A. -

"Gain, profit pécuniaire" : Et met de ce exemple ou .XIIe. de Methaphisique de un honme qui se exercite en aucun artifice principalment pour garder sa santé, et moins principalment et comme pour fin seconde pour le guaing qui vient de l'artifice. (ORESME, C.M., c.1377, 508). Fole seray se je me faing De faire a ce cop un tel gaing Com de trente mars d'or avoir. (Mir. Oton, c.1370, 349). Car tel mentëeur ment pour ce que il se delicte en mentir, et un autre ment pour ce que il appete gloire, et l'autre ment pour ce que il appete gaaing. (ORESME, E.A., c.1370, 268). Et ceus qui sont amis pour utilité ou pour gaaing, il laissent estre amis quant le gaaing deffaut. (ORESME, E.A., c.1370, 421). Aprés il oste une doubte, pour ce que aucuns disoient que ces noms, gaaing et damage, ne ont pas lieu en injures, mais tant seulement en pecunes ou possessions. (ORESME, E.A.C., c.1370, 289). (...) ilz promistrent et jurerent li uns à l'autre que jamaiz jours de leurs vies ne feroient aucun autre mestier que gaigner où ilz pourroient trouver à gaigner, lequel gaing il entendoit et entend embler (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 97). ...lequel capitaine, pour chascun voyage qu'il faisoit dont rapport lui estoit fait par la maniere que dit est, lui bailloit pour son salaire .IJ. s. par. Et dist, sur ce requis, que autre salaire, gaing ou prouffit, il n'ot onques d'iceulx Engleiz, ne de chose qu'il gaignassent ou pillassent (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 124). ...le procureur du Roy à Troyes baillera aux boulengiers dudit Troyes par cedule les .IJ. essaiz faiz par ceulx de Provins, et le gaing ou proufit sur chascun pour chascun sextier (BAYE, I, 1400-1410, 289). Et en ycelle maniere pourras acquerir l'amour Nostre Seigneur qui est [le] plus precieuze chouse que soit et serons bons marchons et ferons beau gaing acquerre tel noble heretatge que toux jours durera (CAUMONT, Voy. N., p.1420, 21). Telz gens suyvent au gaing et a la table, Mais en fortune ilz tournent a l'esquart. (CHART., B. Nobles, c.1424, 401). Les beaulx et riches vestements (...) ay je achatez du gaing et avantage que j'ay fait en mes marchandises. (C.N.N., c.1456-1467, 561). ...donner utile conseil, c'est a dire conseil dont gaing pecuniare peut advenir au prince (FILLASTRE, Traité Conseil H., c.1472-1473, 234).

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En partic. "Ce qu'on a gagné sur l'ennemi, butin" : Et se gaaing y pooit avoir, Il en feïst a son voloir. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 180). Longuement avoit Aigre chevauchié et erré, et durement estoit traveilliez, quant il regarda devant soy en une place une moult tres belle fontaine, et vit .XII. larrons qui la seoient et y avoient departi leur gaing et estoient assis au mengier. (Bérinus, I, c.1350-1370, 265). Et vuelt savoir comment, se il vous vient en grez, Nous arons nous gaiaing partir et dessevrer ? (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 258). Le geaing despartirent qui gaingier estoit : Chescun selon son estet sa partie en avoit. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 713). Et des dessus diz, ceuls qui sont despoilleurs de mors et ceulz qui sont larrons, ilz soustiennent de tres grans perilz pour cause de tel gaaing. (ORESME, E.A., c.1370, 241). Et le roy Blanchandins au courage vaillant Fist le guaang partir, n'y alla arrestant, Et en donna autant au petit comme au grant. (Tristan Nant. S., c.1350, 558). ... si y ot grant gaing Pour Rommains et moult dur mahaing Pour Macedonois et, adont, Phelipe paix aux Rommains moult Requist, qui a leur preu l'octroyent (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 237). L'autre pollist marquins et dollequins Et la marque [["la fille"]] souvent le gain choisit. (VILLON, Ball. jarg. T., c.1455-1460, 347). Babillangier sur tous fais et sur ars Tant qu'il n'y eust de l'arton sur les cas ["du pain sur les tables"], Brocquans, dor(e)lots, grain, guain, aubeflorye, Que tout ne fust desployé [et] en pars Pour maintenir la joyeuse folye. (VILLON, Ball. jarg. T., c.1455-1460, 353). Car la première bande voulut avoir part à tout ce qu'il avoit gaigné et voullurent que son gaing fust departy à six ou sept qu'ilz estoient, et disoient qu'il n' avoit pas puissance de abutiner les autres en leur part. (BUEIL, II, 1461-1466, 96).

