que dittes vous ? Vous sçavés bien que vous estes de tant grant noblesse que le plus grant seigneur du monde seroit content de vous avoir, et vous mettrés vostre cuer en cestui jeune chevalier qui est estrangier... (Belle Maguel. C., 1453, 9). ...les yeulx d'elle, archiers du cueur descocherent tant de fleches en la personne dudit bourgois que... (C.N.N., c.1456-1467, 23). ...vous prie que vous n'obliez pas celle qui vous a fait le don de son cueur (C.N.N., c.1456-1467, 167). ...elle qui aultre part avoit le cueur ne fist que ung sault jusques a la chambre de celuy qui l'attendoit de pié coy. (C.N.N., c.1456-1467, 250). ...si ne les povoit il forclorre de l'entiere et loyale amour dont leurs deux cueurs estoient mutuellement entreliez et embrasez. (C.N.N., c.1456-1467, 546). Mais que te nuysoit elle en vie ? Mort j'appelle de ta rigueur, Qui m'as ma maistresse ravie Deux estions [moi-même et ma maîtresse] et n'avions q'un cueur ; S'il est mort, force est que desvye, Voirë, ou que vive sans vie (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 86). Ce pendant fit faire le roy d'Angleterre grant appareil pour aller espouser celle qui avoit desja gaigné le cueur de luy (Jehan de Paris W., 1494-1495, 20).

 

Rem. Chez CH. D'ORLÉANS le coeur peut être opposé au je, la passion amoureuse devenant dominante : Mon cueur s'est de moy departy ; Pour tenir l'amoureux party, Il m'a voulu abandonner (CH. D'ORLÉANS, Chans. C., c.1415-1440, 217).

 

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Avoir le coeur sous l'aile. "Être amoureux" : ...le seigneur de Charny (...) avoit le coeur soubs elle merveilleusement fort, et avoit fierté et amour qui le conduisoient (CHASTELL., Chron. K., t.2, c.1456-1471, 22). Meriadec (...) luy dist : "Messire Henry, comment l'entendez vous ? Il samble à vous veoir que vous ayez le ceur soubz l'ele et que vous en volez a qui que ce soit. Toutevoyez Monsieur vous a il donné congié de porter emprinse ?..." (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 133).

 

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[P. oppos. au corps] : ...pour bien choisir et son temps employer, donna cueur, corps et biens a une belle damoiselle (C.N.N., c.1456-1467, 252).

 

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Prov. Loin de l'oeil, loin du coeur : "Par ma loy, mon bel amy !" dist Jason. "Qui de l'oeil eslonge, du cuer se recule. Mirro est clere comme l'or, mais Medee flamboye comme la pierre precieuse..." (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 200).

 

3.

En partic. [Comme siège du désir, de la volonté, de l'attention portée à qqn ou qqc. (par adhésion, par ardeur, avec sincérité...)]

 

a)

[Comme lieu] : Ma dame ma seur, Dieu vous doint joye de quan que vostre cuer desire. (ARRAS, c.1392-1393, 215). Fuiez de cy, faulx traitre, vous me avez fait par vostre faulx traitre rapport parjurer contre la meilleur et la plus loyal dame qui oncques nasquist après celle qui porta Nostre Createur. Vous m'avez apporté toute doulour et emportez toute ma joye. Par Dieu, se je creoie mon cuer, je vous feroye mourir de male mort, mais raison naturelle le me deffent, pour ce que vous estes mon frere. (ARRAS, c.1392-1393, 242). ...ung mois après le partement de son amy, desir luy eschaufa le cueur et si luy vint ramantevoir les plaisans passetemps qu'elle souloit avoir (C.N.N., c.1456-1467, 146). ...s'entr'amerent tant fort et si loyalement qu'ilz n'avoient qu'un seul cueur et ung mesme vouloir. (C.N.N., c.1456-1467, 163). ...le haut coeur de grandir vostre maison vous a fait trop aimer vostre péril (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 172).

 

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Avoir (le) coeur de qqc. / de faire qqc. "Avoir l'envie de qqc., désirer qqc., en avoir la volonté" : He Dieux, comment a la ["là"] cuer personne de religion, de ses braz estendre a la vaine joye du monde, ne a karoler, qui regarde les braz au douz Jesu Crist pour lui estenduz en la croix (FRÈRE ROBERT, Chastel perill. B., c.1368, 434). Se vous avez tant de hardement que vous vous osez vengier de ce tort qu'on vous fait, nous vous aiderons trestuit. Et il leur dist qu'il en avoit bien le cuer et la voulenté. (ARRAS, c.1392-1393, 57). Qu'en dites vous de cecy ? Avez vous cuer de moy obéir ? (LA SALE, J.S., 1456, 48). ...je n'aroye cueur ne courage de vous faire bonne chere avec ces paillards houseaulx. (C.N.N., c.1456-1467, 157). Quant on joingt à son ennemy, on le voit face à face, qui est grant hardement de l'attendre. Quant on est joinct avec lui, il faut vaincre ou mourir. Pour ce, peust l'on bien dire qu'il est vaillant qui va jusques là et a le cuer de y tenir pié ferme. (BUEIL, II, 1461-1466, 113).

 

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Avoir (le / son) coeur / grant coeur à / en qqn / en qqc. "Mettre beaucoup d'attention à qqn ou qqc., l'avoir toujours à l'esprit ; mettre beaucoup d'espoir dans qqn ou qqc." : Point ne puet estre que une personne puisse avoir son cuer en livres et en deniers. (FOUL., Policrat. B., I, 1372, 93). Pour ce dame nuit et jour Doit avoir l'ueil et le cuer à s'onnour (MACH., L. dames, 1377, 198). ...ilz n'ont pas bien le cuer à voz besoingnes. (Doc. 1413. In : H. Moranvillé, Bibl. Éc. Chartes 51, 1890, 432). Et Pierre avoit tousjours son cueur en Maguelonne car il ne sçavoit a quelle fin estoit devenue. (Belle Maguel. C., 1453, 45). ...cest évesque avoit fort le coeur à ce saint voyage (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 334). Si ayez tousjours le cuer à Dieu et à la vocacion en quoy vous estes convoqué (BUEIL, II, 1461-1466, 25). ...ledit nostre Saint Pere, aiant grant ceur a la journee que avoit establie a Mantue, tousjours sollicitoit d'icelle et affectoit fort que fruit en peust venir a la crestienté par l'assistence que les princes lui donroient. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 233).

 

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Avoir le coeur à / en la cuisine. "Porter tout son intérêt à ce qui se passe dans la cuisine, être plein d'appétit (y compris pour les femmes)" : Chasse hors, au moins pour I peu de temps, toute autre cure et souci, autre pensee de tes besoingnez mondaines ; ne soit pas le corps au moustier et le cuer en la cuisine. (GERS., Pent., p.1389, 72). ...ou en oyant la messe ou sermon, ont le cuer tousjours a terre, c'est a dire a pensee terrienne, orde ou charnelle, ont le cuer en la cuisine, comme on seult dire. (GERS., Noël, p.1404, 299). JAUNE BEC. (...) L'une des voys est femenine. CUIDER. (...) Il a le cuer a la cuysine, Se jaune bec en son sotoys. (Pipée R., c.1470-1480, 189). Il a le cueur à la cuysine (Maistre Mim. T., c.1480-1490, 256).

 

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Le coeur est qq. part. "L'intérêt, l'attention va qq. part" : Car quant li hom ou la femme est au moustier pour ouyr le service divin son cuer ne doit mie estre en sa maison, ne es champs, ne es autres choses mondaines (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 12).

 

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Avoir le coeur comment... "Se préoccuper de la manière comment" : Elas ! le chastelain n'avoit cuer comment il partesist, mais qu'il fust hors des mains des Englès ; sy s'acorda à che que le conte volloit (FROISS., Chron. L., III, c.1375-1400, 281).

 

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Avoir qqc. à / au coeur. "Prendre beaucoup d'intérêt à qqc., tenir à qqc., être préoccupé par qqc." : ...aiens mout à cuer et vueillans pourveoir diligenment que aus religieus et aus eglises de nostre royaume, à leur famille et à leurs biens soit pourveu de seurté de sauve protection. (Doc. Poitou G., t.1, 1333, 431). ...nous avons ferme esperance que vous, comme prince tres catholique, avez ladite besoigne [la croisade] a cuer (PHIL. VI VALOIS, Lettres closes C., 1334, 51). Et que vous sachez que nous avons ceste chose à cuer, et que nous voulons que ledit chevalier soit briefment delivrés (Mand. Ch. V, D., 1364, 66). ...nous voulons savoir quelle diligence en sera par vous faitte, attendu la matière qui est grande, laquelle nous avons bien à cuer et voulons que par justice elle preigne fin ; telement que ce soit exemple à autres qui voudroient faire esmeutes ou rumeur en nostre ditte ville. (Hist. Lille T., t.1, 1385, 55). ...quelle redoubtée et reverent personne estoit cellui à veoir, qui heure ou temps ne passoit sans l'occupacion d'aucune bonne euvre, c'est assavoir ou vacquier en ce qui touchoit le bien de la chose publique, sur toute riens il avoit à cuer (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 70). Et tousjours se deffendoient ceulx de ladite ville d'Orléans vigoureusement, à l'aide que le roy de France leur bailloit des gens, et le bastard d'Orléans, qui moult avoit la chose à ceur, qui continuellement labouroit à la deffence d'icelle ville (CHART. J., Chron. Ch. VII, V., t.1, c.1437-1464, 61). ...ledit Cuer avoit le fait dudit doienné fort à cuer. (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 461). ...ilz en eslisent un d'entre eulx, celluy qui leur samble estre le plus saige et qui a plus à cueur le bien commun. (LA BROQUIÈRE, Voy. Outr. S., c.1455-1457, 7). ...n'avoit aultre regret que monseigneur [son mari] n'avoit l'assault plus au cueur (C.N.N., c.1456-1467, 278). ...car y vouloit mettre peine et avoit fort la besongne au coeur (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 24). ...bien par l'espace de deux mois aprés le trespas dudit maistre Jehan Chevrot le roy fit semblant de dormir et de non avoir a cuer ceste besongne (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 265). ...En ung jardin que moult avoie a cueur (Compl. lion G., c.1470, 295). Parquoy, aprés la mort d'icelluy, il monstra bien qu'il avoit a cueur et aymoit bien et affectueusement ce que luy avoit esté recommandé a la fin du dict notable seigneur de Vendosme. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 312).

 

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Avoir qqc. fort au coeur. "Tenir beaucoup à" : ...il n'estoit pas trop content ne joyeux. Neantmoins, car il avoit la chose fort au cueur, ne laissa pas sa poursuite (C.N.N., c.1456-1467, 48). La bonne dame, qui bien avoit la chose au cueur, appella ceste damoiselle et luy dist... (C.N.N., c.1456-1467, 248).

 

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Avoir qqc. en coeur / pres du coeur. "Projeter qqc., être résolu à qqc." : ...pour avoir leur aide sur son voiage de Turquie lequel il avoit en coeur (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 10). Sy ne se voulut plus contenir le duc qu'à ce jeusne chevalier il n'ouvrist pleinement son estomac, et qu'il ne lui dist ce qu'avoit en coeur de faire (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 21). ...car voioit bien qu'il avoit la chose en coeur (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 34). Comment le roy ariere leur declara ce qu'avoit encore en ceur (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 26).

 

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Avoir qqc. sur (le) coeur. "Désirer qqc., projeter qqc., être affecté, préoccupé par qqc." : ...plus ne vous voeul nïer Ce que j'ay sur le coeur, si sçarés mon cuidier (Huon Bordeaux B., c.1400-1450, 221). Dictes ce que sur cueur avez. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 153). Sire, vous avez aucune chose sus le cuer, parquoy vous ne faittes que penser (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 257). Dictes moy, sans attandre plus, Ce qu'en avés sur vostre cueur, Car l'emperere mon seigneur Le veult savoir, Et pour ceste cause de voir M'a cy devers vous envoyer. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 93). C'est grant chose quant on se peut conseillier, desgorger et dire ce que on a sur le cuer a ung sien amy. (JUV. URS., Verba, 1452, 315). ...ne luy cela gueres ce qu'il avoit sur le cueur et, sans aller de deux en trois, luy demanda... (C.N.N., c.1456-1467, 120). Vous savez bien la grand amytié qui est despieça entre luy et moy, et qu'il n'y a celuy qui ne dye a son compaignon tout ce qu'il a sur le cueur (C.N.N., c.1456-1467, 210). Car il vous a dist et bien monstré ce qu'il avoit sur le cuer, et a dit, present son conseil et devant vous, qu'il est deliberé de secourir ceulx de Crathor, quelque chose qui luy doye couster. (BUEIL, I, 1461-1466, 175).

 

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Avoir son coeur fixe en qqc. "Désirer qqc., y être attaché" : ...iceux avoient coeur fixe et rassis en leur dilection première (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 400).

 

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Avoir le coeur elevé pour qqc. "Être très attaché à qqc." : Le duc de Bourgongne estoit retourné en son pays et avoit le cueur très eslevé pour ceste duché qu'il avoit joincte à sa crosse, et trouva goust en ces choses d'Alemaigne, pour ce que l'empereur estoit de très petit cueur et enduroit toutes choses pour ne despendre riens (COMM., II, 1489-1491, 5).

 

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Avoir qqn contre coeur./Avoir coeur contre qqn./Tenir qqn (à) contre coeur. "Ne pas aimer qqn, le détester" : ...se [les femmes] contre cuer ont leur homme, Porter ne li faut autre somme. (Best. lap. Rosarius S., c.1330, 181). ...et eurent en aprez moult contre cuer ledit sire de Mortemer (LE BEL, Chron. V.D., t.1, 1352-1356, 102). ...et m'ont ehut en habomination et contre cuer (Psaut. lorr. A., 1365, 89). De quoi tout cil dou pays, grans et petis, nobles et non nobles, en furent durement tourblet et couroucié, et eurent puissedi durement contre coer le signeur de Mortemer. (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 88). Bien sentoit messires Charles d'Espagne que li rois de Navare l'avoit grandement contre coer (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 129). ...et dont elle doutoit que son seigneur et mary à tousjours ne la tinst à despecte et contre-coeur (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 341). ...que pourtant on ne le tenist point si à suspect, ne si contre coeur (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 94). ...le duc mesme avoit fort contre coeur ledit de Saint Pol (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 132). ...lequel il avoit contre coeur pour ses longues et plusieurs démérites envers luy (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 435). ...le roy avoit coeur contre luy [le comte de Charolois] (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 14).

 

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Avoir qqn sur coeur. "Avoir du ressentiment contre qqn" : ...moult fu honnouré Benuic des chevalliers qui le congnoissoient et des pucelles aussi pour sauver leur honneur. Mais ung pou l'avoient sur coeur pour son anel, si en receu celle nuit le chevallier plusiers ramprosnes. (Percef. Compl. R., c.1450 [c.1340], 500).

 

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Donner coeur de + inf. "Donner le désir, l'envie, la volonté de" : ...Et me donnez cuer et desir De vous de miex en miex servir (Mir. femme roy Port., c.1342, 176). Et le plaisir qu'Amours lui fait lors prendre Lui donne cuer et volenté d'apprendre Et de savoir (CHART., D. Fort., 1412-1413, 167). Donne moy cueur et pensement De moy purgier presentement (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 57). Ces raisons donnèrent grant cueur aux nostres de passer, et fut le pont achevé et dressé (COMM., I, 1489-1491, 63).

 

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Faire qqc. contre coeur. "Faire une chose qui va à l'encontre de ce que l'on voudrait" : ... Mopsus et Theseus furent tres grandement festoyez du roy et de ses nobles, meismement de Peleus, qui contre cuer faisoit une chiere fainte. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 165).

 

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Faire qqc. arriere coeur. "Faire qqc. à contre coeur" : Se li fisent li bourgois de le Rocelle grant feste arrière coer, mais il n'en osoient aultre cose faire. (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 140).

 

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Mettre coeur à qqc. / à faire qqc. "Mettre son énergie à qqc., tendre à qqc." : ...qu'il mette cuer et entente A li servir et honnourer (MACH., D. Aler., a.1349, 264). J'ay moult de foiz mis cuer et cure En vous prïer que m'oïssiez, A ce qu'enfant me donnissiez. (Mir. enf. ress., 1353, 69). ...tes serviteurs qui t'ont servy si loyalment, et ont mis cuer, corps et biens pour la salvacion de ton ame (JUV. URS., Loquar, 1440, 353).

 

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Mettre en son coeur que. "Prendre la résolution de" : ...ycy jamais ne pourrons accomplir nostre desir. Et certes j'ay mis en mon cueur que jamais ne vous laisseray ; et aussi vous avés dist que vous me garderés en toute honnesteté jusques a nostre mariage. (Belle Maguel. C., 1453, 28). Celle nuyt Maguelonne se mist au cueur, puisque Pierre n'estoit illec, qu'elle se mist en quelque lieu devot a servir Dieu en quoy elle peust mieulx garder sa virginité (Belle Maguel. C., 1453, 41).

 

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Mettre son coeur à. "S'appliquer à" : Car droit ne veult nul vray amant blasmer, Qui met son cuer et son entendement A bien servir la vierge (Mir. ev. arced., c.1341, 145). Parle LE VALET a Cayphas. Syre Caÿphas, entendés : Vecy celuy que demandés. Saichés que bien est vostre amys, A vous servir a son cueur mys. (Pass. Autun Biard F., 1470-1471, 131). Nous y advons bien le cuer mis [à notre office]. (Pass. Auv., 1477, 195).

 

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Mettre coeur (à / pour qqc.) : Diligentez bien, enquestez, et mettez coeur à mon commandement (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 253). ...car riens ne luy estoit impossible, ne dur, ne difficile envers luy, là où il vouloit coeur mettre (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 180). Adherer a vanité et y mettre ceur, c'est perdition. (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 185).

 

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Mettre qqc. arriere de son coeur. "Se détacher de qqc." : Messires Robers d' Artois (...) ne pooit oubliier ne mettre arriere de son coer les despis et les vituperes que li rois Phelippes li faisoit et avoit fais (FROISS., Chron. D., p.1400, 228).

 

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Porter coeur à qqn. "Tourner sa préoccupation vers qqn (ici par rancoeur)" : Pisso a Juliz porta coeur, Ne il ne l'ama a nul foeur, Mais tout adès fut son contraire De tout quanqu'il luy vëoit faire. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 213).