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Aller en gain. "Piller" : Et s'en vont en gaiaing, la vitaille ont gaingnie (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 558).

B. -

P. ext. "Profit, avantage"

1.

[En cooccurrence avec perte ou dommage] : Ma dame, refuser ne puis Vostre commandement, et puis Qu'il vous plaist, je vous en diray Le voir, ne ja n'en mentiray, Qu'a vous verité n'iert couverte De moy, pour gaaing [var. gaing, gaeingne, gaaigne] ne pour perte ; Mais volentiers m'en deportasse, S'il vous pleüst, dame, et j'osasse. Si vous pri, ma dame, pour Dieu, Que, se je di en aucun lieu Chose qui vous puist anuier (MACH., R. Fort., c.1341, 130). Et s'il y avoit poingneïs, Bataille ou paleteïs, Chastiaus assis ou guerre ouverte, Ne doubtoient gaaing ne perte, Qu'adès ne fussent des premiers. De c'estoient il coustumiers. (MACH., D. Lyon, 1342, 207). Une autre lettre estoit enclose En ceste ci qui portoit glose, Dont li bons roys moult se merveille, Et je aussi en ay grant merveille, Qu'elle n'otoit gaaing ou perte, Et s'estoit seelée et ouverte. Et vesci la teneur des lettres qui estoient ouvertes et encloses dedens les premieres, et seellées dou seel le signeur de Lespaire. (MACH., P. Alex., p.1369, 230). ...donques ce que un a souffert est appelé damage et ce que l'autre a fait est appellé proffit quant a lui. Et de ci qui est en plus et de ce qui est en moins, chose equale est le moien. Et .II. choses sont, c'est a savoir, gaaing et damage ; et gaaing est en plus et damage est en moins en contraires manieres. Car gaaing est avoir plus de bien et moins de mal ; et damage, au contraire, est avoir plus de mal et moins de bien. (ORESME, E.A., c.1370, 289). ...combien que c'est chose acoustumée que, après le decès de si grand et puissant prince, les mutations soyent grandes, et y ont les ungs pertes, et les autres gaing. (COMM., I, 1489-1491, 3).

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À gain et à perte. "À tort et à travers" : ...L'oppinion n'est pas bien seure S'il n'estoit autrement prouvé, Et croy que ce soit controuvé De simple gent et inexperte Qui parlent a gaing et a perte, Ou c'est oppinion de femmes. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 114).

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(Soit) à gain ou à dommage/(soit) à gain ou à perte. "Coûte que coûte, à quelque prix que ce soit" : Garde qu'aus povres soit ouverte Ta main a gaaing [var. gaing] et a perte, Et Dieus le te rendra a double, Adès pour un denier un double, Car le pechiet aumosne esteint, Si com l'iaue feu, quant l'ateint. (MACH., C. ami, 1357, 136). Pour elles ne poons trop faire Et si devons de droit hommage, Soit a gaaing ou a damage, Estre enclins a servir les dames. (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 125). Je ne puis bonnement souffrir ceste melencollye en mon cuer, et vault mieulx que je les voise querir ou à perte ou à gaing, jusques où ilz sont, que je demeure tousjours en ceste doubte. (BUEIL, II, 1461-1466, 229). En Alemaigne, ne soit a gaing ou a perte, Ne retournray sinon que je prendré Temps pour aller ou quel je contendré De mes choses ordonner par dela (SAINT-GELAIS, Eurial. Lucr., c.1490. In : Chrestom. R., 262). Saint Germain est la clef et le passage Ou passer fault, soit a gaing ou dommaige, Et dont se doit saisir et acoustrer Qui au royaume de Napples veult entrer. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 245).