 

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Prendre qqc. à / en coeur. "Attacher beaucoup d'importance, d'intérêt à qqc., s'y impliquer ; trouver beaucoup d'intérêt à qqc., apprécier qqc." : Li jones contes de Haynau, qui estoit hardis et entreprendans, avoit si pris en coer ceste guerre (...) que... (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 46). ...il avoit pris trop à cuer l'avenue de Limoges. (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 248). Si fort prens en cuer ce diffame Que j'en pers du tout le parler. (Pass. Auv., 1477, 208). Plus fut content le roy de ce mistere Que qui luy eust cent mil escuz donné, Et print a cueur tellement la matiere Que tost aprés de volunté entiere Leur petit don fut bien reguerdonné (LA VIGNE, V.N., p.1495, 172).

 

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Prendre qqn à coeur. "Accorder de l'intérêt à qqn, se préoccuper de qqn" : ...que de vostre benignité et bonté vous plaise les prenre à cuer comme dame et mere (Doc. 1414. In : L. Mirot, Bibl. Éc. Chartes 75, 1914, 309).

 

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Tenir le coeur de qqn. "Bénéficier de l'intérêt, de l'appui de qqn" : Et oultre dirent les dessusditz au duc qu'il ne porroit gueres gaigner à la mort du roy, pour ce que Mons. de Guienne tenoit tous les cueurs des plus grans hommes du royaulme en sa main. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 219).

 

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Tourner contre coeur à qqn. "Répugner à qqn, aller à l'encontre de sa volonté" : ...par luy accorder sa requeste, ce luy fust tourné contre coeur ; et par la refuser à plat, c'estoit matière de rancune (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 106).

 

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Que dit le coeur ? "Que désirez-vous ?" : SOTIE. (...) Ça, que dit le cueur ? CROQUEPIE. Tout basme, tout bruyt, tout honneur. (Vig. Trib., c.1480, 223). LE JUIF. Le grant Dieu vous gard de courroux Et vous tienne en prosperité ! LE .I. SERGENT Que dit le cueur ? LE JUIF. Necessité Eusse de trouver ung sergent Qui fust a mon cas diligent Pour adjourner a ma requeste Ung crestien (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 114).

 

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Comme le coeur dit. "De toute ma volonté, sincèrement, du fond du coeur" : Finablement, en escripvant, Ce soir, seulet, estant en bonne, Dictant ces laiz et descripvant, J'ouys la cloche de Serbonne, Qui tous jours a neuf heures sonne Le salut que l'ange predit ; Si suspendis et mis en bonne Pour prier comme le cueur dit (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 28).

 

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[D'une chose]

 

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Estre à coeur à / pour qqn. "Avoir de l'importance pour qqn" : ...mais si la matière de Charles vous est tant à coeur... (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 238). ...car ce m'est chose fort à ceur que ne m'ayez adverty de son allée. (Lettres Louis XI, V., t.6, 1476, 39).

 

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Gesir en coeur à qqn. "Avoir beaucoup d'importance pour qqn, préoccuper qqn" : ...et jà-soit-ce que belle-fille me gist en coeur plus que riens du monde, et aimeroie mieux mourir que de lui faillir... (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 283).

 

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Son coeur gist sur. "Sa préoccupation porte sur" : ...car tout son coeur gisoit sur les Anglois et sur la journée promise et à laquelle ne pouvoit parvenir (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 42).

 

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Venir à coeur : Pour ce entendez maintenant, Gabriel, Et vous aussi, familier Raphael, Ce qui me vient a cueur et a couraige (LA VIGNE, S.M., 1496, 208).

 

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Prov. Le coeur fait l'oeuvre et non pas les longs jours : Et li bons coerz fait l'oevre, non mie le lonc jour. (Baud. Sebourc B., t.1, c.1350, 103). Le coeur fait l'oeuvre et non point les longs jours. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 66). Le coeur faict l'oeuvre et non point les longs corps (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 227).

 

Rem. Morawski, 1069.

 

b)

[Dans des loc. adv.]

 

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Coeur à coeur. "En toute confiance" : Car avec son amy l'en ne doit mye besongner par aguet ou malice, maiz plainnement et rondement cuer a cuer. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 91). Quant on se marie aultrement Que coeur à coeur... (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 238).

 

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À contre coeur. "Contre son désir"

 

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Prendre (des paroles) à contre coeur. "Prendre en mauvaise part" : CATHECUMYNAIRE. (...) je suis entalenté D'estre a vous tous treshumble serviteur Ne ne prandray voz ditz a contre cueur Në a nul mal vostre correction Se je failloye au service du cueur Ou a quelque aultre bonne operacion. (LA VIGNE, S.M., 1496, 373).

 

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Qqc. vient à contre coeur. "Qqc. déplaît" : Si grant erreur me vient a contre cueur, Que teste et corps me creve de despit ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 369).

 

-

De coeur / du coeur / en coeur / de bon coeur / de coeur agreable / de coeur entier / de coeur fin / de grand coeur / de coeur parfait / de coeur profond / de vrai coeur. "Volontiers, de bon gré, pleinement ; franchement, sincèrement" : Je ne le feray pas envis, Mais de cuer, car il m'est avis Que gentilz estes et courtois. (Mir. femme roy Port., c.1342, 156). ...si feroie De bon cuer ce qui li plairoit. (Mir. marq. Gaudine, 1350, 153). Tres douce Vierge, humblement Te deprie de cuer parfait Que... (ARNAUD, Prière Vierge O., II, c.1350-1400, 150). Mere, je voy que de cuer fin Ces gens la vous servent et aiment (Mir. enf. ress., 1353, 6). Droit au moustier vous en alez, Mercïer la vierge Marie, Et nous vous tenrons compagnie De cuers entiers. (Mir. enf. ress., 1353, 74). Celui par droit de patronage tu dois de vray cuer honorer (FOUL., Policrat. B., I, 1372, 89). Et puis s'en retourna à Toulouse, quant il eut pris le saisine et possession de le ville et dou chastiel de Montsach, que moult recommenda en coer, et le fist depuis remparer et rapareillier (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 179). Très-chier et grant ami, se vous voulez chose que je puisse faire, je le feray très-voulentiers et du cuer. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 524). ...ceste merveilleuse aventure que je voy ou cours des estoilles que tu as lassus assises dès le commencement du ciel, par haulte science d'astronomie dont tu m'as presté une des branches, de quoy je te doy louer de cuer parfait, et ta Haulte Majesté, ou nulle ne se puet comparer. (ARRAS, c.1392-1393, 19). ...se ilz ne feussent, les Sarrazins les eussent tous destruiz ou tournez a leur loy, qui vaulsist piz que mort corporelle, car ceulx qui a ce se feussent consentu de bon cuer eussent eu dampnacion perpetuelle. (ARRAS, c.1392-1393, 118). Et au chief de V. jours se mistrent les barons en mer, et en brief temps arriverent en Chippre, et compterent au roy Uriien toute la verité de la recueillette que son frere avoit eue en Armenie, et comment il en estoit roy paisiblement, de quoy Uriien loua Jhesucrist de bon cuer. (ARRAS, c.1392-1393, 144). Sachiez qu'il n'a si grant pecheur ou monde que Dieu ne soit plus grant pardonneur et plus debonnaire, quant le pecheur se repent et lui crie mercy de bon cuer et de bonne voulenté. (ARRAS, c.1392-1393, 255). Or parle SEINT PIERRE. Or suis je bien deseperé ! De malle heure suis je né, Quar pour mon grant peché Mon segnieurs ay renyé. Mes non pas de ceur ! (Pass. Autun Roman F., c.1400-1500, 187). Il vous sera obeissant D'entier cueur et loyal povair. (CH. D'ORLÉANS, Chans. C., c.1415-1440, 211). Le grant Dieu, pas ne demorra Que je ne le mainne de cueur ; Je ne le lairay a nul feur Tant comme il sera en vie. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 192). Honny soit quil l'espargnera ! Reguarde comment du cueur j'ovre, La peaul de son dox se desepvre. Tel ovrier doit on aloer. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 196). Auquel la Court, après les regraciations et congratulacions en telz cas acoustumées, a dit et respondu qu'elle, de son povoir très volentiers et de bon cuer, se emploiera à ce que dit est (FAUQ., III, 1431-1435, 48). ...se mon très redoubté seigneur et prince monseigneur le duc de Bourgoingne, va en ce present voyage, et il soit son bon plaisir que je y voise en sa compaingnie, je yray de bon coeur (ESCOUCHY, Chron. B., t.2, 1454, 195). ...elle fut haultement merciée, doulcement escoutée, et de bon cueur obeye (C.N.N., c.1456-1467, 49). "...N'est ce pas ainsi, mes seurs ? dit elle. - Oy, oy", dirent elles trestoutes de bon cueur. (C.N.N., c.1456-1467, 144). ...fut force a nostre gentilhomme d'(...)aller au service de mon dit seigneur, ce que de bon cueur et bien il fist. (C.N.N., c.1456-1467, 145). ...ces femmes entrerent dedans, qui si tresfort rioyent, et de si grand cueur, qu'elles ne sceurent mot dire (C.N.N., c.1456-1467, 188). ...il se trouva seul avecques la gouge, qui le receut tres doulcement et de grand cueur, comme il sembloit (C.N.N., c.1456-1467, 231). ...lesquelles choses toutes le roy libéralement et de grant coeur lui a accordées (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 76). Sy prieray pour luy [mon seigneur, l'évêque Thibault d'Aucigny] de bon cueur (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 25). Mes amis, de cuer je vous prie Qu'alliés a luy. (Pass. Auv., 1477, 87). O Dieu, de bon cuer te supply Droit ycy Que soyons avec toy logés. (Pass. Auv., 1477, 103). Va ad Jhesus et de cuer fin Luy dit que le veulhe guarir. (Pass. Auv., 1477, 127). Goubelet, beau Gobelet, venés a moy de mactin ; De grant cuer vous baisarey, mes que soyes plein de vin (Pass. Auv., 1477, 178). Servons de cueur le createur (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 159). Quant au regard de vostre emprise, Elle est licite et raisonnable Que vous la devez sans faintise L'acomplir de cueur agreable, Ne vous n'avez riens plus notable. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 99). Combien que vous monstrez en cueur Qu'en amours vous n'estes rien lasche... (Colin loue dép. Dieu T., c.1485, 152). De tresbon cueur cecy vous donne. (P. Jouh. D.R., a.1488, 29). Hellas, monsieur, se je sçavoye Vous faire service ne bien, Tresvoluntiers je le feroye De bon cueur (LA VIGNE, S.M., 1496, 532). Et, ce faisant, ledit bastard et Vuyau se recommanderent de bon cueur à monseigneur Saint-Nicolas, et, la corde gettée, ledit conte descendit par laditte corde, ayant ung baston entre ses jambes. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 173). Mons. le grant maistre, s'il est chose que pour vous puisse faire, en me le faisant sçavoir, je le feray de bon cueur. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 347).

 

-

De / du tout (mon) coeur. "Pleinement, franchement" : De tout mon cuer vous en graci (Mir. ev. N.D., c.1348, 79). De tout mon cuer te magnify Pour les graces et le bienfait Qu' autre foiz et ores m' as fait (Mir. enf. ress., 1353, 73). ...je m'en alay a Nostre Seigneur et le depri et lui dis de tout mon cuer : ... (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 285). Je regarde que aucuns sont qui servent Dieu de tout leur cuer en faisant ses commandemens ; et se a la foys ils pechent, tantost sont repentans et en sont yci puniz et purgiez. (GERS., Déf., 1400, 224). ...a toy, vray et certain Pere, sommes venues humblement nous offrir labourer diligemment et de cuer a ceste besoingne, chascune selon son pouoir et office que tu nous as presté (GERS., Concept., 1401, 395). ...de tout son cueur il regardoit la singuliere beaulté de Maguelonne qui estoit assise devant luy (Belle Maguel. C., 1453, 7). ...en service et aultres choses, il est celuy qui s'i veult du tout son cueur employer. (C.N.N., c.1456-1467, 96). ...vous ose bien faire la pareille promesse, vous suppliant treshumblement et de tout mon cueur que mon bon et loyal vouloir me soit reputé... (C.N.N., c.1456-1467, 168). De tout mon cuer joyeusement, M'amye, vous obeyrey. (Pass. Auv., 1477, 91).

 

-

Du bon du coeur. V. bon "Du fond du coeur, sincèrement" : Roy souverain, a vous je viens Vous faire service et honneur, Ainsi comme il vous appartient Et a mon souverain seigneur, Dont je suis prest, du bon du cueur, Faire vostre commandement. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 223). Monseigneur, sachez fermement Que de bon du ceur le ferons, Et ne le croyez autrement, Que, s'i vous plaise, y entendrons ; Ne autre desir nous n'avons Fors aquerir louenge et gloire Encontre Anglois faulx et felons, Espoir d'avoir d'eux victoire. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 302).

B. -

[Comme siège des qualités morales (ou des défauts), en partic. du courage]

 

1.

[Comme lieu] : ... le roy de Chippre (...) estoit bleciez de coup mortel, et ne feust que pour le venin dont le dart estoit entechié, et en pou de temps y paru, car il print mort de cellui coup. Mais il avoit le cuer plain de si grant vaillance que il ne le daignoit monstrer a sa gent, jusques a tant que ly uns des barons apperceut que le roy estoit, du senestre costé de la hanche jusques au talon, tous rouges de son sang, et la place ou il arrestoit, toute tainte et arrousee du sang de son corps. (ARRAS, c.1392-1393, 106). Et pour ce je vous prie que, s'il a en ceste place homme qui ne sente son cuer ferme pour actendre l'adventure qu'il plaira a Jhesucrist de nous envoier, qu'il se traye a part, car par un seul couart failly est aucunesfoiz une besoingne perdue. (ARRAS, c.1392-1393, 108). ...c'est qu'il ne se faict nulz hommes de tel cueur ne telle vertu pour sçavoir seigneurier, comme ilz avoient à Rome (COMM., III, 1495-1498, 114). Et avoit [ledit de Meleun] le cueur ouvert à tous vices et clos à toutes vertus, et disoient aucuns que c'estoit pain beneist de l'avoir effacé de la terre des vivans. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 212).

 

-

Coeur + adj. désignant une qualité, un défaut : ...mon dessusdit seigneur (...) a tant fait qu'il en a sceu au plus prez de la droite verité qu'il a peu, et m'en a commandé a faire le traictié de l'ystoire qui cy après s'ensuit. Et je commenceray de cuer diligent, de mon povre sens et povoir, en ay fait le mieulx que j'ay sceu. (ARRAS, c.1392-1393, 1). Qui est l'omme de cuer si dur, si ingrat et si pervers que se le roy, qui icy est, offroit monseigneur le Daulphin, son propre enfant, a mort pour le garentir de mourir, et pour le sauver et honnourer, qui moult n'amast le roy ? (GERS., Noël, p.1404, 294). Las ! et de quoy prendras tu orgueil et gloire d'ores en avant, o sot cuer orguilleux de creature humaine ? (GERS., Noël, p.1404, 295). Le flegmatique (...) est moult obliuieux, paresseux et sommilleux, de char mole et fluxible, de couleur fade et blanchastre, le cuer orguilleux et enfle, plain de crachemens et de humeurs habondant (CIB., p.1451, 219). ...pour la distance du lieu ne povoit estre si souvent emprès sa dame que son loyal cueur et trop amoureux desiroit (C.N.N., c.1456-1467, 474). Je scey bien qu'elle a le cuer autain Et qu'elle est bien de mal affaire (Pass. Auv., 1477, 134).

 

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Coeur si dur que pierre : Je dy q'un cuer si dur que pierre S'admolliroit veyant cecy. (Pass. Auv., 1477, 155).

 

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Tel défaut de coeur / de son coeur : Mais Obstinacion la met [l'âme] en la biere et ou sarcueil qui se nomme oblivion de Dieu. Et affin que jamais ne soit ostee, cruaulté luy met tres pesant, tres froide et tres horrible pierre de obduracion de cuer et de desesperance. (GERS., Purif., 1396-1397, 66). Dieu vueille par sa grace que sur nous ne viengne telle cruaulté et telle dureté de cuer ! (GERS., Purif., 1396-1397, 66). ...luy remonstrant sa tresfole entreprinse, la grand lascheté de son cueur (C.N.N., c.1456-1467, 73). ...il parla bien a elle, en luy remonstrant sa tres grand lascheté et desloyauté de cueur (C.N.N., c.1456-1467, 239). ...il la veult trop bien tancer et luy dire la lascheté et neanté de son cueur (C.N.N., c.1456-1467, 345). ...avez monstré la grand lascheté de vostre cueur, qui vous estes habandonnée a ung meschant villain charreton. (C.N.N., c.1456-1467, 345).

 

-

Coeur de boucher. "Coeur cruel, insensible" : Chier filz (...) n'avez pas cuer de bouchier, Mais d'aignel doulz et debonnaire (Mir. ste Genev. S., c.1410-1420, 81).

 

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Avoir le coeur transi. "Avoir le coeur dur" : Je seroye bien mauvaiz Et auroye le cueur bien transsy Si je le mectoye en obly. (Pac. Job M., c.1448-1478, 336).

 

-

Avoir le coeur sur le gros. "Être d'un naturel orgueilleux" : Claudius, qui par nature avoit le coeur sur le gros, fust dur a celle paix. (LA SALE, Sale D., 1451, 80).

 

-

Prov. Rien ne vaut grant coeur / riche coeur en pauvre panse (si l'on n'a pas même de quoi se nourrir, de se maintenir en vie) : C'est tropt fole demesurance D'avoir grant cuer en povre pance (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 97).

 

Rem. Morawski, 2202. Cf. aussi Tomb. Chartr. W., c.1337-1339, 107, v.32.

 

2.