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Soit gain ou perte. "Quoi qu'il arrive" : ...de leur sanc ferons un baing Ou l'empereur, soit perte ou gaing, Sera baigniez (Mir. st Sev., 1362, 196). Et toutes fois pour li arai Et pour s'amour, soit gaing ou perte, A toute heure l'orelle ouverte Pour entendre et pour orillier, Soit hors lit ou sus orillier (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 65). ...Qu'il [le blanc chevalier] ne s'en voit pas si le cours Que ne sachiez, soit gaing ou perte, Que il sera (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 62). Pour ce ne me vueil plus complaindre, Mais mon livre vueil ci ataindre Et le dire, soit gaing ou perte, Avant que de ci me departe: Telle est m'entente. (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 279). Gentil messaigier, attandez. De mon avoir vous vueil donner, Et le surplus habandonner A mon seigneur le roy de Parthe ; Et luy dictes, soit gain ou parthe, Que le servirons sans doubtance, Tant que le corps et la chevance Pourra durer, quoy qu'en advienne. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 16).

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Pour gain ni perte. "Pour rien au monde" : Un petit en sus me trairay, Mais pour certain n'en partiray Pour gaing qui m'aviengne ne perte S'aray baisié ma fille Berthe Enmy la bouche. (Mir. Berthe, c.1373, 211).

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Prov. : Laissiés le chevalier aler ; Il est heure que de ci parte. Mieus vault petit gains que grant perte. (FROISS., Méliad. L., t.2, 1373-1388, 247).

2.

"Profit spirituel" : ...l'exemple de Gabriel et le gaaing de nostre resalutacion nous doivent esmouvoir a saluer Marie. (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 207). [Prière à Dieu]...recuevres et rien n'as perdu, rien ne te faut et as joye du gainh (GAST. PHÉBUS, Livre oraisons T., c.1380-1383, 58). Car tu ne sceiz quel gaing espirituel redonde de ce temporel dommage, ne quel pechié passé et couvert se tappist soubz celle justice reposte. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 51). ...ne ne convoiteroies ja les joieux jours de ceste vie mais t'esjoïroies plus a estre pour Dieu triboulé, et tendroies pour grant gaing estre compté pour neent entre les hommes. (Internele consol. P., 1447, 208). Puis que grace riens ne vous couste, Donnez la agreablement. En vostre arche secretement Est le gaeng ou avez fiance Et dommaige a la conscience, Pour l'argent qui n'est pas pas durable, Pour perdre la vie pardurable. (ALECIS, Passe temps P.P., 1480, 171).

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[P. litote] Faire petit gain. "Subir une grande perte" : Or parle SAINT JEHAN a saint Perre. Helas, Pere, beaulx doulx compain, Que nous avons fait petit gain Quan nostre maistre avons perduz ! (Pass. Autun Biard F., 1470-1471, 84).

C. -

DR. Gain de cause. "Fait de gagner un procès ; avantage obtenu en justice" : ...on ne peut conduire ne intenter, par l'usaige du pays, nulles actions de retraict, d'interupcion, d'appel, de meffait dedans termes, de peine commise, de revocquer ung gaing de cause (Cout. instit. Anjou Maine B.-B., t.3, a.1458, 7). Et s'il est bezoing de prouver Les faiz que viens de reciter J'offre tant de tesmoings trouver Qu'il souffira pour en pourter Guaing de cause et surmonter Ma partie, n'oustant ses faictz. (MART. D'AUV., Mat. Vierge L.H., c.1477-1483, 102).
 

A. -

"Herbe du pâturage" : ...Pour jouster en pré ou en wain (MARTIN LE FRANC, Champion dames D., t.4, 1440-1442, 79). Je tenray main au chariot, Qu'il ne tresbuche en ung ruyot, En bourbe, en herbette ou en wain. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 318).