P. méton. "Courage, hardiesse, ardeur, énergie" : ...j'ay veü moult de foiz chienz qui ne pouoient en avant, et on leur donnoit deux ou trois morsiaux de pain, et le cuer leur revenoit, et tantost se metoient en chasce (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 149). Si [le capitaine] le tient [Urian] a grant haultesce de cuer et a grant vaillance. Et, quant il considere le grant et la facon de Uriien, et la fierté de son visaige, et aussi de Guion, son frere, si dist : Ces gens sont dignes de conquester tout le monde. (ARRAS, c.1392-1393, 93). Cuer et hardement recouvré Ont (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 102). ...et ceulx qui combatent et assaillent sont bien esbahyz, quant ilz voient gens fraiz sur eulx ; et aux deffendeurs le cuer leur croist de la moittié (BUEIL, II, 1461-1466, 196). Le duc de Bourgongne estoit retourné en son pays et avoit le cueur très eslevé pour ceste duché qu'il avoit joincte à sa crosse, et trouva goust en ces choses d'Alemaigne, pour ce que l'empereur estoit de très petit cueur et enduroit toutes choses pour ne despendre riens (COMM., II, 1489-1491, 5). Car, lorsqu'on frappoit sur luy, le couraige luy croissoit, et qui plus est, encouraigoit ses gens et leur faisoit enfler le cueur, tant par ses dictz que par ses vertueux faitz. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 288). ...homme très hardi et non desgarny de cueur (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 256). Et alors ledit Guerin le Groing, qui estoit allé chevaulchier lesditz ennemys, fut rembarré avec lesditz quinze hommes d'armes et trente archiers qu'il avoit menez par deffaulte de puissance et non pas de cueur qui fust failli en luy, mais pour ce qu'il estoit chargé de quatre enseignes, acompaigné de cent ou six vingtz hommes d'armes, lesquelz les ramenoient bien rudement, en criant sur ledit Guerin le Groing : à l'ousse ! à l'ousse ! (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 302).

 

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Bon coeur / grand coeur / hardi coeur : Mais le soudant, qui fu plain de grant cuer et de grant vaissellage, ralie sa gent autour de lui, et livre assault a noz gens moult fierement. (ARRAS, c.1392-1393, 112). Se bon coeur tu ne prens nous sommes confondus ! (Huon Bordeaux B., c.1400-1450, 182). Cestui Theseus mist son estude de vouloir ressembler à Herculles et fut de très hardi cueur. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 27 r°).

 

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De bon coeur. "Avec courage, avec ardeur" : Quant Sarrasin percurent que le soudant fut mort, si furent moult esbahiz, ne oncques puis ne se combatirent de bon cuer. (ARRAS, c.1392-1393, 113). Et Hulin de bon coeur va sur paiens caplant (Huon Bordeaux B., c.1400-1450, 179).

 

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(Estre) de haut coeur. "(Être) de grand courage" : ...le roy d'Ausay (...) qui tenoit un gros baston ou poing, et ordonnoit ses gens moult a droit. Et bien sembloit prince de hault cuer et de haulte emprise. (ARRAS, c.1392-1393, 174).

 

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Coeur d'homme : Mon compere, il vous fault avoir Ung cuer d'omme, non pas de femme. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 91).

 

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Coeur de leopard / coeur (de fierté) de lion : Centurïon, cuer de liepart, Le grant Dieu vous gart de perir. (Myst. Pass. N.S. R., c.1350-1370, 236). Ayez cuer de fierté de lyon envers voz ennemis, et entre eulx devez monstrer puissance et seignourie. (ARRAS, c.1392-1393, 87). Il doit avoir cuer de lyon, Hardi et preux, ou sans raison Nom de chevallier est donné. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 231).

 

Rem. Nombreux ex. ds Prov. H., 78b-79a.

 

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Coeur de lievre : [De l'Angleterre] Cuer de lievre mis en corps de lion (DESCH., Oeuvres Q., t.1, c.1370-1407, 315).

 

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Avoir du coeur au ventre : Aprez le Roy le mena à sa fille et lui dist : "Vecy vostre dame et vostre femme. Or aperra comme vous ferez bien la besongne pour l'amour d'elle." Et le Jouvencel lui respondist : "Sire, qui n'auroit point de cuer au ventre, vecy assez pour y en faire venir..." (BUEIL, II, 1461-1466, 179).

 

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Avoir / donner coeur de / pour + inf. : ...la pouvre gentil femme n'eut plus cueur, puissance ne vouloir de soustenir son fardeau desplaisant. (C.N.N., c.1456-1467, 125). Laquelle chose elle ne pourroit souffrir, et n'a pas cueur pour soustenir et porter le desplaisir et ennuy qu'endurer luy conviendroit a ceste occasion. (C.N.N., c.1456-1467, 294). Ceulx de dedans Nancy estoient advertiz des traictéz dudit conte de Campobache, qui leur aydoit bien à donner cueur de tenir. (COMM., II, 1489-1491, 149).

 

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Cueillir coeur. V. cueillir "Reprendre courage, se ressaisir"

 

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Donner / rendre coeur (à qqn) (de + inf.) : Par foy, dist cil, vous me mettez en grant adventure, car, se je suiz prins des Sarrasins, de ma vie n'est rien. Mais pour l'amour de vous et du roy, faire confort et donner cuer et esperance d'estre delivrez du peril ou il est, je me mettray en l'adventure. (ARRAS, c.1392-1393, 93). Et faisoit le roy Uriien si grant semblant qu'il donnoit a ses gens si grant cuer que avecques lui et a son emprise, ilz eussent bien osé combattre de X mille que ilz estoient, que de pié, que de cheval, cent mille payens. (ARRAS, c.1392-1393, 128). Et le chappleiz fu fiers et l'occision de une part et d'autre, car le roy d'Ausaiz ravigoure ses gens et rent grant cuer, et a son poindre fait grant dommage aux Poictevins. (ARRAS, c.1392-1393, 162). Et [la Pucelle] parloit aussy preudanment de la guerre comme ung cappitaine eust sceu faire. Et quant le cas advenoit qu'il avoit en ost aucun cry ou effray d'armes, elle venoit, fust à pié ou à cheval, aussy vaillanment comme cappitaine de la compaignie eust sçeu faire, en donnant cuer et hardement à tous les autres. (CHART. J., Chron. Ch. VII, V., t.1, c.1437-1464, 88).

 

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Se donner bon coeur : ...et dist à ses barons qu'ilz se donnassent bon cueur (Doolin de Mayence V, P., 1501, 33).

 

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Prendre / reprendre (bon / grant) coeur. "Prendre, reprendre courage, se ressaisir" : Or pren cuer et te reconforte, Biaus dous amis (MACH., R. Fort., c.1341, 71). Et te souveigne en prenant cuer du benoist saint Loys, ton grant pere, et des vaillans roys de la nef francoise tes predecesseurs, qui pour tenir bonne justice regnerent vaillamment. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 192). Si reprint cuer ou doulx buvrage que Charite, Doulce Amour la royne, du dextre coste de l'Aignelet occis avoit presente au jeune Moyse. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 513). La renforca grant la bataille, car, quant sa gent le virent remondé, ilz reprindrent grant cuer, et se combatirent moult asprement et y ot moult de mors et de navrez, et d'une part et d'autre. (ARRAS, c.1392-1393, 72). Je vous prie pour Dieu mercy, Tres doulce dame, cuer prendez Et en santé vo recoillez. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 197). Mon frere, soyez couraigeux Et reprenez ung pou de cueur ! (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 109). Frere, prenez cueur desormais ; Gary serez (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 196). Alors le pouvre desconfit print cuer et dist : "Oÿ, ma dame, puis qu'il vous plait." (LA SALE, J.S., 1456, 10). Pour ce conclus : de bien faisons effort, Reprenons cueur, ayons en Dieu confort (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 63). Vous serez tantost en bon point, si Dieu plaist, madame, dist la religieuse messagiere ; faictes bonne chere et prenez cueur (C.N.N., c.1456-1467, 140). Le seigneur, qui ad ce fut certain de la mort de son filz, pour non desconfforter les aultres, ne madame, au mieulx qu'il peult print cuer... (LA SALE, Reconf. De Fresne H., 1457, 21). Je vous pry que prenez bon cueur, Que s'il y a venent, j'é coraige De leur faire telle rigeur Qu'i ne l'aront pas daventaige. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 532). Frere, prenez cueur desormais : Gary serés, je vous prometz, Briefment, ce Jhesus est venu (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 488).

 

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Prendre coeur en soi. "Se ressaisir" : Fausse gent, que voulez vous faire ? Encore n'est pas revenu le messaige qui est alez querre le secours au roy d'Ausaiz. Prenez cuer en vous, car vous orrez par temps bonnes nouvelles. (ARRAS, c.1392-1393, 181). M'amye, faictes bonne chiere : je vous amaine ung grant tas de beaulx prisonniers, et fault que preignez cueur en vous et que vous vous mectez en jolys estat. (Charles de Hongrie C., c.1495-1498, 189).

 

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Prendre coeur de + inf. : ...le bon chevalier (...) de prinsault fut assez esbahi d'avoir telle rencontre. Neantmains toutesfoiz print cueur et hardement et vouloir de soy defendre s'il estoit assailly. (C.N.N., c.1456-1467, 428).

 

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Ne pas avoir le coeur dans les genoux. "Ne pas fléchir" : Mais les dames, sachez le bien, N'ont pas leurs cuers en les genoulz. (Chev. dames M., c.1462-1477, 62).

C. -

[Comme siège de l'esprit et, plus gén., de tout l'être psychique ; p. méton, la personne elle-même]

 

1.

[Comme siège de l'esprit, de l'intuition, de la mémoire]

 

a)

[Comme siège de l'esprit, de la pensée, du jugement, de la connaissance...] "Esprit" : De quanque mon cuer en conçoit, Je n'en say nul si bon eslire (Mir. enf. ress., 1353, 14). Et les haulx princes veoient plus cler en leurs affaires par les sciences qui lors estoient aprinses en temps deu, que s'ilz feussent innocent des sciences, et sentoient en brief le vif des conseulx que on leur monstroit. Et ainsi je croy que cuer de noble estrattion qui a la science des nobles vertus des ars dessuz diz ou cuer, qu'il n'en sauroit meserrer si tost que cil qui auroit aprins les ars par avarice de vouloir enrichir (ARRAS, c.1392-1393, 17). ...haste toy pour moy secourir, pour moy tirer et delivrer de ce tres doloreux tourment plus grief que langue ne pourroit dire, ne cuer penser. (GERS., Déf., 1400, 227). ...ou en oyant la messe ou sermon, ont le cuer tousjours a terre, c'est a dire a pensee terrienne, orde ou charnelle (GERS., Noël, p.1404, 299). ...quant pardevant lui fu lieute [une lettre] et avisée Et il ot la teneur en cuer ymaginée, Sachiés ciertainement, n'en fist c'une risée (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 376). Frere, il n'est main qui peust escripre, Cuer d'omme ne pourroit pensser, Oreille oïr, langue parler, Les grans aises ou ceulz seront Qui Dieu de bon cuer ameront Sur toutes choses sans faintise. (Mart. st Pierre st Paul R., c.1430-1440, 146). ...mais prestement lui entra en coeur comment les charbons se brullent ès parfondes forests et jugea certainement que ce pouvoit estre une charbonnière comme c'estoit (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 255). Mon cueur s'employe A panser qu'il me fault morir. (Pass. Auv., 1477, 110). Certes ceste predicion si veritable de la science des estoilles doit toute seulle crever le cueur à ses ebethés calumpniateurs de astrologie, qui dient que ne sont que vanités et mensonges. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 79 r°). Brief, quant j'y pense le cueur me va resvant, Car telle chose jamais voir ne pensoye. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 160).

 

b)

[Comme siège de l'intuition] : Cueur sent aucunes fois ce que avenir lui est (Chron. Valois L., c.1377-1397, 27). ...le cuer ne dit mie aux chiens qu'il [le cerf] aille le chemin (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 223). Il me gist au ceur se tu as un filz qu'il me mettera a mort. (LEFÈVRE (R.), Hist. Troyes A., c.1464, 188).

 

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Le coeur (me) dit que. "J'ai le sentiment que" : Li cuers me dist que la cose n'est pas encore où elle sera (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 217). Li coers me dist que nous arons en celle nuit Audenarde. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 137). Sire, il est mestiers que vous chevauchiez par ceste forest, tous armez, vous et voz gens, par ordonnance, car le lignaige de Jossellin que vous avez destruit, ne vous aiment pas. Si vous pourroient tost porter dommage, se ilz vous trouvoient desgarny, et ly cuers me dist que nous les trouverons assez tost. (ARRAS, c.1392-1393, 71). LE DEUSIESME. Quant il me vient au souvenir Du bon vin que buré tantost, Mon cueur dit que m'avance tost, Je pense que je n'y faudray pas. (Tr. Men., c.1480-1500, 292).

 

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Mon coeur est à cela que : ...mon cueur est a cela que ce [faire l'amour] me pourroit estre medicine et cause de garison. (C.N.N., c.1456-1467, 348).

 

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RELIG. "Faculté spirituelle de percevoir les mystères de la foi, d'en avoir l'intuition" : Ouvrez doncques les oreilles espirituelles de vostre cuer, tendez les en hault, et escoutez leur humble requeste [des âmes des trépassés] et leur plainte doloreuse, pour les aydier, secourir et delivrer. (GERS., Déf., 1400, 226). Ouvrez les yeulz maintenant de vostre cuer, et par le jour de vraye foy regardez cest enfant au jour d'uy nez : le veez vous ? Y pensez vous ? (GERS., Noël, p.1404, 295).

 

c)

[Comme siège de la mémoire (surtout la mémoire affective ou bien la mémoire mécanique)]

 

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Par coeur. "De mémoire" : ...[elle] pria tant et requist icellui Guïot qu'il aprint à elle qui parle, par cuer, l'euvangile mons. saint Jehan ; et laquelle, à ceste fin, elle a assez bien et compettement recitée de bouche. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 327).

 

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Recorder / retenir / savoir qqc. par coeur. "Avoir qqc. parfaitement en mémoire, savoir qqc. parfaitement" : Et aussi enfans qui ont recordé par cuer aucunes choses, il dient bien les paroles et ne scevent ou entendent qu'il dient. (ORESME, E.A., c.1370, 373). ...les chemins qu'il fait, je les sçay tous par cuer, car aussi en sa compaignie et sans lui je les ay fais trop de fois (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 112). Ceuls qui avoient et ont acoustumé de faire en ceste musique naturele serventois de Nostre Dame, chançons royaulx, pastourelles, balades et rondeaulx, portoient chascun ce que fait avoit devant le Prince du puys, et le recordoit par cuer (DESCH., Art dictier R., 1392, 271). ...ceulx (...) Qui ces deux poins ont par cuer retenuz : Servir leur roy et leurs subgez deffendre. (CHART., B. Nobles, c.1424, 397). Je sçay par cueur ce mestier bien a plain, Et m'a longtemps esté si agreable Qu'il me sembloit qu'il n'estoit bien mondain Fors en Amours, ne riens si honnorable. (CH. D'ORLÉANS, Songe compl. C., 1437, 103). D'amer sçay par cuer le droit cours (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 293). ...cent mille choses que ces abateurs de femmes scevent tout courant et par cueur (C.N.N., c.1456-1467, 146). ...et moult loerent la sage dame Ysengrine qui si hautement avoit continuee son euvangile, et departi par .XXVI. articles qui tous estoient de grant sens et de grande importance, et promirent qu'elles metteroient paine de tant les repeter, qu'elles les sauroient par cuer pour les publier et communiquier a celles qui point n'avoient esté a ceste lecture. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 88).

 

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Dire / reciter par coeur. "Dire, réciter qqc. de mémoire" : ...icellui prisonnier recita de bouche et par cuer les larrecins cy-dessus escriptes par lui autrefois faites (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 420). Trompete, va legierement Partout publier cest affaire Et dis par cueur ton mandement (LA VIGNE, S.M., 1496, 158).

 

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Prier par coeur. "Prier de mémoire (et non pas en lisant) ; prier mentalement (et non pas oralement), à l'intérieur de soi-même, selon sa fantaisie, son imagination" : Sy prieray pour luy [mon seigneur, l'évêque Thibault d'Aucigny] de bon cueur, Pour l'ame du bon feu Cotart ; Mais quoy ! ce sera donc par cueur, Car de lire je suis fetart. Priere en feray de picart (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 25).

 

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Vivre par coeur. "Vivre de façon mécanique, en apparence seulement" : Mort j'appelle de ta rigueur, Qui m'as ma maistresse ravie Deux estions [moi et ma maîtresse] et n'avions q'un cueur ; S'il est mort, force est que desvye, Voirë, ou que vive sans vie, Comme les ymaiges, par cueur. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 86).

 

Rem. Ds l'ex. suiv. par coeur peut se rapporter à vis ("voir comme de mémoire ou en imagination") ou bien à dancer ("comme s'ils savaient la danse par coeur, dans ses automatismes gestuels") : [D]edens la maison de Doleur, Ou estoit trespiteuse dance, Soussy, Viellesse et Desplaisance Je vis dancer comme par cueur. (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 536).

 

d)

[Comme siège de l'âme] : ...le cueur est chault et sec, le foye est chault et moiste, l'ame de la personne gist au cueur, l'esperit de vie est au cerveil (LE LIÈVRE, Traité saignée W., a.1418, 18).

 

2.

[Comme siège de tout l'être psychique, de la personne, de son psychisme, de ses aspirations...] "Les pensées, les sentiments que l'on a au fond de soi-même" : C'est voirs, je vueil a vous parler : Mon cuer ne vous puis plus celer. Je vous ay amé vraiement Plus que nul homme (Mir. st J. Cris., c.1344, 269). Car ce qui est ou cuer, li homs ne le dit mie. (CUVELIER, Chans. Guescl. F., c.1380-1385, 237). Dieu eternel (...) Qui en divine prescience Congnois les cueurs et les couraiges... (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 135).

 

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[P. oppos. à l'oeil] : ...je pleure de cueur ["du fond de moi-même"] et d'ueil (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 129).