B. -

P. méton.

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"Époque de la moisson, automne" : En yver apert li enfles et en esté, et en gain se ratapist se la maladie n'est mout vielle (Chir. chevaux P., c.1325-1350, 400). ...damoiselle Rose, fille de Moinne de Maire, escuier, qui fu, en tient un mouif de bleif, moitié wayn et moitié mars (Trés. Reth. S.L., t.2, 1330, 4). ...et dura le siege d'Aguillon tout cel esté jusques au temps de wain (LE BEL, Chron. V.D., t.2, 1358, 56). ... et doit chascuns chevalz trois corvées l'an, l'une a versainne, l'autre a wayn et l'autre a mars, et chascuns ouvriers une journée a fenner. (Comté Porcien R., 1369, 170). En cel an meisme fist I grant yvier et froidure grande, et si fist tot le printemps et esteit froid ; et li wayen fut chaut jusques à le Touz sains. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors B.B., t.4, a.1400, 269). AUTUMPNUS : unum de IIII^or temporibus et sunt : ver, etas, autumpnus, hiems - wain. Autumpnalis : de wain. (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 38). ...car deux equinoxes sont en l'an. Le premier est au mymars qui se dist equinoxe de printemps, l'aultre, comme dit est, ou temps de wain. (Somme abr. M., II, c.1477-1481, 81). ... distinguier les temps, les annees, les quatre temps de l'an, printemps, esté, wain temps et yver (Somme abr. M., II, c.1477-1481, 81).

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(Corvée) en/au gain. "Une des trois corvées annuelles dues au seigneur" : ...et les corvées de sacler et de moissener, qui sont celles : c'est à savoir de chascune charrue des diz habitanz d'Ahuit chascun anz, un journaul de sombre [["saison du premier labour"]], un journaul de vaain et un journaul de tremis. (Chartes communes Bourg. G., t.2, 1331, 197). Des corvées illuec en wayn et en tremois (Comté Champ. Brie L., t.3, 1340-1341, 346). ...trois courvées de cherruë l'an (...) c'est assavoir, au temps de sombrer, en vayng et en tremoix (Ordonn. rois Fr. S., t.4, 1354, 297). ...et doit chascuns chevalz trois corvées l'an, l'une a versainne, l'autre a wayn et l'autre a mars, et chascuns ouvriers une journée a fenner. (Comté Porcien R., 1369, 170). Devront et païeront les diz habitans chacun an audit Seigneur, leurs charruës deux jours à chascune saison ; c'est assavoir, deux jours en Voyn ; deux jours en Tramois, et deux jours en Vorrerot. (Ordonn. rois Fr. S., t.6, 1381, 630). ...chascun an, III journées, l'une aux mars, l'autre aux versainnes, l'autre au wayn (Trés. Reth. S.L., t.2, 1409, 587).

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(Blé) gain. "Froment semé en automne, céréale d'hiver" : 14 moitons de blef batu, woyn ; environ 4 sextiers de blef woyn, à batre ; une mine d'orge et environ boissel et demy de cheneveux (Invent. mobiliers ducs de Bourg. P., t.1, 1368, 145). ...à lad. dame de Jaucourt, 10 moitons de blef, par moitié woyn et avoine. (...) A Demoingel le menestrier, 2 sextiers blef woin (Invent. mobiliers ducs de Bourg. P., t.1, 1368, 146). Jugement de l'abauce des Cordellieres e de son couvant d'une pairt, et de Jehan Rombardel et de Jaicomin, son frere, d'autre pairt, pour une .VI. quarte de wain de cens que lesdits .II. freres volloient raicheteir encontre lesdictes Cordellieres, qui estoient en lour main venue ; les queles abbauce et couvant diënt que l'escript de l'acquaist n'en fait nulle mention. (Jug. maître-échev. Metz S.M.S., t.1, a.1494, [1367], 433).

Rem. Doc. 1328 (soit wains, soit tramois) ds GD IV, 195c.

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Fromage de gain. "Fromage fait du lait tiré après la moisson (temps auquel ces laits sont très gras)" : Devra encores ledit Maire audit Seigneur, à chascune Feste Saint Remy, deux xxii.^nes de Fromages de Voyn. (Ordonn. rois Fr. S., t.6, 1381, 632). Puis le broyez [le mélange de viandes hachées] en ung mortier et des oeufz crus avec, et de bon frommage de gain, et de bonne poudre d'espices (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 248). ...puis prendre toutes lesdictes mistions et du fromage de gain esmié et mettre tout en une paelle ou jatte (Viand. Taillev. Vat. S., c.1400-1450, 266). ...de pititz oysellons qui soient farciz de fromaige de guein et de medulles de beuf (CHIQUART, Cuis. S., 1420, 173).

Rem. Doc. 1328 (.L. fromages de gayn) ds GD IV, 195c.