 

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Au coeur / en (son) coeur. "Au fond de soi-même" : Si nous a humblement supplié, comme elle soit née de nostre royaume et ait tousdiz esté et soit bonne françoise en cuer, comme dit est, et fust mariée au dit Henry par sa simplece, et ne doit avoir forfait ne perdre la moitié des dis conquests (Doc. Poitou G., t.4, 1373, 285). Or vous lerray un petit de Uriien et de sa compaignie, et vous diray du cappitaine de la ville, qui moult bien advisa l'ost et le maintieng des gens, qui moult le prisa en son cuer, et bien dist que c'estoient gens de fait et de grant emprise, quant si pou de gent emprenoient a contrester contre l'effort du soudant qui avoit plus de cent mille Sarrasins. (ARRAS, c.1392-1393, 92). Quant le duc Anthoine scot le meschief que les Sarrasins font au roy, si en ot grant pitié et jure en son cuer que pas ne demourra en ce party et que Sarrasins acheteront la peine que ilz font souffrir aux Crestiens. (ARRAS, c.1392-1393, 172). Combien que tu t'estoies parjurez envers moy quant tu mis paine a moy veoir, mais pour ce que tu ne l'avoies descouvert a personne, je le t'avoye pardonné en cuer, combien que je ne t'en eusse point fait de mencion, et Dieu le t'eust pardonné, car tu en eusses fait la penitence en ce monde. (ARRAS, c.1392-1393, 256). ...doulcement et en grand reverence luy dist qu'il avoit en son cueur ung secret (C.N.N., c.1456-1467, 93). ...promis luy avoie en mon cueur, non pas de jamais moy marier, mais de le non faire encore (C.N.N., c.1456-1467, 170). Il n'avoit point d'orgueil et ne reputoit jamaiz les choses venir de soy et ne pensoit jamaiz avoir bien fait ; mais disoit tousjours en son cuer que Dieu lui avoit fait grant grace. (BUEIL, I, 1461-1466, 147). ...combien que on croit que Escaigne faisoit ceste faincte et que en cueur estoit content du pape (COMM., III, 1495-1498, 91). Desquelz faulx rappors ledit conte fut fort estonné et courroucé en son cueur, et pourpensa dès lors soy evader et s'en aller hors du royaulme, pour eviter la fureur du roy, laquelle n'avoit justement deservie. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 143). Et lors print congié de luy ledit Voyaul et monta à cheval pour s'en aller à Sainct-Fergeaul vers ledit conte, son maistre, qui y estoit troublé en son cueur, car de plus en plus avoit rappors que le roy de tous poincts estoit deliberé de le faire mourir et serchoit de tous poinctz sa destruction (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 151).

 

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De / du coeur / de coeur profond / de coeur fervent... "Du plus profond de soi-même" : Et quant la dame l'ot, s'a du cuer soupiré (Brun de la Mont. M., c.1350-1400, 128). ...Pour faire aus Sarrazins contraire, Et au soudan principaument, Qu'il het de cuer si mortelment (MACH., P. Alex., p.1369, 245). ...de fervant cuer il pria nostre Seigneur a grant devocion (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 190). Ainsy font pluseurs qui ne se daignent repentir de cuer, ainsoys veullent tousjours attendre en leur ordure. (GERS., Trin., 1402, 165). Souverain Dieu, de cuer parfond Accomplirons vostre plaisir. (Pass. Auv., 1477, 98). Il te vient bien de cuer parfont Et d'une bonté merveilheuse De pardonner a ceulx qui t'ont Donné poine si angoysseuse ! (Pass. Auv., 1477, 216).

 

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Le fond / le profond du coeur : ...tant empescherent sa doulce langue les larmes [sourdantes] du profond de son cueur (C.N.N., c.1456-1467, 145).

 

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[P. oppos. à l'apparence (au semblant)] : Lors ot ly roys moult grant joye ; mais sachiez qu'il monstroit meilleur semblant que le cuer ne lui apportoit, car il souffroit grant hachie, car le venin qui estoit en la plaie lui bruissoit tout le corps. (ARRAS, c.1392-1393, 121). ...oyant bonne cette adventure, ne fist pas semblant par dehors tel que dedans son cueur portoit (C.N.N., c.1456-1467, 42). ...luy demanda qu'il avoit et que sa maniere monstroit que son cueur n'estoit pas a son aise. (C.N.N., c.1456-1467, 231). ...s'efforçoit de monstrer semblant plus desplaisant que le cueur ne luy donnoit (C.N.N., c.1456-1467, 236). Et, à l'arriver ausditz appentis, quant le roy d'Angleterre vit et apperceut le roy, il luy fist l'onneur qui luy appartenoit et le roy le receut très honnestement, et se firent lesditz deux roys bonne et grande chere, se leurs cueurs estoient telz que leurs visaiges le demonstroient, ce que je croy que non. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 343).

 

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[En partic. pour désigner l'âme, la personne devant Dieu] : C'est usages qui endottrine Maint cuer de celer et couvrir Sa penance au monde, et ouvrir Son cuer a Dieu par oroison. (Mir. parr., 1356, 9). Mon cuer et ma char se sont esjoïs en Dieu vivant. (FOUL., Policrat. B., III, 1372, 207). Se tous les pracheurs qui ou monde sont ne cessoyent chascun jour de preschier a l'ame qui est en ce point mise, c'est assavoir en mauvaise acoustumance et en durté de cuer, ilz ne l'amolliroyent pas a bien faire ; point ne feroyent tant qu'elle laissast sa mauvaise coustume, qu'elle levast son cuer a Dieu, que elle issist hors du sepulcre et de l'abhominable ordure de pechié. (GERS., Purif., 1396-1397, 66). Et ay mis en la personne des Vertuz raisons qui bien puent mouvoir nous cuers a croire et tenir que nostre Dame oncques ne fut, en sa concepcion ne aprés, fors toute belle, vive, pure et nette (GERS., Concept., 1401, 408). Desoubz la table, mon saulveur, Ad voz piés gecter je me vaiz. Helas, je vous donne mon cuer ; Pardonnés moy tous mes mesfaiz ! (Pass. Auv., 1477, 152). Treshault Dieu (...) Ou j'ay mon cuer et ma fïance (...) Veulhe moy donner alegrance ! (Pass. Auv., 1477, 278). Item Dieu par sa misericorde rechoit joyeusement le pecheur retournant envers lui, et esmolit son cuer a faire penitance, et legierement pardonne l'offence, et aprez le pardon plus ne lui souvient de l'injure a lui faicte. (Somme abr., c.1477-1481, 180).

 

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Les nets de coeur. "Les purs" : ...et fut appellé filz de Dieu [saint Paul] pour sapience qui est appropriee au Filz, laquelle il parloit entre les parfaiz, et la receu a cause de pais de conscience. Ces deux promesses fait Jhesu Crist ; l'une aux nes de cuer, l'autre aux paisibles. (GERS., P. Paul, a.1394, 513).

 

3.

P. méton.

 

a)

"La personne elle-même"

 

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Un coeur / aucun coeur / maint coeur / nul coeur. "Une, quelque, mainte, aucune... personne" : C'est usages qui endottrine Maint cuer de celer et couvrir Sa penance au monde (Mir. parr., 1356, 9). ...mes cuers sont de diverse opinion (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 180). ...un cuer plus noir que meure, Triste, dolent... (MACH., Bal., 1377, 557). Car, sans faillir, ce seroit trop estrange Que bien servir peust un cueur en mains lieux, Combien qu'aucuns cueurs ne demandent mieulx Que de servir du tout a la volée, Et qu'ilz ayent d'amer la renommée (CH. D'ORLÉANS, Ret. am. C., 1414, 12). Il n'est nul cuer, il fust de marbre, Plus dur a ploier que gros arbre, Se ces mots cy ot regehir Qui plorer ne doive et gemir. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 155).

 

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Sans coeur. "Sans personne (sans la personne aimée)" : Car il m' estuet long de li demourer, Tout seul, sans cuer, et tant mal soustenir Qu'on en verroit meint amant desperer (MACH., L. dames, 1377, 154).

 

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Coeur + adj. (ou rel., ou compl. déterminatif) : Je n'en puis mais ; cuer courrociez Ne scet a la foiz que doit dire. (Mir. enf. diable, c.1339, 10). ...et si en fait peuture A tout vray cuer qui l'ayme (Mir. ev. arced., c.1341, 145). Che fu uns gentilz coers et vaillans chevaliers, larges et courtois (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 171). Lors demaine la pucelle telle douleur que c'estoit grant pitié a veoir et se deteurtoit et tiroit ses cheveulx, que de l'angoisse qu'elle sentoit il n'a si dur cuer ou monde qui n'en eust eu pitié. (ARRAS, c.1392-1393, 181). Et lors maine tel doulour qu'il n'a si dur cuer ou monde a qui il n'en eust prins pitié se il l'eust veue en ce point. (ARRAS, c.1392-1393, 256). Les bons cuers les fuyent (CHART., L. Paix, a.1426, 417). ...cueur qui a bonne voulenté seuffre beaucoup avant que semblant en face. (Cleriadus Z., c.1440-1444, 49). [L]es malades cueurs amoureux Qui ont perdu leurs appetis, Et leurs estomacs refroidis Par soussis et maulx douloureux, Diete gardent sobrement (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 358). ...et ny avoit si dur coeur qui se peust tenir de plorer. (ESCOUCHY, Chron. B., t.1, c.1453-14, 177). ...faisans feste, comme font les cueurs gaiz quand ilz se trouvent es plaisans lieu. ["les coeurs gais" est l'équivalent de "les gens gais"]. (C.N.N., c.1456-1467, 89). Cruel cueur n'a point d'amytié (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 62). Que voulez vous, cueur amoureux... (P. Jouh. D.R., a.1488, 36). Resveille toy, franc cueur joyeux, Tu n'as pas cause de dormir (Cene dieux, c.1492, 107). Cueurs volans et legiers couraiges Yront après et les suivront. (Cene dieux, c.1492, 136).

 

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Prov. : A coeur vaillant il n'est riens difficile. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 278). Honneste cueur ne peult mentir. (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 132).

 

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A coeur vaillant rien impossible : A ceur vaillant rien impossible (LEFÈVRE (R.), Hist. Troyes A., c.1464, 296). A coeur vaillant, riens impossible. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 193). ...maint convent vent Son honneur et mal content tend De se venger, s'il est possible : A cueur vaillant rien impossible. (Piteuse Compl. Terre Sainte B., 1500-1501, 112ú).

 

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Coeur humain / coeur mondain ne... "Personne ne" : Lors ot tel dueil a son cuer et telle tristece que cuer humain n'en pourroit plus porter. (ARRAS, c.1392-1393, 242). ...c'est pour le pechié des moines, qui estoient de mauvaise vie et desordonnee ; et en a Nostre Seigneur voulu avoir la punicion, combien que ceste chose soit incongnoissable quant a humaine creature, car les jugemens de Dieu sont si secrez que nul cuer mondain ne les puet comprendre en son entendement. (ARRAS, c.1392-1393, 255).

 

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Coeur doux / coeur dur (P. référ. à la Parabole du semeur, Luc 8, 10-12) : Le doulx cuer en m'oyant fructiffie, Et de ses pechés mercy crie. (Pass. Auv., 1477, 137). La semence est la parole Dieu, Que es durs cuers n'a point de lieu, Si peu que semence sur piarre. (Pass. Auv., 1477, 137).

 

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Les nobles coeurs. "Les hommes courageux, les hommes d'élite" : Cilz qui ont devocion de vengier la mort de Nostre Createur et de essaucier sa loy, et de aidier au roy de Chippre, si se traye soubz ma banniere, et ceulx qui n'en auront devocion passent par dela le pont. Quant ly noble cuer ouïrent ce mot, si le tindrent a grant sens et a grant vaillance. Si s'en vont tous en une flote ferir dessoubz sa banniere, en lermoiant de joie et de pitié des mos que Uriiens leur avoit dit. (ARRAS, c.1392-1393, 109).

 

-

Estre le coeur de qqn. "Être la personne qui a toute l'affection de qqn" : ...c'estoit tous li coers dou conte De Flandres, et ne l'appelloit mies li contes de Flandres son cousin, mais son biau fil. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 79).

 

Rem. Autres ex. : FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 63 ; R., XI, 272.

 

b)

En partic. [Comme terme d'affection, en appellatif] : Et lors, a ce mot, Melusigne le va acoler et baisier moult doulcement en disant : Adieu, mon tres doulz amy, mon bien, mon cuer et toute ma joye. (ARRAS, c.1392-1393, 258). Adieu, m'amour et mon cuer fin ! (Pass. Auv., 1477, 224). Mon filz, ma plaisance certayne, Mon enffant, ma doulce porture, M'amour, ma joye souverayne (...), Mon cueur, ma belle creature (LA VIGNE, S.M., 1496, 389).

 

c)

Mon coeur. "Moi, je" : ...avance toy, mon chier enfant, qui jadiz estoyes la joye de tout mon cuer, haste toy pour moy secourir, pour moy tirer et delivrer de ce tres doloreux tourment (GERS., Déf., 1400, 227). ...mon coeur ne fut oncques d'accord de faire ce que mes parens et amys m'ont a force contraincte de faire. (C.N.N., c.1456-1467, 424). A toy, Simon, mon cuer s'adresse Pour toy parler de ton profit. (Pass. Auv., 1477, 153). Las, mon cuer nect Est ja tout prest - a morir si ce m'est le mieulx ! (Pass. Auv., 1477, 257).

 

Rem. Pour un effet de sens comparable, v. corps. Cf. aussi JEAN DE LE MOTE, Regr. Guill. S., 1339, 183 (note du v.2038).

 

-

Le tien coeur. "Toi, tu" : Faux trahitour, le tien coeur murdrieur at dormit trop longuement. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 179).

III. -

P. anal. [Idée d'intériorité, à propos de choses (ou idée de plénitude)]

A. -

[À propos de choses concrètes] "Partie centrale"

 

1.

[Du bois, d'un fruit, d'un légume...] : Tout n'estoient que li escorce Dont vous estiés li cuers dou bos (JEAN DE LE MOTE, Regr. Guill. S., 1339, 44). Item , quant les courges sont en saison si en prenez et fendez par .IIII. quartiers, et ostez le cuer de dedens, et les gouvernez tout ainsi comme les navetz. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 268).

 

-

Coeur de chesne : ...un breulet (...) fait de cuer de quesne (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 296). À lui, pour avoir livré de bois de cuer de chesne emploié en deux casses (Comptes Etat bourg. M.F., t.3, 1418-1420, 587).

 

-

Coeur de soie. "La plus belle soie (la soie qui est pleinement la soie)" : ...ainçois rompirent les sengles soubz les chevaulx qui estoient de coeur de soye (Percef. I, T., c.1450 [c.1340], 177).

 

Rem. T-L II, 1121 ; FEW II-2, 1171b (coeur de lin "partie la plus souple, la plus fine de la filasse").

 

2.

[D'un endroit, d'un lieu] : ...ou droit cuer de France (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 203). L'autel est la voulenté de l'omme, qui est comme ou milieu du cuer de ce temple [Ou est-ce choeur ?]. (GERS., Purif., 1396-1397, 63). DIEU. (...) J'ay resplendy de ma divinité Le cueur des cieulx (LA VIGNE, S.M., 1496, 208).

 

-

CHASSE Coeur de la haie. "Partie centrale de la haie où sont tendus les lacs" : Et garde que le ceur de ta haye, ou tu tendras tes las... (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 107).

 

Rem. Ds l'ex. suiv., coeur devantsemble désigner la poupe. Peut-être mis pour corps (FEW II-2, 1214b, sens de "coque") : Adoncques attendirent tant qu'ilz veyrent ung batel qui s'adreçoit par devers eulx, dont moult s'esmerveillerent car ou coeur devant [var. a la poupe ; sur le devant] avoit une baniere des armes au bon roy Alexandre. (Percef. I, T., c.1450 [c.1340], 136).

 

-

ASTR. Estoile du coeur du lion. "Régulus, en pleine constellation du Lion" : Car il en y avoit .XV. [estoiles] qui estoient les plus grandes de toutes les aultres et sont appellees de la premier gra[n]deur, comme est l'estoille du cueur du Lion (FUSORIS, Traité cosmogr. G., 1432, 34).

B. -

[À propos d'une période] "Centre" : La saisson de chassier le cerf est entre la Sainte Crois en mai et la Sainte Crois en septembre, et le cuer de la saison, ou il ont meilleur veneson, est environ la Magdaleine (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 13). [Autre ex. p.65] ...quant il est cuer de saison Que les cerfs ont grant venaison... (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 470). ...et si estoit le blé tant cher ou droit cuer d'aoust, à l'entrée de septembre, que... (Journal bourgeois Paris T., 1437, 333).

 

-

Le (fin) coeur de l'hiver : ...et si estoit le fin cueur de l'yver, et touzjours plevoyt et faisoit tres froit. (Journal bourgeois Paris T., 1419, 132). ...car estoit coeur d'hyver, près assez de Noël (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 286). ...si estoit en fin cueur d'yver (COMM., I, 1489-1491, 115).

 

.

Au / en coeur d'hiver : ...il estoit au cuer d'ivier à l'entrée de decembre, et plouvoit toudis. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 38). ...en ceur d'yver (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 67).

 

-

Coeur de vendanges. "Les pleines vendanges" : À Massot d'Avrilli, impositour fermier du plat païz et des villages de la chastellerie de Paci, pour un an (...) pour et en recompensation de ce que sa ferme li avoit esté ostée et le XIIIe mis sus le premier jour daoust CCCLXI en son prejudice, car il avoit poié par mois toute la morte saison, et quant le bon temps vint quil devoit gaengnier et recouvrer ce quil avoit perdu devant, cest assavoir aoust, septembre et octobre, quil fu cuer de vendenges et vente de vins nouveaulx, son marché li fu osté (Compte Navarre I.P., 1367-1371, 400).

REM. Cf. Senefiance 30, 1991, numéro intitulé Le "Cuer" au Moyen Âge.
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Robert Martin

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     CRÈVE-COEUR     
FEW II-2 crepare
CREVE-COEUR, subst. masc.
[T-L : crievecuer ; GDC : crevecoeur ; FEW II-2, 1319a : crepare ; TLF : VI, 480a : crève-coeur]

"Grand déplaisir mêlé de dépit, crève-coeur" : "O quelle abhominacion et creve cuer aux nobles et au peuple voire quant aux aides de despoillier et apauvrir mille ou IIm personnes pour enrichir un tout seul et tel comme dit est dessus..." (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 217). Or, pensés doncques, quel dueil est ce A ung prince chevallereux Qui, soy moustrant plain de prouesse, Se voit desemparé de ceulx Qui lui doyvent service et foy, Dont il est et chief et seigneur ? Et, par mon serement, je croy Qu'il n'est nul si grant crevecuer. (CHART., D. Her., p.1415, 429). Et ainsi la Royne et la duchesse se rassembloient souventeffois, pour eulx douloir et complaindre l'une à l'aultre de leur creve cueur. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 55).

Rem. Ex. d'a.fr., cf. TLF.
 

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